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ONU / Golan syrien occupé : Le cadeau de Trump à Bibi est nul, non avenu et sans effet juridique… 
Par Dr. Bachar al-Jaafari
Mondialisation.ca, 08 novembre 2020
Vidéo /TV nationale syrienne
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Avant-propos

Dans son chapitre abordant des questions thématiques, l’Organisation des Nations Unies [ONU] précise que lorsque les 51 pères fondateurs ont rédigé la Charte à l’origine de sa création en 1945, « ils n’y ont pas inclus le mot ‘‘démocratie’’. Et pour causes… » [1]. Causes qu’il ne nous appartient pas de discuter, sauf à rappeler que, contrairement aux décisions du Conseil de sécurité rassemblant 15 États Membres dont 5 États permanents, les décisions de l’Assemblée générale ne sont toujours pas contraignantes, bien qu’elle rassemble désormais 193 États Membres. 

Or, le 4 novembre courant, la Quatrième Commission de la 75ème Assemblée générale chargée des questions de politiques spéciales et de décolonisation a adopté, « à une majorité écrasante, une série de résolutions critiquant Israël, fustigeant l’État juif, entre autres, pour d’ostensibles violations des droits de l’homme contre les Palestiniens et des ‘‘mesures répressives’’ contre les Syriens sur le plateau du Golan ». Ce sont là les propres termes du quotidien « The Times of Israël », lequel ajoute : « Les trois pays arabes avec lesquels Jérusalem a récemment signé des accords de normalisation -les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Soudan- n’ont pas changé leur schéma de vote traditionnel et ont soutenu toutes les résolutions critiques envers Israël » [2]. Est-ce vraiment une surprise ? 

Concernant les projets de résolutions adoptées, le lecteur pourra consulter le compte-rendu du site de l’ONU destiné à la presse [3]. Il découvrira, que pour le point 52 concernant les réfugiés :

  • Le projet de résolution A/C.4/75/L.9 relatif à l’ « aide aux réfugiés de Palestine » a été adopté par 153 voix pour, 2 voix contre [États-Unis, Israël] et 12 abstentions. 
  • Le projet de résolution A/C.4/75/L.10 relatif aux « Opérations de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient » a été adopté par 151 voix pour, 5 voix contre [Canada, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Micronésie] et 9 abstentions. 
  • Le projet de résolution A/C.4/75/L.11 relatif aux « Biens appartenant à des réfugiés de Palestine et produit de ces biens » a été adopté par 151 voix pour, 6 voix contre [Canada, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Micronésie, Nauru] et 8 abstentions. 

Alors que pour le point 53 concernant les pratiques israéliennes : 

  • Le projet de résolution A/C.4/75/L.12 portant sur les « Travaux du Comité spécial chargé d’enquêter sur les pratiques israéliennes affectant les droits de l’homme du peuple palestinien et des autres Arabes des territoires occupés » a été adopté par 72 voix pour, 13 voix contre et 76 abstentions. 
  • Le projet de résolution A/C.4/75/L.14 portant sur les « Pratiques israéliennes affectant les droits de l’homme du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est » a été adopté par 138 voix pour, 9 voix contre [Australie, Canada, États-Unis, Guatemala, Hongrie, Israël, Îles Marshall, Micronésie, Nauru] et 16 abstentions. 
  • Quant au projet A/C.4/75/L.15 portant sur « le Golan syrien occupé », il a été adopté par 142 voix pour, 2 voix contre [États-Unis, Israël] et 19 abstentions. 

Par conséquent, certains États, toujours les mêmes, soit votent dans le même sens que les États-Unis et Israël, soit s’abstiennent, très probablement pour des raisons qui n’ont rien à voir avec le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde ou le respect de la démocratie et des droits de l’homme.

Pour mémoire, ci-joint la réponse du délégué permanent de la Syrie auprès des Nations Unies, le Docteur Bachar al-Jaafari. [NdT]. 

***

Monsieur le Président, 

Je remercie infiniment toutes les délégations qui ont voté en faveur des projets de résolution des points 52 et 53 inscrits à l’ordre de ce jour, y compris le projet intitulé « Le Golan syrien occupé ». Et je remercie tout autant les délégations amies de Cuba, d’Indonésie, d’Afrique du Sud et de Namibie pour avoir porté ces projets. 

Par leur vote massif en faveur de ces projets de résolution, les États Membres ont affirmé leur refus de l’occupation des territoires d’autrui par la force et leur rejet du mépris des droits des peuples sous occupation. 

Ils ont aussi adressé deux messages sans ambiguïté à Israël, désigné par la légalité internationale par les termes de « Puissance occupante » [4]. Le premier message est de mettre fin à son occupation des terres arabes en Palestine occupée et dans le Golan syrien. Le deuxième message est de cesser ses violations de la IVe Convention de Genève de 1949, notamment les activités de colonisation, le vol de ressources naturelles, la confiscation de terres et l’expulsion des nôtres de leurs terres au Golan occupé. 

Un autre message important de ce vote massif s’adresse à tous ceux qui tentent de conférer une légitimité unilatérale à l’occupation israélienne des territoires palestiniens et du Golan syrien occupés. En effet, ce vote est décisif car les États Membres ont ainsi signifié que l’occupation de ces territoires n’est pas une question d’état d’esprit soumis aux caprices des Israéliens ou aux humeurs de leurs protecteurs, mais une question de droit et de morale que nous traitons, au sein de cette assemblée, conformément à nos deux références en la matière : la Charte des Nations Unies et les dispositions du droit international. 

De ce fait, le vote des États-Unis et d’Israël contre ces projets de résolution amène une preuve supplémentaire à toute une série d’autres preuves de violations caractérisées de la Charte des Nations Unies et du droit international. Deux références que le représentant de l’entité israélienne vient de traiter avec mépris en considérant qu’elles sont désormais dépassées. Par conséquent, la question qui s’impose devant une telle haine de notre organisation internationale est : que fait-il dans cette enceinte qui est justement celle de la légalité internationale ? 

Monsieur le Président,

Les États-Unis ne se sont pas contentés de soutenir Israël militairement et politiquement dans ses guerres et agressions contre notre région ou de le dédouaner de toute responsabilité pour ses crimes au sein même du Conseil de sécurité depuis des décennies. Ils ont outrepassé toutes les règles régissant les relations civilisées entre les États comme le prouvent ces quelques exemples parmi d’autres : la déclaration faisant de Jérusalem la capitale d’Israël, le droit d’Israël d’établir des colonies sur les terres qu’il occupe sans que cela ne contrevienne au droit international, le tout menant au soi-disant « accord du siècle » qui déstabilisera davantage la sécurité et la stabilité de notre région déjà amplement déstabilisée par les politiques israéliennes. 

En l’occurrence, le comble du mépris croissant des États-Unis et d’Israël pour la légalité internationale pourrait être leur reconnaissance conjointe de la prétendue souveraineté israélienne sur le Golan syrien occupé, suivie par la décision du Premier ministre israélien d’y construire une colonie baptisée du nom de « Trump » en cadeau pour un vil service rendu. 

Le gouvernement syrien condamne de nouveau, et dans les termes les plus forts, la décision illégale et immorale du président Donald Trump concernant la prétendue souveraineté d’Israël sur le Golan syrien occupé. C’est en effet une violation flagrante du droit international, de la Charte des Nations Unies et des résolutions pertinentes de l’ONU, à commencer par la résolution 497 (1981). Il considère que le document qu’il a signé le 25 mars 2019 avant de l’offrir en cadeau au Premier ministre de l’entité d’occupation israélienne, Benjamin Netanyahu, n’est qu’un simple papier émis par quelqu’un qui ne possède ni la qualité, ni la capacité politique, juridique ou morale de décider du sort des peuples de ce monde ou de disposer de terres faisant partie intégrante de la République arabe syrienne, membre fondateur de cette organisation internationale. 

Par conséquent, toute mesure unilatérale concernant le Golan syrien occupé est nulle, non avenue et sans effet juridique, exactement comme le stipule la résolution 497 (1981).

Les États-Unis d’Amérique, Membre permanent du Conseil de sécurité et pays hôte du siège des Nations Unies, auraient mieux fait de constituer « une coalition internationale légitime » pour établir la paix, mettre fin à l’occupation israélienne, restituer les terres arabes occupées à leurs propriétaires légitimes dont le Golan syrien occupé à sa mère patrie, créer l’État palestinien avec Jérusalem pour capitale ; au lieu d’avoir constitué « une coalition illégitime » pour parrainer le terrorisme, agresser d’autres pays, soutenir des milices séparatistes en mon pays, enraciner l’occupation et voler le pétrole syrien. 

Je vous renouvelle mes remerciements, Monsieur le Président, et je remercie le Secrétariat général pour tous les efforts consentis en vue de la tenue de cette quatrième commission, malgré la pandémie Covid-19. Permettez-moi de formuler à partir de cette tribune tous nos vœux pour le rétablissement de ceux qui en souffrent et la miséricorde pour ceux qui ont succombé. 

Merci, Monsieur le Président. 

Dr Bachar al-Jaafari 

04/11/2020

Source : Vidéo /TV nationale syrienne

https://www.facebook.com/Aljafaribashar/videos/274128260661396

Traduction de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca

 

Notes : 

[1][ONU, Questions thématiques, La démocratie]

[2][Les EAU, le Bahreïn et le Soudan soutiennent des mesures anti-Israël à l’ONU]

[3][La Quatrième Commission adopte une première série de textes sur l’UNRWA, les pratiques israéliennes, l’utilisation pacifique de l’espace et l’information]

[4] Extrait du projet de résolution A/C.4/75/L.15 concernant le Golan syrien occupé :

L’Assemblée générale, 

« 1. Demande à Israël, Puissance occupante, de se conformer aux résolutions concernant le Golan syrien occupé, en particulier la résolution 497(1981), par laquelle le Conseil de sécurité a décidé notamment que la décision prise par Israël d’imposer ses lois, sa juridiction et son administration au Golan syrien occupé était nulle et non avenue et sans effet juridique sur le plan international, et a exigé qu’Israël, Puissance occupante, rapporte sans délai cette décision; 

2. Demande également à Israël de renoncer à modifier le caractère physique, la composition démographique, la structure institutionnelle et le statut juridique du Golan syrien occupé et en particulier de renoncer à y établir des implantations; 

3. Considère que toutes les mesures et décisions législatives et administratives qui ont été prises ou seront prises par Israël, Puissance occupante, pour modifier le caractère et le statut juridique du Golan syrien occupé sont nulles et non avenues, constituent une violation flagrante du droit international et de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, et n’ont aucun effet juridique; 

4. Demande à Israël de renoncer à imposer aux citoyens syriens du Golan syrien occupé la nationalité israélienne et des cartes d’identité israéliennes, et de renoncer à ses mesures de répression à l’égard de la population de ce territoire; 

5. Déplore les violations par Israël de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949; 

6. Demande une fois de plus aux États Membres de ne reconnaître aucune des mesures ou décisions législatives et administratives susmentionnées; 

7. Prie le Secrétaire général de lui rendre compte, à sa soixante-seizième session, de l’application de la présente résolution ». 

***

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