N’oubliez pas la Palestine

Vers une réalité raciste unique

Des tunnels et des routes, des bouclages et des barrages, et le Mur de ségrégation – vers une réalité raciste unique.

De nouveaux travaux de construction ont démarré récemment à l’extrémité ouest d’Al-Khader, au sud de la région de Bethlehem en Cisjordanie occupée. Des énormes engins, protégés par un imposant service de sécurité, provoquant d’énormes nuages de poussière, ont défoncé le sol bruyamment près de maisons habitées. La principale entrée à l’ouest, qui habituellement reliait Bethlehem à tout le sud de la Cisjordanie et des villages voisins, a eu le malheur de se trouver situé à l’ouest de la route 60 menant aux colonies, et les habitants ne peuvent plus l’utiliser. L’administration civile israélienne a ordonné aux habitants d’utiliser l’entrée sud à Al Kader comme solution temporaire jusqu’à ce que le tunnel pour palestiniens seulement, qui est toujours en construction à l’entrée principale soit terminé.

Quand le mur et ses tunnels de liaison seront en place, la plupart des terres agricoles se retrouveront à l’ouest et au sud de la barrière, ce qui provoquera l’isolement des fermiers de leurs terres et la perte de leur principal moyen de subsistance.

Les palestiniens dans toute la Cisjordanie subissent de telles situations. De larges morceaux de terres ont été isolés derrière le mur et leur accès dépend de procédures spécifiques et de permis délivrés par l’administration civile israélienne. Obtenir ces permis est compliqué comme en ont fait l’expérience les palestiniens du nord de la Cisjordanie là où le mur est terminé.

La municipalité d’Al Khader a engagé plusieurs avocats en Israël pour suivre le cas, et a commencé à organiser des manifestations.

L’ouverture de ce tunnel fait partie d’un projet plus large d’ouverture de routes et de tunnels à travers la Cisjordanie. Ce plan politiquement orienté a pour but de construire un réseau de routes destiné aux seuls palestiniens et un réseau destinés aux seuls israéliens. Selon des cartes et des ordres militaires délivrés dans certains districts, les routes pour palestiniens seront plus sinueuses et traverseront des zones montagneuses et des terrains accidentés, identiques à la route alternative reliant actuellement la zone d’Hébron et le nord de la Cisjordanie via Taqou à l’est de Bethléem. Plusieurs autres routes de ce type ont déjà été construites dans le nord de la Cisjordanie.

C’est difficile de mesurer les effets directs et les violations des droits de base civiques des palestiniens, tels que les droits économiques et sociaux, mais le plus important c’est la création systématique de faits accomplis sur le terrain qui constituent des obstacles majeurs à la capacité des palestiniens à réaliser leur projet d’état sur leur propre terre. Toutes ces mesures israéliennes – construction de tunnels, le Mur de ségrégation, le bouclage de vastes surfaces de terre en Cisjordanie – ont pour but d’établir un système raciste unique quant à son ampleur et son impact. On peut voir les marques de ce système sur le terrain avec les points suivants :

Le Mur de ségrégation :

La cour internationale de Justice a émis un avis non contraignant concernant ce Mur, le considérant comme illégal et a appelé à son démantèlement. C’est devenu l’objectif du peuple palestinien et des mouvements de solidarité et d’un certain nombre d’activistes israéliens, étant donné que c’est un exemple physique dramatique de l’Apartheid et de tous ses effets, incluant l’isolement des terres agricoles, la division de la Palestine et la destruction du système social des populations autochtones. Cela à aussi un effet boomerang, car cela crée un système d’isolement avec des conséquences négatives pour les israéliens. Le Mur de béton s’étend du nord au sud, près de la frontière de 1967, mais pénètre souvent à l’intérieur de la Cisjordanie. Des murs ont été construits près de plusieurs colonies, et dans un certain nombres d’endroits, le mur de ségrégation sépare les villes palestiniennes les unes des autres et les divisent en entités disparates. Suivant les ordres militaires, Abu Dis, Qalqilya et Hébron vont – où subissent déjà – un tel découpage.

Des routes et tunnels pour palestiniens seulement et israéliens seulement :

L’objectif de ce plan c’est de construire un réseau de routes prévues pour être utilisées par les palestiniens d’une part et un autre prévu pour être utilisé par les israéliens seulement. La plupart des routes servant au trafic des israéliens seulement ainsi que les routes de contournement des colonies ont déjà été achevées. Ce qui est nouveau, c’est la dissociation totale des routes servant au trafic à l’intérieur de la Cisjordanie, une idée née il y a quelques années au cœur d’Hébron, où les palestiniens avaient déjà interdiction d’utiliser les routes des colons et devaient se contenter de longs chemins tortueux.

Ces routes de contournement pour les colons serpentent à l’intérieur même d’Hébron. Ainsi, il existe maintenant la « route des fidèles » qui lie Kiryat Arba, Karsina et les autres colonies à la Mosquée Ibrahim (le tombeau des patriarches) dans le centre ville. Une autre route, créée sur ordre militaire, lie la colonie de Ramat Yeshai situé à l’extrémité sud ouest de la vieille ville au centre ville,complétant ainsi la division de la ville en créant des routes pour les colons seulement, laissant aux palestiniens des routes alternatives plus longues. Le plus important, c’est que cette division de ces routes sur une base raciale a des ramifications dévastatrices sur la vie quotidienne des palestiniens, leur structures sociales, économiques éducatives et limite considérablement leur liberté de mouvement.

C’est dans ce contexte, que le système de routes séparées est appliqué à Al-Khader, et d’autres ont été démarrés dans des zones de la Cisjordanie. Toute une série d’ordres militaires ont été décrétés pour la construction d’autres tunnels identiques dans la plupart des districts de la Cisjordanie. Il y a un an, 4 ordres militaires ont été promulgués dans le sud de la Cisjordanie pour la construction de 4 tunnels dans le district d’Hébron pour le déplacement des palestiniens seulement. Les municipalités et propriétaires dont les terres étaient confisquées à ces fins, se sont adressés au tribunal israélien, contestant cet ordre.

L’expert pour les terres du comité de défense des terres Abdel Hadi Handash, a dit : « selon les ordres militaires, et les cartes publiées, 4 tunnels seront construits aux quatre coins des districts pour que les israéliens et les palestiniens soient complètement séparés. Cependant, ce n’est pas tout. Ces tunnels auront comme résultat un contrôle israélien sur la plupart des terres et un accroissement de leur contrôle sur les villes des districts. Cela interdira tout essor naturel palestinien. Ces tunnels et routes mèneront à plus d’isolement des villes palestiniennes les unes des autres, réduisant les mouvements aux rues et routes et fermant plusieurs autres routes et entrées que les citoyens ont l’habitude d’utiliser. »

Déclaration de vastes étendues de terre comme « zones militaires fermées » :

ces derniers mois, les autorités israéliennes ont réactivé l’une des politiques qui a accompagné l’occupation depuis son début, la confiscation de terres et la déclaration de zones choisies comme « zones militaires fermées « sur lesquelles les palestiniens ont alors interdiction d’entrer. En même temps que leur maison, des familles perdent souvent une source majeure de subsistance par la réquisition des terres. C’est une politique établie depuis longtemps, et qui est maintenant appliquée sur une vaste échelle. 3 nouveaux ordres militaires ont été délivrés, selon lesquels 80 000 dunams de terres (8000ha) dans le sud de la Cisjordanie ont été confisqué et enclos, les autorités israéliennes le justifiant pour créer une zone tampon. Ces zones sont situées au nord du mur de ségrégation, à l’intérieur de terres occupées en 1967.

Cette politique a été étendue à la région nord de la vallée du Jourdain en Cisjordanie il y a quelques mois, quand un certain nombre de check points ont été établis et l’endroit déclaré zone militaire fermée. Cette zone, qui compte au total approximativement 440 000 dunams (44 000 ha) comprend une population de 54 000 habitants – en même temps que l’une des plus riches source d’eau en Palestine.

Les check points permanents ont été installés pour empêcher les non résidents de la zone d’entrer, renforcés par des barrières faites de matériaux naturels comme des barricades de terre et des tranchées. A cause de ces barricades les résidents ont été empêchés d’entrer sur leurs terres agricoles ou de se déplacer dans la région. De même, faisant partie de cette politique d’étranglement dans la vallée du Jourdain, des douzaines de maisons, et d’installations agricoles ont été démolies et des dizaines de familles déplacées. Au début du mois, un certain nombre de familles ont été expulsées de leurs terres sous le prétexte que leur lieu de résidence n’était pas dans la région de la vallée du Jourdain.

La plupart des propriétaires dans le nord de la vallée du Jourdain habitent dans les villes voisines, comme celle de Tubas, et ont été interdits d’accès à leurs terres agricoles pour les récoltes de cette année. Au lieu de cela on leur a dit que la zone était une « zone militaire fermée ». A la fois dans le nord et le sud de la Cisjordanie, de vastes régions ont été fermées, confinant et expulsant les palestiniens. Des check points ont été construits, des barbelés installés, des projets de colonies développés, et des routes de contournement mises en service. Deux développements opposés mais néanmoins en collusion, sur la même parcelle de terre – l’expansion des colonies d’un côté, et le confinement des palestiniens de l’autre – montre encore une autre face du système d’apartheid.

En plus, des douzaines de points d’un nouveau type sont installés. Il y a plus de 500 barricades militaires et de terre à travers toute la Cisjordanie occupée, considérées comme entrées des villes palestiniennes et plus significativement comme des points de passages internationaux. Le point de passage de Qalandiya, considéré maintenant par Israël comme un poste de passage international bien que situé sur des terres occupées en 1967, en est un exemple. Des check points permanents qui renvoient au système de bandoustans de l’Afrique du sud, ont aussi été installés pour diviser les districts sur les terres palestiniennes.

En ce basant sur ces faits, c’est juste de dire que la carte future de la réalité pour la Palestine c’est un système d’Apartheid qui s’étend horizontalement pour inclure tous les territoires occupés palestiniens du nord au sud et d’ouest en est. Verticalement, il inclut tous les aspects de la vie – il sépare les villes des unes des autres, divisent les routes et séparent les personnes les unes des autres, c’est un système d’Apartheid qui séparent les montagnes, les plaines, et les gens tout à la fois ; c’est un système extrême dans son racisme et son impact. Nous sommes face à une guerre d’un nouveau type, une guerre de tunnels et de restrictions, et de mesures plus profondes d’isolement et de séparation sur une base raciste.

Ahmad Jaradat 8/08/06 coordinateur du projet sur la violence des colonies pour l’AIC (Alternative Information Center www. http://www.alternativenews.org/)



Articles Par : Ahmad Jaradat

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