Les craintes de guerre nucléaire s’accroissent après la menace de Trump d’anéantir la Corée du Nord
La tirade fasciste du président américain Donald Trump à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York mardi, dans laquelle il a déclaré que Washington était « prêt, disposé et capable » à « détruire totalement la Corée du Nord », a choqué et horrifié des gens autour du monde hier.
L’« Agence de presse centrale coréenne » du régime nord-coréen (KCNA) a averti qu’elle pourrait maintenant attaquer des objectifs américains si elle détecte que les forces américaines se préparent à la détruire. Le KCNA a déclaré que Pyongyang préparerait une « frappe résolue et préventive, si elles présentaient un léger signe de provocation. Au cas où les États-Unis opteraient pour l’affrontement et la guerre enfin […] ils rencontreront une horrible frappe nucléaire et une ruine misérable et définitive ».
Alors que les fonctionnaires de l’ONU et les autres grandes puissances mondiales réagissent au discours de Trump, il devient toujours plus clair que l’élite dirigeante à l’échelle internationale est politiquement en faillite, dans un état de perplexité, de terreur et de déni face au risque que Washington lance ou provoque une guerre nucléaire. Aucun d’entre eux n’a le moyen d’arrêter l’escalade militaire de cette puissance hégémonique impérialiste au centre du système capitaliste mondial. Ils se taisent sur la nature barbare des propos de Trump et sur le risque d’une guerre nucléaire qui pourrait détruire l’humanité.
À l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, où Trump avait livré ses menaces génocidaires contre le peuple nord-coréen, des dizaines de pays ont signé la veille un Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Le président brésilien Michel Temer a été le premier chef d’État à signer ce traité. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, l’a qualifié d’« une étape importante vers l’objectif universel d’un monde exempt d’armes nucléaires ».
En fait, le traité était une charade élaborée, mais impuissante. Il a été boycotté par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, tous dotés d’armes nucléaires. Étant donné que chacune de ces puissances peut opposer un veto à l’adoption du traité au Conseil de sécurité de l’ONU, le traité est mort à son arrivée. L’alliance de l’OTAN a également publié une déclaration silencieuse sur les menaces de Trump contre la Corée du Nord, mais qui dénonçait ce traité en disant qu’il « méconnaît les réalités de l’environnement de sécurité de plus en plus difficile ».
Dans l’un des rares commentaires abordant la portée de la guerre en cours de préparation, le Global Times de l’État chinois a averti que l’attaque américaine initiale contre la Corée du Nord pourrait coûter la vie à des centaines de millions des personnes dans de régions densément peuplées de l’Asie du Nord-Est. Cependant, il n’a rien dit sur ce qui se produirait après la frappe initiale des États-Unis, et a cherché à adoucir ses critiques de Trump en imputant la faute autant à Trump qu’à la Corée du Nord.
Il a écrit : « La destruction totale de la Corée du Nord entraînerait une catastrophe écologique insupportable pour l’Asie du Nord-Est. Le nord-est de la Chine, la péninsule du Shandong et la Corée du Sud seraient tous engloutis par les retombées nucléaires. Ainsi, le président des États-Unis, au lieu de se vanter de sa force militaire, devrait essayer d’éviter une telle guerre […] Si une guerre nucléaire éclatait, ce serait un crime contre les Chinois et les Sud-Coréens par Pyongyang et Washington. »
Alors que le Global Times n’a pas dit comment le régime chinois pourrait répondre à une telle attaque, il est bien connu que ses missiles nucléaires peuvent atteindre l’ensemble des États-Unis continentaux. Alors que la Chine et la Russie organisent des manœuvres maritimes communes entre Vladivostok et la mer d’Okhotsk, au nord de la péninsule coréenne, il est clair que Beijing et Moscou préparent des mesures de représailles qui pourraient rapidement se développer en une guerre mondiale avec les forces américaines en Asie, en Europe, au Moyen-Orient et dans le monde entier.
La Russie effectue actuellement un exercice militaire appelé Zapad et hier, l’agence de presse TASS a signalé que les forces russes avaient testé avec succès les missiles nucléaires stratégiques RS-24, qui ont atteint leurs objectifs dans la péninsule du Kamtchatka en Russie.
Les menaces de Trump ont également exposé la faille profonde entre les États-Unis et les puissances européennes, en particulier l’Allemagne et la France. Sans aborder ou condamner la menace de Trump d’une attaque génocidaire contre la Corée du Nord, les responsables et les médias européens ont clairement indiqué qu’ils s’opposaient ouvertement à la politique étrangère des États-Unis dans toute une série de problèmes et de conflits militaires dans le monde entier.
Le quotidien français Le Monde a commenté : « Pour le reste de la communauté internationale, le discours de [Trump] est un défi terrible. C’est particulièrement le cas pour l’Europe, le partenaire privilégié et l’allié des États-Unis, qui s’oppose à Washington sur de nombreuses questions comme le climat, l’Iran et le multilatéralisme. Le discours du président Emmanuel Macron deux heures plus tard était une contradiction frappante avec Trump. L’alliance atlantique perd son sens. »
La chancelière allemande Angela Merkel a prévenu qu’en Corée du Nord, « seule une solution pacifique et diplomatique à ce conflit est possible. Toute autre chose entraînerait une catastrophe, je suis profondément convaincu de cela ». Elle a ajouté qu’elle se battrait « avec toutes mes forces » pour une solution pacifique.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a qualifié les menaces génocidaires de Trump d’« inappropriées », ajoutant : « Cette rhétorique guerrière ne nous permet pas d’avancer d’un seul pas ».
Le président français, Emmanuel Macron, s’était déjà exprimé à l’ONU juste après le discours de Trump, auquel Macron n’avait manifestement pas assisté. Il a déclaré que la France « s’opposera à toute escalade » en Corée, ainsi que contre d’autres régimes à travers le monde menacé par Trump. Macron a déclaré qu’une tentative unilatérale de faire capoter le traité nucléaire de 2015 avec l’Iran, comme le menace Trump, serait « irresponsable » et a ajouté qu’il avait prévenu Téhéran et Washington qu’une « spirale mortelle » était possible.
Il ne fait aucun doute que les gouvernements européens répondront à la menace croissante de la guerre en accélérant leurs augmentations de dépenses de défense de plusieurs milliards d’euros, emmenés par l’Allemagne et sa campagne depuis trois ans maintenant pour militariser sa politique étrangère.
Comme le discours de l’ONU de Trump lui-même, la réaction des puissances européennes et internationales est le fruit d’une longue évolution. Depuis un quart de siècle, depuis que la bureaucratie stalinienne a dissous l’Union soviétique, enlevant ainsi le contrepoids militaire à Washington, l’impérialisme américain cherchait à compenser sa faiblesse économique croissante en recourant à des guerres de plus en plus agressives au Moyen-Orient et à travers le monde. Il a continué à servir de pivot financier et militaire du capitalisme mondial, cependant, et de modèle pour les politiques d’austérité et de plus en plus militaristes et de ses rivaux européens.
L’absence d’une condamnation internationale de la menace lancée par Trump d’assassiner 25 millions de Nord-Coréens est une mesure de la dégénération politique de la classe dirigeante dans le monde entier. Ils ne disent rien parce que, après un quart de siècle où les puissances européennes et d’autres alliés des Américains se sont joints aux guerres dirigées par les États-Unis en Afghanistan et en Irak, en Libye, en Syrie et en Ukraine, ils sont eux-mêmes prêts à recourir à la guerre et à des niveaux de violence abominables.
La faillite de l’élite dirigeante souligne que la seule force qui peut s’opposer à la guerre est la classe ouvrière internationale, agissant sur un programme socialiste et révolutionnaire. Cela souligne l’importance de la dénonciation au vitriol par Trump du socialisme dans son discours à l’ONU, que les politiciens et les médias ont passée sous un silence pratiquement total. Les représentants politiques d’une classe dirigeante corrompue et ultra-riche, bien conscients qu’ils sont au bord d’une horrible conflagration nucléaire, craignant qu’une telle crise ne puisse provoquer un changement politique rapide de la population et le discrédit complet du capitalisme mondial.
Les puissances européennes ainsi que la Chine et la Russie préfèrent entrer dans un conflit diplomatique et stratégique toujours plus net avec les États-Unis. Lors du Conseil de sécurité de l’ONU hier, le président ukrainien Petro Poroshenko a demandé d’envoyer les inspecteurs de l’OSCE dans la région disputée du Donbass Russophone, où Kiev a fait face à une opposition des milices soutenues par la Russie depuis le coup d’État de l’OTAN en 2014.
Il y a des appels continus à Washington pour armer le régime ukrainien contre Moscou – une politique qui a poussé l’Allemagne et la France à avertir du risque d’une « guerre totale » avec la Russie et à conclure un accord de paix séparée avec l’Ukraine et la Russie en 2015 à Minsk. Hier, Macron a annoncé que la France chercherait une nouvelle rencontre avec l’Allemagne, la Russie et l’Ukraine pour « continuer, dans le cadre des accords de Minsk, la désescalade de la violence et les réformes en Ukraine ».
Alex Lantier
Article paru d’abord en anglais, WSWS, le 21 septembre 2017