Obama se sent « menacé » par le Venezuela

Le président a annoncé une mesure d’« urgence nationale » contre le Venezuela qui représenterait « une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique extérieure  ». Maduro a immédiatement rappelé son plus haut représentant à Washington.

Le président étasunien, Barack Obama, a présenté hier le Venezuela comme une « menace » à la sécurité nationale et a publié un décret annonçant des sanctions à l’encontre de sept hauts responsables vénézuéliens. Son homologue, Nicolás Maduro, qui accuse les Etats-Unis de financer des campagnes de déstabilisation dans son pays déclare qu’ « Obama a pris l’initiative la plus agressive, injuste et désastreuse jamais subie par le Venezuela ». Son gouvernement a immédiatement rappelé son chargé d’Affaires à Washington, Maximilien Sánchez Arveláiz. En outre, le vice-président du parti au pouvoir, le Parti Socialiste Uni du Venezuela (PSUV), Diosdado Cabello, affirme que les Etats-Unis prévoient des « frappes militaires » contre son pays.

Obama a annoncé une mesure « d’urgence nationale » face à la « menace inhabituelle et extraordinaire » que représente la situation dans le pays sud-américain pour la sécurité nationale et la politique extérieure de Washington. Les sanctions prévues par le décret « sont basées sur la loi en faveur de la défense des droits de l’homme et de la société civile de 2014 au Venezuela, ratifiée par le leader démocrate le 18 décembre 2014 et vont au-delà des conditions requises par cette législation », soutient le document de la Maison Blanche. Le porte-parole, Josh Earnest, a déclaré à cet égard que « les fonctionnaires vénézuéliens passés et actuels qui violent les droits de l’homme de leurs concitoyens et se livrent à la corruption publique n’ont pas leur place ici ; par ailleurs nous disposons maintenant des moyens nécessaires pour geler leurs avoirs et les empêcher d’utiliser les systèmes financiers des Etats-Unis ». Il a également affirmé qu’Obama se montrait « particulièrement préoccupé par l’ampleur des tentatives d’intimidation du gouvernement vénézuélien à l’encontre de ses opposants politiques ». La Maison Blanche réclame de ce fait que le gouvernement de Maduro « libère tous les prisonniers politiques, c’est-à-dire des dizaines d’étudiants, le leader de l’opposition, Leopoldo López, et les maires Daniel Ceballos y Antonio Ledezma ».

Les sanctions visent Antonio José Benavides, commandant des Régions Stratégiques pour le Développement Intégré des Forces Armées Nationales Bolivariennes (FANB) ; Gustavo González López, directeur général des Services de Renseignements Nationaux ; Justo Noguera Pietri, président de la Corporation Vénézuelienne de Guyane (CVG), compagnie minière étatisée. Cette liste comprend également Katherine Haringhton, procureur au niveau national du 20ème bureau de district du ministère public du Venezuela ; Manuel Eduardo Pérez Urdaneta, directeur de la Police Nationale Bolivarienne ; Manuel Bernal Martínez, chef de la 31ème Brigade Blindée de Caracas, de l’Armée Bolivarienne et ex directeur général des Services Secrets, et Miguel Vivas Landino, inspecteur général des Forces Armées Bolivariennes. Le décret doit conduire à bloquer ou geler les avoirs et les biens des personnes concernées par ces sanctions, sur le sol américain, et interdit aux citoyens usaméricains toute transaction commerciale avec elles.

Diosdado Cabello, président de l’Assemblée Nationale et vice-président du PSUV, fait corps avec ces fonctionnaires et a récusé les sanctions « de façon percutante ». « Monsieur Obama, vous et votre impérialisme allez devoir sanctionner de nombreuses personnes, un très grand nombre de vénézuéliens qui sommes prêts à donner nos vies pour la révolution bolivarienne », a-t-il mis en garde. Il ajoute : « De quelles armes disposons-nous pour menacer les Etats-Unis d’Amérique ? Seulement la dignité, le courage, l’amour, la fermeté d’un peuple qui a opté pour sa liberté ». Hier, le gouvernement vénézuélien a ainsi rappelé “immédiatement ” son chargé d’Affaires aux Etats-Unis et plus haut diplomate en poste à Washington, Maximilien Sánchez Arveláiz. Les relations entre Washington et Caracas se trouvent donc actuellement entre ses mains.

La ministre vénézuélienne des Affaires Étrangères Delcy Rodríguez a déclaré hier qu’elle répondrait « très vite » à l’ordonnance rendue par le président Obama pour l’application des nouvelles sanctions. « Nous ne souhaitons pas mélanger les politiques internationales et nous ferons très vite connaître la position du Venezuela quant à la portée de ces déclarations », a-t-elle annoncé lors d’une conférence de presse donnée pour répondre à d’autres questions internationales. Le gouvernement avait auparavant qualifié les sanctions d’ « arrogantes ». La semaine dernière, Maduro avait déjà annoncé la diminution du personnel diplomatique sur la centaine de fonctionnaires en poste à l’Ambassade des Etats-Unis à Caracas et avait décidé de la demande de visas de tourisme pour les nord-américains se rendant au Venezuela.

Les Sénateurs et membres du Congrès latinos ont applaudi la décision d’Obama de sanctionner les sept fonctionnaires vénézuéliens, bien qu’ils considèrent que l’administration démocrate ait vu trop juste et qu’il conviendrait de compléter la liste des « 7 ». Les sénateurs Robert « Bob » Menéndez et Marco Rubio ont appelé Obama à prendre des mesures contre le ministre de la Défense vénézuélien Vladimir Padrino pour l’aval qu’il donne aux forces de sécurité de son pays à l’usage de « la force meurtrière contre des manifestants pacifiques » au Venezuela. « Ce général devrait figurer en bonne place sur la liste, mais curieusement il en a été écarté », se plaint Rubio.

Les relations entre le Venezuela et les Etats-Unis ont subi des hauts et des bas jusqu’en 2010, où les deux pays ont rappelé leurs ambassadeurs respectifs. La tension s’est accrue ces dernières semaines après les accusations portées par le gouvernement vénézuelien contre le pays du Nord qui serait derrière un coup d’État avorté le 11 février.

« Manigances putschistes »

« Le décret signé aujourd’hui (pour hier) par le président Barack Obama dans lequel il dénonce la menace extraordinaire et inhabituelle que représente le Venezuela pour la sûreté nationale et la politique extérieure des États-Unis est la justification d’une attaque militaire contre le Venezuela », a déclaré Oscar Laborde, directeur de l’Institut d’Études de l’Amérique latine (Instituto de Estudios de América latina) et dirigeant du Front Transversal (Frente Transversal). « Il est maintenant évident que les manigances putschistes de la droite vénézuélienne dénoncées par le président Nicolás Maduro bénéficient du soutien des États-Unis, qui n’attend qu’une chose : des troubles intérieurs dans ce pays pour pouvoir intervenir militairement, enrayer le processus bolivarien et avoir accès au pétrole, qui a déjà servi de déclencheur à ses nombreuses guerres », conclut Laborde.

Atilio Boron

Article original : Obama se siente “amenazado” por Venezuela, Página 12. Buenos Aires, 10 mars 2015.

Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Florence Olier-Robine

El Correo. Paris, le 12 mars 2015

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Articles Par : Atilio A. Boron

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