Les schismes dans l’Eglise: Prélude à une réconciliation définitive entre les hommes?
Dieu de tous les êtres de tous les temps , tu ne nous as pas donné un cœur pour nous haïr et des mains pour nous égorger (…) Puisses tout les hommes se souvenir qu’ils sont frères !(…) »
Voltaire ( Prière à Dieu)
«Le pape Jean-Paul II, parlant de l’unité de l’Église, aimait rappeler la métaphore du poète et penseur russe Viatcheslav Ivanov sur la nécessité pour la chrétienté de respirer à deux poumons: oriental et occidental.» (2)
L’histoire du christianisme est faite de schismes. Le premier l’avait coupé dit-on, de ses racines juives. Le deuxième eut lieu aux premiers âges de l’Eglise dans cette Eglise d’Afrique dont on dit qu’elle fut apostolique entière et où s’affrontaient deux visions du sacerdoce, celui adossé à l’Empire et au décorum et celui dépouillé qui privilégie le dénuement, la proximité du peuple et l’élection du meilleur pour diriger les fidèles. Ce sera le schisme donatiste.
Le donatisme et l’Eglise un schisme avant le grand schisme
Beaucoup d’écrits existent concernant ce fameux schisme de 1054, mais sait-on qu’il y eut un schisme dès 315? Pour faire court il opposa des religieux berbères de l’Eglise d’Afrique en l’occurrence Augustin et Donat Le donatisme et saint Augustin ou la défense de l’Unité. Sous la plume de l’abbé Le Pivain dont nous soupçonnons le parti pris pour l’Eglise «officielle», nous lisons: «Le donatisme prit naissance en 311/312 à l’occasion de la succession de l’évêque de Carthage, Mensurius. Son successeur, Cecilianus, élu en 309 par le clergé de Carthage, reçut l’imposition des mains de Felix d’Abtungi au lieu de Secundus de Tigisi qui, en tant que primat de la province de Numidie, estimait devoir présider la consécration épiscopale de l’évêque de Carthage. (1) Nous voyons là les premières compromissions de l’Eglise, ce n’est pas le plus méritant qui doit présider à guider les fidèles.
«À cela s’ajoute une évolution dans l’Empire poursuit l’auteur avec l’arrivée de Constantin. Sous son règne, l’Église sortit de la persécution pour devenir progressivement religion d’État. L’attitude romaine face à Cyprien et à Firminin de Césarée de ne pas faire dépendre la valeur du baptême de la dignité du ministre fut reconnue légitime. (…) Les donatistes refusèrent ces mesures et Donat évêque [de Baghaï (Wilaya de Khenchela Algérie), ndR] organisa en Afrique une église parallèle. Un premier édit de persécution de 317 fut cause de grandes violences contre les donatistes. Il fut suivi d’un édit de tolérance en 321 qui permit leur développement sous l’impulsion de Donat (évêque de 313 à 350) et de Parménien son successeur (362-393). L’année 393 constitue un tournant pour le donatisme. D’une part, leurs extrémistes n’hésitent pas à user de violence (…) Optat de Timgad qui faisait régner la terreur avec les circoncellions fut mis à mort en 398. (..;)» (1)
Nous voyons là encore, le parti pris de l’auteur qui accuse les donatistes – cette église des pauvres et des sans-grade de s’être ligués avec les circoncellions (qui rodent autour des fermes) c’est-à-dire des «révolutionnaires» contre l’ordre romain établi. L’auteur poursuit:
«Le concile de Carthage, réuni en septembre 401, décida donc d’employer la méthode persuasive.(…) Lorsque la politique impériale publia à nouveau un édit de tolérance, laissant à chacun la liberté de suivre le «culte chrétien» qu’il veut (en 410), l’épiscopat catholique s’en émut» (1) Nous le voyons encore une fois, il ne fallait pas qu’il y ait de dissension: «Un concile eut lieu à Carthage et dans l’attente de la conférence, qui devait être réunie au 19 mai, toute poursuite contre les schismatiques devait être arrêtée. (…) L’argumentaire catholique, n’eut aucun mal à l’emporter devant l’incohérence donatiste. (…) Il en résulta un édit d’union le 30 janvier 412 qui mettait officiellement fin au schisme donatiste. (…) Plus délicate est la question du recours au pouvoir civil pour réprimer l’hérésie. Les donatistes accusent les catholiques de recourir contre eux par la persécution violente. (…) Augustin était pour une application douce et s’opposa toujours à la peine de mort (…) Il y eut cependant chez lui une évolution allant vers un durcissement de sa position en ce domaine (…) Il ne pouvait reconnaître la liberté de conscience en matière religieuse comme en aucune matière, puisque la liberté ne consiste pas à s’affranchir de la vérité qui en est la source (..)» (1)
Le donatisme ne disparu pas. On dit qu’il y eut des églises donatistes bien plus tard au Maghreb jusqu’au dixième siècle
Le grand schisme entre l’Orient et l’Occident
Dans la contribution suivante, nous voulons tracer à grands traits les causes du schisme vu du côté orthodoxe sous la plume de l’archevêque Hilarion de Volokolamsk nous lisons:
Les deux mille ans de l’histoire du christianisme sont remplis d’événements qui ont déterminé la vie non seulement de l’Église du Christ, mais aussi celle des civilisations et des peuples tout entiers. Indubitablement, l’un d’entre eux est la séparation entre les Églises d’Orient et d’Occident, datée traditionnellement de 1054. Les origines de ce conflit remontent aux différences rituelles entre les Églises en Occident et en Orient. (…) L’une des causes immédiates de cette rupture fut la décision du patriarche de Constantinople Michel Cérullaire (1043-1058) de fermer à Constantinople les églises et monastères du rite latin qui célébraient l’Eucharistie avec le pain azyme. (..) Pour résoudre cette situation, le pape Léon IX (1049-1054) dépêcha à Constantinople des légats avec à leur tête le cardinal Humbert. Le pape décéda pendant le voyage de ses légats qui ainsi perdaient automatiquement leurs pleins pouvoirs. Pour cette raison, l’anathème du patriarche Michel Cérullaire et de ceux qui le suivent, proclamé dans la bulle déposée par le cardinal Humbert le 15 juillet 1054 sur l’autel de Sainte-Sophie, n’avait aucune force canonique. Par ailleurs, l’anathème prononcé en réponse par le patriarche de Constantinople et les évêques de son synode ne concernait que les légats de l’Église de Rome à titre personnel.» (2)
«Cependant, poursuit l’auteur il devint clair que les tensions entre les légats du pape et le patriarche Michel Cérullaire étaient la manifestation de contradictions et de divergences plus complexes, accumulées au cours des siècles précédents. Le sac de Constantinople par l’armée des croisés en 1204 a démontré que les chevaliers latins ne considéraient plus les Grecs comme leurs frères dans la foi et a parachevé la division. (…) Dans le domaine de l’ecclésiologie, l’esprit du droit romain et la théorie de saint Augustin sur la lutte permanente entre deux cités – céleste et terrestre, de l’Église et de l’État – ont contribué à une représentation trop juridique de la nature de l’Église et de l’autorité ecclésiale en Occident. L’évêque de Rome n’y était plus perçu comme le premier parmi les autres patriarches qui lui sont égaux et qui, ensemble, représentent l’Église universelle, mais comme le souverain pontife de toute l’Église et le vicaire du Christ dont le pouvoir s’étend sur les autres patriarches et les autorités civiles.» (2)
Nous retrouvons là la cause réelle de la rupture comme ce fut le cas entre la vision de Donat et celle d’Augustin deux évêques maghrébins. Une vision des simples , une Eglise des déshérités et celle de l’autre Eglise qui mobilisa le concours de l’Empire romain
Nous lisons la suite du plaidoyer :
«En Orient, le principe de collégialité ou de conciliarité dominait: il trouvait son application dans les conciles oecuméniques. En Occident, en revanche, le principe monarchique a pris progressivement le dessus dans l’organisation de l’Église. Les tentatives suivantes de réconciliation entre l’Église romaine et les Églises orientales n’ont pas eu de succès dans la mesure où le siège de Rome exigeait leur soumission à l’autorité du Pape (…) Le dialogue au sens propre du terme entre les deux Églises a commencé avec les réformes du concile Vatican II (1962 – 1965), qui a marqué un changement de principe dans la vision qu’à l’Église catholique de ses rapports avec les chrétiens d’autres Églises. Dans les relations avec les orthodoxes, l’Église romaine n’appelle plus au «retour» au sein de «l’Église-Mère», mais à un dialogue d’égal en égal. L’Église orthodoxe russe a même envoyé les observateurs au concile Vatican II. Sa clôture a été marquée par un acte profondément symbolique – la levée réciproque des anathèmes de 1054, célébrée simultanément par le pape Paul VI à la basilique Saint-Pierre de Rome et le patriarche Athénagoras de Constantinople au Phanar le 7 décembre 1965 (…) Les orthodoxes et les catholiques doivent aujourd’hui répondre à la question suivante: sans avoir retrouvé la pleine communion eucharistique, pouvons-nous apprendre à agir comme une seule structure face au monde contemporain?.»(2)
Dans le même ordre, parlant du schisme de 1054, Henri Tinq écrit:
« Ce matin du 16 juillet, à Constantinople- «la nouvelle Rome»-, les clercs et les fidèles se pressent pour la liturgie à Sainte-Sophie. Trois hommes -l’impétueux cardinal Humbert de Moyen-Moutier, l’évêque Pierre d’Amalfi et le chancelier Frédéric de Lorraine- font leur entrée dans le sanctuaire, se présentent comme les légats du pape Léon IX (qui vient de mourir) et déposent solennellement sur l’autel, face à une assistance médusée, une bulle d’excommunication: «Nous, donc ne pouvons supporter les injures inouïes et les outrages adressés au Saint Siège, remarquons que la foi catholique est en ceci notoirement atteinte, nous signons l’anathème contre Michel Cérulaire et ses fauteurs, s’ils ne venaient pas à résipiscence». Dans un geste biblique, ils secouent la poussière de leurs sandales, proclament «Que Dieu voit et juge!» et tournent les talons».Le patriarche d’Orient Michel Cérulaire brave le pape, en toute hâte, il convoque un concile d’une vingtaine d’évêques et à son tour, il excommunie ceux qui ont «rédigé» ou «inspiré», la «charte impie». La rupture est scellée, l’Empire chrétien de Constantin vient de se briser. A la base de cette rupture, c’est la querelle dogmatique sur la question du Saint -Esprit; l’affaire du «filioque» Les anathèmes de sainte-Sophie – qui ne seront levés que neuf siècles plus tard en 1965 par le Pape Paul VI et le patriarche Athénagoras.» (3)
«Cette stratification de la haine devait naturellement aboutir à l’affrontement. Lors de la quatrième Croisade, les Croisés envahissent la capitale byzantine; le 12 avril 1204, Constantinople est en flammes. Pendant quatre jours, pillages et exactions servent d’exutoire à près de deux siècles de haine accumulée par les Latins contre les Grecs… Leurs églises, leurs couvents sont saccagés, leurs autels, outragés et profanés. Ecoutons le témoignage de Jean Masaritès métropolite d’Ephèse: Ils (les Croisés) proféraient blasphèmes et insanités, arrachaient les enfants à leurs mères, violaient sans honte les vierges dans les églises consacrées, ils massacraient les nouveau-nés, tuaient les femmes tempérantes, dénudaient les femmes âgées et les outrageaient.(..) on traînait les gens comme des moutons pour leur trancher la tête.»(3)
La rencontre du pape et du patriarche
962 ans après le grand schisme, les deux responsables du christianisme se rencontrent . Ce sont en fait, même si c’est le même évangile deux visions du Monde, celle du monde occidental qui s’est approprié le sacerdoce d’une religion qui est de fait orientale. On dit que les prêtres syriens, libanais voire irakiens quand ils veulent dire Dieu disent Allah ! Et celle justement de ce monde oriental plus proche d’un christianisme de l’humilité, de la sobriété. Il n’y a pas de mon point de vue rien d’extraordinaire, le pape François ne s’est pas présenté comme le seul et unique représentant du Christ ( le vicaire du Christ) comme l’ont fait ses prédécesseurs depuis près de mille ans. Nous connaissons tous les certitudes martelées en boucle. Hors de l’Eglise , point de salut. Le pape ne peut pas se tromper ( dogme de l’inerrance). Le pape François s’est présenté humblement d’abord en tant qu’évêque de Rome ensuite en tant que pape
Alain Crevier écrit à ce propos:
«À l’époque déjà, les orthodoxes trouvaient que la personne du pape avait terriblement tendance à vouloir occuper tout l’espace. Avec obéissance en prime! (…) Bien des choses ont changé. Ce pape François n’est pas comme les autres. Il ne se dit jamais pape, justement. Il se dit d’abord pécheur et puis évêque de Rome. (..) Il voudrait que l’Église retrouve sa mission première, plus proche des pauvres, plus humble, plus missionnaire et plus collégiale! (…) Je ne dis pas que tous les Russes sont de retour à la messe. L’Église orthodoxe de Russie n’est plus menacée. Elle a même développé de forts liens d’amitié avec le Kremlin, ou du moins avec Poutine. (…) Après d’intenses négociations, il fallait trouver un terrain neutre. (…) Ces deux hommes ont une cause en commun. C’est la tragédie des chrétiens du Moyen-Orient qui sont ciblés, assassinés, pourchassés et en fuite. La Terre sainte qui fut jadis chrétienne ne l’est plus. Une déclaration commune n’arrêtera pas la guerre. Mais c’est le symbole le plus puissant qu’ils peuvent offrir au monde.» (4)
« A l’issue de leur conversation, lit on sur le journal [Les deux chefs d’Eglise d’Orient et d’Occident], ont signé une déclaration commune (…) Celle-ci comporte un appel pressant en défense des chrétiens d’Orient, dont le sort actuel a été l’un des facteurs qui a poussé au rapprochement les chefs de ces deux Eglises chrétiennes qui se sont si longtemps tourné le dos. «Nous appelons la communauté internationale à des actions urgentes pour empêcher que se poursuive l’éviction des chrétiens du Proche-Orient» et à «mettre fin au terrorisme à l’aide d’actions communes, conjointes et coordonnées». Le patriarche de Moscou, qui a pleinement soutenu l’intervention militaire russe en Syrie, n’a de cesse de mettre en avant «le génocide des chrétiens au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et centrale» et «dans de telles conditions, tout le monde comprend qu’il faut se soutenir les uns les autres». (…) A Rome comme à Moscou, cette rencontre est vue comme «le résultat d’un travail de vingt ans». La précédente tentative de rapprochement, en 1997, avait tourné court à l’initiative des orthodoxes russes, qui voyaient en Jean-Paul II un pape animé d’un dessein «politique» envers les pays de l’ancien bloc soviétique (…) «Nous ne sommes pas concurrents, mais frères, Il ne peut donc être question d’utiliser des moyens indus pour pousser des croyants à passer d’une Eglise à une autre.» (5)
«La déclaration revient sur la situation des chrétiens persécutés surtout au Proche et Moyen-Orient et Afrique du Nord: des chrétiens exterminés par familles et villages entiers, des églises détruites et pillées de façon barbare, des objets sacrés profanés, et évoquent l’exode massif qui a transformé l’Irak et la Syrie. Le pape et le patriarche de Moscou appellent la communauté internationale à trouver des actions urgentes pour faire cesser ces persécutions, mais l’invitent aussi à tout faire pour mettre fin au terrorisme et à trouver des solutions pour rétablir la paix. Après avoir signé chacun le texte, le pape et Cyrille ont prononcé à tour de rôle quelques paroles improvisées. «Nous nous sommes parlés comme des frères, nous avons le même baptême, nous sommes des évêques» a relevé François ». (6)
La réalité des ingérences génératrices du chaos
La réalité est l’ingérence continuelle dans les affaires de ce Moyen Orient compliqué . Cela commença il y a plus d’un siècle et demi avec les deux cavaliers de l’apocalypse que furent l’Angleterre et la France et à un degré moindre de la Russie. Le but du jeu est de fomenter des troubles à un Empire Ottoman sur le déclin avec des révoltes de ses marches chrétiennes (Grèce, Bulgarie..) pour atteindre Bilad Echam (la grande Syrie englobant la Syrie et le Liban qui fut créé après les accords Sykes –Picot) . Les troubles qui amenèrent à des émeutes et des contre les Chrétiens furent le début de la mainmise européenne : Un gouverneur chrétien fut imposé à l’Empire pour gérer les affaires des Chrétiens arabes, les détachant ainsi des autres arabes sunnites. Un Algérien s’illustra pendant ces émeutes : L’émir Abdelkader qui à la tête de ses hommes bravant les foules chauffées à blanc par une propagande européenne , recueilli plus d’un millier d’un chrétiens les soigna les logea, les nourrit et assurera leur sécurité pendant plus d’un mois. Comment est perçue cette tentative récurrente d’ingérence caractérisée depuis près de deux siècles dans les affaires arabes ? A leur façon, deux Arabes chrétiens répondent :
Hayat al Huwik Atia, journaliste libanaise de confession maronite interpellant le pape lors de son voyage en Israël :
« L’Eglise d’Orient refuse d’être entraînée dans le processus de judaïsation de l’Occident chrétien. (…) Nous, l’Orient arabe chrétien, nous ne voulons pas de ce néochristianisme judéo-chrétien et nous refusons que l’Occident chrétien utilise l’influence spirituelle occidentale des églises, catholiques et protestantes pour implanter en Orient et particulièrement dans le monde arabo-chrétien l’idée ou l’influence de judaïsation. Votre Sainteté le pape, sachez que je suis une chrétienne arabe ! (…) Par conséquent, cela ne m’empêche pas de vous rappeler ma fierté d’appartenir à cette terre arabe. Cette terre est le berceau de toutes les Religions et de toutes les Révélations monothéistes. (…) La deuxième raison, est que c’est l’Occident qui est le générateur historiquement du racisme et du sionisme avec tous les résultats connus et, notamment ceux que cet Occident exerce depuis des décades contre le Monde arabe pour saper cette cohésion sociale et religieuse dans le Monde arabe. (..) En conséquence, Votre Sainteté, sachez que nous – Arabes chrétiens – nous ne sommes une minorité en aucune façon, tout simplement parce que nous étions des Arabes chrétiens avant l’Islam, et que nous sommes toujours des Arabes chrétiens après l’Islam. La seule protection que nous cherchons est comment nous protéger du plan occidental qui vise à nous déraciner de nos terres et à nous envoyer mendier notre pain et notre dignité sur les trottoirs de l’Occident. » (…) (7)
Pour sa part, le docteur Rafiq Khoury, prêtre palestinien du Patriarcat latin de Jérusalem, écrit : « (…) les Chrétiens font partie de l’identité de la terre et la terre fait partie de leur identité, avec leurs concitoyens musulmans. (…) L’arabité et la palestinité des chrétiens de Palestine sont des faits acquis, que nous recevons avec le lait de notre mère, comme on dit en arabe. Les relations islamo-chrétiennes en Orient en général et en Palestine en particulier, s’inscrivent dans une longue histoire, qui a à son actif treize siècles de communauté de vie, où nous avons partagé « le pain et le sel », comme on dit en arabe aussi. » (8)
La tolérance des autorités de l’Islam: la déclaration historique de Marrakech
Les deux chefs d’église parlent de la tolérance. Ils oublient seulement au moins de faire allusion diplomatiquement aux racines de cette malvie et de cette misère, de ces drames qui ne touchent pas seulement les syriens chrétiens, les irakiens chrétiens mais aussi dans la même charrette de l’horreur les syriens sunnites, chiites, les Irakiens chiites , et sunnites dans la même tourmente. Ils auraient au moins faire allusion au fait qu’avant les équilibres séculaires faits d’empathie de vivre ensemble ont fait que ces hommes et ces femmes ont vécu en harmonie pendant plus d’un millénaire. Ils savent certainement que les clés du saint sépulcre à Jérusalem sont confiées à une famille palestinienne sunnite depuis que Salah Eddine ( Saladin) les leur a confiées en signe d’équilibre pour ne favoriser aucune de la dizaine de communautés présente à Jérusalem. Tout ces équilibres fragiles ont volé en éclat sous les coups de boutoir d’un Occident qui dicte la norme qui série, qui distribue des bons points voire des prix Nobel, et des mauvais points que nous comptons tout les jours avec une comptabilité macabre.
Puisqu’ils doivent tout savoir, ils savent que les chrétiens de Palestine à Gaza sont protégés par le Hamas. Qu’ils n’ont pas les mêmes facilités sous le joug israélien qui fait constamment dans la provocation à l’endroit des deux autres religions ( musulmane et chrétienne) ; Si ces éminences sont là pour apporter la paix globalement au genre humain et pas une seule communauté , il aurait été souhaitable que leur déclaration soit moins exclusive.
Sont-ils au courant de la déclaration de Marrakech qui va dans le sens d’une auto-critique de l’apaisement ? En effet, dans une déclaration de très haute importance, mais passée sous silence dans les médias occidentaux 300 responsables musulmans, venus de plus de 120 pays défendent publiquement les droits des minorités religieuses en terre d’Islam.
« L’initiative est historique. À l’issue d’une conférence internationale qui s’est tenue du 25 au 27 janvier derniers à Marrakech (Maroc), plus de 300 personnalités musulmanes, savants, intellectuels, responsables politiques venus de plus de 120 pays ont signé, mercredi 27 janvier, une déclaration de très haute importance, dans laquelle ils adoptent des mesures concrètes visant à protéger les droits de toutes « les minorités religieuses dans le monde islamique ». La déclaration, intitulée « Les Droits des minorités religieuses en Terre à majorité musulmane – Directives légales et appel à l’action ». Le texte s’appuie sur le modèle de la Charte de Médine – sorte de contrat signé voici 1 400 ans entre les différents peuples et groupes religieux qui habitaient dans la région de Médine La Charte de Médine, attribuée au prophète Mahomet lui-même, est considérée comme la première Constitution écrite de l’Histoire ».
« Le document souligne que « la situation (des minorités religieuses) se détériore gravement dans différentes parties du monde islamique (…) en raison du recours à la violence et aux armes pour régler les différends et imposer des opinions ». « Il est inacceptable que la religion soit utilisée pour porter atteinte aux droits des minorités religieuses établies dans les pays musulmans », poursuivent les conférenciers. Ils demandent aux juristes et spécialistes musulmans de « développer une jurisprudence sur la notion de citoyenneté ». Ils exhortent aussi les « institutions et les autorités éducatives musulmanes » à effectuer un examen des programmes d’enseignement afin d’identifier et de supprimer tout le matériel incitant à la « violence et à l’extrémisme », conduisant » à la guerre ou au chaos », et entraînant la « destruction de nos sociétés partagées ». Le document avertit contre “l’amnésie collective qui feint d’oublier les siècles de coexistence collective et de partage vécus sur un même sol ».(7)
Afin de comprendre et d’apprécier cette tolérance, on doit la remettre dans son contexte, à l’époque où l’islam était un État officiel, avec des lois spécifiques établies par le Prophète et conformes aux principes de la religion. Le meilleur exemple de tolérance dont le Prophète fit preuve envers des membres d’autres religions fut sans doute la constitution elle-même, appelée « Sahifah » par les premiers historiens. Le Prophète rédigea une constitution détaillant les responsabilités de chaque groupe résidant à Médine, de même que leurs obligations les uns envers les autres et certaines restrictions pour chacun. Chaque groupe se devait de respecter les détails de cette constitution et toute violation de l’un de ses articles était considérée comme une trahison. Le premier article de cette constitution stipulait que tous les habitants de Médine, c’est-à-dire les musulmans et tous les juifs, chrétiens et idolâtres qui avaient signé le traité de paix, constituaient « une seule nation, à l’exclusion de toutes les autres ». Ils étaient tous considérés comme membres et citoyens de Médine, indépendamment de leur race, religion ou lignée.: « Les juifs qui sont avec nous recevront de l’aide et seront traité de façon équitable. Ils ne seront point lésés et aucun soutien ne sera apporté à leurs ennemis. »(9)
Tout est dit, le sort des Chrétiens n’intéresse l’Occident que dans la mesure où il peut faire aboutir ses autres projets, à savoir la mainmise sur les ressources énergétiques mais aussi l’instauration d’une paix américaine qui ne se fera pas sans dégât durable. Les ingérences continuelles contribuent à créer cette tension permanente qui n’existait pas avant. Il est à craindre que cette boite de Pandore ouverte par un Occident dévastateur va détruire des “équilibres” culturels et religieux” que les sociétés du Moyen Orient ont mis des siècles à sédiementer. Pouvons nous rester indifférent à ce scandale d’une nouvelle fitna ( chaos) qui prolonge d’une certaine façon ,les guerres religieuses déclenchées par un certain Urbain II ? Nous devons témoigner et dire notre rejet de la violence d’où qu’elle vienne. Qu’on laisse ces sociétés “arabes harassées par tant de malheur retrouver dans les religions du Livre le secours spirituel qui manque de plus en plus à ces sociétés qui risquent une sécularisation au nom du « Money-théisme » seul Dieu qui s’impose par ces temps incertains.(10)
Paix sur Terre à tous les hommes quelles que soient leurs espérances, les chrétiens comme les juifs comme les musulmans.
Chems Eddine Chitour
1.http://www.revue-kephas.org/03/4/LePivain21-36.html
2.http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/Le-grand- schisme-entre-l-Orient-et-l-Occident-point-de-vue-orthodoxe_a3796.html Vladimir Golovanow le 18 Juin 2014
3. Henri Tinq. L’Orient des confesseurs et des martyrs. Journal le Monde. 16 juillet 1999.
4. francois-pape-kirill-patriarche-rencontre-cuba-schisme.shtml
5.Alain Crevier http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/international/2016/02/12/00
6.http://www.lemonde.fr/international/article/2016/02/13/le-pape-francois-a-cyrille-enfin-nous-nous-voyons_4864757_3210.html# hKqgIvdX8HL84SQS.99
7.Hayat al Huwik Atia : Lettre ouverte http://liberation-opprimes.net/ 24 mai 2009
8.Rafiq Khoury : Palestine http://www.gric.asso.fr/spip.php?ar … 30.04.2009
9. http://plumenclume.org/blog/89-islam-la-declaration-historique-de-marrakech
Article de référence :