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Les injustices subies par Youssef Nada : Un cas d’école
Par Silvia Cattori
Mondialisation.ca, 19 janvier 2010
Le site de Silvia Cattori 19 janvier 2010
Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/les-injustices-subies-par-youssef-nada-un-cas-d-cole/17081

Lundi 18 janvier 2010

Le devoir d’un journaliste est d’apporter au public les éléments d’information et d’analyse permettant de comprendre ce qui se passe. Á l’heure où les États « occidentaux » se sont engagés dans des guerres unilatérales dévastatrices et des campagnes de haine raciste contre l’Islam, ce que les journalistes disent – ou taisent – peut contribuer à ce que des pays et des peuples soient injustement écrasés et humiliés, et des gens – notamment de confession musulmane – arbitrairement arrêtés, torturés, inscrits sur des listes terroristes, brisés à jamais.

Quand on exerce ce métier il est impératif de rester libre de toute attache. Car une information correcte requiert du journaliste le respect d’une éthique, et un travail de recherche courageux pour porter à la connaissance du public ce que les pouvoirs en place cherchent à occulter.

Dès les années 90, suite à des campagnes de dénigrement bien orchestrées – et malheureusement toujours à l’œuvre – la vie de nombreuses personnes de confession musulmane, a basculé dans l’horreur. Pour sa grande infortune et celle de sa famille, Youssef Nada, un ingénieur et banquier italien d’origine égyptienne, a été l’une d’elles.

La douloureuse histoire de Youssef Nada, inscrit après le 11 septembre 2001, sans que rien ne le justifie, sur la liste noire des personnes accusées de soutenir le terrorisme [1] – et finalement radié de cette liste [2] après huit années de « vicissitudes kafkaïennes », selon les propres termes du sénateur suisse Dick Marty – devrait nous conduire à méditer afin que ce genre d’abominations ne se répète plus. L’injustice subie par Youssef Nada – une figure politique très respectée dans le monde, qui occupait notamment une position éminente au sein du mouvement des Frères musulmans – nous paraît emblématique du rôle perverti d’une partie de la presse, et de ses accointances avec les services de renseignement.

Le ciel est tombé une première fois sur la tête de Youssef Nada quand, en 1997, le journaliste Guido Olimpio a publié un article [3] dans l’influent quotidien milanais Corriere della Sera, affirmant, sans apporter aucune preuve tangible, que Youssef Nada « finançait le mouvement du Hamas », mouvement de résistance – faut-il le préciser – que l’occupant israélien pourchassait et s’acharnait depuis longtemps à criminaliser et à transformer en menace planétaire, aux yeux de « l’Occident ».

Les folles accusations de Guido Olimpio ont été dûment démenties. Toutefois, la suite des évènements allait démontrer que l’objectif visé par ces fausses informations avait été atteint : braquer l’attention des services de renseignements et des médias du monde entier sur la personne de Youssef Nada, en faisant d’une pierre plusieurs coups. Donner un visage planétaire à la « menace musulmane » au travers d’un paisible financier ; stigmatiser les banques détenues par des musulmans pour inciter l’Occident à considérer d’avance comme suspectes leurs transactions financières et à considérer les dons versés à des organisations caritatives gérées par le mouvement des Frères musulmans comme destinées à financer le « terrorisme » ; répandre la peur dans l’opinion publique, en faisant croire que des musulmans vivants parmi nous, pouvaient cacher des « terroristes » potentiels, etc.

Les choses ne se sont donc pas arrêtées là. Dans de nombreux pays, considérés comme « stratégiques », il s’est trouvé des « experts en terrorisme » pour reprendre, sans vergogne, comme véridiques, les fantaisies de Guido Olimpio.

En Suisse, c’est le journaliste français Richard Labévière qui, dès 1997, a repris, en les aggravant, les affirmations de Guido Olimpio. Á cette époque d’intoxication et de désinformation intense destinée à criminaliser le mouvement des Frères musulmans, Richard Labévière travaillait à télévision publique suisse romande (TSR). Il s’est attaché à dépeindre Youssef Nada et le mouvement des Frères musulmans sous les traits de fanatiques dont il fallait se méfier. Ce qu’il affirmait, a eu un impact énorme sur des journalistes suisses qui n’avaient aucune connaissance du monde musulman, et qui s’en sont inspirés en toute bonne foi.

Le film « documentaire » réalisé par Richard Labévière, diffusé en mai 1998 par la TSR dans son magazine Temps Présent, mêlait la figure de Youssef Nada aux images de l’attentat qui, le 17 novembre 1997 à Louxor, avait coûté la vie à des touristes suisses, ce qui pouvait laisser penser qu’il y avait des liens entre les deux.

Youssef Nada évoque souvent ce film de Richard Labévière comme un moment très douloureux et offensant car il a relancé la polémique, attirant ainsi, une nouvelle fois l’attention des services de renseignement sur ses activités ; lui, l’homme respecté dans le monde entier, qui côtoyait les chefs d’Etats, qui intervenait comme médiateur de paix, à vu là, suite à cette nouvelle vague de calomnies et de suspicions, sa réputation compromise sans retour et le vide se faire autour de lui.

On sait bien aujourd’hui à quoi ont abouti ces campagnes visant à retourner l’opinion publique contre la population de confession musulmane, et poursuivies ad nauseam. En 2001, après l’attentat contre le World Trade Centre – attentat qui, selon la version officielle, n’impliquait qu’une poignée de terroristes – l’Occident a pu faire passer comme une lettre à la poste, aux yeux de l’opinion, sa guerre globale raciste contre la « terreur musulmane ».

Les listes noires où les noms de Youssef Nada, de mouvements politiques, d’entreprises, et de milliers de musulmans à la moralité irréprochable ont été inscrits, associés de manière infamante à des attentats terroristes (dont on ignore à ce jour qui sont les vrais commanditaires), à Ben Laden, à Al Qaida, se sont avérées arbitraires et illégales. « Un homme, n’importe quel citoyen, qui vient à se trouver sur ces listes est précipité instantanément, dans un puits sans fond » a fait remarquer Dick Marty [4].

Pourquoi des soi-disant « spécialistes du monde arabe » ou « experts en terrorisme », ont-ils œuvré de manière à propager un climat de peur et d’inquiétude vis-à-vis de la religion musulmane et à abonder dans le sens voulu par la propagande israélienne, c’est-à-dire, à viser continuellement, et en priorité, le mouvement des Frères musulmans, et à le désigner comme le péril absolu ? Pourquoi se sont-ils faits les instigateurs de ces campagnes mensongères ? Quel était finalement leur agenda ? Agissaient-ils de façon indépendante ou dans le cadre d’une stratégie organisée – et, si oui, par qui ? La question « cui bono ? » pourrait bien nous conduire sur la bonne piste.

La stratégie d’Israël a toujours consisté à tout tenter pour entraîner les grandes puissances dans sa confrontation avec ses voisins arabes et iraniens. Les campagnes orchestrées pour accréditer la « menace terroriste » devaient contribuer à déstabiliser les mouvements de résistance à l’occupant israélien en Palestine et au Liban, et les États qui, comme la Syrie, l’Iran, étaient dans la ligne de mire des États-Unis. [5]

Les gouvernements israéliens successifs ont toujours présenté la résistance palestinienne légitime – incarnée hier par le mouvement du Fatah (qu’il a réussi à mâter), et, depuis les années 90, par le mouvement du Hamas – comme des « terroristes » représentant une menace pour toute la région. En martelant que le Hamas et le mouvement des Frères musulmans qui, en Égypte s’oppose à Hosni Moubarak, ne faisaient qu’un, Israël a obtenu le plein ralliement du dictateur égyptien.

De même, en présentant la résistance libanaise incarnée par le Hezbollah, comme inféodée à l’Iran, et l’Iran lui-même comme une menace nucléaire, l’État d’Israël – fortement appuyé dans sa propagande de guerre par le réseau pro-israélien et divers services de renseignements aux Etats-Unis et en Europe – a réussi à entrainer l’occident dans sa confrontation regionale sur fond de peur de l’Islam.

Le ciel est tombé une deuxième fois sur la tête de Youssef Nada quand, après les attentats du 11 septembre 2001, son nom, celui de ses associés ainsi que leurs sociétés, ont été inscrits sur la liste noire des personnes et institutions accusées de financer Al Qaida.

Aujourd’hui, grâce à sa formidable pugnacité, après huit années d’actions exténuantes et coûteuses auprès des tribunaux pour sauver son honneur et celui de sa famille, et être reconnu dans son innocence et son extranéité au terrorisme, il a obtenu la levée des accusations infamantes contre lui et la radiation de son nom de la liste terroriste des Nations Unies ; mais pas encore celle de toutes ses sociétés [6].

Ce n’est donc pas encore la fin de ses tribulations ! Dans cette folle histoire il a subi des torts moraux et des dommages estimés à plus de 380 millions de francs suisses. A qui va-t-il pouvoir présenter la facture de cet hallucinant gâchis auquel des journalistes sans scrupules ont activement contribué ?

Nous avons demandé à Youssef Nada si ceux des journalistes qui l’ont dépeint avec insistance et force affabulations, dans des avalanches d’articles et de livres traduits en plusieurs langues, comme le « chef d’un projet islamique qui voulait conquérir l’Occident », avaient, quand deux tribunaux l’ont innocenté, rectifié leurs erreurs et reconnu le mal qu’ils lui avaient causé. Il nous a répondu qu’aucun d’entre eux ne lui a jamais adressé la moindre excuse, ni écrit une ligne dans les médias qui avaient diffusé leurs accusations mensongères, pour faire connaître aux lecteurs abusés son innocence, établie depuis 2005, et admettre qu’ils s’étaient fourvoyés.

Face aux fabrications délibérées d’un prétendu « ennemi islamiste », il convient de choisir son camp : le camp de la vérité et de la justice ; le camp de la défense de ceux qui sont discriminés par nos sociétés « civilisées ».

On n’est jamais mieux servi que par soi-même. Durant ces années de cauchemar où il a eu à affronter tracas et humiliations, Youssef Nada a pris la plume pour désigner les « vandales » qui ont détruit sa vie et celle de sa famille. Une famille qui vivait jusque là dans le confort tranquille d’une grande demeure donnant sur le lac de Lugano et qui, privée du jour au lendemain de ses revenus et de ses avoirs, s’est trouvée à devoir licencier ses domestiques et à vivre à l’étroit, mais qui a su faire front avec cette foi des gens qui n’ont rien à se reprocher et savent que la justice est de leur côté.

Partant de son douloureux cas, Youssef Nada a voulu rendre justice à tant d’autres frères et sœurs musulmans anonymes n’ayant pas les moyens de faire entendre leur voix, et bien plus maltraités que lui, par les manipulations médiatiques qui ont précédé les attentats du 11 septembre, et par la folie sécuritaire qui s’en est suivie.

Sur son site personnel [7] (jamais fini faute de temps) Youssef Nada raconte, avec distance et précision, ce qu’il a observé, constaté, compris, analysé, au cours de cette pénible odyssée.

Blessé par les injustices subies, profondément atteint, affaibli par le grand âge, mais infiniment digne face à l’adversité, il résume ainsi en préambule son état d’esprit d’alors : « Youssef Nada, banquier prétendument terroriste, armé de foi et de courage, luttant pour établir son innocence et pour obtenir justice ».

Nous vous invitons à lire ce que Youssef Nada présente comme une « étude de cas sur l’utilisation abusive de slogans sur la lutte contre le terrorisme, pour stigmatiser les militants politiques musulmans. »

Extraits du récit de Youssef Nada [8]

« LE “SMOKING GUN ”

En octobre 1997 un banquier m’a appelé pour me demander si j’avais lu l’article paru à mon sujet dans le Corriere della Sera. Je lui ai dit que non. Il m’a dit : c’est très grave, vous devriez le lire et le transmettre à votre avocat pour qu’il engage une action en justice.

Il m’a fallu lutter de 1997 à 2005 pour obtenir du Tribunal pénal de Milan une condamnation de l’auteur de cet article : Guido Olimpio [9] du Corriere della Sera. Un procès civil contre lui est actuellement toujours en cours [à Milan, ndt].

Les mensonges de Guido Olimpio figurant dans son article du Corriere della Sera ont été diffusés et répandus partout.

Parmi ceux qui ont contribué à répandre ces mensonges, que ce soit par jalousie ou par haine, sciemment ou non, intentionnellement ou non, qu’ils aient été engagés pour désigner des « activistes islamistes », ou motivés politiquement ou financièrement, ou par leur propre agenda professionnel, ou qu’ils aient été induits en erreur, on relève les noms suivants : Richard Labévière [10], Roland Jacquard, Leo Sisti, Kevin Coogan, Paolo Fusi, Daniel Pipes [11], Victor Comras, Sylvain Besson [12], Lorenzo Vidino [13], Mike Isikoff, Mark Hosenball, Douglas Farah et d’autres dont les noms seront indiqués ultérieurement.

Chacun d’eux a été utilisé pour répandre des histoires fabriquées, par les moyens à sa disposition, que ce soit des journaux, des films, des chaînes de télévision, des livres, des sites internet, des rapports de sécurité, et des témoignages devant la Chambre des Représentants.

En cherchant à mettre ensemble les pièces de la mosaïque, les grandes agences d’information allèrent encore plus loin en ajoutant de graves modifications qui mirent en cause leur crédibilité. La Télévision Suisse romande, la BBC, et l’AFP sont parmi celles qui m’ont causé le plus de torts.

Quand je me suis mis à chercher sur Google ce qu’on avait écrit à mon sujet, j’ai trouvé 200’000 pages répétant les mêmes fabrications.

Au cours du long processus d’enquête, ce furent surtout l’ignorance et le manque de connaissance qui conduisirent à de mauvaises interprétations ; tout cela aboutit finalement à soutenir des accusations sans fondement. Celles-ci devinrent un problème pour ceux qui dans le monde devaient investiguer. Aucun enquêteur n’a jamais pu mettre la main sur aucun élément de preuve pour soutenir ces fausses allégations, simplement parce qu’elles n’existent pas.

Ceux des enquêteurs qui ont été trompés par les mensonges qu’ils ont repris dans leurs rapports officiels ou témoignages, ne peuvent continuer à s’abriter derrière l’excuse que leurs preuves sont classées, alors que des avocats commencent à vérifier et à enquêter. Je leur recommande sincèrement de reconsidérer leurs sources et de reconnaître leur erreur.

L’enquête pénale a commencé dans divers pays au sujet de cette diffusion de fuites mensongères. D’autres actions vont suivre pour démasquer ceux qui ont utilisé ces mensonges pour en faire des articles, des livres ou des rapports officiels.

(…)

Par qui le mal est arrivé pour commencer

Le 20.10.1997 le Corriere della Sera publiait en page 4 (Corriere economia) un article signé par Guido Olimpio intitulé « Hamas perde meta’ del tesoro » (« Le Hamas perd la moitié de son trésor »).

QUI EST GUIDO OLIMPIO ?

Il est né en Albanie le 15.04.1957. Son niveau d’éducation n’est pas connu. Il a commencé à travailler au journal Il Tempo à l’âge de 23 ans. Il a été correspondant du Corriere della Sera en Israël. Il a déclaré le 09.10.2002 devant le Tribunal pénal de Milan, avant d’être mis en accusation, qu’il avait des contacts avec le FBI des États-Unis, qu’il « avait donné une audience au Congrès des États-Unis en 1996 et qu’il avait témoigné devant la commission de sécurité du Congrès des États-Unis ».

Le cas AL TAQWA / NADA faisait partie de son témoignage [la banque de Youssef Nada qui sera conduite à faire faillite, ndt].

L’article de Guido Olimpio avait pour titre : « Le Hamas perd la moitié de son trésor »

Y figurait également un tableau contenant des déclarations agressives sans aucun fondement, au sujet de soit disant magiciens de la finance, de banquiers qui opéraient depuis les paradis fiscaux des Caraïbes et des montagnes suisses.

L’auteur, Guido Olimpio, y désignait à plusieurs reprises, sans aucune preuve, la Banque Al Taqwa comme la principale source de financement du Hamas et d’autres groupes islamistes ; notamment la Jamaa Islamia égyptienne, le FIS algérien et le Alnahda tunisien.

Il y écrivait également que les dirigeants du Hamas étaient en train d’enquêter pour savoir où avaient disparu les « cinquante milliards de lires » que la Banque Al Taqwa avaient donné au Hamas, cette banque, qui avait son quartier général aux Bahamas et des bureaux à Lugano, étant considérée comme le « poumon de l’appareil financier des intégristes ».
Il affirmait en outre que la Banque Al Taqwa était le moteur financier des partis islamistes au niveau planétaire. Il désignait le président de la banque YOUSSEF NADA et affirmait que ce dernier avait chargé son associé et adjoint Ghaleb Himmat de la mission de soutenir le Hamas, la Jamaa Islamia égyptienne, le FIS algérien et le Alnahda tunisien.

L’article portait également sur le financement des groupes armés accusés de promouvoir le terrorisme, et attribuait ce financement à la Banque Al Taqwa, à l’organisme de gestion Al Taqwa, à leur président YOUSSEF NADA, et à son adjoint Ghaleb Himmat.

(…)

LA DEUXIÈME VAGUE

En novembre 1997, j’ai reçu un appel de MM. Schreiber et Richard Labévière de la Télévision suisse romande. Ils voulaient m’interviewer au sujet de l’article du Corriere della Sera. Je les ai informés que notre avocat avait introduit une action en justice contre Guido Olimpio et le Corriere della Sera devant le Tribunal pénal de Milan et j’ai refusé de leur accorder une interview.

Le 14 mai 1988, [plus d’une année] après l’attaque terroriste inhumaine et barbare de Louxor, en Égypte où de nombreux touristes suisses avaient été tués, la Télévision suisse romande a diffusé un film documentaire réalisé par Richard Labévière.

QUI EST RICHARD LABÉVIÈRE ?

Citoyen français, né le 04.05.1958, domicilié à 01210 Ferney-Voltaire/Ain/France, 23 bis Rue de Meyrin [il collaborait alors avec la Télévision suisse romande (TSR). Actuellement, il affirme vivre entre le Liban et la France (ndt)]. Bachelier et journaliste. Le bruit a couru que, de 1991 à 1997, il a été utilisé pour des activités de renseignement au Centre des Nations Unies de Genève pour le compte de pays d’Europe et du Moyen-Orient. Nous ne savons pas si c’est vrai ou non.

Ce qui est étonnant est que Labévière a, par la suite, fait de son film [14] un livre [15], dans lequel il a encore ajouté d’autres fabulations. Comme ses connaissances [de la question musulmane] étaient médiocres, il a essayé de recueillir des informations au Moyen-Orient. On constate le même phénomène avec tous ceux qui ont tenté d’enquêter sur n’importe quelle faction islamiste, qu’il s’agisse de journalistes ou d’agents du renseignement. Il a utilisé comme source, des gens qu’il qualifiait d’experts, qui en savaient plus que lui mais qui, néanmoins, étaient soit des ignorants en la matière mais pas moins que lui, ou qui visaient les mêmes objectifs que lui ! Tous ceux qu’il a présentés comme des références dans son film, pour qu’ils contribuent à nous calomnier, appartiennent à cette catégorie.

Il n’a présenté, dans son livre ou son film, aucun élément de preuve pour soutenir ce que lui-même ou ses experts ont prétendu, excepté quelques individus stipendiés au Moyen-Orient, ainsi que l’article mensonger de Guido Olimpio dans le Corriere della Sera. Il a retenu ces éléments comme des preuves fiables, alors que, de son côté, Guido Olimpio, lors de l’audience à son encontre au Tribunal pénal de Milan où il a été inculpé, a tenté de faire valoir comme preuve le livre de Labévière pour soutenir ses propres fabrications !

Parmi les fantaisies écrites par Labévière figure l’histoire fabriquée selon laquelle, pendant la deuxième guerre mondiale, c’est-à-dire en 1940, Youssef Nada avait travaillé pour le troisième Reich allemand, l’Abwehr de l’amiral Canaris, et avait participé à un complot contre le roi Farouk. Labévière s’est ainsi montré nul en arithmétique parce que, à cette époque, j’étais un enfant de neuf ans (je suis né en 1931).

Dans ses publications, datant de septembre 2002, un autre prétendu expert international du même acabit nommé Kivin Coogan, et que les milieux du renseignement ont coutume de consulter, a écrit ce qui suit :
« À cet égard, Labévière cite également des rapports égyptiens selon lesquels Youssef Nada a travaillé pour le renseignement militaire de l’Abwehr allemande, dans les années 1930 et 1940 (nous rappelons au lecteur que, dans son livre, Labévière a écrit 1940, et que Coogan a ajouté une nouvelle fantaisie : 1930 ?). Il convient également de rappeler que Francois Genoud, le banquier nazi suisse, a commencé à développer des contacts dans le monde arabe pour le compte des renseignements allemands dans les années 1930 ».

Le film de Labévière, tout en répétant les fausses histoires de Guido Olimpio dans le Corriere della Sera, ajoutait des images sans aucun rapport, de Louxor, d’Afghanistan, de Ben Laden, et autres.

Madame Carla Del Ponte et le Dr. Urs Von Daeniken

Madame Carla Del Ponte, la Procureure fédérale Suisse à cette époque, et le Dr. Urs Von Daeniken, chef de la sécurité au sein de la Police fédérale suisse, ont tous deux été interrogés dans le film documentaire [de Richard Labévière] où il leur est demandé pourquoi ils ne veulent pas ouvrir un dossier pour enquêter sur les faits qu’il relate au sujet de Nada et d’Al Taqwa. La réponse qu’ils donnent dans le film est que les éléments présentés par ses auteurs ne contiennent aucune substance concrète ou preuve permettant l’ouverture d’une procédure d’enquête.

Quand j’ai vu le film j’ai appelé à la fois les bureaux de Madame Del Ponte et du Dr. Von Daeniken, le 26 mai 1998, pour demander une rencontre.

Une semaine après, le 02.06.1998, j’ai reçu de leur part un fax fixant un rendez-vous. (…)

Le résultat de cette rencontre a été que, pour eux, le film n’avait aucun sens ; si cela avait été crédible un dossier d’enquête aurait dû être ouvert ; c’est également ce que Mme Del Ponte disait dans le film. En même temps, le Dr. Von Daeniken est venu droit vers moi et m’a dit : « à part le film, j’ai des questions concernant deux transactions qui nous ont été signalées ». Je l’ai assuré que j’étais très confiant dans le fait que nos transactions ne pouvaient pas toucher ou venir de sources douteuses et que nous étions prêts à donner des réponses ou des clarifications concernant tout document relatif à toute transaction n’importe où dans le monde. Il m’a répondu que ses collaborateurs spécialisés se mettraient en contact avec moi.

Quelques semaines après, ses assistants, M. Christian Duc et M. Serge Bacci m’ont appelé pour prendre rendez-vous et sont venus à mon bureau. Les prétendues transactions au sujet desquelles ils avaient reçu des informations étaient fausses ; elles n’avaient jamais eu lieu et ne pouvaient pas avoir eu lieu ; je leur en ai expliqué la raison et j’ai répondu à leurs questions concernant notre histoire et nos activités. Nous avons compris que tout était en ordre et que, de leur côté, ils n’avaient rien à redire. Nous avons apprécié leur comportement respectueux et professionnel.

LA TROISIÈME VAGUE

Comme on pouvait s’y attendre, les calomnies contenues dans l’article du Corriere della Sera et le film de Labévière commencèrent à se développer et à produire leurs fruits empoisonnés.

Le 9 décembre 1999, je suis arrivé à l’aéroport d’Atlanta, en provenance de Zurich, en transit pour Nassau aux Bahamas. Les services d’immigration étatsuniens m’ont stoppé, m’ont empêché d’embarquer dans mon vol pour Nassau et m’ont renvoyé à Zurich par le vol retour de Swissair.

Lorsque je leur en ai demandé la raison, ils m’ont répondu : « Contactez le plus proche consulat des États-Unis et demandez-leur ». En examinant mon passeport italien, je me suis aperçu qu’ils y avaient inscrit un numéro de code ; ce code était 217.4’6’A7811 5412 ATC 212 ‘0’.

Le 15 décembre 1999, j’ai appelé le consul des États-Unis à Milan et je suis allé le voir. Quand il a vu le passeport, il m’a dit : « Vous devez ouvrir un dossier. Pour ouvrir un dossier vous devez demander un visa, apporter tout ce qui a été écrit sur vous dans les médias, le traduire en anglais, et apporter également tous vos documents bancaires, actions, obligations, correspondants, et les traduire en anglais. Apportez aussi l’inscription de votre entreprise. »
En fait, je me suis mis à rire et n’ai pu m’empêcher de lui demander : « Vous êtes sérieux ? Vous voulez que je vous amène cinq ou six camions ? Je ne veux pas aller aux États-Unis, tout ce que je veux, c’est laver mon nom de tout soupçon. Je ne connais pas la raison de ce qui s’est passé. Ce pourrait être une erreur ou une fausse information. » Néanmoins j’ai fait la demande de visa comme il l’avait indiqué.

Quatre mois plus tard, le 27 avril 2000, j’ai reçu une lettre disant qu’ils m’avaient trouvé « inéligible en vertu de l’article 212’a’’3’’b’ qui stipule notamment que tout étranger qui s’est engagé dans des activités terroristes ou qui est un représentant ou un membre d’une organisation terroriste étrangère est inadmissible. Les allégations du journal italien selon lesquelles vous étiez le financement d’organisations terroristes pourraient être la base d’un refus en vertu de l’article 212’a’’3’’b’ ; vous pouvez engager un avocat aux États-Unis et traiter directement avec l’INS. »

Je suis retourné voir le consul. Il était très détendu et m’a dit « Vous devez demander un nouveau visa de catégorie I. C’est la procédure officielle. Si vous ne l’acceptez pas, je ne peux pas vous aider. »
Je l’ai quitté puis lui ai envoyé une lettre relative aux documents juridiques ; j’ai également envoyé une autre lettre à l’Immigration and Naturalization Service (IMS) à Atlanta, disant : « Ma principale préoccupation n’est pas de voyager aux États-Unis ou dans n’importe quel autre pays ; c’est uniquement que mon nom soit lavé de tout soupçon. Je suis prêt à me soumettre à toute enquête, qu’elle soit formelle ou informelle, pour répondre à toute question pouvant conduire à ce que mon nom soit réhabilité. »

Deux mois plus tard, le 23 juin 2000, j’ai reçu leur réponse disant que ce qui s’était passé [le refoulement du 9 décembre 1999 à l’aéroport d’Atlanta. Ntd] découlait des instructions du siège, à Washington D.C. et que ma lettre avait été transmise à leur bureau.

Trois mois plus tard, le 29 septembre 2000, n’ayant reçu aucune réponse du bureau en question, je leur ai adressé une nouvelle lettre demandant une réponse.

Sept mois plus tard, le 8 février 2001, j’ai reçu une réponse disant : « Vous nous avez demandé de vous conseiller sur la personne à contacter pour discuter de votre cas. La personne appropriée serait le consul américain dans votre pays de résidence. Nous vous remercions d’avoir porté cette question à notre attention et de nous donner l’occasion de répondre à vos préoccupations. »

Le 30 mars 2001, j’ai contacté à nouveau le consul des États-Unis à Milan en lui donnant copie de ma correspondance avec le Département de la justice. Il m’a répondu (sur un petit Post-it jaune 3M) : « Aucune autre mesure ne peut être prise dans votre cas tant que vous n’avez pas fait une nouvelle demande de visa. »

Le 22 mai 2001, j’ai fait une nouvelle demande de visa en suivant son conseil.

Le 13 juin 2001, je lui ai envoyé un fax pour tenter d’obtenir un rendez-vous, vu qu’il n’avait pas répondu à ma lettre et à ma demande de visa et que je n’arrivais pas à le joindre par téléphone ; je n’ai reçu aucune réponse.

J’ai donc cherché pendant un an et demi, de décembre 1999 à juin 2001, à obtenir une réponse, mais en vain. Alors j’ai décidé d’attendre leur réponse.

LA DATE NOIRE DU 11 SEPTEMBRE 2001

Nous [associés faussement au financement du terrorisme avant ces attentats, ndt] avons dûment condamné l’acte barbare et inhumain que nous considérons comme contraire à toute civilisation et toute religion ; nous avons publié dans les journaux nos condoléances aux familles des victimes. Copie de ce communiqué de presse a été envoyé aux consulats des Etats-Unis à Milan et à Berne.

Les noms des pirates de l’air ont été distribués à toutes les banques du monde entier avec des instructions précises pour que tout compte ou opération, concernant ou lié à chacun d’entre eux, soit signalé.

Le 20 septembre 2001, nous avons vérifié tous nos dossiers et n’y avons trouvé aucun de ces noms là. (…). Nous avons suivi et respecté les instructions et fait le rapport requis, y compris tous les documents s’y rapportant, et les avons remis à la Banque centrale des Bahamas. La Banque centrale les a transmis au Procureur général des Bahamas qui les a envoyés aux États-Unis.

Le 29 octobre 2001, le Consulat des États-Unis à Rome m’a appelé et m’a dit : « Le 27 avril 2000 vous avez envoyé une lettre à Washington disant que vous vouliez que votre nom soit lavé de tout soupçon. Quelqu’un vous appellera demain de Washington, seriez-vous disponible, à 8h30 heure de Washington, 14h30 heure suisse ? » J’ai répondu positivement.

Le lendemain, M. John Cosenza du FBI m’a appelé et m’a dit qu’il allait prendre le jour suivant un vol pour Milan et qu’il me demandait de le rencontrer au consulat. Je suis arrivé au consulat à l’heure précise ; il y avait une longue file d’attente à l’entrée. J’ai demandé au garde de les informer que j’étais arrivé, par le biais de l’interphone. La réponse fut : « OK, s’il vous plaît, restez dans la file d’attente ». Je leur ai demandé de leur dire : « Nada ne reste pas dans la file des mendiants », et je suis parti.

Lorsque je suis arrivé chez moi, j’ai appris que le Consulat des États-Unis m’avait appelé quatre fois. Ils m’ont à nouveau appelé, et se sont excusés en me disant qu’ils m’attendraient en bas. J’ai pris avec moi une copie du fichier que j’avais donné à la Banque centrale et la leur ai remise. Je leur ai raconté ma conversation avec le consul et que celui-ci me demandait de lui apporter des documents qui auraient rempli plusieurs camions ; je leur ai dit que, comme ce monsieur ne connaissait guère plus en matière de finance que son salaire, le contrat de location de sa maison, sa nourriture, ses habits et ceux de sa femme, comment aurait-il pu comprendre quelque chose aux documents financiers d’une banque ? Et comment aurais-je pu les lui amener ?

Ils m’ont posé des questions, au sujet de ce qui avait paru dans le Corriere della Sera, à mon sujet et au sujet de la Banque Al Taqwa, au sujet du Centre islamique de Milan, de Ahmed Idris Nasreddin [16], ainsi qu’au sujet de ma famille et de mon activité, aussi bien comme homme politique que comme banquier. Ils étaient deux : John Cosenza et Linda Viti ; j’ai compris que c’étaient des agents basés à Rome. Quatre ans plus tard, j’ai pu lire leur rapport et j’ai découvert qu’ils avaient fait de leur mieux pour reproduire l’entretien honnêtement, mais qu’ils avaient mélangé certains noms et certains faits.

Le 5 novembre 2001, M. Hosenball, de News Week, m’a appelé pour me poser de nombreuses questions au sujet de Nasreddin et de la Mosquée de Milan, ainsi qu’au sujet de notre avocat dont il m’a demandé le numéro de téléphone. Il a appelé notre avocat et l’a informé de sa conversation avec moi. Mais ce qu’il lui a rapporté n’était pas exact, il donnait d’autres significations à notre conversation et embrouillait les choses. Lorsque l’avocat m’en a informé, je lui demandé d’envoyer officiellement à M. Hosenball le contenu correct de la conversation et de tenir ce dernier pour responsable s’il y apportait le moindre changement. Le lendemain, j’ai appelé M. John Cosenza et je l’ai informé de cette conversation.

Le 5 novembre 2001, Nasreddin est arrivé du Maroc ; j’ai accompagné son fils pour aller l’accueillir à l’aéroport de Milan. À Chiasso, sur notre route en direction de Lugano, la Police suisse des frontières nous a arrêtés, nous a enfermés dans un garage avec la voiture, et a inspecté celle-ci complètement. Cela a duré deux heures ; lorsque je suis arrivé chez moi, j’ai téléphoné à mon avocat, et pris rendez-vous avec lui pour le lendemain matin. »

On peut lire d’autres parties du récit de Youssef Nada sur son site, où il raconte par exemple, comment les choses se sont précipitées de façon dramatique pour lui et ses associés, un fatidique 7 novembre 2001, lorsque des dizaines de policiers ont fait irruption à son domicile alors que son épouse dormait, ainsi qu’à celui de son associé Himmat et dans ses bureaux à Lugano, pour mener une perquisition, sous la direction de Claude Nicati, Substitut du Procureur fédéral suisse, qui lui signifiait sans ménagement qu’il « était accusé d’utiliser sa société Al Takwa Mamagement et sa Bank Al Taqwa pour financer une organisation terroriste. » [17]

Le soir même, le président George W. Bush en personne apparaissait à la télévision pour accuser M. Nada, ses associés et sa banque de soutien au terrorisme et déclarer « Nous allons les affamer ».

Les médias se sont déchaînés contre lui. C’était le début de huit années cauchemardesques au cours desquelles, comme le dit M. Nada : « Les vandales sont réapparus. Les vieilles histoires et les mensonges ont été répétés dans les médias. (…). L’article du Corriere della Sera de Guido Olimpio ainsi que le film de Labévière ont recommencé à circuler avec de nouvelles inventions et fabrications. »

Quelques leçons à tirer

La plupart des gens l’ignorent, des journalistes, des responsables de rédactions travaillant dans les médias traditionnels ne sont pas forcément neutres : ils se font souvent l’écho de nouvelles biaisées qui participent activement à la guerre de propagande de certains États en guerre et contribuent à justifier l’inacceptable ; ou, pour les mêmes motifs, taisent délibérément certains évènements [18].

Les gens ignorent également que, malheureusement, les nouveaux médias ne sont pas épargnés non plus par les manipulations étatiques [19]. Des blogs et des sites, qu’ils croient honnêtes, militants, radicaux, sont la création d’agents de renseignement qui, par le biais des forums notamment, cherchent à infiltrer les milieux dissidents, à mesurer l’impact des articles que ces derniers diffusent, à soulever des faux débats entre faux messagers, pour ensuite ameuter les décideurs politiques sur l’ampleur de la menace « antisémite » par exemple, et, last but not least, à identifier les « islamistes » qui tombent dans leurs provocations.

En 1990, Israël et les États-Unis ont parfaitement réussi à entraîner l’Organisation des Nations Unies dans la guerre du Golfe qui opposa l’Irak à une coalition de 34 États. Cette guerre qui devait, selon leurs dires, apporter la « paix en Palestine » et « un nouvel ordre mondial » n’a apporté ni l’un ni l’autre. Au contraire, elle a été le point de départ de guerres toujours plus meurtrières, et toujours en cours. Des pays entiers ont été détruits, démembrés, contaminés pour des millénaires par des bombes à l’uranium appauvri. Des peuples, ont été jetés dans la misère, la faim et dans la peur des cancers en grande augmentation. Ils ne comprennent pas que cette barbarie puisse continuer de s’abattre sur eux, sans soulever, au niveau mondial, la vague d’indignation qui pourrait permettre de l’arrêter.

Comment notre monde dit « civilisé » en est-il arrivé à ce degré d’inhumanité ?

Le journaliste britannique John Laughland [20] apporte des éléments de réponse à cette lancinante question. Il a brillamment analysé les techniques de désinformation utilisées pour conditionner l’opinion en vue d’atteindre des objectifs politiques [21]. Il se réfère notamment à l’ouvrage de Serge Tchakhotine « Le viol des foules par la propagande politique » [22], pour nous rappeler ceci : « … le rôle des journalistes et des médias est fondamental pour s’assurer que la propagande est constante (…) la propagande ne saurait s’interrompre (…) une des règles fondamentales de la désinformation moderne est que le message doit être répété très souvent (…) les campagnes de propagande doivent être dirigées de manière centralisée et très organisée… ».

Laughland se fonde également sur les affirmations du journaliste à Sky TV, Tim Marshall, pour illustrer les liens pervers tissés entre journalistes et membres des services secrets. Il cite comme exemple les évènements qui ont conduit à la chute de Milosevic, où Tim Marshall « se vante de ses nombreux contacts avec les services secrets, en particulier ceux de Grande-Bretagne et des États-Unis (…) Un des thèmes qui traversent son livre [23] sans qu’il le veuille, est que la frontière entre les journalistes et les barbouzes est ténue. Au début du livre, Marshall parle en passant des « liens inévitables entre les agents, les journalistes et les politiques », disant qu’ils « travaillent tous dans le même domaine ». Il continue sur le ton de la plaisanterie en disant que c’est une « association de barbouzes, de journaleux et de politicards, plus le peuple », qui a causé la chute de Milosevic. Il adhère au mythe de la participation du « peuple » mais le reste de son livre montre qu’en réalité le renversement du président yougoslave n’a pu avoir lieu que grâce à des stratégies politiques conçues à Londres et à Washington. »

Soyons clairs : certes, les États de droit ont besoin de services de renseignements pour assurer leur sécurité, mais les citoyens n’ont pas à accepter que ces États les trompent, par la fabrication de fausses informations. Il est de ce fait inacceptable que des journalistes entrent dans ce jeu.

[1] Voir :
 « L’incroyable histoire de Youssef Nada », par Silvia Cattori, Mondialisation, 13 juin 2008.
 « Islam : L’ennemi fabriqué », par Silvia Cattori, Mondialisation, 16 novembre 2008.

[2] Voir : « Nous avons toujours cru en l’innocence de Youssef Nada », par Silvia Cattori, silviacattori.net, 24 septembre 2009.

[3] Voir : « Hamas perde meta’ del tesoro », par Guido Olimpio, Corriere della Sera, 20 octobre 1997.

[4] Quotidien suisse italien Corriere del Ticino du 25 septembre 2009. Sans la dénonciation par Dick Marty, de ces listes noires illégales, qui a contribué à médiatiser le sort de M. Nada, celui-ci serait peut-être encore sur cette liste, associé au « terrorisme » fabriqué, comme tant d’autres plus malchanceux que lui.

[5] Voir la vidéo en trois parties intitulée : « Criminal State : A Closer Look at Israel’s Role in Terrorism », par Jeff Gates.

[6] Le 23 septembre 2009, a été retiré de la liste le nom de Youssef Nada et, le 22 octobre 2009 les noms de sa BANK AL TAQWA et de AL TAKWA MANAGEMENT. Les noms de ses deux associés avaient été retirés précédemment : celui de Ali Ghaleb Himmatt le 10 août 2009, et celui d’Albert Huber (décédé en mai 2008) le 12 août 2008. Voir : http://www.un.org/sc/committees/1267/docs/De-listed.htm.

En revanche, les noms de ses autres sociétés, BA TAQWA FOR COMMERCE AND REAL ESTATE COMPANY LIMITED ; NADA INTERNATIONAL ANSTALT ; WALDENBERG AG ; YOUSSEF M. NADA & CO. GESELLSCHAFT M.B.H, figurent encore sur la liste à l’heure où nous écrivons (voir : http://www.un.org/sc/committees/1267/consolidatedlist.htm).

[7] Voir : http://www.youssefnada.ch/

[8] Extraits traduits de l’anglais par JPH.

[9] Guido Olimpio, correspondant du « Corriere della Sera ». En 1996, Guido Olimpio avait témoigné à Washington, auprès de la « Task force » sur le terrorisme et les armes non conventionnelles. Présenté comme « expert en terrorisme international », M. Olimpio couvre les affaires du Moyen Orient depuis les années 80. De 1999 à l’été 2003, il était chef correspondant pour le Corriere della Sera en Israël.

Il a publié divers recueils de ses articles qui ont fait tant de mal au monde musulman, dont « La rete del terrore. Come nascono e agiscono i militanti delle Guerre Sante », Sperling & Kupfer, 2002.

Ses prétendues révélations ont aussi contribué au malheur de Kassim Brittel. Cet Italien d’origine marocaine, victime d’« extraordinary rendition », (consignes spéciales basées sur le kidnapping et le transfert par la CIA dans des lieux secrets), voyageait au Pakistan quand, le 10 mars 2002, il a été enlevé par les Services de renseignement pakistanais. Torturé, puis « vendu » aux officiers du FBI et de la CIA, enfin livré aux Services secrets marocains, il est toujours emprisonné au Maroc, alors même que son innocence a été démontrée, et malgré la pressante invitation au gouvernement italien, contenue dans la Résolution du Parlement européen sur les « vols secrets de la CIA », pour que l’Italie « fasse des pas concrets pour sa libération ».
Son épouse nous avait confié : « Déjà en 2001, quatre mois avant que mon mari ne soit enlevé illégalement et remis à des agents de la CIA au Pakistan, Guido Olimpio avait écrit un article dans lequel il le présentait comme un dangereux terroriste. »
Pour plus de détails, voir : « Islam : L’ennemi fabriqué », par Silvia Cattori, Mondialisation, 16 novembre 2008.

[10] Chef du service de politique internationale à RFI de 1999 à 2008, Richard Labévière a poursuivi ses enquêtes sur les Frères musulmans et le terrorisme islamique. On peut lire ses articles et les interviews qu’il a données à ce sujet, sur les moteurs de recherche. Compte tenu des fausses informations qu’il a propagées sur Youssef Nada, et sur le mouvement des Frères musulmans – le Hamas est le mouvement de résistance contre l’occupant qui a évité jusqu’ici la liquidation de la cause palestinienne – il est troublant de lire aujourd’hui sous sa plume des articles où il apparaît comme un défenseur de la cause palestinienne.

[11] Voir : « Daniel Pipes, expert de la haine », Réseau Voltaire, 5 mai 2004.

[12] Auteur de « La conquête de l’Occident », Sylvain Besson, journaliste au quotidien genevois Le Temps, s’est-il laissé prendre dans cette folle spirale de la menace exagérée, voir fabriquée ? Toujours est-il que, dans son incroyable essai, il affirme de manière fantaisiste que, parmi les documents séquestrés chez Nada, il y avait un plan de conquête de l’Occident par les Frères musulmans. Exactement ce que les services de propagande israéliens et leurs associés cherchaient à faire croire !

[13] Auteur de « Al Qaeda in Europe : The New Battleground of International Jihad ». Les écrits de Lorenzo Vidino, consacrés à l’Islam politique et au terrorisme en Europe ont participé à la fabrication de l’ennemi musulman. Vidino a témoigné auprès de l’United States House of Representatives sur l’extrémisme islamique en Europe.

[14] La TSR a diffusé, le 14 mai 1998, un documentaire fait d’amalgames et d’approximations, réalisé par Richard Labévière, en lien avec l’attaque terroriste barbare qui avait eu lieu le 17 novembre 1997 à Louxor, et au cours de laquelle de nombreux touristes suisses avaient été tués.

[15] « Les Dollars De La Terreur – Les Etats-Unis et Les Islamistes », Grasset & Fasquelle, 1999.
Richard Labévière a également publié ultérieurement, et dans la même veine, « Les coulisses de la terreur », Grasset, 2003.

[16] Responsable avec Youssef Nada de la banque suisse Al-Taqwa son nom aussi a été abusivement mis sur la liste des organisations suspectées de liens avec Al-Qaida.

[17] Voir (en anglais) le compte rendu de cette journée fait par M. Nada sur son site : http://www.youssefnada.ch/7%20NOVEMBER%202001.asp

[18] Voir : « Une répression passée sous silence », par Seumas Milne, Réseau Voltaire, 10 janvier 2010.

[19] Voir par exemple : « Israël déploie une équipe de cybernautes pour diffuser de la désinformation positive », par Jonathan Cook, info-palestine.net, 25 juillet 2009.

[20] John Laughland a été administrateur du British Helsinki Human Rights Group, association étudiant la démocratie et le respect des Droits de l’homme dans les anciens pays communistes, et membre de Sanders Research Associates. Il est aujourd’hui directeur de recherches à l’Institut pour la Démocratie et la Coopération.

[21] Voir : « La technique du coup d’État coloré », par John Laughland, Réseau Voltaire, 4 janvier 2010.

[22] Le viol des foules par la propagande politique, par Serge Tchakhotine, Gallimard, réédition en poche 1992.

[23] Shadowplay, par Tim Marshall, Beograd : Samizdat B92, 2003.

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