Les océans pour la survie de l’humanité (première partie)

Photo: SOS à propos de l’acidification de l’océan Arctique. Source: http://www.lejdd.fr/Ecologie/Pollution/Images/Septembre-2009/alaska-acidification-des-oceans-131765
Avec l’ère industrielle et celle de la consommation de masse les océans et les mers sont devenus le passage obligé d’une quantité énorme de produits et, dans le contexte d’un marché mondial de plus en plus intégré, plus de 100 000 navires assurent le transport des marchandises. Près de trois milliards de personnes dépendent des zones marines et côtières pour assurer leur subsistance, notamment pour la pêche, le tourisme, le commerce, le transport et l’énergie. Ainsi, la surface des océans et des mers et de leur bordure est le théâtre d’un nombre croissant d’activités dont plusieurs leur infligent d’énormes préjudices. L’agriculture affecte les eaux marines par le rejet des engrais. D’autres matières résiduelles non traitées dans les zones densément peuplées dégradent l’environnement des baies fermées, des estuaires et des littoraux. Les activités touristiques ont un impact souvent destructeur sur les plaines littorales et les habitats côtiers.
Le premier bilan mondial de l’état de santé des océans dressé par E. D. Golberg en 1976 relevait des problèmes majeurs de pollution dans les zones côtières. Plus tard, en 1992, dans les cadres du Forum Global de Rio, le chapitre 17 de l’Agenda 21 faisait de nouveau un diagnostic d’ensemble alarmant tout en proposant un plan d’action global. Puis, les analyses de GEO-3, de GEO-4, du rapport publié en juin 2011 par l’IPSO (International programme on the state of the oceans), les constats de Rio+20 ainsi que de GEO-5 ont exposé les menaces qui pèsent sur l’environnement marin et les grands enjeux entourant le processus de restauration des habitats, la conservation de la biodiversité marine ainsi que la stratégie globale devant être appliquée d’urgence en vue d’améliorer l’ensemble du milieu marin.
Dans la première partie de cet article nous présentons un bilan succinct de l’état de santé des océans, les principales formes de dégradation et de destruction des écosystèmes et les efforts consentis dans le processus de création et de gestion des aires marines protégées. Pour illustrer ces éléments nous avons choisi de présenter, dans la deuxième partie, trois expériences dans lesquelles le concept de la conservation et de l’utilisation durable des ressources a présidé depuis plusieurs années au développement des activités économiques: La réserve marine des îles Galápagos en Équateur, le parc national marin de la Grande Barrière de Corail en Australie et la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio située au sud de la Corse.
I. Grandeur et immensité
Les océans occupent plus de 70% de la surface terrestre (figure 1). On pourrait dire que vus du ciel les continents baignent dans leurs eaux. C’est la Planète océan selon l’expression consacrée (https://www.youtube.com/watch?v=QWn6ttf9NRg).
Figure 1. Les océans
Source: http://commons.wikimedia.org/wiki/File:World_ocean_map-fr.gif?uselang=fr
Les océans sont interconnectés les uns avec les autres. Cependant, on en distingue quatre : Le Pacifique, l’Atlantique, l’Indien et l’Arctique. À partir du début du siècle l’Organisation hydrographique internationale reconnaît un cinquième qui correspond aux eaux qui entourent le continent Antarctique jusqu’au 60èmedegré de latitude. Leur bathymétrie montre un profil composé de quatre zones : La plateforme continentale, le talus, les grands bassins et les fosses abyssales. C’est sur les plateformes continentales et les littoraux (environ 10% des surfaces océaniques) ou s’exercent la presque totalité des activités économiques et c’est sur cette zone ou se développe l’essentiel de la vie marine : « Ces eaux côtières sont les sites d’une production élevée de matières organiques et de la photosynthèse des plantes qui forment la base de la chaîne alimentaire qui se termine dans les poissons, les oiseaux et les mammifères marins » (Golberg, 1976, p. 17) Il importe d’ajouter les zones de «upwellings» (remontées d’eaux profondes côtières) où la productivité est élevée comme celles, notamment, du Pérou, de la Californie et des côtes occidentales du continent africain. Ces zones ne couvrant que 0,1% des aires océaniques produisent 50% de la production halieutique (Golberg, 1976, p. 17).
L’océan Pacifique occupe une surface immense de 165 250 000 de kilomètres carrés. Sa profondeur moyenne est de 4028 mètres et la fosse la plus profonde qui le borde dans la partie nord-ouest est celle des Mariannes d’une profondeur de 10 994 mètres (figure 2) (wikipedia.org). L’océan arctique est le moins étendu avec une superficie de 5 400 000 kilomètres carrés, une profondeur moyenne de 1 205 mètres et sa cote la plus profonde correspond au bassin Eurasia qui atteindrait la profondeur de près de 6 000 m (Source : enchantedlearning.com).
Figure 2. L’océan Pacifique avec fonds marins
Source : http://www.geodus.com/fr/carte-ocean-pacifique-ng_0-7922-9803-9.htm
«L’Océan mondial génère plus de 60% des services écosystémiques qui nous permettent de vivre, à commencer par la production de la majeure partie de l’oxygène que nous respirons (wikipedia.org).
II. Un état de santé très précaire et inquiétant
L’on sait très bien que les océans et surtout les zones côtières, les estuaires et les mers fermées subissant une grande pression de la part des utilisateurs montrent un environnement fort dégradé. Ce qu’on connaît moins c’est l’ampleur de cette dégradation. La mort des coraux, La perte d’habitats, la diminution des stocks de poissons, la multiplication ainsi que l’expansion des zones mortes sont des symptômes de cet état critique dans lequel se retrouvent les habitats de l’environnement marin.
LES BILANS SUR L’ÉTAT DE SANTÉ DES OCÉANS
Nous ne faisons qu’évoquer, ici, les principaux enjeux définis dans le cadre des bilans dressés sur l’état de l’environnement mondial par les Nations Unies.
L’état de l’environnement mondial – 1982 – La pollution côtière nuit aux ressources halieutiques et réduit les attraits touristiques.
Les grands constats de ce premier rapport des Nations Unies sur l’état de santé de l’environnement mondial concernant les océans se résument ainsi : «Il n’y a aucun danger imminent pour la haute mer, mais la pollution croissante des estuaires et des zones côtières a nui à leurs ressources halieutiques et a réduit leurs attraits touristiques. Les océans de l’hémisphère austral ont un potentiel économique précieux, mais il faut encore mettre au point des systèmes écologiquement sains pour en gérer les ressources» (PNUE, 1982, p. 67).
GEO-3. La dégradation du milieu marin se poursuit et même s’intensifie – 2002
Le rapport GEO-3 publié en 2002 conclut que «de façon générale au cours des 30 dernières années, la protection du milieu marin et du milieu côtier n’a progressé que dans quelques pays, surtout industrialisés, et au sujet de quelques questions d’environnement seulement. Dans l’ensemble, la dégradation du milieu côtier et du milieu marin non seulement se poursuit, mais s’est même intensifiée. Les principales menaces pesant sur l’océan qui étaient reconnues en 1972 – pollution marine, surexploitation des ressources biologiques de la mer et perte des habitats côtiers – existent toujours, en dépit d’une action nationale et internationale menée pour résoudre ces problèmes» (PNUE. GEO-3, p. 180).
Le rapport synthèse du Millénaire sur l’évaluation des écosystèmes – Les menaces se font de plus en plus fortes, 2005
«L’activité humaine engendre maintenant plus de produits azotés que tous les processus naturels réunis, et plus de la moitié de tout l’azote industriel a été produit et utilisé depuis 20 ans. Le résultat : l’apport d’azote dans les océans a doublé depuis 1860. Par ailleurs, depuis 1980, 35% des mangroves ont disparu, 20% des récifs coralliens ont été détruits et une autre tranche de 30% est menacée. La surexploitation des ressources marines fait en sorte que les humains grugent désormais le capital plutôt que les intérêts annuels du quart de tous les stocks de poissons. Néanmoins, les volumes de prises continuent d’augmenter en raison de l’évolution des techniques utilisées, ce qui accentue le déclin d’espèces autrefois abondantes comme la morue» (unep.org).
GEO-4 – 2007 – La planète est dans un état critique. L’espèce humaine est menacée.
Selon le communiqué de presse mondial délivré à l’occasion du lancement du rapport, les problèmes plus graves de la planète persistent, notamment le changement climatique, le taux d’extinction des espèces et le défi consistant à alimenter une population croissante. Ces menaces « figurent parmi les nombreux problèmes qui n’ont pas été résolus et qui mettent l’humanité en danger » (unep.org/documents).
Le rapport souligne le fait que les stocks de poisson sont à la baisse. «La consommation a plus que triplé entre 1961 et 2001. Les prises ont stagné ou légèrement décliné depuis les années 1980. Les subventions ont créé des capacités de pêche excessives, selon les estimations supérieures de 250% à la capacité nécessaire pour capturer la production durable des océans (unep.org / Documents)».
Le rapport du Programme international sur l’état des océans (IPSO)- 2011. Le danger d’asphyxie des océans est appréhendé
Selon le PNUE, « Des millions de déchets plastiques et les rejets de phosphores venant des engrais agricoles menacent les océans d’asphyxie. Le cas des phosphores et des plastiques marins mettent clairement en évidence le besoin urgent (…) d’effectuer une transition mondiale vers une économie verte plus efficace en terme de ressources afin de réaliser un développement durable et s’attaquer à la pauvreté». Le rapport souligne la nécessité d’une surveillance accrue de ces phénomènes (lapresse.ca).
GEO-5- 2012 – Les signes de dégradation persistent
Source : http://www.unep.org/geo/geo5.asp
Selon GEO-5, «Malgré les accords mondiaux, les signes de dégradation persistent. Ainsi, le nombre des zones côtières eutrophiques a augmenté considérablement depuis 1990 – au moins 415 zones côtières ont connu une grave eutrophisation et 13 d’entre elles seulement sont en train de se rétablir. Le nombre des poussées signalées d’intoxication paralytique par fruits de mer (IPFM), dues par exemple à la toxine produite par des efflorescences algales dans des eaux eutrophiques, est passé de moins 20 en 1970 à plus de 100 en 2009. Dans les 12 mers étudiées entre 2005 et 2007, c’étaient les côtes de la mer d’Asie de l’Est, du Pacifique Nord, du Pacifique Sud-Est et de la mer des Caraïbes qui étaient les plus touchées par les détritus marins, et celles de la Caspienne, là Il n’en reste pas moins que les pertes substantielles continues d’espèces contribuent à la détérioration des écosystèmes. Dans certains taxons, jusqu’à deux tiers des espèces sont menacées d’extinction; les populations d’espèces déclinent et, depuis 1970, les populations de vertébrés ont régressé de 30 %.., tandis que la conversion et la dégradation ont réduit de 20 % certains habitats naturels. Les changements climatiques auront des impacts profonds sur la biodiversité, notamment en association avec d’autres menaces» (GEO5).
Rio+20 – Des pressions humaines croissantes – 2012
Selon les Nations Unies, «la négligence, l’acidification, les changements climatiques, la pollution et l’exploitation excessive ont un impact dévastateur. Les océans, qui recouvrent plus de 70 % de la surface terrestre, sont l’un des écosystèmes les plus menacés.
Un fort pourcentage (85 %) des stocks mondiaux de poissons est soumis à une forte pression par la surpêche. Les espèces aquatiques envahissantes continuent de se répandre. Les zones mortes, des zones océaniques dépourvues d’oxygène, se multiplient. Les récifs coralliens agonisent. Des habitats côtiers disparaissent ou se dégradent, entraînant une perte de biodiversité marine. La pollution des bassins versants et des océans causée notamment par les déversements accidentels de pétrole et d’eau rendue radioactive à la suite d’accidents nucléaires entraîne d’autres problèmes» (un.org).
LES SYMPTÔMES D’UN ÉTAT DE SANTÉ TRÈS PRÉCAIRE ET MÊME ALARMANT
Nous avons retenu six éléments qui indiquent jusqu’à quel point les environnements marins et côtiers sont affectés par les activités humaines : La destruction des coraux, la perte d’habitats, la pollution marine, la multiplication et l’expansion des zones mortes, la surexploitation des stocks de poissons et la formation et l’expansion d’immenses plaques de déchets.
La destruction des coraux
Selon le bilan dressé en 2004 «on estime que 20% des récifs du monde ont été détruits et qu’ils ne montrent aucun signe de récupération. Les rapports permettent d’indiquer que 24% des récifs dans le monde sont actuellement en grave danger de destruction sous les impacts des activités humaines et que 26% le sont également dans l’avenir».
«Les récifs continuent à se dégrader en raison des pressions humaines croissantes. De mauvaises pratiques culturales dans les bassins versants provoquent une pollution par les sédiments, les nutriments et autres produits toxiques qui atteignent les récifs. La surpêche, et particulièrement les méthodes destructives de pêche, déstabilisent les récifs et diminuent leur productivité. Conjointement aux autres pollutions et dégradations, on assiste à un changement de nature des récifs qui sont alors dominés par les algues au détriment des coraux constructeurs».
«Le blanchiment quasi mondial de 1998 est considéré comme un événement majeur à l’occurrence millénaire. Des prédictions de changement climatique permettent de considérer que de tels événements pourraient être plus fréquents dans les décennies à venir» (SALVAT, Bernard. 2004).
Figure 3. Les récifs en danger dans le monde
Source : http://www.grida.no/graphicslib/detail/threats-to-the-worlds-coral-reefs_3601
«Les plus graves menaces observées qui pèsent sur les récifs coralliens comprennent le tourisme, la surexploitation des stocks de poissons, la sédimentation, les récoltes de coraux, la pêche à la dynamite et la pollution. Le graphique (figure 3) « Menaces majeures aux récifs » indique le pourcentage des récifs qui sont menacées par la surexploitation, l’occupation du littoral, la pollution terrestre et la pollution marine ainsi que le degré auquel ils sont menacés. Le graphique « détruit les récifs coralliens » indique le pourcentage des récifs de corail qui ont été détruits dans les grandes régions du monde» (grida.no).
La perte d’habitats
L’occupation croissante des espaces côtiers se traduit par une accélération continue et rapide de l’utilisation des plaines littorales et des littoraux eux-mêmes et une augmentation des pressions sur les écosystèmes et les espèces qu’ils renferment. Il en résulte une perte d’habitats et de biodiversité. L’élévation du niveau de la mer exerce un impact important sur les habitats côtiers : Des inondations côtières plus étendues, un accroissement de l’érosion côtière, une intrusion d’eau salée dans les aquifères d’eau douce, un amincissement de la couverture glacielle, une hausse des inondations causées par des ondes de tempête, une augmentation des températures à la surface de la mer (rncan.gc.ca).
La pollution marine
Selon les données rapportées par les Nations Unies, «les pollutions d’origine terrestre (comme les pollutions agricoles, le rejet de fertilisants, de pesticides et de déchets non traités y compris les déchets plastiques) représentent environ 80% de la pollution marine à l’échelle mondiale. Dans le monde entier, les habitats marins sont contaminés par des débris d’origine humaine. Les déversements de pétrole restent une source de préoccupation, bien que leur nombre ait diminué de façon constante depuis plusieurs décennies (unesco.org).
La multiplication et l’expansion des zones mortes ou déserts biologiques (figure 4)
«Une zone morte est une zone hypoxique (déficitaire en oxygène dissous) située dans un environnement aquatique (mers, océans, estuaires, grands lacs, mares, etc.). Les études conduites en mer Baltique et aux États-Unis depuis la fin des années 1990 montrent que nombre de poissons, dont on pourrait penser qu’ils puissent facilement les fuir, y perdent rapidement connaissance et meurent asphyxiés. Comme on l’a observé au moyen de films pris par des robots, si dans certains cas, certains poissons semblent pouvoir échapper à la mort, les crustacés tels que homards, langoustes ou crevettes se déplacent trop lentement pour échapper à l’asphyxie. Quant aux moules, huîtres et autres organismes fixés, ils sont condamnés. Les coraux et de très nombreux animaux coloniaux meurent, et leur putréfaction contribue à accentuer le phénomène» (mondialisation.ca).
Figure 4. Localisation des zones mortes
Source : https://www.classzone.com/books/earth_science/terc/content/investigations/es2206/es2206page04.cfm
En 2005, le rapport GEO-3 identifie près de 150 zones mortes dans le monde. Si certaines de ces zones sont de superficie réduite (moins d’un kilomètre carré), d’autres sont devenues très vastes, la plus grande atteignant 70 000 kilomètres carrés selon le PNUE. Le nombre et la taille de ces zones augmentent à chaque décennie au moins depuis les années 1970 et plus particulièrement depuis la fin des années 1990. Celle qui se trouve dans le golfe du Mexique au sud du delta du Mississipi a dépassé en 2010 les 12 000 kilomètres carrés. La taille de cette zone est l’une des plus importantes jamais cartographiées depuis 1985. La »zone morte » du golfe du Mexique est l’une des plus grandes jamais observées (actu-environnement.com).
La surpêche
D’après les données des Nations Unies et de la FAO rapportées par notre-planete.info, «70% de la biomasse marine est surexploitée, au point de ne plus pouvoir se régénérer à temps, résultat : 30% des populations de poissons ne sont plus qu’à 10% de leur niveau « normal », c’est-à-dire s’ils n’avaient pas été pêchés. Mais il y a pire : sur les 9000 à 10 000 tonnes de poissons que nous pêchons par heure, pratiquement la moitié est gaspillée ! (notre-planete.info). Les zones affichant les plus fortes proportions de stocks de poissons pleinement exploités sont situées dans l’Atlantique du Nord-Est, à l’ouest de l’océan Indien et dans le Pacifique du Nord-Ouest.
La dérive d’immenses plaques de déchets
«Appelé le 7e continent de plastique une immense plaque de déchets s’est formée dans le nord de l’océan Pacifique, de la taille d’un tiers de la superficie des États-Unis. Il s’agit d’une multitude de micro-plastiques, d’un diamètre inférieur à 5 mm, en suspension à la surface ou jusqu’à 30 mètres de profondeur. Selon Audrey Garric, «cette pollution, invisible depuis l’espace, se retrouve dans cinq grand bassins océaniques, au sein du Pacifique Nord, mais aussi du Pacifique Sud, de l’Atlantique Nord et Sud et de l’océan Indien (figure 5). Ces zones sont en effet caractérisées par la rencontre de courants marins qui, influencés par la rotation de la Terre, s’enroulent dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère nord, et en sens inverse dans l’hémisphère sud, selon le principe de la force de Coriolis, et forment d’immenses vortex appelés gyres océaniques. La force centripète aspire alors lentement, en plusieurs années, tous les détritus qui flottent sur l’eau vers le centre de la spirale, où ils s’amalgament et d’où ils ne sortent jamais».
«Les déchets qui peuplent les océans proviennent en effet à 80 % des terres, portés par le vent ou les rivières – le reste tombant des navires de commerce. Jusqu’alors, les débris flottants étaient détruits par les micro-organismes, mais cela n’est plus le cas avec l’arrivée des plastiques, essentiellement du polyéthylène, du polypropylène et du PET, qui constituent 90 % des déchets maritimes».
Le déversement des plastiques dans les océans pourrait décupler d’ici à dix ans. On estime que 269 000 tonnes de déchets plastique flottent sur les océans et que leur surface est contaminée à 88 % par du plastique (lemonde.fr).
Figure 5. Localisation approximative des plaques de déchets
Source : http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/05/09/le-7e-continent-de-plastique-ces-tourbillons-de-dechets-dans-les-oceans_1696072_3244.html#bsJWKP5b3K43J8SH.
III. Au secours des océans
Une conscience environnementale qui saisit peu à peu les grands enjeux et passe à l’action
La route a été longue vers une prise de conscience générale des dangers qui menace l’environnement mondial. Des efforts considérables ont été déployés par un très grand nombre d’organisations internationales, par des gouvernements nationaux et par la société civile. Plusieurs conventions ont été ratifiées et appliquées en vue de concrétiser dans l’action les principes de la conservation et de l’utilisation durable des ressources. Les différentes stratégies et, notamment, la stratégie mondiale de la conservation, la stratégie pour l’Avenir de la Vie et celle de la biodiversité, visent à améliorer l’état de la planète et les conditions d’existence des peuples en proposant des moyens d’action. Les conventions internationales telles que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, la Convention-cadre sur les changements climatiques et la Convention pour la diversité biologique constituent les références de base qui guident les actions à entreprendre par les organisations responsables.
Un plaidoyer pour la protection des océans a été présenté dans les cadres de la Conférence sur le développement durable à Rio en juin 2012 par France Nature Environnement. En plus de demander qu’une plus grande protection soit assurée à la haute mer il a été proposé qu’un réseau mondial d’aires marines protégées soit créé.
IV. Le réseau mondial des aires marines protégées
Les aires marines protégées couvrent désormais 2,8% des océans – une superficie plus grande que l’Europe – selon la carte officielle issue de la base de données mondiale sur les aires protégées, gérée par l’UICN et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE).
La carte mondiale des aires océaniques protégées permet, pour la première fois, de géolocaliser facilement les aires marines protégées dans le monde, pour tout public. En outre, elle offre la possibilité de suivre les progrès réalisés pour la protection des océans et d’identifier les zones qui mériteraient d’être incluses.
Figure 6. Localisation des aires océaniques protégées
Source : http://www.notre-planete.info/actualites/3862-carte-oceans-zones-protection
«Elle matérialise ainsi les progrès obtenus ces dernières années grâce à la création de grandes aires marines protégées en mer, en complément des nombreux sites de plus petite taille qui existent dans les eaux côtières de nombreux pays. Ces évolutions sont particulièrement visibles autour des eaux territoriales de l’Australie, de la France et de l’Afrique occidentale. Elle prend en compte les données officielles de WDPA (World Database on Protected Areas) et un certain nombre d’autres données concernant les aires marines protégées (AMP), comme les parcs naturels marins, sur le point d’être désignées».
«Ainsi, la carte montre une augmentation de 0,6% de la superficie des zones protégées depuis 2012».
« »Il est encourageant de constater les progrès que nous avons réalisés jusqu’à présent », a déclaré Carl Gustaf Lundin, Directeur du Programme mondial marin et polaire de l’UICN. « Protéger moins de 3% de l’océan n’est pas encore suffisant pour assurer sa conservation durable. Toutefois, si nous continuons à augmenter cette superficie de un pour cent chaque année, nous devrions être en mesure d’atteindre l’objectif de 10% d’ici 2020. Nous espérons que cette carte va rendre ce processus beaucoup plus efficace »» (unesco.org).
Conclusion
Les activités économiques mondiales exercent une pression de plus en plus forte sur la biosphère. Le système capitaliste dominant est hanté par la croissance qui a pour conséquence de détériorer, de dégrader et de détruire les écosystèmes. Ce processus compromet le renouvellement des fondements de la vie génératrice des ressources pour le bien-être et la survie de toute l’humanité.
Les nombreux bilans sur l’état de santé des océans et des mers qui ont été dressés depuis trente ans ont exposé l’ampleur des dommages causés aux habitats côtiers et marins. Les décharges de matières azotées, la destruction des coraux, la disparition des mangroves, l’augmentation du niveau de la mer, la surexploitation des ressources halieutiques, l’accumulation des déchets et des plastiques et la formation de déserts marins ne peuvent que soulever de grandes inquiétudes et ce à l’échelle mondiale.
Des efforts ont été consentis pour améliorer la performance de la gouvernance environnementale un peu partout dans le monde. De nombreux accords internationaux demandent à tous les gouvernements de s’engager sur la voie de l’utilisation durable des ressources. Plusieurs stratégies globales et programmes d’intervention s’avèrent les guides pour l’action. Des voix se sont fait entendre dans toutes les conférences mondiales pour réclamer des changements profonds à l’intérieur des paradigmes qui président au développement actuel. Les fortes inégalités sociales entraînent avec elles le phénomène du gaspillage des ressources dans les régions les plus riches, lesquelles par surcroît continuent d’effectuer un pillage des ressources des pays pauvres. Devant ce panorama il y a lieu de manifester, en effet, beaucoup d’inquiétudes.
Selon GEO-4 :
«pour certains des problèmes persistants, les dégâts peuvent déjà être irréversibles. Celui-ci avertit que s’attaquer aux causes sous-jacentes des pressions environnementales affecte souvent les intérêts de groupes puissants capables d’influencer les décisions politiques. La seule façon de traiter ces problèmes plus difficiles exige de déplacer l’environnement depuis la périphérie vers le centre du processus de prise de décision : l’environnement pour le développement, et non un développement obtenu au détriment de l’environnement» (unep.org).
RIO+20 a proposé des actions pour atteindre quatre objectifs :
– Réduire les facteurs de stress et restaurer la structure et les fonctions des écosystèmes marins;
– Promouvoir le développement de l’économie bleue-verte;
– Entreprendre des réformes politiques, juridiques et institutionnelles en faveur d’une gouvernance efficace des océans;
– Apporter un appui de la recherche marine, de la surveillance et de l’évaluation du milieu marin, du transfert de technologies et de capacités en vue d’améliorer les connaissances, de répondre aux questions nouvelles et de développer les capacités en faveur d’une exploitation durable des océans (unesco.org).
Enfin, nous croyons, que l’établissement d’un réseau mondial d’aires marines protégées performant est l’expression d’une volonté de modifier substantiellement les paramètres du développement pour une utilisation de l’environnement côtier et marin qui puisse respecter le rythme de vie et le renouvellement des écosystèmes. Ces aires constituent des laboratoires de conscientisation et d’apprentissage pour tous.
Jules Dufour
Pour le Centre de recherche sur la Mondialisation
Deuxième partie :
Les océans pour la survie de l’humanité (deuxième partie)Aires marines protégées des Galápagos, de la Grande Barrière et de Bonifacio, 24 mars 2015
Références
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Jules Dufour, Ph.D., C.Q.: Professeur émérite, géographe, membre de la Commission mondiale des Aires protégées de l’Union Internationale pour la conservation de la nature (UICN), président du Comité de coordination du Parc national marin du Saguenay-Saint-Laurent (2002-2010), membre du Conseil de gestion des ressources fauniques de la région marine d’Eeyou (Baie James et Baie d’Hudson) (2013- ).