Les Etats-Unis attaqueraient-ils l’Iran ?

En Allemagne diverses informations circulent sur une prochaine attaque des Etats-Unis en Iran, comme étant déjà prévue et conçue. L’agence DPA a diffusé le 23 décembre 2005 un article du journaliste et expert en intelligence Udo Ulfkotte dans lequel celui-ci affirme que, selon des « sources de sécurité occidentale », le directeur de la CIA, Porter Gross, s’est rendu à Ankara le 12 décembre pour solliciter l’appui de la Turquie à une probable attaque aérienne contre les installations nucléaires iraniennes. C’est-à-dire, que les avions étasuniens puissent décoller du territoire turc pour la mener à bien. L’agence de nouvelles allemande a en outre indiqué que Washington a informé les gouvernements de l’Arabie Saoudite, Jordanie, Oman et Pakistan de ses intentions. Le journal berlinois Der Tagesspiegl (28 décembre 2005) cite, à son tour, des déclarations d’agents d’intelligence de l’OTAN : la Maison Blanche a annoncé à ses alliés qu’elle explore toutes les options pour mater Téhéran, y compris par une intervention militaire.

L’argumentation de la Maison Blanche est la même que celle brandie pour envahir l’Irak : que l’Iran prétend fabriquer des armes nucléaires, bien que son gouvernement insiste sur le fait qu’il utilisera cette énergie à des fins pacifiques, et qu’il collabore avec Al Qaida, évidemment. Selon la DPA, Gross aurait livré à des fonctionnaires d’intelligence turques trois dossiers qui prouveraient l’appui iranien au réseau terroriste et donne au gouvernement de Recep Tayyip Erdogan la voie libre pour bombarder les nationalistes de l’Armée de Libération du Kurdistan qui pullulent dans les montagnes à la frontière proches de l’Irak avec la Turquie. Ankara craint la poussée séparatiste des 18% de kurdes de sa population, quelque 13 millions d’habitants.

La Turquie avait observé l’activité militaire américaine dans la région avec un certain scepticisme et elle est allée jusqu’à s’opposer au début du 2003 à ce que son territoire soit utilisé pour attaquer le nord de l’Irak. Rumsfeld n’est se pas fatigué de répéter que ce fait a accentué les difficultés de l’occupation de l’Irak. Toutefois, il y a deux semaines le commandant en chef de l’armée turque, Yasar Buyukanit, a déclaré après une visite à Washington, que les relations avec les Etats-Unis étaient à nouveau excellentes. Quelque chose qui a un lien avec la multiplication du nombre de hauts fonctionnaires d’Europe occidentale et des services d’intelligence des Etats-Unis qui arrivent à Ankara. « En quelques jours, le chef du FBI, en suite le chef de la CIA et le secrétaire général de l’OTAN Jaap de Hoop Scheffer se sont rendus dans la capitale turque » ( Der Spiegel , 2 janvier 2006). Le mois passé ce fut la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice, avec un arrêt préalable à Berlin.

Le projet de bombarder l’Iran n’est pas nouveau mais il semble que son exécution est proche. Dans une entrevue a accordé à la NBC en janvier le 2005, le vice-président Dick Cheney a souligné que, vu la bellicosité anti-israélienne de Téhéran, « Israël pourrait bien agir d’abord et laisser le reste du monde s’occuper après d’ordonner le chaos diplomatique » qu’une attaque de Tel-Aviv provoquerait. Alors que, le journaliste Seymour Hersh a révélé que des commandos yanquis se sont déjà infiltrés en territoire iranien ( New Yorker , janvier 2005). Et à la fin de 2004, le chef du Pentagone, Donald Rumsfeld, a donné aux forces armées des Etats-Unis l’ordre d’être prêts pour lancer dans les 12 heures ou moins une attaque préventive contre tout pays du monde soupçonné d’avoir ou de développer des armes de destruction massive, Iran et la Corée du Nord en particulier. Ceci n’est pas une blague : le plan inclut une option nucléaire ( The Washington Post , 15 mai 2005). Le danger est donc valable pour 2006 aussi.

La fin de la Guerre Froide a déplacé de l’Europe à l’Asie l’axe de la tension nucléaire sur la planète. Tant en Israël et en Iran dans l’ouest, qu’ en Corée du Nord et au Japon dans l’est, en passant par l’Inde et le Pakistan dans le sud, on a assisté à une activité dans ce domaine que la Maison Blanche mesure avec deux poids et deux mesures. Elle accuse l’Iran de ne pas respecter le traité international de non-prolifération d’armes nucléaires, mais nourrit le programme israélien de production d’armes nucléaires. Elle inclut la Corée du Nord dans « l’axe du mal », mais établit une « association stratégique » avec l’Inde et W Bush s’ engage à obtenir que le Congrès donne son feu vert pour approvisionner à New Delhi de technologies nucléaires avancées ( IPS , 29-1205). Le président américain a décrété que l’Inde est un État nucléaire « responsable ». Les autres sont irresponsables.

Les « faucons » voient avec d’un bon œil la demande des conservateurs japonais qui exigent la modification du statut imposé au Japon au terme de la Deuxième Guerre Mondiale : il lui interdit de disposer de grandes forces armées et de produire ou d’acquérir des armes nucléaires. Tokyo stocke d’énormes quantités de plutonium traité en Europe qui peuvent rapidement dériver à la fabrication d’armement nucléaire et ceci déclencherait la réaction de Pékin et une chaîne de conséquences imprévisibles. « Parfois je pense que, en créant l’être humain, Dieu a surestimé ses possibilités » (Oscar Wilde).

Traduction pour
El Correo de l’espagnol : Estelle et Carlos Debiasi

Voici un complément d’information sur « qui manipule qui » et à prendre avec des pincettes parce que dans cette information peut se dissimuler -encore- une opération d’intelligence destinée à préparer l’opinion publique européenne à une attaque en règle des « alliés » en Iran :

LES DANGEREUX RATES DE LA CIA EN IRAN

Par Philippe Gélie
Le Figaro . Paris, 6 janvier 2006

 



Articles Par : Juan Gelman

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