L’Occident et le terrorisme international
Il importe de dire la vérité. Le terrorisme sous toutes ses manifestations est généré et fomenté par les agressions de l’Occident à travers le monde. Agressions contre des nations toutes entières. Agressions du passé, mais surtout domination, pillage et destruction lente et inexorable des économies et du tissu social dans un très grand nombre de pays. Un total de 55 guerres livrées directement ou par procuration par les Occidentaux depuis le début du siècle.
Le discours fallacieux propagé dans l’arène politique internationale ne cesse de légitimer les interventions et opérations guerrières occidentales en occultant les facteurs à leur origine. Cette assertion est corroborée par tous ceux et celles qui ont compris les stratagèmes de la propagande des tout puissants. Deux d’entre eux, Noam Chomsky et André Vitchek ont proposé une analyse de cette conjoncture mondiale dans un ouvrage qui est paru aux Éditions écosociété, ouvrage intitulé : « L’Occident terroriste. D’Hiroshima à la guerre des drones ». Ils brossent un tableau des siècles passés : « Il y a assurément deux façons de parler du terrorisme, car le terrorisme n’est pas considéré comme tel lorsqu’il est pratiqué (et sous une forme nettement plus meurtrière) par ceux qui, de par leur pouvoir, sont parés de vertu ».
« Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le colonialisme et le néocolonialisme occidentaux ont causé la mort de 50 à 55 millions de personnes, le plus souvent au nom de nobles idéaux comme la liberté et la démocratie. Pourtant, l’Occident parvient à s’en tirer en toute impunité et à entretenir, aux yeux du reste du monde, le mythe voulant qu’il soit investi de quelque mission morale. Comment y arrive-t-il? Les deux auteurs critiquent de façon magistrale l’héritage funeste du colonialisme et l’exploitation éhontée des ressources naturelles de la planète exercée par l’Occident. Ce livre d’entretiens est augmenté de deux articles qu’ils ont publiés dans la foulée de l’attaque contre l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, à Paris, en janvier 2015, dénonçant l’hypocrisie occidentale vis à vis d’un terrorisme qu’il a largement contribué à développer ».
Les thèses propagées en Occident sont celles des conquérants. Tous ceux ou celles qui s’opposent aux politiques d’intervention dans le monde par les puissances occidentales sont taxés de terroristes ou d’ennemis de la démocratie. Dans ce contexte, rien n’est évoqué sur le processus de militarisation des économies et des sociétés. L’État capitaliste s’empare de la scène politique et sociale mondiale et agit de façon dictatoriale en collaboration avec les médias mainstream qui se font l’écho de cette conjoncture en la normalisant aux yeux du public. Les mensonges et les fausses vérités sont alors propagés ad nauseam, le tout appuyé par des experts sélectionnés pour les corroborer. C’est la propagation de la pensée unique tant décriée au cours des dernières décennies. C’est l’errance générale qui développe le syndrome de l’ennemi et s’acharne sur les individus au profil dit terroriste selon la définition proposée par les experts occidentaux.
I. Le terrorisme défini par l’Occident
Le terrorisme défini en Occident correspond à toutes les formes d’activités qui menacent ou qui pourraient menacer les intérêts de ceux qui contrôlent le cœur du monde capitaliste. Sont considérés comme étant une menace les manifestations populaires dans les rues des grandes métropoles qui réclament la protection de leurs droits et la justice sociale, les associations qui luttent pour la protection de ces droits et, à la rigueur, les États progressistes. Les attentats de Paris en novembre 2015 et ceux de Bruxelles en mars 2016 ont permis de réaffirmer le discours fallacieux des Occidentaux. Cette traque des djiadistes, cette concentration de la nouvelle orientée vers des individus dits radicalisés et dangereux n’a pas encore permis une réflexion sur les vrais tenants du terrorisme international. Pourtant, la guerre contre la terreur devrait être élucidée aux yeux du grand public. Bien au contraire, l’on recherche à en parler comme étant une traque d’individus à travers le monde, d’individus qui « menaceraient » la sécurité globale de la planète.
II. Le terrorisme pratiqué par l’Occident
Il importe de dire la vérité. Les attentats perpétrés à Paris et à Bruxelles conduisent les États nationaux à adopter des mesures de contrôle des populations et ainsi à militariser l’espace national tout entier ainsi que les institutions. Ce régime, l’Amérique latine l’a connu pendant des décennies avec le règne prolongé de plusieurs dictatures et, notamment, au Brésil, en Uruguay, en Argentine et au Chili. Un état de siège permanent et la perte de tous les droits et de toutes les libertés fondamentales. C’est ce qui se dessine maintenant dans l’espace Shengen. Déploiement des forces policières et des forces armées, contrôle accru des mouvements, perquisitions multiples, surveillance continue des sites stratégiques tels que les centrales nucléaires et les bases militaires. Ce sera de plus en plus l’expression d’un terrorisme d’État exercé sur l’ensemble des citoyens. Une perspective inquiétante au plus haut point.
III. La radicalisation. Un concept qui s’applique bien aux contingents des armées nationales
Une autre conception fallacieuse diffusée sous tous les horizons : Le phénomène de la radicalisation. Des individus seraient entraînés à développer une pensée radicale et à poser des gestes violents au détriment de citoyens innocents. Selon cette conception, ce comportement se présente comme étant le résultat d’un endoctrinement et d’une déviance profonde. Dans ce discours, l’on oublie que les soldats des forces armées nationales à travers le monde sont entraînés à poser des actions guerrières, à tuer des êtres humains et, surtout, à obéir aux ordres dictés par les commandements. Est-ce que l’on peut qualifier leurs actions comme étant radicales? Ces soldats acceptent deux éléments : « Tuer ou être tués ». Comment peut-on occulter cette réalité et répéter que ces soldats sont là pour défendre la patrie? Ils sont entraînés pour détruire un « ennemi » que l’on prend soin de construire dans la pensée collective.
IV. Deux poids deux mesures. Les victimes occidentales méritent des hommages des nations. Les victimes des pays pauvres ne font qu’entrer dans les statistiques. Exemples concluants : Bruxelles et Aden
C’est exactement ce que nous avons pu observer avec les attentats de Bruxelles et ceux qui ont eu lieu quelques jours plus tard, le 25 mars, au Yémen. Les attentats de Bruxelles qui ont causé la mort de 34 personnes et plus de 200 blessés ont entraîné un déploiement considérable des forces policières et armées et provoqué une commotion planétaire. Ceux du Yémen, attentats suicides à la voiture piégée contre trois barrages tenus par les forces loyalistes dans la grande ville portuaire du Sud du Yémen, ont provoqué la mort d’au moins 22 personnes (Journal Le Devoir, les 26 et 27 mars 2016, p. C 5). Une dépêche apparaît dans le bas d’un page intérieure. Aucun hommage n’est adressé aux victimes. Ces événements qui se sont déroulés au Yémen comme ceux qui marquent les guerres d’invasion de l’Occident en Syrie, en Irak et en Afghanistan, sont entrés, dans l’espace US-OTAN, dans la liste des faits divers.
Conclusion
Les attentats de Paris et de Bruxelles ont révélé, une fois encore, l’aveuglement des Occidentaux sur les actions terroristes qu’ils ne cessent de perpétrer dans de vastes régions du monde. La guerre mondiale contre la terreur livrée par les États-Unis depuis 2001 aurait causé la mort de 1,3 million de personnes selon un rapport intitulé « Body Count : Casualty Figures after 10 years of the ’War on Terror’», publié par les organisations Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IPPNW, prix Nobel de la paix en 1985), Physicians for Social Responsibility et Physicians for Global Survival. Ce rapport affirme, en se basant sur diverses sources, y compris gouvernementales, que ce bilan de 1,3 million de morts est « une estimation basse » et ne tient pas compte d’autres pays en conflit (Yémen, Somalie, Libye, Syrie). 500 morts par jour en Irak.
Nous reprenons ici la conclusion de Michel Collon analysant les attentats de Bruxelles :
« Les attentats, ce n’est pas une fatalité, c’est le résultat d’une politique. Menée à Washington. Puis à Londres et Paris. Bruxelles suivant servilement. Messieurs les dirigeants, vous êtes donc co-responsables. Avons-nous le droit d’en débattre – en « démocratie » – ou bien allez-vous encore user de pressions pour que les médias se taisent ? ».
Jules Dufour
Références
AFP. 2016. Le Yémen secoué par trois attentats. Journal Le Devoir, les 26 et 27 mars 2016, p. C 5.
CHOMSKY, Noam et André Vltchek. L’Occident terroriste. D’Hiroshima à la guerre des drones. Montréal, Éditions écosociété. 176 pages. Traduit de l’anglais par Nicolas Calvé.
COLLON, Michel. 2016. Attentats de Bruxelles : non, monsieur le premier ministre ! Mondialisation.ca et investigaction.net. Le 23 mars 2016. En ligne : http://www.mondialisation.ca/attentats-de-bruxelles-non-monsieur-le-premier-ministre/5516181
DUFOUR, Jules. 2010. L’Occident et la diabolisation : Pour un changement radical du discours global. En ligne : http://www.mondialisation.ca/l-occident-et-la-diabolisation-pour-un-changement-radical-du-discours-global/21739
DUFOUR, Jules. 2015. La militarisation planétaire s’intensifie. Les drones de combat sèment la terreur et la mort. Montréal, Centre de recherche sur la mondialisation (CRM). Le 3 mars 2015. En ligne : http://www.mondialisation.ca/la-militarisation-planetaire-sintensifie-les-drones-de-combat-sement-la-terreur-et-la-mort/5434583
DUFOUR, Jules. 2015. L’aube du XXIème siècle. Plus d’armements. Plus de guerres. La spirale de la terreur et de la mort se poursuit (1ère partie). Montréal, Centre de recherche sur la mondialisation (CRM). Le 2 avril 2015. En ligne:http://www.mondialisation.ca/laube-du-xxieme-siecle-plus-darmements-plus-de-guerres-la-spirale-de-la-terreur-et-de-la-mort-se-poursuit/5440161
DUFOUR, Jules. 2015. L’aube du XXIème siècle. Plus d’armements. Plus de guerres. La spirale de la terreur et de la mort se poursuit. Les interventions et occupations militaires de l’Occident dans le monde. Irak, Syrie, Libye et Gaza (2ième partie). Montréal, Centre de recherche sur la mondialisation (CRM). Le 6 avril 2015. En ligne : http://www.mondialisation.ca/laube-du-xxieme-siecle-plus-darmements-plus-de-guerres-la-spirale-de-la-terreur-et-de-la-mort-se-poursuit-2ieme-partie/5440984
DUFOUR, Jules. 2015. Le grand réarmement planétaire 2015. L’humanité se retrouve face à un grave danger d’extinction. Montréal, Centre de recherche sur la mondialisation (CRM). Le 14 novembre 2015. En ligne : http://www.mondialisation.ca/le-grand-rearmement-planetaire-2015/5488806
IPPNW GERMANY, PSR (Physician for Social R[J1] [J2] [J3] [J4] [J5] [J6] responsibility) et PGS (Physician for Global Survival). 2015. Body Count. Casualty Figures after 10 Years of the “War on Terror” Iraq Afghanistan Pakistan. Mars 2015. 100 pages. En ligne : http://www.ippnw.de/commonFiles/pdfs/Frieden/Body_Count_first_international_edition_2015_final.pdf
REUTERS ET AFP. 2016. 34 morts et plus de 200 blessés dans les attentats de Bruxelles revendiqués par l’État islamique. JOURNALDEMONTREAL.COM. Le 22 mars 2016. En ligne : http://www.journaldemontreal.com/2016/03/22/attaques-a-bruxelles
WIKIPÉDIA. Terrorisme d’État. Dernière mise à jour : Le 23 février 2016. En ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Terrorisme_d%27%C3%89tat
WIKIPÉDIA. Guerre contre le terrorisme. Dernière mise à jour : Le 22 février 2016. En ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_contre_le_terrorisme
Pour aller plus loin, sur les attentats terroristes de Bruxelles, articles en anglais de Michel Chossudovsky :
Is the ISIS Behind the Brussels Attacks? Who is Behind the ISIS?, 22 mars 2016
Fake Video Used in News Coverage of Brussels Terror Attacks, 22 mars 2016
Media Manipulation: More Fake Video Reports of the Brussels Terror Attacks, 23 mars 2016
Paris, Brussels… The Role of “Massive Casualty Producing Events”. The Roadmap to a Police State, 24 mars 2016
The Brussels Attacks: What is True, What is Fake? Three Daesh Suspects at Brussels Airport, 25 mars 2016