Objectifs et moyens de la stratégie militaire de haute technologie d’Obama
Comme l’on peut constater ces derniers temps dans diverses publications des revues spécialisées, l’administration Obama veut tenir, malgré la situation économique peu satisfaisante dans le pays, à la position d’hégémonie des Etats-Unis à l’avenir. Un des résultats en est la confrontation croissante avec la Chine dans le Pacifique occidental. Contrairement à la stratégie militaire de la précédente administration Bush, qui était intellectuellement plutôt simple et qui est aujourd’hui désigné comme presque archaïque, Obama mise sur la haute technologie pour poursuivre l’hégémonie géostratégique des Etats-Unis dans le monde. Il s’agit de la cyberguerre à l’aide des virus informatiques et des vers informatiques contre des installations sensibles d’un adversaire tel que les réseaux informatiques et d’électricité. Souvenons-nous du virus Stuxnet avec lequel le programme d’armement nucléaire de l’Iran a été sapé en 2010. Les informaticiens comparent Stuxnet en analogue à la guerre aérienne étant une arme de précision dans la cyberguerre.
Parmi les moyens de la haute technologie de l’administration Obama comptent également les drones de combat UCAV (Unmanned Combat Aerial Vehicles). Limité uniquement par quelques règles politiques, les dirigeants indésirables ou des membres clés d’Al-Qaïda sont liquidés par des bombes guidées du type Hellfire d’UCAV qui sont dirigées par des officiers stationnés dans le Nevada. Qu’il y ait des dommages collatéraux, c’est-à-dire des meurtres de civils innocents, les mandataires d’une mission UCAV à Washington DC et leurs opérateurs dans le Nevada l’acceptent.
Le troisième instrument important de l’arsenal stratégique d’Obama et de son administration sont les unités d’élite hautement qualifiées de Special Operations Forces (SOF), comme Seal Team Six et Delta. Avec ces forces spéciales, les adversaires de haut rang sont liquidés directement. Un exemple en était la liquidation d’Oussama Ben Laden dans son repaire pakistanais Abbottabad en 2011. La recherche des informations nécessaires, requises par le Waterboarding (simulation de noyade) auprès des partisans d’Al-Qaïda capturés, revient à la CIA qui a pris de plus en plus en main le rôle du responsable dans la guerre contre Al-Qaïda et qui a ainsi évincé partiellement les forces armées de cette fonction. L’élimination ciblée des dirigeants adversaires montre également une certaine analogie avec les actions des cadres de la guérilla en Europe au milieu des années 80 du XXe siècle. En particulier, les terroristes de la RAF voulaient affaiblir l’Etat et la société de la République fédérale d’Allemagne en tuant les hauts dirigeants de l’Etat et de l’économie pour enfin détruire l’ensemble de la société. L’administration Obama veut parvenir, analogue aux terroristes européens du siècle dernier, à l’effondrement de son adversaire par l’élimination de la direction d’Al-Qaïda.
Pourtant, les axiomes qui déterminent cette stratégie sont intéressants. Pendant que l’administration Obama utilise les moyens high-tech déjà décrits secrètement, elle laisse à ses alliés l’emploi des moyens conventionnels, tels que le bombardement des adversaires de l’air ou/ et le soutien des soi-disant rebelles contre les dictateurs désagréables. On peut citer les exemples comme l’intervention en Libye et au Mali par les alliés européens ou le commandement de la soi-disant Free Syrian Army par la Turquie et l’Arabie saoudite. Une tendance semblable se montre également dans le conflit entre le Japon et la Chine concernant les îles inhabitées dans le Pacifique occidental. Les Etats-Unis se limitent dans tous ces conflits et affrontements sur la logistique. Cette stratégie et vision des choses ont de nombreux points communs avec la stratégie Nixon et Kissinger après la fin de la guerre de Vietnam. A cette époque, Nixon et Kissinger voulaient, comme Obama aujourd’hui, seulement concevoir les objectifs et soutenir la guerre de leurs Alliés par la logistique des Etats-Unis. Même aujourd’hui, les Alliés doivent faire le sale boulot militaire pour les Etats-Unis. Cette façon de penser peut être caractérisée par un «bon mot» français utilisé pendant les deux guerres mondiales, avec lequel les Français ont reproché aux Britanniques qu’ils auraient, dans les guerres, sauvé la vie de leurs soldats britanniques au détriment des Français avec la devise suivante: «Se battre jusqu’aux derniers soldats français!» Les Alliés devraient purger et non plus les Américains, car du point de vue des politiciens à Washington DC, ils ont déjà fait assez de sacrifices dans les guerres des 20 dernières années. Mais, on tait le fait que presque toutes les guerres ont été provoquées et menées par les Etats-Unis.
Albert A. Stahel, Institut d’Etudes stratégiques, Wädenswil
Traduction : Horizons et débats, no. 9, 4 mars 2013