Ordre Exécutif de Bush : Criminaliser le Mouvement Anti Guerre
« J’ai édicté un décret bloquant les biens de personnes dont il a été déterminé qu’elles ont commis, ou présentent un risque sérieux de commettre un acte ou des actes de violence ayant pour but ou effet de menacer la paix ou la stabilité de l’Irak ou du gouvernement de l’Irak ou de saper les efforts en vue de promouvoir la reconstruction économique et la réforme politique en Irak ou de fournir une aide humanitaire au peuple irakien. »
L’Ordre Exécutif intitulé « bloquer les biens de certaines personnes qui menacent les efforts de stabilisation en Irak » fournit au Président l’autorité pour confisquer les avoirs de quiconque s’oppose à la guerre menée par les US.
Le décret intitulé « bloquer les biens de certaines personnes qui menacent les efforts de stabilisation en Irak » fournit au Président l’autorité pour confisquer les avoirs de quiconque s’oppose à la guerre menée par les USA
Un décret présidentiel édicté le 17 juillet révoque d’un trait de plume le droit de contester et de s’opposer à l’agenda militaire du Pentagone en Irak.
Le décret intitulé « bloquer les biens de certaines personnes qui menacent les efforts de stabilisation en Irak » fournit au président l’autorité pour confisquer les avoirs de «certaines personnes « qui s’opposent à la guerre menée par les USA en Irak.
« J’ai édicté un décret bloquant les biens de personnes dont il a été déterminé qu’elles ont commis, ou présentent un risque sérieux de commettre un acte ou des actes de violence ayant pour but ou effet de menacer la paix ou la stabilité de l’Irak ou du gouvernement de l’Irak ou de saper les efforts en vue de promouvoir la reconstruction économique et la réforme politique en Irak ou de fournir une aide humanitaire au peuple irakien. »
En substance, selon ce décret, s’opposer à la guerre devient un acte illégal.
Le décret criminalise le mouvement anti-guerre. Il vise à « bloquer les biens » des citoyens US et des organisations activement impliquées dans le mouvement pour la paix. Il autorise le Département de la Défense à interférer dans des affaires financières et donne instruction au Trésor Public de « bloquer les biens » et/ou de confisquer/geler les avoirs de « certaines personnes » impliquées dans des activités anti-guerre. Il cible ces « certaines personnes » en Amérique, y compris des organisations de la société civile qui s’opposent au programme de « paix et stabilité » de l’administration Bush en Irak, caractérisé en bon français par une occupation illégale et le meurtre continu d’innocents civils.
Le décret vise aussi ces « certaines personnes » qui « sapent les efforts pour promouvoir la reconstruction économique », ou qui sont opposées à la confiscation et à la privatisation des ressources pétrolières de l’Irak, pour le compte des géants pétroliers anglo-américains.
Le décret vise également toute personne qui s’oppose au programme de Bush de « reforme politique en Irak », en d’autres mots, qui met en doute la légitimité du « gouvernement » irakien installé par les forces d’occupation.
De plus, ces personnes ou organisations non gouvernementales (ONG) qui fournissent gratuitement une aide humanitaire aux civils irakiens et qui ne sont pas approuvées par l’armée américaine et ses laquais dans le gouvernement fantoche irakien patronné par les USA risquent également de voir leurs avoirs financiers confisqués.
Le décret viole les Premier, Quatrième et Cinquième Amendements de la Constitution américaine. Il révoque l’un des principes fondamentaux de la démocratie US, qui est le droit à la libre expression et à contester. L’ordre n’a pas fait l’objet d’une discussion au Congrès US. Jusqu’à présent, le mouvement anti- guerre US n’a pas pris formellement et publiquement position sur ce décret.
Mis à part une dépêche insipide de l’agence Associated Press qui présente le décret comme « l’autorisation de recourir à des sanctions financières », il n’y a eu aucune couverture médiatique ou commentaire de la décision présidentielle qui s’en prend au cœur même de la Constitution US.
Implications plus générales
On peut parler de criminalisation de l’État dès lors qu’ un président et un vice-président en exercice usent et abusent de leur autorité par le biais de décrets, de directives présidentielles ou par d’autres moyens pour définir « qui sont les criminels » quand en fait ce sont eux qui sont les criminels.
Ce dernier décret criminalise le mouvement pour la paix. Il doit être mis en relation avec différentes parties de législation « anti-terroriste », toute la gamme de directives présidentielles et sécuritaires etc. qui visent en dernière analyse à abroger le gouvernement institutionnel et à installer la loi martiale en cas d’ « urgence nationale ».
Les criminels de guerre en haut lieu ont l’intention de réprimer toutes les formes de contestation qui mettent en question la légitimité de la guerre en Irak.
Combiné avec l’actuelle législation anti-terroriste, le décret a finalement pour but d’être utilisé contre les mouvements anti-guerre et de défense des droits civiques. Il peut être utilisé pour saisir les avoirs des groupes anti-guerre en Amérique ainsi que pour bloquer les biens et activités d’organisations humanitaires non gouvernementales fournissant de l’aide en Irak, saisir les avoirs des médias alternatifs qui rapportent la vérité sur ce qui se passe dans la guerre menée par les USA etc.
En mai 2007, Bush a promulgué une importante directive présidentielle de Sécurité Nationale (National Security and Homeland Security Presidential Directive NSPD 51/HSPD 20), qui suspendrait le gouvernement constitutionnel et installerait des pouvoirs dictatoriaux étendus sous loi martiale dans le cas d’une « urgence catastrophique » (par exemple un deuxième attentat du type 11 septembre).
Le 11 juillet 2007, la CIA a publié ses « Prévisions du Renseignement National » qui pointaient l’imminence d’une attaque d’Al Qaïda sur l’Amérique, un deuxième 11 septembre qui, selon les termes de la NSPD 51, serait immédiatement suivie de la suspension du gouvernement constitutionnel et de l’instauration de la loi martiale sous l’autorité du Président et du vice-Président. (Pour plus de détails, voir Michel Chossudovsky, Bush Directive for a « Catastrophic Emergency » in America: Building a Justification for Waging War on Iran?, juin 2007)
La NSPD 51 accorde des pouvoirs sans précédent à la Présidence et au Département de la Sécurité Intérieure, annulant le gouvernement constitutionnel. Elle autorise le président en exercice à déclarer une « urgence nationale » sans l’approbation du Congrès. L’application de la NSPD 51 conduirait à la fermeture de facto de la législature (Congrès et Sénat) et à la militarisation de la justice et de l’application de la loi.
« Le Président devra conduire les activités du gouvernement fédéral pour assurer le gouvernement constitutionnel… »
En cas d’application de la NSPD 51, le vice-président Dick Cheney, qui détient le réel pouvoir derrière l’exécutif, assurerait principalement et de facto des pouvoirs dictatoriaux, circonvenant à la fois le Congrès et le pouvoir judiciaire, en continuant à utiliser le président George W. Bush comme homme de paille pour la galerie.
Tout en contournant la Constitution, la NSPD 51 envisage néanmoins des procédure très précises garantissant les pouvoirs du vice-Président Dick Cheney en relation avec les fonctions visant à assurer la « continuité du gouvernement » sous la loi martiale.
« Cette directive devra être appliquée en accord avec des dispositions de la Constitution concernant la succession à la Présidence ou l’exercice de ses pouvoirs, et facilitant l’application effective , et avec le Presidential Succession Act of 1947 (3 U.S.C. 19), avec consultation du vice-Président et, selon les cas, d’autres impliqués. Les chefs des départements et agences exécutifs devront s’assurer que le soutien au vice-Président et aux autres (responsables) impliqués sera disponible, afin de se préparer à tout moment à appliquer ces dispositions.»( (NSPD 51, op cit.).
Le décret pour confisquer les avoirs des militants anti-guerre/pro-paix est dans la droite ligne de la NSPD 51. Il pourrait être appliqué même en l’absence d’une « urgence catastrophique » envisagée par la NSPD 51. Il abroge la démocratie. Il représente un nouveau pas dans la « criminalisation « de toutes formes d’opposition et de contestation à la guerre menée par les USA et à l’agenda de la « Sécurité Inérieure ».
ANNEXE
TEXTE DE L’ORDRE EXECUTIF
17 JUILLET 2007
Décret : Blocage des biens de certaines personnes menaçant les efforts de stabilisation en Irak
Par l’autorité qui m’est dévolue en tant que Président par la Constitution et les lois des États-Unis d’Amérique, incluant l’International Emergency Economic Powers Act, amendé selon (50 U.S.C. 1701 et seq.)(IEEPA), le National Emergencies Act (50 U.S.C. 1601 et seq.)(NEA), et la section 301 du chapitre 3, du code des Etats-Unis,
Moi, George W. Bush Président des États-Unis d’Amérique, trouve que, étant donné la menace inhabituelle et extraordinaire à la sécurité nationale et à la politique étrangère des États-Unis posée par des actes de violence menaçant la paix et la stabilité de l’Irak et des efforts pour saper la reconstruction économique et la réforme politique en Irak et par la fourniture d’une assistance humanitaire à la population irakienne, c’est dans l’intérêt des États-Unis de prendre des mesures additionnelles concernant l’urgence nationale déclarée dans le Décret 13303 du 22 mai 2003, et étendu par le Décret 13315 du 28 août 2003, et reposant sur des mesures additionnelles prise dans le Décret 13350 du 29 juillet 2004, et du Décret 13364 du 29 novembre 2004. Je soussigné ordonne :
Article 1.
(a) Excepté la mesure stipulée dans l’article 203(b)(1), (3), et (4) de l’ IEEPA (50 U.S.C. 1702(b)(1), (3), et (4), ou dans des règlements, ordres, directives ou licences qui peuvent être promulguées suite à cet ordre, et en dépit de tout contrat entré en effet ou toute licence ou permis accordé avant la date de cet ordre, que tous les biens et intérêts des biens des personnes désignées ci-dessous, qui sont aux États-Unis, qui ci-après entrent aux États-Unis, ou qui ci –après entrent dans les biens ou sont sous le contrôle de personnes des États-Unis, soient bloqués, et ne doivent pas être transférés, payés, exportés, retirés, ou traités de tout autre manière : toute personne désignée par le Secrétaire au Trésor en consultation avec le Secrétaire d’État, et le Secrétaire à la Défense,
(i) qui ont commis, ou présentent le risque sérieux de commettre un acte ou des actes de violence qui ont pour but ou effet de
(A) menacer la paix ou la stabilité de l’Irak ou du gouvernement d’Irak ; ou
(B) saper les efforts visant à promouvoir la reconstruction économique et la réforme politique en Irak ou à fournir une aide humanitaire au peuple irakien ;
(ii) qui ont assisté matériellement, sponsorisé, ou fourni un soutien financier, logistique ou technique pour, ou des produits ou des services en soutien à, tel acte ou de tels actes de violence ou à toute personne dont les biens et les intérêts de biens sont bloqués suite à cet ordre; ou
(iii) qui appartiennent ou sont sous le contrôle de, ou d’avoir agi ou avoir eu l’intention d’agir pour ou pour le compte de, directement ou indirectement, toute personne dont les biens et intérêts sont bloqués suite à cet ordre.
(b) Les interdictions dans le sous-article (a) de cet article inclus, mais ne sont pas limité à, (i) faire toute contribution ou mise à disposition de fonds, produits ou services par, à, ou au bénéfice de toute personne dont les biens et intérêts des biens sont bloqués suite à cet ordre, et (ii) au réceptionnaire de toute contribution ou avance de fonds, produits ou services d’une telle personne.
Article. 2
(a) Toute transaction par une personne des États-Unis ou a l’intérieur des États-Unis qui esquive ou évite, a l’intention d’esquiver ou d’éviter, ou essaie de violer l’une des interdictions établies dans cet ordre, est interdite.
(b) tout complot ourdi pour violer l’une des interdictions établies dans cet ordre est interdit.
Article. 3. Pour les besoins de ce décret :
(a) le terme « personne » veut dire un individu ou une entité,
(b) le terme « entité » veut dire partenariat, association, trust, entreprise conjointe, grande entreprise, groupe, sous-groupe, ou autre organisation ; et
(c) Le terme « personne des États-Unis » veut dire tout citoyen américain, résident permanent, entité organisée selon les lois des États-Unis ou toute juridiction à l’intérieur des États-Unis (incluses des branches étrangères), ou toute personne à l’intérieur des États-Unis.
Article. 4
Je soussigné détermine que faire des donations du type spécifié dans l’article 03(b)(2) de IEEPA (50 U.S.C. 1702(b)(2) par, à, ou pour le bénéfice de, toute personne dont les biens et les intérêts des biens sont bloqués suite à ce décret réduirait ma capacité de m’occuper de l’urgence nationale déclarée dans l’Ordre Exécutif 13303 et étendu dans l’ordre Exécutif 13315, et je soussigné interdis de telles donations comme stipulé dans l’article 1 de cet ordre.
Article. 5.
Pour les personnes dont les biens et intérêts des biens sont bloqués suite à ce décret qui pourraient avoir une présence constitutionnelle aux États-Unis, je trouve que, à cause de la capacité de transférer instantanément des fonds ou d’autres avoirs, une notification préalable à de telles personnes des mesures à prendre suite à cet ordre rendraient ces mesures inefficaces. Par conséquent je détermine que pour que ces mesures soient efficaces pour répondre à l’urgence nationale déclarée dans le Décret 13303 et étendu dans le Décret 13315, qu’il n’y a pas besoin de notification d’une mise sur liste ou décision faite en lien avec l’article (1) a de cet ordre.
Article. 6.
Le Secrétaire au Trésor, en consultation avec le Secrétaire d’État et le Secrétaire à la Défense, est selon ce présent document autorisé à mener de telles actions, incluant la promulgation de règles et de régulations, et d’employer tous les pouvoirs accordés au Président par l’IEEPA, nécessaires pour appliquer les mesures de cet ordre. Le Secrétaire au Trésor peur déléguer l’une de ces fonctions à d’autres fonctionnaires et agences du gouvernement des États-Unis, en conformité avec la loi en vigueur. Toutes les agences du gouvernement des États-Unis selon ce présent document ont l’ordre de prendre toutes les mesures appropriées relevant de leur autorité pour appliquer les dispositions de ce décret et, quand cela est approprié, d’avertir le Secrétaire au Trésor en temps voulu des mesures prises.
Article. 7.
Rien dans le décret ne vise à affecter la poursuite de l’application effective l’efficacité de toutes les règles, régulations, ordres, licences, ou d’autres formes d’action administrative promulguées, prises, ou mises en œuvre avant ou après l’adoption de ce décret, aux termes du chapitre V 31 C.F.R, sauf si elles sont expressément abrogées, modifiées ou suspendues par ce décret ou suite à celui-ci.
Article. 8.
Cet ordre ne vise à créer et ne crée aucun droit, bénéfice, ou privilège, quant au fond ou à la forme, exécutoire en droit ou en justice par quelque partie que ce soit contre les États-Unis, leurs ministères, agences, filiales, ou entités, leurs fonctionnaires ou employés ou toute autre personne.
GEORGE W. BUSH
LA MAISON BLANCHE
17 juillet 2007
Texte du Message au Congrès des Etats Unis concernant l’ International Emergency Economic Powers Act
The text of the Message to the Congress of the United States Regarding International Emergency Economic Powers Act (Pour lire le texte en anglais, cliquez ici )
Voir l’article original en anglais: pour lire ce texte, cliquez ici
Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org , révisée par Fausto Giudice, Tlaxcala.
Source pour la version française : Planète Non Violence
Michel Chossudovsky est l’auteur du livre America « War on Terrorism » , Deuxième Edition, Global Research, 2005. Il est professeur d’économie à l’Université d’Ottawa et directeur du Centre de Recherche sur la Mondialisation.