Lettre ouverte à François Hollande, le Frankenstein de la République

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Après ce nouvel attentat terroriste qui frappe cruellement notre pays, vous avez exprimé au nom de la nation tout entière, avec émotion et dignité, votre compassion pour ses victimes. Désignant aussitôt le coupable, et nous vous supposons bien informé, vous avez appelé les Français à faire preuve d’unité et de solidarité face au « terrorisme islamiste ». Vous nous avez conviés à serrer les rangs et à faire face, en mobilisant toutes nos énergies contre cette terrible menace.

Mais cet appel légitime à la cohésion nationale en ce moment où le pays entier se sent meurtri ne saurait interdire aux citoyens d’interroger la politique qui est la vôtre. Depuis votre élection, vous prétendez lutter sans ménagement contre les organisations terroristes. Mais, en réalité, tout donne à penser que vous avez fait exactement le contraire. Car au lieu de combattre le mal, vous avez concentré vos efforts contre ceux qui tentaient de le terrasser. Vous nous disiez que vous combattiez le terrorisme, mais vous n’aviez de cesse de diaboliser et de combattre la Syrie de Bachar Al-Assad.

Cet Etat souverain, détesté de vos amis américano-sionistes parce qu’il refuse de se plier à leur diktat, vous l’avez sciemment désigné à la vindicte des mêmes criminels que ceux qui mitraillent les terrasses de nos cafés. Les mercenaires du djihad cherchaient une cible, et vous avez cyniquement désigné Damas. Oui, des milliers de jeunes ont été encouragés, par votre propagande de guerre, à aller se battre contre cet Etat honni que vous rêviez d’anéantir sous les bombes. Et c’est votre ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, qui donna le signal de cette curée, lorsqu’il déclara que Bachar Al-Assad « ne méritait pas de vivre » et que la branche syrienne d’Al-Qaida faisait du « bon boulot » en Syrie.

Vous aurez beau tenter d’occulter vos responsabilités, chacun voit que les attentats commis en France sont le résultat de votre politique. Pourquoi n’y a-t-il aucun attentat en Italie, en Argentine, au Japon ? Les Français ont-ils pris la mesure de votre refus de coopérer avec les services syriens afin d’identifier les djihadistes français susceptibles de revenir en France ? Nos compatriotes savent-ils que vous interdisez tout transfert de fonds au profit de cette majorité de Syriens vivant dans les régions sous contrôle gouvernemental ? Réalisent-ils que vous n’avez jamais eu un mot de compassion pour les nombreuses victimes syriennes des attentats d’Al-Qaida, et que vous persistez à infliger des sanctions économiques à ce peuple victime du terrorisme de masse ?

Vous étiez décidé à prendre parti dans le conflit syrien, et vous l’avez fait sous des prétextes humanitaires qui se sont effondrés comme un château de cartes, exhalant surtout un âcre parfum d’hydrocarbures. Vous embourbant, et nous avec, dans cette ornière qu’il eût fallu éviter avec prudence, vous avez exposé les Français à un effet boomerang dont on mesure à peine le potentiel destructeur. Cette violence que vous avez déchaînée chez les autres par votre politique néo-coloniale, vous l’avez ramenée à domicile !

Je doute que les Français vous en remercient, surtout lorsqu’ils auront renoué les fils de cette dramatique affaire. Au lendemain de ce drame, M. Hollande, passé le moment de la compassion devant les caméras et de la célébration de l’unanimité patriotique, allez-vous remettre de nouvelles médailles aux banquiers de la terreur ? Condamnant le crime terroriste côté cour, irez-vous encore dîner, côté jardin, avec ses sponsors saoudiens ? Avec George W. Bush, les USA ont eu leur Dr Frankenstein, l’apprenti-sorcier de la géopolitique du chaos. Avec vous, c’est match nul. Les Français ont désormais le leur.

En rangeant la France du côté d’une rébellion sectaire, mafieuse et manipulée, en vous croyant habile alors que vous n’êtes qu’un semi-habile, vous avez nourri le monstre qui nous frappe aujourd’hui de ses tentacules. Allié objectif de Daech tant qu’il combattait Assad, vous avez juré sa perte après les premiers assassinats d’Occidentaux en Irak, nourrissant alors le ressentiment de cette mouvance criminelle dont vous attendiez sans doute davantage de compréhension !

Conseillé par de pseudo-experts dont l’indépendance intellectuelle est proportionnelle au chèque que vous leur versez, vous êtes désormais condamné à persévérer dans l’erreur faute de pouvoir vous déjuger. Vous allez continuer à nous jeter de la poudre aux yeux avec l’état d’urgence et à faire des moulins avec vos petits bras. Mais, à neuf mois d’une élection présidentielle où vous allez faire de la figuration, vous nous léguez surtout les fruits pourris de votre politique de gribouille, les manifestations d’incompétence d’un ministre qui confond Saddam Hussein et Bachar Al-Assad ne parvenant même plus à nous faire rire en ce jour de malheur.

Bruno Guigue

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Bruno Guigue, ancien élève de l’École Normale Supérieure et de l’ENA, Haut fonctionnaire d’Etat français, essayiste et politologue, professeur de philosophie dans l’enseignement secondaire, chargé de cours en relations internationales à l’Université de La Réunion, est l’auteur de cinq ouvrages, dont « Aux origines du conflit israélo-arabe, L’invisible remords de l’Occident, L’Harmattan, 2002 », et de centaines d’articles.



Articles Par : Bruno Guigue

A propos :

Ancien élève de l’Ecole normale supérieure et de l’Ecole nationale d’administration, Bruno Guigue est un ex-haut fonctionnaire français. Chercheur en philosophie politique et analyste politique, il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont « Aux origines du conflit israélo-arabe, L’invisible remords de l’Occident », « Faut-il brûler Lénine ? » et « Les Raisons de l’esclavage », publiés chez L’Harmattan. Chroniqueur de politique internationale, il a publié des centaines d’articles diffusés en huit langues par plusieurs dizaines de sites d’information indépendants.

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