Les compteurs intelligents seraient un risque «sérieux» pour la santé de la population

Une sommité internationale contredit les affirmations d’Hydro-Québec

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Selon un chercheur de réputation mondiale, les compteurs-émetteurs de radiofréquences proposés par Hydro-Québec pourraient constituer un risque sérieux à la santé.
Photo : Jacques Nadeau – Le Devoir
Selon un chercheur de réputation mondiale, les compteurs-émetteurs de radiofréquences proposés par Hydro-Québec pourraient constituer un risque sérieux à la santé.

Dans un mémoire déposé la semaine dernière dans le dossier des compteurs intelligents, le Dr David Carpenter, une sommité internationale en matière d’impacts de champs électromagnétiques, affirme que « l’état de la recherche scientifique établit de façon suffisante qu’il est fort probable que les compteurs-émetteurs de radiofréquences (RF) proposés dans le programme d’Hydro-Québec puissent constituer un risque sérieux et engendrer des dommages irréversibles pour la santé, notamment des séquelles biologiques autres que celles résultant d’un effet thermique ».

Le Dr Carpenter, qui témoignera devant la Régie de l’énergie le 17 ou le 18 mai prochain, a fait ses études médicales à l’Université de Harvard. Il dirige aujourd’hui l’Institut de santé environnementale de l’Université d’Albany, dans l’État de New York en même temps qu’il enseigne à l’École de santé publique du même État. Auteur de deux livres sur les champs électromagnétiques et d’environ 350 articles scientifiques, il est aussi coauteur du rapport Bioinitiative, qui synthétise les effets biologiques des RF, démontrés par 2000 études scientifiques. Ce rapport a notamment servi de base au Conseil de l’Europe et à ses conseillers scientifiques pour qu’il recommande aux 25 d’appliquer le principe de précaution en matière d’électromagnétisme et de radiofréquences.

Le mémoire du Dr Carpenter démolit les affirmations du Dr Michel Plante, le médecin consultant d’Hydro-Québec qui a soutenu notamment que les compteurs choisis par la société d’État sont sans danger, même pour ceux qui disent souffrir d’électrosensibilité, une maladie qui n’existe pas à son avis.

Dans le chapitre qui traite de la querelle scientifique sur les effets des RF, le Dr Carpenter indique que les milieux scientifiques ont commencé à s’interroger publiquement sur la présence de médecins associés aux industriels dans les organes étatiques ou internationaux qui établissent les normes réglementaires sur les RF, comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ou encore dans les comités de révisions scientifiques des grandes revues. Un des auteurs à l’origine de ce questionnement a nommément visé dans un article le « Dr Michel Plante d’Hydro-Québec comme étant un de ces participants problématiques qui a des liens avec l’industrie ».

Selon le mémoire de ce spécialiste, « il a été établi hors de tout doute raisonnable qu’il y a des effets nocifs pour la santé humaine à des niveaux d’exposition aux RF bien inférieurs aux niveaux où on constate des effets thermiques ». Présentement, les recommandations des autorités étasuniennes et canadiennes suggèrent de ne pas dépasser 6 millions de microwatts par mètre carré (uW/m3). S’appuyant sur la méta-étude Bioinitiative, le Dr Carpenter estime qu’il n’est pas sécuritaire pour les humains d’être exposés à des compteurs qui émettent à l’extérieur plus de 1000 uW/m3 et plus 100 uW/m3 à l’intérieur des maisons.

La mauvaise prémisse des normes canadiennes et étasuniennes, dit-il, suppose qu’il n’y a pas d’impacts pour la santé sauf si on mesure des effets thermiques, comme ceux produits par les micro-ondes ou les téléphones cellulaires. Mais des centaines d’études portant sur les cellules, dit le Dr Carpenter, démontrent l’existence d’impacts tout aussi réels sur le métabolisme cellulaire à des taux bien inférieurs aux normes en vigueur.

De plus, dit-il, les études démontrent que de très faibles expositions peuvent aussi altérer l’intégrité de l’ADN, engendrer des aberrations chromosomiques, provoquer la mort de cellules, de neurones cervicaux et augmenter la production de radicaux libres, etc.

Quant aux études portant sur les humains, elles ont démontré à des taux bien inférieurs aux normes nord-américaines des changements dans les fonctions cérébrales, incluant des pertes de mémoire, des retards dans l’apprentissage, des baisses de performance chez les enfants, des maux de tête, des impacts sur les fonctions neurogénératives, des déséquilibres des fonctions immunitaires, des baisses de la mélatonine et des troubles de sommeil, des déséquilibres hormonaux, des problèmes cardiaques et des problèmes de tension artérielle, des inflammations et des effets sur la gestation, y compris des fausses couches, des cancers chez les enfants et les adultes, comme la leucémie, les tumeurs cérébrales, etc.

Ressermement des normes

Le mémoire de Dr Carpenter, disponible sur notre site Internet en lien avec cet article, cite des dizaines d’études scientifiques.

Si la querelle scientifique n’aboutit pas encore à un resserrement des normes, c’est qu’on n’a pas encore relié tous ces impacts sur la santé dans une théorie globale qui l’expliquerait complètement, dit-il. Le poids des représentants des industriels dans les organismes réglementaires s’ajoute, dit-il, aux fausses prémisses qu’ils continuent de défendre, comme celle voulant que la température du corps doit augmenter de 1 degré Celsius pour qu’il y ait impact biologique mesurable. C’est d’ailleurs pourquoi, précise-t-il, même les organismes réglementaires nord-américains, y compris le Canada, suggèrent désormais d’appliquer le principe de précaution au phénomène des radiofréquences.

Concrètement, si elle voulait placer ses clients à l’abri de ces risques importants, Hydro-Québec devrait privilégier la transmission par câbles, téléphoniques ou optiques, des données de ses compteurs intelligents, conclut le Dr Carpenter.



Articles Par : Louis-Gilles Francoeur

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