Les forces pro wahhabites de l’opposition syrienne ne contrôlent que 11,7 % du territoire syrien, selon un centre turc de sensibilité islamiste.

Le Centre Omrane, un institut de sensibilité proche des Frères Musulmans, a établi une carte des forces en présence en Syrie, à la date du 15 décembre, révélant que les «Forces de la Révolution Syrienne» ne contrôlent que 11, 74 % du territoire, soit 21.156 km2, infiniment moindre que les autres protagonistes du conflit syrien: Les forces gouvernementales, les forces kurdes et surtout Da’ech, qui tient la pole position avec 43,6 % du territoire soit 78.650 km 2.L’aveu est de taille émanant d’une institution nullement suspectée de sentiments d’hostilité à l’égard des groupements pro-wahhabites.Ce piètre résultat a été obtenu par un subterfuge du Centre Omrane, qui a placé sous le même label «Forces de la Révolution Syrienne», des groupements aussi disparates que Jabhat An Nosra, la filiale syrienne d’Al Qaida, l’Armée Syrienne Libre et Ahrar Al Sham. Le trio retenu par Riyad dans sa sélection de la délégation composite chargée de représenter l’opposition syrienne aux pourparlers avec le gouvernement baasiste. La carte de déploiement des forces en présence a été publiée précisément au lendemain de la sélection par Riyad de la délégation chargée de mener pour le compte de l’opposition syrienne les pourparlers de paix avec le pouvoir baasiste.
Ci-joint le classement :
  1. Etat Islamique « Da’ech » : 43, 6 % du territoire (soit 78.645 km2)
  2. Etat Syrien : 17,47 % , (soit (31. 511 km2)
  3. Forces Kurdes : 14, 61 % , (soit 26.337 km2)
  4. Forces de la Révolution Syrienne : 11, 74 %, (soit 21.156 km2)

Ce résultat a été obtenu par un double subterfuge du centre turc :D’une part, le fait de fédérer des groupements antinomiques: L’Armée Syrienne Libre, soutenue par les pays occidentaux, et Jabhat An Nosra, dont la maison mère Al Qaida et ses filiales Jabhat An Nora (pour la Syrie), AQMI (pour le Maghreb) et AQPA (pour la Péninsule arabique) sont inscrites sur la ligne des organisations terroristes.D’autre part, en décidant arbitrairement et sans la moindre argumentation le fait que 12 % du territoire sont hors contrôle des belligérants, il soustrait d’autant la superficie de la zone précédemment attribuée au gouvernement de Damas.En l’amputant de cette zone, le Centre Omrane réduit d’autant la superficie gouvernementale afin d’atténuer le décalage entre forces gouvernementales et les forces de l’opposition pro wahhabite, et suggérer, en contrechamp, une parité entre eux, alors que théoriquement la superficie sous contrôle gouvernementale aurait dû s’élever à 29 %, soit près du tiers du territoire.Enfin sous le vocable «Forces Kurdes», la carte englobe une large fraction des autres forces démocratiques et laïques déployées sur le terrain (les forces de la Syrie démocratique présidé par un syrien turkmène), qui viennent de participer d’ailleurs au congrès des organisations civile et politiques arabes, kurdes, assyriens… le 13 décembre 2015 pour l’élection de leur président en la personne de M. Haytham Manna. Le centre persiste à désigner ce groupe de «forces kurdes» pour le singulariser sans doute de son environnement arabe.Sur la carte, le signe distinctif des zones contrôlées par les «Forces de la Révolution Syrienne» est, paradoxalement, le drapeau syrien du temps du mandat français, indice indiscutable de l’indépendance de ce groupement dont l’un des mouvements majeurs Jabhat An Nosra passe pour avoir été le preneur d’otages de quatre journalistes français (Didier François, Edouard Elias, Pierre Torres, Nicolas Henin) et la filiale de la péninsule arabique, l’incubateur des auteurs du carnage de Charlie Hebdo.

Cf. sur la carte des zones d’influence et de contrôle du centre Omrane

  • Les «Forces de la Révolution Syrienne» sont identifiées par le drapeau syrien du mandat français et leur zone de déploiement en bleu clair.
  • Forces Kurdes, drapeau Jaune / Zone de déploiement en rose pâle.
  • Etat Islamique, drapeau Noir / Zone de déploiement en rose grise.
  • Pouvoir syrien, drapeau syrien: zone de déploiement en rosé foncé.
  • Conclusion

    Ainsi les groupements terroristes radicaux ou modérés, financés ou soutenus par Riyad, Doha et Ankara, de l’avis même de ce centre turc pro-islamiste, ne contrôlent qu’à peine un peu plus de 10 % du territoire. A contrario l’Arabie saoudite a convié des forces représentant 11, 7 % du territoire et mis un veto sur une coalition qui contrôle 14,6 % du territoire.En conséquence de ce qui précède, l’axe Riyad-Doha-Ankara souhaite-t-il vraiment le succès d’une solution politique ?

    René Naba



    Articles Par : René Naba

    A propos :

    Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de “L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres” (Golias), “Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français” (Harmattan), “Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), “Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David” (Bachari), “Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). Depuis 2013, il est membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme (SIHR), dont le siège est à Genève et de l’Association d’amitié euro-arabe. Depuis 2014, il est consultant à l’Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l’Homme (IIPJDH) dont le siège est à Genève. Depuis le 1er septembre 2014, il est Directeur du site Madaniya.

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