Manifestants au Liban et en Irak: les États-Unis, Israël et l’Arabie saoudite en ont assez de l’Iran (2/4)

En 1975, le Liban a traversé  quinze années de guerre civile violente et destructrice. Avant le début de la guerre, les circonstances visaient à détruire et à supprimer l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) dirigée par Yasser Arafat. Les Palestiniens ont été entraînés dans une guerre civile au Liban, ouvrant la voie à une invasion israélienne en 1982 qui a finalement conduit au départ de l’OLP du Liban – et de la «Résistance islamique» devenue, quelques années plus tard, le Hezbollah. Aujourd’hui, au Liban, le Hezbollah pense que le même scénario pourrait être répété s’il était entraîné dans la rue pour faire face aux manifestants. C’est pourquoi ses dirigeants font preuve de patience et de retenue, et continueront à le faire, pour garder le contrôle de ses hommes, hors de la rue.

Cependant, les manifestants se sont fait entendre : «Pourquoi le Hezbollah couvre-t-il ou protège-t-il ses alliés sans se faire accuser de corruption ?»

Des années avant l’apparition officielle du Hezbollah en 1985, la «résistance islamique» s’employait déjà à libérer le territoire libanais occupé par l’invasion israélienne de 1982. Quelques années après le retrait des forces d’occupation israéliennes de la plupart des villes et des villages en 2000, Le Hezbollah est apparu sur la scène politique. L’engagement politique a été un défi difficile pour les dirigeants de l’organisation. Au sein de son conseil de la Shura, de nombreuses personnes souhaitaient rester à l’écart du gouvernement corrompu qui dirigeait le pays depuis 1992 et craignaient d’être appelées à rendre des comptes en même temps que la vieille garde libanaise de dirigeants politiques corrompus.

Le Hezbollah a décidé de ne garder qu’un seul ministre dans le gouvernement, afin d’avoir une oreille présente à chaque réunion et débat au sein du Conseil des ministres libanais. Après quelques années, le Hezbollah a décidé de devenir un partenaire à part entière du Parlement et du cabinet ministériel avec son allié chiite, le président et chef du mouvement «Amal» Nabih Berri. Après le retrait de l’armée syrienne du Liban en 2005 et la troisième guerre israélienne contre le Liban en 2006, le Hezbollah a décidé de prendre sa part, aux côtés de Berri, pour la nomination des agents de sécurité alloués aux chiites, et a laissé au président celle de tous les autres emplois, hauts responsables et subalternes, à attribuer aux chiites, conformément au système confessionnel libanais. La relation du Hezbollah avec Amal était conditionnée par un principe fondamental : la nomination d’un officier de sécurité dans l’armée ou d’autres forces de sécurité devait être approuvée par les deux principaux groupes chiites.

Le Hezbollah a rempli son objectif de protection des chiites libanais. Le but du Hezbollah était de faire en sorte que le groupe historiquement défavorisé ne soit plus jamais victime d’injustices au sein du système politique libanais. Les longues décennies d’injustice envers les chiites au Liban ont pris fin lorsque le Hezbollah est devenu un groupe militaire et social puissant et efficace.

Le Hezbollah est aujourd’hui «celui qui désigne le président de la République» après ses années de guerre victorieuse contre «État islamique» et Al-Qaïda aux frontières libanaises, en Syrie et en Irak. Les hommes du Hezbollah opéraient sur un territoire dix fois plus grand que le Liban dans les deux pays voisins. Le Hezbollah n’est pas simplement un groupe domestique local mais un acteur régional et international. Ses hommes étaient présents en Bosnie, au Yémen, en Irak, en Syrie et en Palestine, conformément à leur objectif répété de défendre les opprimés où qu’ils se trouvent. Le secrétaire général Sayyed Hassan Nasrallah a récemment confirmé cette mission : «Partout où nous devons être présents, nous serons là». Mais la participation du Hezbollah aux guerres régionales et aux politiques nationales a eu à la fois des effets positifs et des effets négatifs sur le groupe et ses activités.

Sur le plan militaire, le Hezbollah est l’une des plus puissantes armées irrégulières, mais organisées, du Moyen-Orient. Il dispose de dizaines de milliers de roquettes et de missiles, de missiles de précision à longue portée, de missiles anti-navires et anti-aériens, de drones armés, de capacités de surveillance électronique – écoutes téléphoniques – et de milliers de forces opérationnelles spéciales.

Sur le plan national, son alliance et ses liens étroits avec son partenaire chiite, le président Nabih Berri, et son partenaire chrétien, le président de la République, Michel Aoun, ainsi que son gendre, le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil – qui dirige le Mouvement patriotique (FPM) – n’est pas sans coût. Au cours des dernières semaines de manifestations dans le pays, les chiites considérés comme faisant partie intégrante de la «société du Hezbollah» ont, ouvertement et sévèrement, critiqué Berri et Bassil, pour le soutien présumé du Hezbollah aux alliés accusés de corruption.

Ce qui semble être un soulèvement anti-corruption au Liban est aussi une campagne indirecte anti-Hezbollah, visant à paralyser ses alliés lorsqu’il est impossible de frapper directement le Hezbollah lui-même. De nombreux acteurs régionaux et internationaux, qui reconnaissent qu’ils ne peuvent pas affronter le Hezbollah sur le champ de bataille – comme le montrent ses victoires face à Israël, en Syrie, en Iraq et au Yémen – seraient ravis de voir celui-ci impliqué dans des batailles politiques internes, des troubles ou des bourbiers. C’est la politique de l’administration américaine, menée inlassablement par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo. Peut-il réussir ?

En Syrie, le président Bachar al-Assad est devenu l’un des alliés les plus solides de l’Iran. En Irak, Téhéran a réussi à pousser au pouvoir trois de ses principaux alliés, le Premier ministre, le Président du parlement et le Président. Le gouvernement irakien peut compter sur al-Hashd al-Shaabi pour prévenir tout coup d’État et a réussi à déjouer les plans d’officiers irakiens de haut rang, des officiers ayant un lien direct avec l’ambassade des États-Unis à Bagdad.

Elijah J. Magnier

Première partie :

Manifestants au Liban et en Irak: les États-Unis, Israël et l’Arabie saoudite en ont assez de l’Iran (1/4)

Troisième partie :

Manifestants au Liban et en Irak: les États-Unis, Israël et l’Arabie saoudite en ont assez de l’Iran (3/4)

Manifestants au Liban et en Irak: les États-Unis, Israël et l’Arabie saoudite en ont assez de l’Iran (4/4)



Articles Par : Elijah J. Magnier

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