L’épidémie de COVID-19 met en lumière les différences culturelles entre l’Orient et l’Occident

L’épidémie de coronavirus a mis en lumière quelques-unes des différences culturelles principales entre l’Orient et l’Occident, de nombreux États relevant de chacune des civilisations luttant à sa manière pour contenir le virus. La Chine et la Corée du Sud, bien qu’elles soient parmi les plus touchées par la pandémie mondiale, réussissent relativement mieux à s’en sortir que des pays occidentaux comme les États-Unis ou l’Italie. Cette curieuse observation soulève des questions quant au rôle joué par la culture dans tout ceci, et mérite d’être discuté plus en profondeur.

Avant de commencer, il faut rappeler qu’il n’existe aucune hiérarchie de culture, et que chacune d’entre elles est également importante pour la civilisation humaine dans son ensemble. Les singularités abondent de manière naturelle du fait de la diversité sociale, qui s’est vue façonnée par des millénaires de vécu historique, et en particulier par les événements du passé relativement récent, remontant à un ou deux siècles en arrière. Ce sont ces vécus — dont certains ont pu être partagés dans une certaine mesure, et d’autres sont restés quelque peu uniques — qui ont fortement contribué à la pléthore de cultures qui enrichissent chaque habitant de la planète à ce jour.

Regrouper le monde en cultures orientale et occidentale constitue certes une sur-simplification, mais l’objectif de cet exercice, dans le contexte du présent article, est de souligner l’influence de la culture sur les tentatives de contenir le COVID-19. Les cultures orientales sont généralement caractérisées par une discipline stricte, et l’obédience à l’autorité, fût-ce le chef de famille ou le chef d’État, ce qui explique pourquoi de nombreux Chinois et Sud-Coréens ont obéi consciencieusement à leur gouvernement et ont plus ou moins respecté les instructions de confinement qui leur ont été données.

En outre, ces deux pays constituent des exemples parfaits d’États ayant pris des mesures proactives ambitieuses pour enrayer la propagation de la maladie. Ces gouvernements, en particulier celui de la Chine, sont beaucoup plus centralisés que leurs homologues occidentaux — une fois de plus, cela résulte de leur vécu culturel et historique. Ces autorités sont ainsi mieux préparées en termes de capacités de gestion, pour gérer un événement inattendu, tel que le COVID-19, décrit à présent par de nombreux observateurs comme un « cygne noir », au vu de la soudaineté de son apparition et de l’impact massif qu’il présente.

Aux États-Unis et en Italie, cependant, une tendance croissante de scepticisme vis-à-vis des autorités s’est fait jour, ainsi qu’une croyance profondément ancrée dans les droits individuels ; certains estiment que ces droits individuels sont violés par les mesures de confinement prononcées par ces gouvernements : fermetures d’infrastructures culturelles, et même recommandations d’éviter autant que possible les lieux publics. Certains citoyens ne respectent pas ces directives (qui, dans certains cas, sont des ordres), ce qui complique la tâche d’arrêter le virus.

Ce dont l’Occident a besoin est un changement de pensée, qui promet d’être douloureux, par lequel les gens vont devoir commencer à comprendre leur responsabilité envers la communauté, au lieu de rester aussi centrés sur leurs propres droits individuels, comme ils l’ont fait historiquement. Certains de leurs gouvernements se sont également montrés réticents à suivre l’exemple de leurs homologues d’Orient pour ces mêmes raisons [et même par idéologie, NdT], et cela va devoir changer si l’humanité veut mettre en échec le virus, tout en minimisant le nombre de victimes. Pour le dire de manière simple, l’Occident a beaucoup à apprendre de l’Orient.

L’objet de cette observation n’est pas de faire preuve de condescendance, mais de faire progresser la conscience collective quant à l’importance de se montrer prudent durant certaines périodes d’incertitude, comme celle que nous traversons. Vivre sa vie comme si rien ne se produisait ne constitue pas du tout une solution, et paniquer serait encore pire, car ce sentiment de déstabilisation pourrait se propager dans la société bien plus rapidement que le COVID-19. On constate d’ores-et-déjà les conséquences de ce sentiment dans certains pays occidentaux, comme en Australie, où les clients des magasins ne trouvent plus de papier toilette dans les rayons, certains ayant tout acheté compulsivement pour constituer des stocks.

Les pays orientaux n’ont pas vraiment connu ce phénomène, les traits culturels innés de leurs peuples de stoïcisme, de discipline et d’obédience à l’autorité ayant joué leur rôle, ni les gens ni les gouvernements n’ont paniqué, ce qui garantit que la situation reste calme, en dépit des difficultés sociales induites par les mesures de quarantaine qui sont déployées. Les pays occidentaux devraient encourager chacun à modifier ses habitudes — comme l’Italie est en train de le faire, en faisant passer des messages au public décourageant les embrassades et les contacts physiques, par exemple ; ce n’est qu’ainsi que chacun disposera d’une certaine sécurité.

Andrew Korybko

 

 

Article original en anglais : The COVID-19 Outbreak Highlights Cultural Differences In East & West, OneWorld, le 16 mars 2020.

Traduit par José Martí, relu par Kira pour le Saker Francophone

 

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.



Articles Par : Andrew Korybko

A propos :

Andrew Korybko est le commentateur politique étasunien qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides: l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime(2015).

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