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Obama du rêve à la réalité.
Par Rag
Mondialisation.ca, 17 mars 2009
Geopolintel 17 mars 2009
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Depuis l’élection de Barack Obama, les Etats-Unis ont tourné une page de leur histoire. Ce serait la victoire du bien sur le mal, les néo-conservateurs ne sont désormais plus les maîtres de Washington. Mais il semble que la passation de témoin se soit faite bien avant le résultat des élections présidentielles de 2008.

Une sorte de « Coup d’Etat »

Les tortures et les exactions des milices privées du Pentagone de Rumsfeld ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. La communauté internationale n’en pouvait plus de se raidir devant tant de manquement envers le droit international.

En décembre 2006, Robert Gates succède à Donald Rumsfeld à la tête du Pentagone. Cette journée fut le signe annonciateur que le congrès américain pouvait enfin vaincre la dynastie Bush et son cortège de néo-conservateurs va-t-en guerre. Georges Bush sera destitué de sa responsabilité des seize agences de renseignement américain, il est alors isolé du pouvoir.

On apprendra que dans le rapport de la CIA mandaté par le Congrès, l’Iran a stoppé définitivement son programme nucléaire militaire depuis 2003. Le sort de ce pays ne sera finalement pas celui de l’Irak qui fut vendu comme une marchandise de supermarché.

Les tortures infligées dans la prison d’Abu Graib deviendront finalement le prétexte pour créer la commission d’enquête Baker Hamilton en 2006. Celle-ci prévoit que l’image des USA est un frein pour sa diplomatie et son économie.

Le duo Baker Hamilton patronné par Brzezinski expliquera qu’il est maintenant temps de renouer le dialogue avec les ennemis désignés dans le rapport du PNAC « Reconstruire les défenses de l’Amérique ». Le trio Bush-Cheney-Rumsfeld ne peut plus désigner à sa guise les futures cibles de sa guerre préventive.

Obama semble l’emporter sur Bush en redorant l’image des Etats Unis tout en lui attribuant le terme de « première démocratie au monde », tout devient possible. Yes We Can !

Dans quel contexte Obama va-t-il appliquer sa politique internationale ?

Du point de vue européen, les Etats-Unis sont un pays ruiné par l’immoralité de la finance et par les programmes d’armement stratégique du bouclier anti-missile. Nous avons assisté au déclin de l’Empire soviétique qui privilégia la course à l’armement contre le développement économique de son pays. Maintenant c’est l’Empire américain qui vacille.

Les dépenses pharaoniques de l’ABM, cette arme surréaliste, ne peuvent se concrétiser sans son application dans l’OTAN et donc sans l’aval de l’Europe. Lors du mandat français à la présidence de l’Europe, Nicolas Sarkozy eut comme mission de faire valider le traité de Lisbonne. Son échec est somme tout relatif car il a décidé de réintégrer la France dans l’alliance atlantique de L’OTAN. Mais avant de faire l’Europe de la défense il fallait faire l’Europe des nations.

Le vote du NON irlandais a stoppé la ratification du traité de la communauté européenne et nous assistons à une construction européenne calquée sur celle de l’OTAN malgré le refus de certains peuples.

Des interrogations demeurent.

Cette armée créée pour contrer le rideau de fer de l’URSS a-t-elle encore une légitimité ?

Le 5 juin dernier, à l’occasion d’un rapport sur la Politique Extérieure et de Sécurité Commune, les députés européens ont approuvé un paragraphe qui apporte une précision sur ce qu’ils entendent faire des sièges français et britanniques au Conseil de Sécurité des Nations Unies. Le Traité de Lisbonne conférant à l’Union européenne la personnalité juridique, elle lui apporte aussi la possibilité de siéger dans des organismes internationaux indépendamment des Etats qui la composent. Ainsi, le texte adopté (paragraphe 53 du projet de rapport Jacek Saryusz-Wolski A6-0198/2008 et § 54 du texte adopté) « rappelle que l’institution de l’Union en tant que personnalité juridique soulève la question de son statut au sein des organisations internationales telles que les Nations Unies » et la partie suivante adoptée par appel nominal « estime que le statut futur de l’Union au sein des Nations unies devrait être à la mesure de sa contribution financière et politique. »

C’est à dire, en clair, que l’Union européenne devrait, à terme, grâce à sa personnalité juridique, remplacer les Etats membres qui siègent à l’ONU. Les sièges de la France et de la Grande Bretagne au Conseil de sécurité sont particulièrement visés, comme dans le rapport Laschet adopté en 2005.

Le projet de défense commune se trouve contrarié par l’installation des missiles en Pologne ainsi que par le radar en Tchéquie. De plus, il n’y a pas de consensus autour de ce projet parmi les pays membres de l’Union européenne.

La Tchéquie, succédant à la France pour présider l’Europe, semble s’orienter vers une construction défensive et non progressiste.

En outre, la Russie emploie la menace de suspendre ses livraisons de gaz comme arme diplomatique afin de stopper la provocation érigée au seuil de ses frontières.

L’exemple de l’offensive géorgienne en Ossétie est un cas d’école qui démontre la responsabilité de l’Europe dans l’agression envers la Russie. Selon l’article 5 du traité de l’Atlantique, chaque pays de l’OTAN se doit de riposter collectivement face à l’agression d’un état membre. Si la Géorgie avait été intégré dans l’OTAN, comment la France aurait-elle pu éviter un engagement dû à un pays allié dans l’affrontement contre la Russie? Nicolas Sarkozy a mené les négociations pour mettre fin au conflit en Ossétie du sud, tout en ménageant les intérêts de l’Allemagne et l’ approvisionnement en gaz de l’Europe.

Dans ces conditions, Obama devrait considérer que l’Europe si chère à De Gaulle, doit se faire de l’Atlantique à L’Oural pour ne pas recréer une nouvelle guerre froide dans laquelle nous seront impliqués.

La course au surarmement est-elle finie?

Les deux écrits fondateurs de la politique étrangère américaine sont les rapports du Defense Planning Guidance et celui du PNAC.

Le père de George Bush prononça le 11 septembre 1990 son discours sur le « Nouvel Ordre Mondial. Cet ordre ne peut se faire que dans l’adversité et la guerre, puisque la doctrine de ces deux écrits mentionne que les USA ne tolèreront pas qu’une autre nation s’oppose aux Etats-Unis.

Le complexe militaro-industriel a atteint son paroxysme avec le budget 2008 du Pentagone, soit 500 milliards de dollars, alors que la crise financière annoncée venait d’éclater aux Etats Unis.

Barack Obama a décidé d’augmenter le budget de la défense américaine et fait ainsi mieux que son prédécesseur George Bush en la matière. Le projet de budget 2010 pour l’Etat fédéral américain comprend une enveloppe totale de 663,7 milliards de dollars pour la défense, incluant le coût des guerres en Irak et en Afghanistan, soit une hausse d’environ 1,5% sur un an. Le gouvernement demande une enveloppe supplémentaire de 130 milliards de dollars pour financer les guerres en Irak et en Afghanistan en 2010.

Finalement, il faut se poser la question de savoir qui contrôle le budget du Pentagone. Nous n’en savons strictement rien puisque les Etats-Unis et le Pentagone sont au bord de la faillite.

Ils doivent s’acquitter du remboursement des intérêts de la dette militaire de l’ordre de 138 milliards de dollars. L’argent étant le nerf de la guerre, verra-t-on la guerre devenir le nerf de l’économie ? La guerre sera-t-elle l’échappatoire à cette crise du système financier mondial ?


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