Les entretiens entre Obama et Xi soulignent la menace de guerre américaine en Asie
Hier à Pékin, le président américain Barack Obama s’est vanté que les accords qu’il avait signés avec son homologue chinois, Xi Jinping, dans les domaines militaire, commercial, et écologique avaient amené leur « coopération bilatérale, régionale et mondiale à un nouveau niveau. ». En fait, les deux jours de discussions entre Obama et Xi ont souligné les tensions géostratégiques et les risques de guerre engendrés par le « pivot vers l’Asie » de Washington.
Depuis son entrée en fonction, Obama a dirigé un effort pour maintenir la domination impérialiste américaine de la région Asie-Pacifique en encerclant la Chine avec des alliés diplomatiques et militaires des Etats-Unis. Le « pivot », officiellement annoncé en novembre 2011, a aussi vu Washington attiser les contentieux territoriaux entre la Chine et ses voisins, y compris le Japon au sujet des îles Senkaku/Diaoyu et plusieurs Etats d’Asie du Sud-Est au sujet de la Mer de Chine méridionale.
Pendant les 18 mois depuis l’accueil de Xi Jinping en Caroline du Sud par Obama pour leur première rencontre, une série d’incidents ont menacé de déclencher un conflit régional susceptible de dégénérer en une guerre ouverte entre les Etats-Unis et la Chine.
L’impérialisme américain se prépare activement à mener une guerre contre la grande puissance asiatique, en recentrant 60 pour cent de ses ressources aériennes et navales dans la région et en développant sa stratégie « Air-Sea Battle », qui prévoit un bombardement aérien dévastateur ainsi qu’un blocus naval de la Chine.
Cependant, le gouvernement Obama veut pouvoir choisir le moment qu’il lancera la guerre, et aussi le prétexte qu’il citera. C’est pourquoi Washington a exhorté le premier ministre japonais Shinzo Abe, qui a rencontré Xi pour la première fois lundi, d’apaiser les tensions avec Pékin au sujet des petites îles Senkaku/Diaoyu, revendiquées par les deux pays.
Ces calculs sont à la base des nouveaux protocoles entre les armées américaine et chinoise entérinés cette semaine. Ben Rhodes, un conseiller à la sécurité nationale américain, a dit aux journalistes avant le sommet : « Il est extrêmement important que nous évitions une escalade intempestive et une situation où des circonstances accidentelles déboucheraient à nouveau sur quelque chose susceptible de provoquer un conflit. »
Ces remarques constituent une condamnation accablante des provocations irresponsables de la part du gouvernement Obama en Asie de l’Est au cours de ces deux dernières années, qui menacent de déclencher une guerre ouverte entre deux puissances nucléaires.
Le Wall Street Journal a écrit que Pékin s’était « longtemps opposé à un accord sur les conflits militaires avec les Etats-Unis, au motif que ceci impliquait une relation antagoniste comme celle entre les Etats-Unis et l’ancienne Union soviétique. » Le Journal a toutefois précisé que ceci avait « changé depuis l’année dernière, car les deux camps ont reconnu ne pas pouvoir concilier leurs interprétations de la loi internationale sur les questions maritimes, et qu’ils ne pouvaient pas non plus permettre que des affrontements militaires imprévus fassent dérailler leurs relations générales. »
Le nouveau « mécanisme pour développer la confiance » ne résout aucun des problèmes qui sous-tendent les confrontations sino-américaines. L’une des mesures comporte une notification mutuelle d’« activités militaires majeures » ; une autre couvre les « règles de comportement pour la sécurité en cas de rencontres maritimes ou aériennes. » Un communiqué de la Maison Blanche a ajouté que les deux parties s’engageaient à développer davantage de « mécanismes pour développer la confiance, » Washington donnant la priorité à la transmission d’informations relatives aux lancements de missile balistique.
Les accords impliquent une concession significative de la part de Pékin à l’appel incessant de Washington pour « plus de transparence » sur les affaires militaires chinoises. Par cette demande qui gonfle la propagande américaine contre la « menace chinoise, » le Pentagone veut particulièrement obtenir plus de connaissances des capacités de son ennemi potentiel.
A Pékin, Rhodes a réitéré l’insistance de longue date du gouvernement Obama que Pékin se soumette totalement au cadre géostratégique de la domination américaine de l’Asie développé après la Seconde Guerre mondiale, ou du moins ce qui en reste. « Nous serons très clairs lors d’incidents où nous estimerons que les actions de la Chine dépassent les limites de ce que nous pensons être les normes internationales indispensables pour régir les relations entre des nations et la façon avec laquelle nous réglons les conflits, » a-t-il dit.
Lorsd’une conférence de presse avec Xi, Obama a tenté de minimiser les tensions sino-américaines en déclarant qu’ « alors même que nous sommes en concurrence et en désaccord dans certains domaines, je crois que nous pouvons continuer de faire progresser la sécurité et la prospérité de nos peuples et des populations de par le monde. »
Obama a proposé de nouveaux accords sur diverses questions. Un accord commercial supprimera des tarifs évalués à 1 millier de milliards de dollars de ventes annuelles de semi-conducteurs et autres produits technologiques. Selon le Washington Post, l’accord « profiterait aux entreprises américaines en quête d’un accès plus grand vers la Chine ainsi qu’aux usines en Chine destinées à produire pour le marché américain. » Un autre accord élabore de nouveaux visas touristiques et d’affaires pour les ressortissants américains en Chine.
Les nouvelles promesses de réductions d’émission de gaz à effet de serre furent tout particulièrement promues par la Maison Blanche et les médias américains. Obama a annoncé un « accord historique » qui engagerait les Etats-Unis à diminuer leurs émissions de 26 à 28 pour cent pour 2025. La Chine a promis de se donner « jusqu’autour de 2030 » pour atteindre le pic de ses émissions nets et de tirer éventuellement 20 pour cent de l’énergie du pays de source sans émission de CO2.
L’idée que ces nouveaux objectifs atténueront la crise climatique est un mensonge. Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE, United Nation’s Intergovernmental Panel on Climate Change) avait précédemment conclu que les émissions des économies avancées devaient d’ici 2020 être inférieures de 25 à 40 pour cent par rapport à leurs niveaux de 1999 et de 80 à 95 pour cent d’ici 2050. Ces chiffres ont de plus été contestés par de nombreux scientifiques spécialistes du climat comme étant une sous-estimation de ce qui serait nécessaire pour empêcher des niveaux dangereux et éventuellement irréversibles du réchauffement mondial.
Pékin a égalé la modicité de la promesse tout à fait insuffisante d’Obama de réduire les émissions de 26 à 28 pour cent d’ici 2025 par rapport à leur niveau de 2005. Plusieurs rapports ont montré que les émissions de gaz carbonique de la Chine devaient déjà atteindre leur pic autour de 2030 et l’engagement de Xi ne prévoyait que peu ou pas du tout d’action supplémentaire pour réduire la pollution résultant des émissions de gaz à effet de serre.
Après une série de fiascos lors de sommets internationaux pour élaborer un traité sur le climat prenant suite au protocole de Kyoto, dont le sommet de Copenhague de 2009, une autre série de pourparlers doit se dérouler à Paris l’année prochaine. Loin d’ouvrir la voie lors de ce sommet à un accord efficace, l’accord sur les émissions de gaz carbonique entre Obama et Xi souligne l’impossibilité de résoudre la crise du changement climatique au sein du cadre du système capitaliste d’Etat-nation.
Patrick Kelly
Article original, WSWS, paru le 13 novembre 2014