Print

Lettre du Président iranien, Mahmoud Ahmadi-Nejad, au Président américain George W. Bush
Par Global Research
Mondialisation.ca, 13 mai 2006
Le Grand Soir 13 mai 2006
Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/lettre-du-pr-sident-iranien-mahmoud-ahmadi-nejad-au-pr-sident-am-ricain-george-w-bush/2438

[ Avant d’entamer la lecture de cette lettre du président iranien à Bush, il me semble qu’une mise en perspective est absolument nécessaire si l’on veut en mesurer pleinement la portée. Cette missive peu ordinaire d’un chef d’état à son homologue est constituée essentiellement de références à la religion, mais gardons-nous de la juger à la hâte à travers le filtre du « laïcisme éclairé » qui prévaut actuellement en politique. Je précise tout de suite que je ne suis pas moi-même croyante. En revanche je me suis efforcée d’apprécier l’impact que ces critiques d’un croyant à un autre croyant pouvait avoir, du moins en théorie – car contrairement au Dieu omniscient dont il est question dans ce texte, nous sommes bien incapables de sonder les coeurs et nous trouvons contraints de juger les gens sur leurs paroles, d’une part, sur leurs actes, d’autre part.

Bush s’est beaucoup réclamé de Dieu par le passé : souvenons-nous qu’il avait affirmé que Dieu lui-même s’était adressé à lui, entre le 11 Septembre et les diverses agressions militaires auxquelles s’est livrée l’Amérique de GWB. Bush s’est présenté comme un leader bénéficiant de la bénédiction divine. S’agissait-il là d’une nouvelle religion révélée ? Les chrétiens apprécieront.

Aucune personne totalement saine d’esprit ne peut, bien entendu, croire que Bush est un véritable mystique, on a même beaucoup de mal à se le représenter en simple croyant. Bush a instrumentalisé la religion lorsque cela l’a arrangé, et continue de le faire afin de se concilier les bonnes grâces – c’est à dire, concrètement, les voix et le soutien financier – des brandisseurs de Bible de son pays, dont on ne saura jamais s’ils sont tous des tartufes.

Toujours est-il que, tout à fait officiellement, cet amateur de papier vert sur lequel on peut lire « in God we trust » (en Dieu notre confiance) est officiellement le président très croyant des très croyants États-Unis d’Amérique – on est donc en droit d’exiger de lui qu’il se comporte en croyant.

On peut penser ce que l’on veut de l’Islam : mais on ne peut contester que, du moins en apparence, Mahmoud Ahmadi-Nejad agit davantage en accord avec ses propres principes déclarés – que l’on est en droit de ne pas partager, voire de rejeter totalement – que George Walker Bush, qui bafoue en permanence ceux qu’il prétend épouser.

Autant il est tentant de juger les actes d’autrui selon nos propres valeurs morales, autant, ce faisant, nous nous rendons coupables d’éthocentrisme, et ce jugement extérieur qui consiste à dire à quelqu’un qu’il a mal agi, alors que son propre système de référence le convainc du contraire, s’apparente à une forme – assez inefficace – de prosélytisme. La seule manière non subjective de juger une personne qui ne partage pas nos croyances, c’est de mesurer ses actes à l’aune de ses propres valeurs : c’est ce point de vue que je vous demande d’adopter en lisant cette lettre. La question fondamentale que pose Ahmadi-Nejad est la suivante, et elle est cruciale : George W.Bush est-il en accord avec lui-même ? Catherine-Françoise Karaguézian , 13 mai 2006. ]

Lettre du Mahmoud Ahmadi-Nejad, président d’Iran, à George W. Bush, président des États-Unis d’Amérique.

8 mai 2006

Monsieur George Bush, Président des États-Unis d’Amérique

Cela fait déjà un moment que je réfléchis à la manière dont on peut justifier les contradictions indéniables qui existent sur la scène internationale, et qui font l’objet de débats incessants particulièrement dans les forums politiques et dans les universités. De nombreuses questions demeurent sans réponse. C’est ce qui m’amène à analyser certaines de ces contradictions et de ces questions, dans l’espoir d’aider à les résoudre.

Est-il possible que quelqu’un qui suit les enseignements de Jésus Christ (que la paix soit avec Lui) le grand Messager de Dieu,
qui se sent obligé de respecter les droits de l’homme,
qui chante les louanges du libéralisme, civilisation modèle,
qui clame son opposition à la prolifération d’armes atomiques, des armes de destruction massive,
qui fait de la « Guerre contre le Terrorisme » son slogan,
et qui, enfin, s’efforce d’établir une communauté internationale unifiée – une communauté que le Christ et les vertueux de la Terre gouverneront un jour – fasse aussi attaquer des pays, détruire les vies, les réputations et les biens de personnes et, sous prétexte qu’il pourrait y avoir un petit nombre de criminels dans un village, une ville ou à bord d’un convoi par exemple, fasse mettre le feu à l’ensemble du village, de la ville ou du convoi en question.

De même un pays, sous prétexte qu’il recélerait des armes de destruction massive, est ainsi occupé, environ cent mille personnes sont tuées, ses ressources en eau, son agriculture et son industrie sont détruites, près de 180 000 soldats étrangers en foulent le sol, la sacro-sainte intimité du foyer de ses citoyens est violée et le pays régresse d’une cinquantaine d’années. Et combien cela coûte-t-il ? Des centaines de milliards de dollars sont prélevés sur le trésor d’un pays et sur celui de certains de ses alliés et des dizaines de milliers de jeunes hommes et femmes – les troupes d’occupation – sont mis en danger, enlevés à leur famille et à leurs proches, leurs mains sont souillées du sang de leur prochain, ils se voient soumis à une pression psychologique telle que chaque jour il se commet de nouveaux suicides et que les soldats qui rentrent chez eux souffrent de dépression, tombent malades et se retrouvent aux prises avec toutes sortes de maux, tandis que d’autres encore se font tuer et que leurs corps sont remis à leur familles.

Sous prétexte qu’il existait des ADM, cette immense tragédie a englouti à la fois les occupés et les occupants. Il a été révélé par la suite que les ADM n’avaient jamais existé.

Bien sûr, Saddam était un dictateur et un assassin. Mais la guerre n’a pas été déclarée dans le but de le destituer, le but annoncé de cette guerre était la découverte et la destruction d’ADM. Il a été destitué accessoirement alors que l’on poursuivait un autre but, cependant les populations locales s’en réjouissent. Soulignons que pendant les longues années où il a imposé une guerre à l’Iran, Saddam bénéficiait du soutien de l’Occident.

Monsieur le Président,

comme vous le savez peut-être, je suis enseignant. Mes étudiants me demandent comment ces actes peuvent être compatibles avec les valeurs définies au début de cette lettre, et avec le devoir de suivre la tradition de Jésus-Christ (que la paix soit avec Lui) ; Messager de Paix et de Pardon ?

À Guantanamo Bay sont détenus des prisonniers qui n’ont pas été jugés, qui n’ont pas d’avocat pour les représenter, à qui leur famille ne peut pas rendre visite et qui sont, de toute évidence, détenus dans un pays étranger, loin de leur terre natale. Aucune instance internationale n’a droit de regard sur leur conditions de détention ni sur leur sort, personne ne sait s’il s’agit là de détenus, de prisonniers de guerre, de personnes mises en examen ou de criminels.

Des enquêteurs européens ont confirmé l’existence de prisons secrètes en Europe également. L’enlèvement d’une personne et sa détention dans une prison secrète sont incompatibles à ma connaissance avec quelque système judiciaire que ce soit. Je ne comprends pas non plus comment ces actes se conforment aux valeurs définies au début de cette lettre, c’est-à-dire les enseignements de Jésus-Christ (que la paix soit avec Lui), les droits de l’homme et les valeurs de liberté.

Les jeunes, les étudiants et l’homme de la rue se posent de nombreuses questions sur le phénomène que représente Israël. Je suis sûr que vous connaissez certaines d’entre elles.

Tout au long de l’histoire, de nombreux pays ont été occupés, mais il me semble que la création d’un nouveau pays habité par une nouvelle population est un phénomène inédit, qui s’est produit uniquement à notre époque.

Les étudiants disent qu’il y a soixante ans, ce pays n’existait pas. Ils montrent d’anciens documents et globes terrestres et disent, malgré tous nos efforts, nous n’avons pas réussi à trouver de pays nommé Israël.

Je leur dis d’étudier les deux Guerres Mondiales. L’un de mes étudiants m’a dit que pendant la Deuxième Guerre Mondiale, au cours de laquelle des dizaines de millions de personnes ont péri, les nouvelles du front se propageaient rapidement. Chaque belligérant se vantait de ses victoires et des défaites récemment infligées à l’adversaire. Après la guerre, on a prétendu que six millions de Juifs avaient été tués. Six millions de personnes, qui devaient avoir des liens avec deux millions de familles au bas mot. Encore une fois, admettons la véracité de ces événements. Est-ce que la fondation de l’État d’Israël au Moyen-Orient ou le soutien à l’État d’Israël, devaient logiquement s’ensuivre ? Est-il possible de rationaliser ou d’expliquer ce phénomène ?

M. le Président,

je suis sûr que vous savez comment – tout du moins, à quel prix – Israël a été fondée :
– sa création a causé des milliers de morts ;
– elle a transformé en réfugiés des millions d’autochtones ;
– elle a occasionné la destruction de centaines de milliers d’hectares de cultures, d’oliveraies, de villes et de villages.

Cette tragédie n’a pas pris fin avec la période de création initiale, cet état de faits dure hélas maintenant depuis soixante ans. Il a été instauré un régime qui n’a pas de pitié, même pas envers les enfants, qui détruit des maisons alors que leurs occupants se trouvent encore à l’intérieur, qui annonce à l’avance la liste des personnalités palestiniennes qu’il projette d’assassiner, et qui incarcère des milliers de Palestiniens. Un tel phénomène est unique ou pour le moins extrêmement rare dans l’histoire contemporaine.

Les gens se posent également une autre question essentielle : « pourquoi un tel régime bénéficie-t-il de soutiens ? » Est-ce que le fait de soutenir un tel régime est compatible avec les enseignements de Jésus-Christ (que la paix soit avec Lui) ou ceux de Moïse (que la paix soit avec Lui) ou avec des valeurs de liberté ?

Ou bien alors essaierait-t-on de nous faire croire que permettre aux populations d’origine de ces territoires – à l’intérieur comme à l’extérieur de la Palestine – qu’ils soient chrétiens, musulmans ou juifs, de s’auto-déterminer, est contraire aux principes de la démocratie, des droits de l’homme ou aux enseignements des prophètes ? Si ce n’est pas le cas, pourquoi s’opposer avec tant de vigueur à un référendum ?

L’administration palestinienne nouvellement élue a récemment pris les rênes du pays. Tous les observateurs indépendants ont confirmé que ce gouvernement représentait l’électorat. Pourtant, et cela semble incroyable, ce gouvernement a subi des pressions, on lui a conseillé de reconnaître le régime israélien, de renoncer à la lutte et de s’en tenir à la politique du gouvernement précédent.

Si l’actuel gouvernement palestinien s’était présenté avec un tel programme, les Palestiniens auraient-ils voté pour lui ? Encore une fois, une telle position d’opposition au gouvernement palestinien est-elle compatible avec les valeurs déjà citées ? Les gens se demandent aussi pourquoi toutes les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies condamnant Israël se heurtent à un veto.

Monsieur le Président,

vous savez parfaitement que je vis au sein de la population et que je suis en contact permanent avec elle – beaucoup de gens du Moyen-Orient s’arrangent aussi pour me contacter. Cette politique contestable ne leur inspire pas non plus confiance. Une telle politique provoque indubitablement de plus en plus de colère chez les habitants de cette région du monde.

Il n’est pas dans mon intention de poser trop de questions, cependant il me faut soulever d’autres points.

Comment se fait-il que toute réussite technologique ou scientifique qui voit le jour au Moyen-Orient soit interprétée et décrite comme une menace pour le régime sioniste ? La recherche, pure ou appliquée, ne compte-t-elle pas au nombre des droits élémentaires des nations ?

Vous avez étudié l’histoire. À l’exception du Moyen Âge, à quelle autre époque le progrès scientifique et technique a-t-il été considéré comme un crime ? La simple possibilité que des découvertes scientifiques puissent avoir une application militaire suffit-elle à justifier que l’on rejette en bloc la science et la technologie ?

S’il en va ainsi, alors il faut rejeter toutes les disciplines scientifiques, y compris la physique, la chimie, les mathématiques, l’ingénierie etc.

Des mensonges ont été proférés à l’occasion de l’affaire irakienne. Qu’en a-t-il résulté ? Je suis bien certain que le mensonge est mal considéré par l’ensemble des cultures, pas plus, vous n’aimez que l’on vous mente.

Monsieur le Président,

les habitants d’Amérique Latine n’ont-ils pas le droit de demander pourquoi l’on s’oppose aux gouvernements qu’ils ont élus et pourquoi l’on soutient les aspirants putschistes ? Ou, également, pour quelle raison on les menace constamment, les obligeant à vivre dans la peur ?

Les Africains sont des gens travailleurs, créatifs et talentueux. Ils ont la capacité de concourir, de manière importante et positive, aux besoins de l’humanité et de contribuer à son progrès matériel et spirituel. La pauvreté et des conditions de vie défavorables qui sévissent dans de larges portions du continent africain les en empêchent. Ne sont ils pas en droit de demander pour quelles raisons leurs immenses richesses – ressources minières entre autres – sont pillées, en dépit du fait qu’ils en ont plus besoin que d’autres ?

Encore une fois, de tels actes correspondent-ils aux enseignements du Christ et à la philosophie des droits de l’homme ? Le courageux et pieux peuple d’Iran aussi a de nombreuses questions et de nombreux griefs, dont ceux-ci : le coup d’état de 1953 [1] et le renversement du gouvernement légitime alors en place, le rejet de la révolution islamique, la transformation d’une ambassade en quartier général dédié au soutien des opposants à la République Islamique (des milliers de pages de documents sont là pour corroborer mes dires), le soutien apporté à Saddam lors de la guerre qu’il a livrée à l’Iran, le tir qui a abattu l’avion de ligne iranien [2] , le gel des avoirs de la nation iranienne, la multiplication des menaces, de la colère et du mécontentement face aux progrès scientifiques et nucléaires de la nation iranienne (au moment précis où les Iraniens exultent et collaborent au progrès de leur pays), ainsi que de nombreuse autres doléances dont je ne souhaite pas faire mention dans cette lettre.

Monsieur le Président,

le 11 Septembre a été un incident horrible. La mort d’innocents est déplorable et consternante quel que soit l’endroit où elle se produit. Notre gouvernement a immédiatement déclaré son dégoût vis-à-vis des responsables, il a présenté ses condoléances à ceux qui avaient perdu un être cher et a exprimé sa sympathie.

Tous les gouvernements ont le devoir de protéger la vie, la propriété et la réputation de leurs citoyens. Votre gouvernement est censé avoir recours à des systèmes sophistiqués de sécurité, de protection et de renseignement – il va jusqu’à pourchasser ses opposants au delà des frontières. [Les attentats du] 11 Septembre n’étaient pas simples à organiser. Était-il possible de les préparer en l’absence de coordination avec les services de renseignement et de sécurité – ou du moins en l’absence d’infiltration massive de ces services ? Bien entendu, il ne s’agit là que d’une supposition basée sur des faits. Pourquoi les divers aspects des attentats ont-ils été gardés secrets ? Pourquoi ne nous donne-t-on pas les noms des personnes qui ne se sont pas montrées à la hauteur de leurs responsabilités ? Enfin, pourquoi les responsables et les coupables ne sont-ils pas identifiés et jugés ?

Tous les gouvernements ont le devoir de procurer à leurs citoyens sécurité et tranquillité d’esprit. Voilà maintenant plusieurs années que les habitants de votre pays et que les voisins des lieux troublés de ce monde sont privés de tranquillité d’esprit. Après le 11 Septembre, au lieu de tenter d’apaiser et de guérir les blessures émotionnelles des survivants et des Américains en général que les attentats avaient traumatisés au plus haut point, certains médias occidentaux ont au contraire exacerbé la peur et l’insécurité ambiantes, certains évoquant sans cesse la possibilité de nouveaux attentats terroristes et entretenant un climat d’appréhension. Était-ce rendre service au peuple américain ? Qui peut mesurer l’étendue des dommages causés par l’angoisse et la panique ?

Les citoyens américains vivaient avec la crainte permanente que de nouveaux attentats se produisent n’importe quand, n’importe où. Ils ne se sentaient en sécurité ni dans la rue, ni sur leur lieu de travail, ni chez eux. Comment être heureux dans de telles conditions ?

Pourquoi les médias, au lieu rassurer les gens et de leur apporter l’apaisement, suscitaient-ils un tel sentiment d’insécurité ? Il en est pour penser que le tapage médiatique à préparé le terrain à l’attaque de l’Afghanistan – et lui a servi de justification. Une fois de plus il me faut revenir sur le rôle des médias. Une diffusion exacte de l’information et des comptes-rendus honnêtes font partie des exigences du code de déontologie des médias. Je tiens à exprimer l’immense regret que m’inspire le peu de cas que certains médias occidentaux font de ces principes. Le principal prétexte pour attaquer l’Irak était la présence d’ADM. À force de matraquage, le public a fini par y croire, on l’a préparé à accepter une agression de l’Irak.
La vérité résistera-t-elle à un tel climat de machination et de tromperie ? Et encore une fois, si l’on permet à la vérité d’être déformée, comment cela est-il compatible avec les valeurs déjà citées ? La vérité que connaît le Tout-Puissant sera-t-elle aussi dénaturée ?

Monsieur le Président,

dans les pays du monde entier, les citoyens financent le fonctionnement des gouvernements afin qu’à leur tour ces gouvernements puissent les servir.
La question qui se pose ici est la suivante : qu’ont rapporté en définitive aux citoyens les centaines de milliards de dollars, dépensés chaque année dans la campagne d’Irak ?

Ainsi que le sait Votre Excellence, dans certains états de votre pays, des citoyens vivent dans la pauvreté. Les sans-abri sont légion et le chômage est extrêmement problématique. Bien entendu, ces problèmes se retrouvent également, à divers degrés, dans d’autres pays. Dans cette optique, comment expliquer les dépenses gargantuesques de la campagne, que finance le Trésor Public, comment les concilier avec les principes déjà cités ?
Ce qui a été dit résume quelques-uns des griefs nourris par les populations du monde, de notre région, et de votre propre pays. Néanmoins voici ma thèse principale – et j’espère que vous tomberez d’accord avec moi, au moins en partie : les individus au pouvoir y sont pour une durée limitée et ne restent pas indéfiniment aux commandes, néanmoins l’Histoire se souviendra de leurs noms et le futur, proche ou lointain, ne cessera de les juger. Les gens examineront nos présidences.

Avons-nous réussi à donner à notre peuple la paix, la sécurité et la prospérité, ou l’insécurité et le chômage ? Nous sommes-nous efforcés de faire régner la justice, ou nous sommes nous contentés d’apporter notre soutien à des lobbies, et, contraignant de nombreux citoyens à la pauvreté et la souffrance, de permettre à une poignée d’accéder à la richesse et au pouvoir – renonçant ainsi à l’approbation du peuple et à celle du Tout-Puissant pour obtenir celle de cette minorité ? Avons-nous défendu les droits des défavorisés, ou les avons-nous ignorés ? Avons-nous défendu les droits de tous les gens de la terre ou leur avons-nous imposé des guerres, nous sommes-nous illégitimement immiscés dans leurs affaires, avons-nous créé des enfers carcéraux et y avons-nous emprisonnés des gens ? Avons-nous fait régner la paix et la sécurité dans le monde, ou avons-nous agité le spectre de l’intimidation et des menaces ? Avons-nous dit la vérité à notre nation et au reste du monde ou en avons-nous présenté une version renversée ? Avons-nous été du côté du peuple, ou de celui des occupants et des oppresseurs ? Notre gouvernement s’est-il proposé de promouvoir des valeurs de raison, de logique, d’éthique, de paix, de responsabilité, de justice, de service du peuple, de prospérité, de progrès et de respect de la dignité humaine ou avons-nous privilégié le pouvoir des armes, l’intimidation, l’insécurité, le mépris du peuple, l’obstruction aux progrès et à l’excellence des autres nations, et avons-nous foulé aux pieds les droits des gens ? Et enfin, nous serons jugés sur ceci : sommes-nous restés fidèles au serment prêté lors de notre intronisation, lorsque nous avons juré de servir le peuple, ce qui constitue l’essentiel de notre tâche, et la tradition des prophètes – ou pas ?

Monsieur le Président,

pendant combien de temps encore le monde pourra-t-il tolérer cette situation ? Où cette tendance va-t-elle mener le monde ? Pendant combien de temps encore les peuples du monde vont-ils devoir payer pour les mauvaises décisions de certains dirigeants ? Pendant combien de temps encore le spectre de l’insécurité – surgi des stocks d’armes de destruction massive – hantera-t-il les habitants de la planète ? Pendant combien de temps encore le sang d’innocents, hommes, femmes, enfants, sera-t-il répandu dans les rues, et les maisons détruites alors même que les gens s’y abritent ? La situation actuelle du monde vous plaît-elle ? Pensez-vous que la politique actuelle puisse perdurer ? Si les milliards de dollars dépensés pour la sécurité, les campagnes et manoeuvres militaires étaient plutôt investis et alloués aux pays pauvres, à la santé, à la lutte contre diverses maladies, à l’éducation, à l’amélioration de l’hygiène mentale et physique, à l’aide aux victimes de catastrophes naturelles, à la création d’emplois, à des projets de développement, à la lutte contre la pauvreté, à l’instauration de la paix, à la résolution de tensions internationales, à l’extinction des conflits raciaux, ethniques et autres, où en serait le monde aujourd’hui ? Votre gouvernement, et le peuple, ne ressentiraient-ils pas une juste fierté ? L’assise politique et économique de votre administration ne serait-elle pas plus solide ? Et, il me déplaît vraiment de le dire, le monde haîrait-il de plus en plus les gouvernements américains ?

Monsieur le Président, il n’entre pas dans mes intentions de blesser quiconque.

Si les prophètes Abraham, Isaac, Jacob, Ismaël, Joseph ou Jésus-Christ (que la paix soit avec Lui) étaient parmi nous aujourd’hui, comment jugeraient-ils un tel comportement ? Aurons-nous un rôle à jouer dans le monde qui nous a été promis, lorsque régnera la justice universelle et que Jésus (que la paix soit avec Lui) sera là ? Nous accepteront-ils, au moins ?

En résumé, voici la question fondamentale que je pose : n’existe-t-il pas de meilleure manière d’interagir avec le monde ? Aujourd’hui, des centaines de millions de chrétiens, des centaines de millions de musulmans et des millions de gens suivent les enseignements de Moïse (que la paix soit avec Lui). Toutes les religions divines partagent et respectent un concept commun, le monothéisme ou croyance en un seul Dieu à l’exclusion de tout autre.

Le saint Coran met l’accent sur ce concept commun et, s’adressant aux croyants des religions divines, leur déclare : « Dis : « ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah ». Puis, s’ils tournent le dos, dites : « Soyez témoins que nous, nous sommes soumis ». » [3]

Monsieur le Président,

d’après les Saintes Écritures, nous avons tous été appelés à adorer un Dieu unique et à suivre les enseignements de ses prophètes ; à adorer un Dieu qui est au dessus de tous les pouvoirs temporels et qui peut accomplir tout ce qui lui semble bon ; le Seigneur qui connait le visible comme l’invisible, le passé comme l’avenir, qui voit clair dans les coeurs de Ses serviteurs et qui enregistre tous leurs actes, le Seigneur qui possède les cieux, la terre et l’univers tout entier dans Sa cour. Ce sont Ses mains qui façonnent la destinée de l’univers ; il annonce à Ses serviteurs la bonne nouvelle de mansuétude et de rémission des péchés. Il chemine aux côtés des opprimés, les oppresseurs sont Ses ennemis. Il est la Compassion et la Miséricorde. Il est le recours des fidèles ; il les conduit hors des ténèbres jusque dans la lumière. Il est témoin de tous les actes de Ses serviteurs, il demande à Ses serviteurs d’avoir la foi et de faire le bien, et il leur demande de suivre le droit chemin et de rester déterminés. Il demande à Ses serviteurs d’écouter Ses prophètes, et il est témoin de leurs actions. Seuls ceux qui auront choisi les valeurs de ce monde, qui Lui auront désobéi et qui auront opprimé Ses serviteurs connaîtront une fin malheureuse. En revanche un magnifique paradis accueillera pour l’éternité Ses serviteurs qui auront craint Sa majesté et qui ne se seront pas laissé aller à leurs penchants charnels.

Nous croyons qu’un retour aux enseignements des prophètes de Dieu est le seul chemin vers la salvation. Je me suis laissé dire que Votre Excellence suivait les enseignements de Jésus (que la paix soit avec Lui) et croyait en la promesse divine : les bons régneront sur terre.

Nous croyons également que Jésus-Christ (que la paix soit avec Lui) était l’un des grands prophètes envoyés par le Tout-Puissant. Le Coran chante ses louanges à plusieurs reprises. Jésus (que la paix soit avec Lui) est aussi cité dans le Coran [19,36] : « Certes, Allah est mon Seigneur tout comme votre Seigneur. Adorez-le donc. Voilà le droit chemin [,Marie]. »

Servir le Tout-Puissant et lui obéir, tel est le credo de tous les messagers divins.

Les peuples d’Europe, d’Asie, d’Afrique, d’Amérique, du Pacifique et du reste du monde ont tous un seul Dieu : le Tout-Puissant qui veut guider tous Ses serviteurs et leur conférer de la dignité. Il a conféré de la grandeur à l’Humanité.

Nous lisons encore dans le Saint Livre : Dieu Tout-Puissant a envoyé Ses prophètes, des miracles et des signes explicites afin de guider les hommes et de leur donner des indications divines, et afin de les purifier de leurs péchés et de leurs souillures. Et il a envoyé les Écritures et la Balance [4], afin que les hommes soient justes et se tiennent à l’écart des impies.

Tous ces versets se retrouvent aussi, sous une forme ou sous une autre, dans la Bible.

Les prophètes de Dieu l’ont promis : le jour viendra où tous les hommes seront rassemblés dans la cour du Tout-Puissant, afin que leurs actions soient examinées. Les bons seront envoyés au Paradis et les pécheurs seront punis par Dieu. Je crois que nous croyons tous deux en l’avènement de ce jour du Jugement, mais il ne sera pas facile de juger des actes des dirigeants, parce que nous sommes responsables par rapport de nos nations, ainsi que vis à vis de la totalité de ceux dont la vie a été affectée, directement ou indirectement, par nos actes.

Ne croyez-vous pas que si nous croyions tous à ces principes : le monothéisme, l’adoration de Dieu,la justice, le respect de la dignité humaine, le Jugement Dernier, et si nous nous y conformions, nous pourrions vaincre les problèmes du monde actuel, qui résultent de la désobéissance au Tout-Puissant et aux enseignements des prophètes – et nous améliorer ?

Ne croyez-vous pas que la foi en ces principes oeuvre pour la paix, l’amitié et la justice, et les garantissent ?

Ne croyez-vous pas que ces principes, qu’ils soient écrits ou non, sont universellement respectés ?

N’accepterez-vous pas cette invitation à un retour authentique à l’enseignement des prophètes, au monothéisme et à la justice, pour préserver la dignité humaine et obéir au Tout-Puissant et à Ses prophètes ?

Monsieur le Président,

l’Histoire nous montre que les gouvernements répressifs et cruels ne durent pas. Dieu leur a confié le sort de l’humanité. Le Tout-Puissant n’a pas laissé l’univers et les hommes livrés à eux-mêmes. De nombreux faits sont venus contrecarrer les souhaits et les projets des gouvernements. Ils nous indiquent qu’un pouvoir supérieur est à l’oeuvre, et que tous les événements sont déterminés par Lui.

Peut-on rester aveugle aux signes de changement qui apparaissent aujourd’hui dans le monde ? La situation aujourd’hui est-elle comparable à ce qu’elle était il y a dix ans ? Les changements se produisent vite et se succèdent à un rythme effréné. Les peuples de la terre ne sont pas satisfaits du statu quo et font peu de cas des promesses et des discours de nombre de puissants dirigeants mondiaux. Nombreux sont ceux qui, sur cette terre, ne se sentent pas en sécurité et sont opposés à l’accroissement de l’insécurité et à la multiplication des guerres et ne sont pas d’accord avec une politique contestable, qu’ils rejettent.

Le peuple désapprouve le fossé qui se creuse entre possédants et dépossédés, ainsi qu’entre pays riches et pays pauvres.

Le peuple est dégoûté par toujours plus de corruption.

Dans de nombreux pays, le peuple ressent de la colère face aux attaques dont sont victimes leurs fondements culturels et face à la désintégration de la famille. La disparition progressive de la fraternité et de la compassion les plonge également dans l’angoisse. Les peuples de la terre n’ont aucune foi dans les organismes internationaux, parce que ces derniers ne défendent pas leurs droits.

Le libéralisme et la démocratie à l’occidentale se sont avérés incapables d’aider à concrétiser les aspirations de l’humanité. Aujourd’hui, ces deux concepts ont échoué. Quiconque est doué de lucidité entend déjà se fissurer et s’effondrer l’idéologie et la pensée du système libéral-démocrate. De plus en plus souvent, nous constatons que les gens se regroupent autour d’un point focal : Dieu Tout-Puissant. Il ne fait aucun doute que grâce à sa foi en Dieu et aux enseignements des prophètes, le peuple surmontera ses problèmes. Voici ce que je vous demande : ne voulez-vous pas vous joindre à lui ?

Monsieur le Président,

que cela nous plaise ou non, le monde cède à l’attraction de la foi en le Tout-Puissant ; la justice et la volonté de Dieu triompheront de tous les obstacles.

Vasalam Ala Man Ataba’al hoda

Mahmood Ahmadi-Najad, President de la République Islamique d’Iran.

Traduction : Catherine-Françoise Karaguézian
www.egueule.com pour Le Grand Soir.

Avis de non-responsabilité: Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.