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Pas de “Paix sur terre” en 2016
Par Andre Damon
Mondialisation.ca, 28 décembre 2016
wsws.org 24 décembre 2016
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« La paix sur terre et bonne volonté à toute l’humanité », ainsi se lisent les paroles d’un chant de Noël populaire. Les vacances de fin d’année sont une saison où ces sentiments sont généralement exprimés, sincèrement par de larges couches de la population, mais avec les plus grands cynisme et hypocrisie par diverses personnalités politiques.

La trajectoire réelle de la politique mondiale, cependant, était peut-être mieux reflétée dans un tweet du futur président des États-Unis. « Les États-Unis doivent grandement renforcer et développer leur capacité nucléaire », a déclaré Trump jeudi. Cela a été suivi d’un énoncé par la présentatrice de la MSNBC, Mika Brzezinki vendredi : « Qu’on en fasse une course aux armements. Nous les surpasserons à chaque tournant et leurs survivrons tous. »

Les déclarations de Trump, dans le cadre d’un échange avec le président russe Vladimir Poutine, dans lequel les deux hommes se vantaient des arsenaux nucléaires de leurs pays respectifs, semblent être appropriées pour décrire la fin d’une année de carnage.

En 2016, une grande partie de la planète a été engloutie dans des conflits militaires. Et les États qui étaient nominalement en paix ont passé leur temps à se préparer à la guerre et à maltraiter les réfugiés fuyant ces conflits armés.

Bien que des chiffres définitifs n’aient pas encore été publiés, au moins 150 000 personnes ont été tuées dans des conflits armés à travers le monde en 2016. Il y a eu trois « guerres majeures », avec un nombre de morts fixé pour 2016 à plus de 10 000 :

*La guerre civile syrienne, dans laquelle 46 442 personnes auraient été tuées cette année. Depuis que les États-Unis ont commencé à soutenir l’insurrection islamiste en 2011, environs 470 000 personnes sont mortes. La guerre a contraint 4,9 millions de personnes à fuir à l’étranger et a déplacé 6,6 millions de personnes en Syrie.

*La guerre en Irak, dans laquelle 23 584 personnes ont été tuées cette année. Depuis que les États-Unis ont envahi le pays en 2003, plus d’un million de personnes sont mortes. En novembre, 3,1 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays et des millions d’autres avaient fui à l’étranger.

*La guerre en Afghanistan, où 21 932 personnes ont été tuées cette année. Depuis que les États-Unis ont commencé à fournir des armes aux Moudjahidin, les prédécesseurs des Taliban, en 1978, plus de deux millions de personnes ont été tuées dans ce pays, déchiré par l’invasion et l’occupation de 2001.

Ces trois conflits ont représenté les deux tiers des morts dans des conflits militaires dans le monde. Ils ont également conduit à une crise des réfugiés sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Selon les Nations Unies, il y avait 65,3 millions de personnes déplacées à la fin de 2015, en hausse de 5 millions comparé à 2014 et de près de 25 millions depuis 2011.

La montée du nombre de réfugiés et le traitement de plus en plus cruel qu’ils ont subi aux mains des pays destinataires ont été la cause du plus grand nombre de décès de réfugiés jamais enregistrés par l’Organisation internationale pour les migrations.

Quelque 7100 réfugiés sont morts cette année, contre 5740 en 2015. La moitié des décès a eu lieu pendant que les réfugiés cherchaient à gagner l’Europe à travers la mer Méditerranée en fuyant la guerre et la dévastation du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.

Cette année, l’Europe a fermé ses portes aux réfugiés. L’UE a accepté de payer la Turquie pour servir de gardien de l’Europe et empêcher les réfugiés d’entrer, pendant qu’elle militarisait sa patrouille frontalière et déployait les marines de ses pays membres pour arrêter le « trafic d’êtres humains ».

Cette évolution trouve son expression la plus claire en Allemagne, l’État le plus puissant de la région, qui se militarise rapidement à mesure qu’il s’affirme comme la puissance européenne dominante. Alors que la Chancelière Angela Merkel proclamait hypocritement une « culture d’accueil » à l’égard des réfugiés en 2015, elle a adopté ce mois-ci de larges sections du programme du parti fasciste de l’Alternative pour l’Allemagne, préconisant l’interdiction du voile intégral et la répression accentuée des réfugiés.

Au-delà des « guerres brûlantes » de l’Irak, de la Syrie et de la Libye, la poussée des États-Unis pour encercler militairement la Chine a attisé les braises autour des poudrières régionales du monde. Cette année, près de 300 personnes sont mortes lors de raids et de bombardements sur la frontière entre l’Inde et le Pakistan, deux puissances possédant des armes nucléaires. Dans l’intervalle, les tensions militaires entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, qui menacent également l’escalade vers la guerre nucléaire, se sont considérablement intensifiées.

Le dernier quart de siècle de guerre sans fin et en pleine expansion a atteint un stade nouveau et encore plus explosif. Dès la première guerre du Golfe de 1991, qui a précédé directement la dissolution de l’Union soviétique, les États-Unis ont cherché, par le biais d’une succession d’aventures à l’étranger, à inverser leur déclin économique à long terme.

Obama quittera ses fonctions en étant le premier président américain à servir deux mandats complets en état de guerre permanente. Il entrera dans l’histoire comme l’homme qui a proclamé le droit du président d’assassiner des citoyens américains sans un procès en bonne et due forme et qui a personnellement autorisé des « frappes » de drones qui ont entraîné la mort de milliers de personnes.

Ces guerres sans fin, cependant, n’ont pas réussi à atteindre le but souhaité. Au cours des quinze dernières années, la Chine a triplé sa part du marché mondial des exportations, tandis que la part des exportations des États-Unis a diminué. Les opérations militaires américaines, de l’Irak à l’Afghanistan en passant par la Libye, sont devenues des bourbiers et des débâcles. En Syrie, la défaite des islamistes, les forces par procuration de la CIA, ce mois-ci, a fait ressortir l’échec des États-Unis à imposer leur volonté sur le Moyen-Orient et le monde.

Mais seul un imbécile croirait que ces échecs vont transformer l’élite dirigeante américaine en pacifistes. Au contraire, ils ont conduit celle-ci à se concentrer de plus en plus directement sur ses plus grands concurrents.

L’inauguration de Donald Trump marquera une nouvelle phase dans le conflit mondial. Les provocations de Trump contre la Chine et sa déclaration selon laquelle il salue une nouvelle course aux armements avec la Russie ne sont que les premières indications de l’acharnement dont son gouvernement fera preuve pour préserver les intérêts de l’oligarchie américaine.

L’année 2017, centenaire de la révolution russe de 1917, posera de nouveau la lutte contre la guerre comme la tâche politique la plus haute et la plus urgente pour l’humanité.

Andre Damon

Article paru en anglais, WSWS, le 24 décembre 2016

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