Nicolas Maduro interdit toute expulsion de paysans et exige d’arrêter les responsables de ces exactions

Photo : Jhenzi Erazo González, membre de la Cooperative Caño Avispero, reçoit le titre de propriété des terres.

“Compagnon Castro Soteldo (Ministre d’Agriculture et des Terres), compagnon Aristóbulo (Ministre des Communes), enquêtez et allez-y à fond. Dites-moi ce qu’il y a à faire et à qui couper la tête !” a dénoncé le Président Maduro lors d’une transmission en direct par la télévision publique VTV. “Je ne veux pas de grands propriétaires, de corrompus ni de complices de grands propriétaires dans le gouvernement bolivarien ! Qu’on les chasse tous ! Que soient arrêtés tous ceux qui ont emprisonné cette petite fille ! En prison, ces voyous !”

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Angélica Palencia et sa fille Juana María. Photo: La Tabla

Maduro faisait allusion à Juana María, une fillette de 5 mois dont la mère, la paysanne Angélica Palencia, de 30 ans, fut une des personnes arrêtées le 16 mars dans la municipalité Obispo Ramos de Lora de l’État de Mérida. La fillette, pour pouvoir être allaitée, était amenée plusieurs fois par jourjusqu’au siège du Corps d’Investigations Scientifiques et Pénales et Criminelles (CICPC) de El Vigía, où ont été reclus les 32 paysans, dont la maman.

“Quel besoin y avait-il de faire entrer cette fillette dans une cellule froide du CICPC?” s’est exclamée durement Jhenzi Erazo González, membre de la Coopérative Caño Avispero, “une des victimes de El Vigía”, ainsi que l’a appelée le Président vénézuélien lui-même, qui a lui a remis en main propre les titres de propriété socialiste agraire et les documents d’enregistrement agraire en faveur de la coopérative mentionnée, l’autorisant à  cultiver 350 hectares de terre de qualité A-1, de niveau optimal pour l’agriculture. Comme l’a dénoncé Angelica González, ces terres ne sont pas mises en culture par les grands propriétaires, qui y parquent des bœufs.

González a expliqué que la terre de La Magdalena, où ils travaillent, sera rebaptisée “Juana María” en honneur à la fillette de 5 mois qui l’a accompagnée lors des jours de prison.

 

Comme l’a expliqué le site Web La Tabla, le 16 mars dernier environ trente paysans étaient en train de travailler la terre de La Magdalena avec l’autorisation de l’Institut National des Terres du 21 septembre 2017 dernier leur permettant de mettre en production 350 hectares qui n’étaient pas cultivés. Des commissions policières du CICPC et de la Garde Nationale se sont alors rendues sur place avec deux juges du Ministère Public. Trois leaders paysans furent abordés avec de supposés mandats d’arrêt.

Leurs compagnons s’opposèrent à l’arrestation et assurèrent aux policiers qu’en cas d’arrestation de leurs compagnons, “il faudrait tous les emmener”, comme l’explique aussi la journaliste Indira Carpio, de sorte que les 32 travailleurs furent arrêtés. Parmi eux se trouvaient onze femmes et six personnes âgées, dont une atteinte d’une affection cancéreuse.

La mesure de privation de liberté fut ordonnée par la Juge du Pôle 6 de contrôle de Mérida, Rosario Méndez. La terre en conflit a pour supposé propriétaire la famille Celis Aranguren, qui – selon le site La Tabla – possèdent huit autres grandes propriétés dans la région et qu’elle voue à l’élevage alors qu’il s’agit de terres de catégorie 1 et 2, dont l’usage doit être légalement réservé à l’agriculture.

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Photo: La Tabla

Finalement, le 25 mars, les paysans ont été libérés. Le jour suivant, le Procureur Général de la République, Tarek William Saab, a annoncé que le Parquet a demandé à la Juge du pôle 6 de Mérida, de revoir sa mesure de privation de liberté contre les 32 paysans. Il a indiqué que ces paysans ont été arrêtés arbitrairement “en violation des Lois de la République, qui consacrent le droit à la terre comme Droit Humain” et a manifesté sa “ferme volonté d’affronter avec la loi les grands propriétaires”.

Il a également indiqué que le Ministère Public “assumera la défense des droits humains de nos paysannes et paysans quand ils sont victimes de puissants secteurs économiques qui veulent faire revenir le Venezuela à l’époque des grandes propriétés (latifundios) ”.

Nicolas Maduro: « J’interdis totalement les expulsions des communautés paysannes. Elles sont totalement interdites ! ». L’Assemblée Nationale Constituante ouvrira une enquête.

“J’ai demandé à l’Assemblée Nationale Constituante qu’on ouvre une enquête et que dans les 15 jours elle me remette un rapport sur les expulsions illégales, répressives, dont a été victime le mouvement paysan ces dernières semaines dans tout le pays” a insisté le Président Maduro lors de la transmission de VTV. “J’exige une enquête approfondie pour punir sévèrement ceux qui s’allient aux grands propriétaires. J’interdis totalement les expulsions des communautés paysannes. Elles sont totalement interdites !” a exprimé le mandataire national.

“Celui dont je découvre qu’il a des liens avec les grands propriétaires et utilise la force publique pour poursuivre et expulser comme cela s’est produit à El Vigia, qu’il soit sûr que je vais le faire traduire en justice et qu’il sera expulsé des rangs de la révolution ! Je le chasserai du gouvernement ! Les expulsions sont interdites ! Assez de corruption et de complicité avec les grands propriétaires ! Ca suffit ! Nous ne sommes pas une révolution complice des grands propriétaires ! Nous sommes une Révolution des paysans, des paysannes, de la justice !” a souligné le président vénézuélien.

Epurer les institutions

Après avoir reçu son titre agraire des mains du Président Maduro, Jhenzi Erazo González s’est exclamée : “Malgré tant d’intimidations de la part des différents corps de sécurité, nous sommes toujours en lutte ! Aujourd’hui notre président Nicolás Maduro Moros fait de notre rêve une réalité. Aujourd’hui, je parle au nom des 32 compagnons injustement détenus par le CIPC d’El Vigía à cause du caprice des grands propriétaires et latifundiaires et de la complicité de fonctionnaires qui sont toujours dans une institution créée en révolution telle que l’Institut National des Terres (INTI). Monsieur le Président, comment est-il possible que deux fonctionnaires aient apporté leur concours à ces actes de répression contre nous ?” s’est demandé González tout en dénonçant les fonctionnaires Yelibel Hernández et Ana Karina Pérez qui « ont participé pour que nous soyons humiliés de la manière la plus cruelle”.

La paysanne a également exigé que soit destituée la juge qui a pris la mesure d’arrestation, au mépris du titre remis par le président de l’Institut National des Terres à ce moment-là, mesure aujourd’hui ratifiée par le Président de la République.

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González a invité le président Maduro, au nom des 32 compagnons arrêtés et de la fillette de 5 mois a ce qu’il “parcoure avec nous tout l’axe Panaméricain et qu’il observe le travail que nous effectuons avec le Front Élargi Unifié de Résistance Paysanne, avec l’appui du Parti  Tupamaro et notre organisation, qui sont ceux qui nous appuient”.

Elle a aussi demandé au Président Maduro de mener les enquêtes pertinentes pour que “cette affaire n’en reste pas là”. Elle a indiqué que d’autres compagnons ont subi un déplacement forcé à la La Buena Esperanza, au cours duquel 11 compagnons furent arrêtés et qui sont encore “devant les tribunaux”, alors que l’Institut National des Terres se soit prononcé en leur faveur. “Ces compagnons ont été traités d’envahisseurs de terre et considérés comme des terroristes, et cela nous fait mal car nous sommes une seule et même famille à l’échelle de tout une nation, nous voulons produire et faire avancer ce pays”.

González a lancé un appel à l’Institut National des Terres pour qu’il “travaille la main dans la main avec nous. Sur l’axe Panaméricain nous travaillons avec trois fois rien, parce que nous n’avons pas de machines. AgroPatria (entreprise publique d’équipements agricoles) ne nous permet pas d’acheter parce que nous n’avions pas de titre agraire. Aujourd’hui nous l’avons, compagnons !”

Vous ne deviez pas vous laisser arrêter. A présent, occupons les terres pour les faire produire !”

“Je ne crois pas dans les paroles des bureaucrates ! Je crois dans la parole de cette paysanne pauvre !” a répondu le président vénézuélien après avoir écouté González. Il a insisté sur le fait qu’il faut passer de la mentalité de résistance à la mentalité offensive et productive. “Le peuple doit posséder la conscience du pouvoir. Vous ne deviez pas vous laisser arrêter. Je ne me serais pas laissé faire. En vous disant cela, tout est dit. Que celui qui a des oreilles entende bien. Ne vous laissez pas faire. Je ne me serais pas laissé faire ! (..) Et à présent il faut occuper les terres pour produire”, a insisté Maduro.

Le 18 avril le Venezuela atteindra les six millions d’hectares remis aux paysans.

Le président a annoncé que le 18 avril “nous allons atteindre un objectif auquel Hugo Chavez accordait beaucoup d’importance : la Révolution Bolivarienne aura octroyé six millions d’hectares aux paysans ”. Pour atteindre cet objectif, a expliqué Maduro, 44.000 hectares de plus ont été remis aux travailleurs ruraux, dont il a remis ce lundi une partie sous la forme de nouveaux titres de propriété aux paysans.

Le président a indiqué qu’il est nécessaire d’être autocritiques et d’augmenter la production agraire pour aider le pays à sortir de la problématique qu’il subit actuellement. Il a rappelé qu’en Colombie plus de 300 mille citoyens ont été assassinés en 70 ans à la suite, entre autres causes, de la lutte pour la terre. “Les terres en Colombie sont aux mains de 10 familles. Au Venezuela, la propriété des terres a commencé à se démocratiser avec l’arrivée de la Révolution Bolivarienne, la Loi des Terres (approuvée en 2011 par le président Hugo Chavez), avec la Constitution Bolivarienne (de 1999)”. Nicolas Maduro a rappelé que la Constituante accélèrera ce processus de démocratisation « pour que les terres appartiennent à ceux qui la cultivent ».

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“Je demande plus d’efforts productifs. Nous ne produisons pas la quantité suffisante pour couvrir les besoins d’un pays qui veut le socialisme, qui veut l’égalité, le futur. Qui va produire pour nous ? Donald Trump ? Santos ? Nous devons produire nous-mêmes et je vais vous demander un plan productif” a dit le Chef de l’État en s’adressant aux leaders des mouvements paysans et aux ministres Castro Soteldo et Istúriz.

Maduro a également convoqué l’État Major Paysan pour que le prochain 25 avril se tienne une réunion de travail dans laquelle seront revus des plans réimpulsant le secteur agricole du pays. Il a appelé les travailleurs ruraux à revoir les plans de production sur les six millions d’hectares octroyés au secteur paysan, afin d’ « approuver les ressources en bolivars et en Petros, pour aller vers un grand plan productif de l’agriculture vénézuélienne ».

Source : http://albaciudad.org/2018/04/maduro-32-campesinos-detenidos-el-vigia-video/

Traduction : Thierry Deronne pour Venezuela Infos



Articles Par : Luigino Bracci Roa

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