Pour comprendre le capitalisme, il faut commencer par les plantations

Quelques années avant d’être reconnu coupable de fraude en valeurs mobilières, Martin Shkreli était directeur général d’une société pharmaceutique qui a acquis les droits du Daraprim, un médicament antiparasitaire qui peut sauver la vie. Auparavant, le médicament coûtait 13,50 dollars la pilule, mais après que Shkreli l’a acquis, le prix a rapidement augmenté de 56%, pour atteindre 750 dollars la pilule. Lors d’une conférence sur la santé, Shkreli a dit à son auditoire qu’il aurait dû augmenter le prix encore plus. « Personne ne veut le dire, personne n’en est fier, a-t-il expliqué. « Mais nous vivons dans une société capitaliste, dans un système capitaliste avec des règles capitalistes. »

Nous vivons dans une société capitaliste. C’est le mantra fataliste qu’on sert à tous ceux qui se demandent pourquoi les Etats-Unis ne sont pas plus justes et plus égalitaires. Mais dans le monde, il existe de nombreux types de sociétés capitalistes, qui passent par toutes les nuances de l’émancipation à l’exploitation, de la justice aux abus, de la démocratie au règne du plus fort. Quand les Etasuniens disent que « nous vivons dans une société capitaliste » – comme un magnat de l’immobilier l’a dit au Miami Herald, l’année dernière, en parlant des propriétaires de petites entreprises expulsés de leurs magasins de Little Haiti – c’est souvent pour justifier le système économique brutal, spécifique à notre pays. Le sociologue Joel Rogers, sociologue de l’Université du Wisconsin-Madison, l’a qualifié de « capitalisme sans foi ni loi ». Dans une société capitaliste sans scrupule, les salaires sont bas car les entreprises se battent pour le prix, et non pour la qualité des produits ; on utilise les punitions et non les promotions pour motiver ceux qu’on appelle les travailleurs non qualifiés ; l’inégalité règne et la pauvreté s’étend. Aux États-Unis, 1 % des Américains possèdent 40 % de la richesse du pays, et il y a plus de gens en âge de travailler (18-65 ans) qui vivent dans la pauvreté que dans tout autre pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Voyons quels sont les droits des travailleurs dans les différentes nations capitalistes. En Islande, 90 % des travailleurs salariés appartiennent à des syndicats qui luttent pour des salaires décents et des conditions de travail équitables. 34 % des travailleurs italiens sont syndiqués, tout comme 26 % des travailleurs canadiens. Seulement 10 % des salariés américains ont une carte syndicale. L’O.C.D.E. note les pays en fonction d’un certain nombre d’indicateurs, comme par exemple la façon dont les pays réglementent le travail intérimaire. Les notes vont de 5 (« très stricte ») à 1 (« très souple »). Le Brésil obtient un score de 4,1 et la Thaïlande un score de 3,7, ce qui montre que les réglementations sur le travail intérimaire sont très différentes. La Norvège (3,4), l’Inde (2,5) et le Japon (1,3) sont plus bas dans la liste. Les États-Unis ont obtenu une note de 0,3, à l’avant-dernière place, à égalité avec la Malaisie. Qu’en est-il des modalités de licenciement ? Des pays comme l’Indonésie (4.1) et le Portugal (3) ont des règles strictes concernant les indemnités de départ et les motifs de licenciement. Ces règles sont un peu plus souples dans des pays comme le Danemark (2.1) et le Mexique (1.9). Elles disparaissent pratiquement aux États-Unis, qui sont les derniers des 71 pays avec un score de 0,5.

Ceux qui s’interrogent sur les raisons pour lesquelles l’économie américaine est particulièrement impitoyable et débridée ont cherché des réponses dans de nombreux domaines (religion, politique, culture). Mais récemment, les historiens ont désigné de manière convaincante les champs couverts de mouches de Géorgie et d’Alabama, les maisons du coton, et les criées d’esclaves, comme le berceau de l’amoral capitalisme étasunien.

L’esclavage a indéniablement été une source de richesse phénoménale. À la veille de la guerre civile, la vallée du Mississippi comptait plus de millionnaires par habitant que partout ailleurs aux États-Unis. Le coton cultivé et cueilli par des travailleurs réduits en esclavage était l’exportation la plus précieuse du pays. La valeur totale des esclaves dépassait celle de tous les chemins de fer et de toutes les usines du pays. La Nouvelle-Orléans a pu se flatter de bénéficier d’une plus dense concentration de capitaux bancaires que New York. S’il y a eu un boom de l’économie du coton aux Etats-Unis, et pas dans aucune autre partie du monde bénéficiant d’un climat et d’un sol adaptés à cette culture, c’est à cause de la détermination inébranlable de notre nation de soumettre par la force les populations non blanches et d’exploiter à volonté des réserves apparemment illimitées de terres et de force de travail. Les Etasuniens n’ont pas voulu choisir entre modernité et barbarie, prospérité et pauvreté, légalité et cruauté, démocratie et totalitarisme. Ils ont tout pris.

Près de deux générations américaines (79 ans) se sont écoulées depuis la fin de l’esclavage, seulement deux. Il n’est pas surprenant que nous puissions encore sentir la présence de cette institution qui a contribué à faire d’un pays pauvre et jeune un colosse financier. Ce qui est surprenant, c’est la puissance et la gravité de l’impact de l’esclavage sur notre vie économique actuelle. « L’esclavage américain est nécessairement inscrit dans l’ADN du capitalisme américain », écrivent les historiens Sven Beckert et Seth Rockman. Il faut maintenant, selon eux,  « répertorier les traits dominants et récessifs » qui sont descendus jusqu’à nous, en suivant les chemins troublants et souvent méconnus par lesquels le péché national de l’Amérique en est arrivé aujourd’hui à affecter les troisième et quatrième générations.

Ils cueillaient en longues rangées, leurs corps courbés progressant dans les champs de coton blanc en fleurs. Des hommes, des femmes et des enfants cueillaient avec leurs deux mains pour aller plus vite. Certains portaient des vêtements d’esclaves, leur production brute leur revenant à travers les moulins de la Nouvelle-Angleterre. D’autres étaient complètement nus. Des jeunes enfants apportaient de l’eau à travers les rangs bosselés, sous la supervision des surveillants à cheval. Les esclaves plaçaient chaque capsule de coton dans un sac suspendu autour du cou. Leur récolté était pesée après le coucher du soleil quand, comme le rappelait l’affranchisseur Charles Ball, on ne pouvait plus « distinguer les mauvaises herbes des plants de coton ». Si la récolte était légère, les esclaves étaient fouettés. « Une courte journée de travail était toujours punie », écrivait Ball.

Le coton était au XIXe siècle ce que le pétrole était au XXe siècle : il faisait partir des matières premières les plus échangées dans le monde. Il y a du coton partout, dans nos vêtements, nos hôpitaux, notre savon. Avant l’industrialisation du coton, les gens portaient des vêtements coûteux en laine ou en lin et dormaient sur des fourrures ou de la paille. Celui qui contrôlait le coton pouvait se faire beaucoup d’argent. Mais le coton nécessitait des terres. Après quelques années consécutives de culture du coton, le sol s’épuisait. Un acre qui avait initialement produit 1 000 livres de coton n’en produisait plus que 400 quelques saisons plus tard. La soif de nouvelles terres agricoles s’est encore intensifiée après l’invention du cotton gin, la machine à égrener le coton, au début des années 1790. Avant le cotton gin, les esclaves cultivaient plus de coton qu’ils n’en pouvaient nettoyer. L’égrenage a brisé le goulot d’étranglement, en permettant de nettoyer autant de coton qu’on en fait pousser.

Les États-Unis ont résolu le problème de la pénurie de terres en expropriant les Amérindiens de millions d’hectares, souvent par la force militaire, en acquérant la Géorgie, l’Alabama, le Tennessee et la Floride. Ils ont ensuite vendu ces terres à bas prix – seulement 1,25 dollar l’acre au début des années 1830 (38 en dollars d’aujourd’hui) – à des colons blancs. Naturellement, les premiers à s’enrichir ont été les spéculateurs fonciers. Les firmes opérant dans le Mississippi ont spéculé sur la terre, la revendant peu après l’achat, généralement pour le double du prix.

Les esclaves abattaient les arbres à la hache, brûlaient les sous-bois et nivelaient la terre pour la plantation. « Des forêts entières ont été littéralement déracinées », se souvient l’esclave John Parker. Une masse de végétation luxuriante et diverse a été remplacée par une seule culture. La propension étasunienne à imposer sa volonté à la terre et à détruire l’environnement à des fins lucratives a sa source dans la plantation de coton. Les inondations sont devenues plus importantes et plus fréquentes. Le manque de biodiversité a épuisé le sol et, pour citer l’historien Walter Johnson, la culture du coton « a rendu l’une des régions agricoles les plus riches du monde dépendante du commerce extérieur pour son alimentation ».

A mesure que les camps d’esclaves se multipliaient dans le Sud, la production explosait. En 1831, le pays récoltait près de la moitié de la récolte mondiale de coton brut, avec 160 millions de kilos récoltés cette année-là. Quatre ans plus tard, il a récolté 230 millions de kilos. Les élites blanches du Sud s’enrichissaient, tout comme leurs homologues du Nord, qui érigèrent des usines textiles pour former, selon les mots du sénateur du Massachusetts Charles Sumner, une « alliance impie entre les seigneurs du fouet et les seigneurs du métier à tisser ». La culture à grande échelle du coton a accéléré l’invention de l’usine, une institution qui a propulsé la révolution industrielle et changé le cours de l’histoire. En 1810, il y avait 87 000 broches à filer le coton en Amérique. Cinquante ans plus tard, il y en avait cinq millions. L’esclavage, écrivait l’un de ses défenseurs dans De Bow’s Review, un magazine agricole très lu, était la « mère nourricière de la prospérité du Nord ». Les planteurs de coton, les meuniers et les consommateurs façonnaient une nouvelle économie, d’envergure mondiale, qui nécessitait la circulation des capitaux, de la main-d’œuvre et des marchandises. En d’autres termes, ils façonnaient une économie capitaliste. « Le cœur de ce nouveau système, écrit Beckert, était l’esclavage. »

Vous lisez peut-être cet article au travail, peut-être dans une multinationale qui fonctionne comme une horloge. Vous relevez de quelqu’un, et quelqu’un relève de vous. Tout est suivi, enregistré et analysé, via des systèmes de reporting vertical, de dossiers en partie double et de quantification précise. Les statistiques et les données semblent présider à chaque opération. Tout cela donne l’impression d’une gestion d’avant-garde, mais bon nombre de ces techniques que nous tenons maintenant pour acquises ont été mises au point par et pour les grandes plantations.

Lorsqu’un comptable déprécie un actif pour payer moins d’impôt ou lorsqu’un cadre intermédiaire passe l’après-midi à remplir des colonnes d’un tableau Excel, il reproduit des procédures  qui ont leur source dans les camps d’esclaves. Et pourtant, malgré cela, « l’esclavage ne joue pratiquement aucun rôle dans l’histoire du management », écrit l’historienne Caitlin Rosenthal dans son livre « Accounting for Slavery ». Depuis la publication en 1977 de l’étude classique d’Alfred Chandler, « La main visible », les historiens ont tendance à relier le développement des pratiques commerciales modernes à l’industrie ferroviaire du XIXe siècle, considérant l’esclavage des plantations comme pré-capitaliste et même primitif. C’est une histoire des origines plus réconfortante, qui laisse penser que la puissance économique de l’Amérique ne s’est pas développée grâce au travail des millions d’esclaves noirs des plantations mais malgré lui. Pourtant, le fait est que les techniques de gestion utilisées par les sociétés du XIXe siècle ont été mises en place au cours du siècle précédent par les propriétaires de plantations.

Les planteurs ont agressivement élargi leurs opérations pour faire des économies d’échelle dans la culture du coton, en achetant davantage d’esclaves, en investissant dans des grands cotton gin et des grosses presses et en expérimentant différentes variétés de semences. Ils ont développé des hiérarchies complexes pour le travail combinant un bureau central, composé de propriétaires et d’avocats responsables de la répartition du capital et de la stratégie à long terme, et de plus petites unités responsables de différentes opérations. Rosenthal parle d’une plantation où le propriétaire avait sous ses ordres un avocat de premier plan, qui supervisait un autre avocat, qui supervisait un autre avocat, qui supervisait un contremaître, qui supervisait trois comptables, qui supervisait 16 chauffeurs en chef esclaves et des ouvriers spécialisés (comme les briqueteurs), qui supervisaient des centaines de travailleurs esclaves. Tout le monde devait rendre des comptes à quelqu’un, et les plantations ont produit non seulement des balles de coton, mais des masses de données sur la façon dont chaque balle était produite. Cette forme d’organisation était très avancée pour l’époque, elle avait un niveau de complexité hiérarchique égalé uniquement par de grandes structures gouvernementales comme la Royal Navy britannique.

Comme les géants de l’industrie d’aujourd’hui, les planteurs ont compris que leurs profits augmentaient lorsqu’ils obtenaient le maximum d’efforts de chaque travailleur. Ils ont donc porté une attention particulière aux intrants et aux extrants en tenant un recueil précis de toutes les données. Des comptables et des surveillants méticuleux étaient tout aussi importants pour la productivité d’un camp d’esclaves agricoles. Les entrepreneurs de plantations ont développé des systèmes de comptabilité, comme le « Plantation Record and Account Book » de Thomas Affleck, qui a été réédité huit fois jusqu’à la guerre civile. Le livre d’Affleck était un manuel de comptabilité exhaustif et détaillé, avec des rangées et des colonnes qui permettaient de suivre la productivité de chaque travailleur. Ce livre « était vraiment la fine fleur des technologies de l’information à la disposition des entreprises pendant cette période, » m’a dit Rosenthal. « Je n’ai jamais rien trouvé d’aussi complexe et complet que le livre d’Affleck sur le travail gratuit. » Les esclavagistes utilisaient le livre pour faire les bilans de fin d’année, en comptabilisant les dépenses et les recettes et en notant l’origine de leurs gains et pertes les plus importants. Ils ont quantifié les coûts de rémunération de leur capital en terrains, outils et esclaves, en appliquant le taux d’intérêt recommandé par Affleck. Peut-être plus remarquable encore, ils ont également mis au point des méthodes pour calculer la dépréciation du capital, une innovation révolutionnaire en matière de méthode de gestion, en évaluant la valeur marchande des esclaves tout au long de leur vie. Leur valeur culminait généralement entre 20 et 40 ans, mais elle était ajustée individuellement à la hausse ou à la baisse en fonction du sexe, de la force et du tempérament : les personnes étaient réduites à de simples données.

Ce niveau d’analyse a également permis aux planteurs d’anticiper la rébellion. Les outils étaient comptés régulièrement pour s’assurer qu’une grande quantité de haches ou d’autres armes potentielles ne disparaisse pas soudainement. « Ne laissez jamais un esclave verrouiller ou déverrouiller une porte », conseillait un esclavagiste de Virginie en 1847. De cette façon, les nouvelles techniques comptables mises au point pour maximiser les rendements ont également contribué à garantir que la violence ne vienne que d’une seule direction, permettant à une minorité de Blancs de contrôler un groupe beaucoup plus important d’esclaves noirs. Les planteurs américains n’ont jamais oublié ce qui s’est passé à Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti) en 1791, lorsque des esclaves ont pris les armes et se sont révoltés. En fait, de nombreux esclavagistes blancs chassés pendant la Révolution haïtienne se sont installés aux États-Unis et sont repartis à zéro.

Les surveillants enregistraient le rendement de chaque esclave. Les données étaient recueillies non seulement après la tombée de la nuit, lorsque les paniers de coton étaient pesés, mais tout au long de la journée de travail. Selon les mots d’un planteur de Caroline du Nord, les esclaves devaient être « suivis du lever du jour à la tombée de la nuit ». Le fait d’avoir les esclaves alignés sur des rangées parfois plus longues que cinq terrains de football, permettait aux surveillants de repérer ceux qui traînaient. L’aménagement uniforme de la terre avait une logique, celle de la domination. Les esclaves les plus rapides étaient placés en tête de ligne, ce qui forçaient ceux qui suivaient à aller au même rythme. Lorsque les esclaves tombaient malades, vieillissaient ou tombaient enceintes, on leur donnait des tâches plus légères. Un esclavagiste a mis sur pied une « équipe de tétées » pour les mères allaitantes, ainsi qu’une « équipe de rougeole », qui mettait immédiatement en quarantaine les personnes touchées par le virus et veillait à ce qu’elles fassent leur part pour contribuer à la machine productive. Les corps des esclaves et leurs tâches étaient gérés avec une exactitude rigoureuse. Dans les magazines spécialisés, les propriétaires échangeaient des conseils détaillés sur tous les aspects de la gestion d’une plantation, y compris sur les régimes alimentaires, les vêtements des esclaves, et le ton qu’un maître devrait utiliser. En 1846, un planteur de l’Alabama conseillait à ses amis esclavagistes de toujours donner des ordres « d’un ton doux, et d’essayer de donner l’impression aux nègres que ce que vous dites est le résultat de la réflexion ». Le diable (et ses profits) était dans les détails.

La quête intransigeante de quantification et la mise en place d’une comptabilité scientifique dans les plantations d’esclaves est antérieure à l’industrialisation. Les usines du Nord ne commenceront à adopter ces techniques que des décennies après l’émancipation. Les grands camps d’esclaves sont devenus de plus en plus efficaces et les esclaves noirs ont été les premiers travailleurs modernes de l’Amérique, leur productivité augmentant à un rythme stupéfiant. Au cours des 60 années qui ont précédé la guerre civile (guerre de Sécession, ndt)) la quantité quotidienne de coton récolté par esclave a augmenté de 2,3 % par an. Cela signifie qu’en 1862, l’esclave moyen ne récoltait pas 25 ou 50 % de coton de plus que son homologue de 1801, mais 400 % de plus.

Aujourd’hui, la technologie moderne facilite la surveillance permanente des lieux de travail, en particulier dans le secteur des services. Les entreprises ont mis au point des logiciels qui enregistrent les touches sur le clavier et les clics de souris des employés, et font des captures d’écran aléatoires plusieurs fois par jour. Les travailleurs d’aujourd’hui sont soumis à une grande variété de tactiques de surveillance, allant des tests de dépistage de drogues et de la vidéosurveillance en circuit fermé aux applications de suivi et même aux radars qui détectent la chaleur et le mouvement. Un sondage mené en 2006 a révélé que plus d’un tiers des entreprises comptant 1 000 employés ou plus avaient du personnel qui lisaient les courriels envoyés par les employés. La technologie qui accompagne cette surveillance des lieux de travail lui donne une allure futuriste. Mais il n’y a que la technologie qui est moderne. Derrière cette technologie, il y a la même volonté que celle des esclavagistes des plantations : contrôler totalement le corps de ses esclaves.

La plantation de coton a été la première grande entreprise américaine, et le premier Big Brother de la nation a été le surveillant d’esclaves. Et derrière chaque donnée, chaque ajustement rationnel du système, la violence perçait. Les propriétaires de plantations utilisaient une combinaison d’incitations et de punitions pour tirer le maximum des esclaves. Des esclaves battus s’évanouissaient sous les coups et se réveillaient en vomissant. D’autres « dansaient » ou « tremblaient » à chaque coup. Un récit à la première personne, datant de 1829 et provenant de l’Alabama, parlait d’un surveillant qui donnait des coups au visage des femmes qui cueillaient trop lentement à son goût, et leur arrachait la peau du dos. Pour l’historien Edward Baptist, avant la guerre civile, les Américains « vivaient dans une économie qui reposait sur la torture ».

Il serait réconfortant d’attribuer la brutalité de l’esclavage au racisme borné. On imagine une douleur infligée un peu au hasard, par un surveillant blanc stéréotypé, libre mais pauvre. Mais bon nombre de surveillants n’avaient pas le droit de fouetter à volonté. Les punitions étaient autorisées par la hiérarchie. Ce n’est pas tant la rage du pauvre Sudiste blanc que l’avidité du riche planteur blanc qui actionnait le fouet. La violence n’était ni arbitraire ni gratuite. Elle était rationnelle, capitaliste, tout cela faisait partie de l’organisation de la plantation. « En 1848, Henry Watson, un ancien esclave, écrivait : « Chaque esclave avait un nombre déterminé de livres de coton à cueillir, et il recevait autant de coups de fouets qu’il en manquait. » Comme les surveillants connaissaient très bien les capacités de chaque esclave, ils attribuaient à chacun un quota spécifique. Si un esclave ne respectait pas ce quota, il risquait d’être battu, mais s’il le dépassait, il risquait de le regretter le lendemain, car le maître pouvait réagir en augmentant son quota.

Les profits issus de la hausse de productivité ont été réalisés en exploitant la peur des esclaves. C’est pourquoi les cueilleurs de coton les plus rapides étaient souvent les plus fouettés. C’est pourquoi les sanctions augmentaient et diminuaient selon les fluctuations du marché mondial. En 1854, l’esclave fugitif John Brown a partagé ses souvenirs de la cueillette du coton : « Lorsque les prix augmentent sur le marché anglais, les pauvres esclaves en ressentent immédiatement les effets, car ils sont dirigés plus durement, et le fouet ne cesse plus de les frapper ». Le capitalisme sauvage n’a pas le monopole de la violence, mais comme il rend possible l’accumulation de fortunes personnelles presque illimitées, souvent aux dépens des autres, l’honnêteté revient chère.

L’esclavage a donné aux travailleurs blancs ce que W.E.B. Du Bois appelait un « salaire public et psychologique », qui leur permettait de faire ce qu’ils voulaient tout en se sentant dans leur droit. Cela aussi servait les intérêts de l’argent. L’esclavage avait réduit les salaires des travailleurs. Tant dans les villes que dans les campagnes, les employeurs disposaient d’un bassin de main-d’œuvre important et flexible composé d’esclaves et de personnes libres. Tout comme ceux qui ont des emplois précaires d’aujourd’hui, les journaliers, au temps de l’esclavage, vivaient dans des conditions de pénurie et d’incertitude, et les emplois destinés à être occupés temporairement étaient souvent occupés à vie. Le pouvoir ouvrier ne faisait pas le poids quand les patrons pouvaient choisir entre acheter des gens, les louer, engager des serviteurs sous contrat, prendre des apprentis ou embaucher des enfants et des prisonniers.

Cela a non seulement créé une situation très inégale et divisé les travailleurs entre eux, mais ça a aussi fait prendre « tout ce qui n’était pas de l’esclavage pour de la liberté », comme l’a écrit l’historien économique Stanley Engerman. Les pauvres travailleurs blancs qui voyaient les horreurs de l’esclavage, se laissaient persuader que leur situation aurait pu être pire. Ils acceptaient donc généralement leur sort, et la liberté américaine est largement comprise comme étant l’opposé de l’esclavage. C’était une liberté qui savait ce qu’elle n’était pas, mais ne savait pas à quoi elle aspirait ; une liberté mal nourrie et étriquée qui vous tenait à l’écart des chaînes mais qui ne fournissait ni pain ni abri. C’était une aspiration à la liberté bien trop facile à satisfaire.

Au cours des dernières décennies, les Etats-Unis ont connu la financiarisation de leur économie. En 1980, le Congrès a abrogé les règlementations en vigueur depuis la loi Glass-Steagall de 1933, en permettant aux banques de fusionner et de facturer à leurs clients des taux d’intérêt plus élevés. Depuis lors, de plus en plus de profits ont été réalisés non pas par le commerce et la production de biens et de services, mais par le biais d’instruments financiers. Entre 1980 et 2008, plus de 6600 milliards de dollars ont été transférés à des sociétés financières. Après avoir été témoins des succès et des excès de Wall Street, même les sociétés non financières se sont mises à faire de l’argent avec des activités et des produits financiers. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi tous les grands magasins de détail, chaînes hôtelières et compagnies aériennes veulent vous vendre une carte de crédit ? Ce tournant financier s’est répercuté dans notre vie de tous les jours : il a impacté nos régimes de retraite, nos prêts hypothécaires, nos marges de crédit et nos comptes-épargne d’études. Les Etasuniens qui ont un peu de moyens sont devenus des « sujets entreprenants », comme dit le politologue Robert Aitken.

Selon l’histoire officielle, l’hégémonie de  la finance américaine remonte à 1980, avec la suppression de Glass-Steagall, ou à 1944 avec Bretton Woods, ou peut-être à la spéculation irresponsable des années 1920. Mais en réalité, sa domination commence avec l’esclavage.

Prenons, par exemple, l’un des instruments financiers les plus populaires : l’hypothèque. Les esclaves ont été utilisés comme garantie pour des hypothèques, des siècles avant que l’hypothèque immobilière ne devienne la caractéristique principale de la classe moyenne étasunienne. A l’époque coloniale, quand la terre ne valait pas grand-chose et qu’il n’y avait pas de banques, la plupart des prêts étaient basés sur la propriété humaine. Au début des années 1700, les esclaves étaient la garantie dominante en Caroline du Sud. Beaucoup d’Américains ont découvert le concept d’hypothèque à travers le commerce d’esclaves, et non des biens immobiliers ; « l’extension des hypothèques à la propriété des esclaves a contribué au développement du capitalisme américain (et mondial) », m’a expliqué l’historien Joshua Rothman.

Par exemple, un instrument financier de Wall Street aussi moderne que les titres de créance adossés (C.D.O.), ces bombes à retardement appuyées sur l’inflation des prix de l’immobilier dans les années 2000. Les C.D.O. étaient les petits-enfants des titres adossés à des créances hypothécaires, basés sur le prix très excessif des esclaves vendus dans les années 1820 et 1830. Chacun de ces produits a permis à quelques-uns d’accumuler d’énormes fortunes avant de faire exploser l’économie.

Les esclavagistes n’ont pas été les premiers à titriser des actifs et des dettes aux Etats-Unis. Les sociétés foncières qui ont prospéré à la fin des années 1700 ont aussi utilisé cette méthode. Mais les esclavagistes ont tellement abusé de ce système et tellement exposé leurs partenaires internationaux au risque d’explosion de l’économie mondiale, que l’historien Edward Baptist m’a dit que cela pouvait être considéré comme « une nouvelle époque du capitalisme international, avec le développement d’un marché financier globalisé ». La nouveauté de la crise des saisies immobilières de 2008 n’était pas le concept de d’expropriation en lui-même mais l’expropriation de millions de propriétaires. De même, ce qui était nouveau dans la titrisation des esclaves, dans la première moitié du XIXe siècle, n’était pas le concept de titrisation, mais le niveau effréné de spéculation insensée sur le coton que la bulle de la dette liée aux esclaves a favorisé.

Avec l’expansion de la filière cotonnière étasunienne, la valeur des esclaves a grimpé en flèche. Entre 1804 et 1860, le prix moyen des hommes de 21 à 38 ans vendus à la Nouvelle-Orléans est passé d’environ 450 dollars à 1 200. Parce qu’il leur fallait acheter plus d’esclaves pour étendre leurs empires du coton, les planteurs ambitieux étaient obligés de lever des capitaux. C’est à ce moment-là que les banques sont entrées en scène. La Second Bank of the United States, créée en 1816, a commencé à investir massivement dans le coton. Au début des années 1830, les États esclavagistes du Sud-Ouest représentaient presque la moitié des affaires de la banque. A peu près à la même époque, les banques  à charte d’Etat ont commencé à se multiplier à un tel point qu’un historien a qualifié cela d' »orgie de création de banques ».

Lorsqu’ils voulaient obtenir des prêts, les planteurs se servaient des esclaves comme garantie. Thomas Jefferson a hypothéqué 150 de ses esclaves pour construire Monticello. Les esclaves pouvaient être vendus beaucoup plus facilement que les terres et, dans plusieurs États du Sud, plus de huit prêts hypothécaires sur dix utilisaient les esclaves comme garantie totale ou partielle. Comme l’a écrit l’historienne Bonnie Martin, « les propriétaires d’esclaves ont fait travailler financièrement et physiquement leurs esclaves de l’époque coloniale jusqu’à l’émancipation » en hypothéquant leurs esclaves pour en acheter davantage. L’accès au crédit s’est développé plus rapidement que le kudzu (plante invasive, ndt) du Mississippi, ce qui a conduit un observateur de 1836 à remarquer qu’en pays du coton « l’argent, ou ce qui tenait lieu d’argent, était la seule chose bon marché ».

Les planteurs ont contracté d’énormes dettes pour financer leurs opérations. Et pourquoi pas ? Les chiffres leur donnaient raison. Une plantation de coton, dans la première décennie du XIXe siècle, pouvait se permettre de payer un intérêt de 8 %  sur ses esclaves car elle obtenait d’eux un rendement trois fois plus élevé. Les planteurs ne s’en sont pas privés, offrant parfois les mêmes esclaves comme garantie pour des prêts hypothécaires multiples. Les banques ont prêté sans retenue. En 1833, les banques du Mississippi avaient émis 20 fois plus de papier-monnaie qu’elles n’avaient d’or dans leurs coffres. Dans plusieurs comtés du Sud, les prêts hypothécaires sur les esclaves ont injecté plus de capitaux dans l’économie que les ventes des récoltes.

Les marchés financiers mondiaux ont participé aux opérations. Quand Thomas Jefferson a hypothéqué ses esclaves, c’est une entreprise néerlandaise qui lui a prêté l’argent. L’achat de la Louisiane, qui a ouvert des millions d’hectares à la production de coton, a été financé par la riche banque commerciale britannique Baring Brothers. La majorité du crédit qui alimentait l’économie esclavagiste américaine provenait du marché monétaire londonien. Des années après l’abolition de la traite des esclaves africains en Grande-Bretagne (1807), ce pays et une grande partie de l’Europe avec lui, finançaient l’esclavage aux États-Unis. Pour mobiliser des capitaux, les banques à charte d’État ont mis en commun la dette générée par les hypothèques sur les esclaves et l’ont reconditionnée en obligations promettant aux investisseurs un intérêt annuel. Pendant la période d’essor de l’esclavage, les banques ont rapidement répandu les obligations, jusqu’à Hambourg et à Amsterdam, à Boston et à Philadelphie.

Certains historiens ont affirmé que l’abolition de la traite négrière par les Britanniques a été un tournant dans la modernité, marqué par le développement d’un nouveau type de conscience morale avec la prise en compte de la souffrance de personnes résidant à des milliers de kilomètres. Mais peut-être que la seule différence, a été le besoin croissant de nettoyer le dollar américain, la livre sterling et le franc français du sang des esclaves, un besoin que les marchés financiers occidentaux ont rapidement satisfait grâce au commerce mondial des obligations bancaires. C’était un moyen de profiter de l’esclavage sans se salir les mains. De fait, beaucoup d’investisseurs n’ont peut-être pas réalisé que leur argent servait à acheter et à exploiter des gens, comme beaucoup de ceux qui ont aujourd’hui investi dans des multinationales du textile ne savent pas que leur argent subventionne un commerce qui continue à dépendre du travail forcé dans des pays comme l’Ouzbékistan et la Chine et du travail des enfants dans des pays comme l’Inde et le Brésil. On peut appeler cela de l’ironie, une coïncidence ou peut-être une relation de cause à effet – les historiens n’ont pas encore décidé – mais les moyens de profiter indirectement de l’esclavage ont gagné en popularité à mesure que l’institution même de l’esclavage devenait impopulaire. « Je pense que cela va ensemble », m’a dit l’historien Calvin Schermerhorn. « Nous aimons nos semblables, mais quel choix faisons-nous lorsque notre profit dépend de leur travail forcé ?  Oui, il y a une conscience supérieure. Mais en fin de compte tout se ramène à la question : A qui achètes-tu ton coton ? »

Les banques ont émis des dizaines de millions de dollars de prêts en partant de l’hypothèse que la hausse des prix du coton se poursuivrait indéfiniment. La spéculation a atteint son paroxysme dans les années 1830, alors que les hommes d’affaires, les planteurs et les avocats voulaient croire qu’ils pouvaient amasser de véritables trésors en participant à un jeu risqué auquel tout le monde semblait jouer. Si les planteurs se croyaient invincibles, capables de plier les lois de la finance à leur volonté, c’était très probablement parce qu’on leur avait donné le pouvoir de plier les lois de la nature à leur volonté, de faire ce qu’ils voulaient avec la terre et les gens qui la travaillaient. Du Bois écrivait : « Le simple fait qu’un homme puisse être, légalement, le maître absolu de l’esprit et du corps d’autres êtres humains devait nécessairement avoir des effets désastreux. Cela gonflait l’ego de la plupart des planteurs au-delà de toute mesure ; ils sont devenus des roitelets arrogants, hautains et querelleurs. » Que représentent les lois de l’économie pour ceux qui exercent un pouvoir divin sur tout un peuple ?

Nous savons comment ces histoires finissent. Le Sud américain a surproduit le coton à la hâte grâce à l’abondance de terres, de crédit et de main-d’œuvre bon marché, la demande des consommateurs n’a pas pu suivre l’offre, et les prix ont chuté. La valeur du coton a commencé à baisser dès 1834 avant de plonger comme un oiseau frappé en plein vol, déclenchant la Panique de 1837. Les investisseurs et les créanciers ont réclamé le remboursement de leur argent, mais les propriétaires de plantations étaient sous l’eau. Les planteurs du Mississippi devaient 33 millions de dollars aux banques de la Nouvelle-Orléans l’année où leurs récoltes n’ont rapporté que 10 millions de dollars. Ils ne pouvaient simplement pas liquider leurs actifs pour lever de l’argent. Lorsque le prix du coton a chuté, il a fait chuter la valeur des esclaves et des terres en même temps. Des esclaves qui valaient 2 000 dollars n’en valaient plus que 60. Aujourd’hui, on dirait que la dette des planteurs était « toxique ».

Comme les esclavagistes ne pouvaient pas rembourser leurs prêts, les banques ne pouvaient pas payer les intérêts sur les obligations qu’elles avaient vendues. Des protestations se sont fait entendre dans le monde occidental, et les investisseurs ont commencé à exiger que les États augmentent les impôts pour tenir leurs promesses. Après tout, les obligations étaient garanties par les contribuables. Mais suite à une vague d’indignation populiste, les États ont décidé de ne pas pressurer chaque famille du Sud pour en extraire l’argent, pièce par pièce. Mais ils n’ont pas non plus exproprié les propriétaires de plantations en faillite. S’ils avaient essayé, les planteurs se seraient enfuis au Texas (une république indépendante à l’époque) avec leur trésor et leurs esclaves. Les détenteurs d’obligations furieux ont intenté des poursuites et des encaisseurs se sont suicidés, mais les États en faillite ont refusé de payer leurs dettes. L’esclavage cotonnier était too big to fail. Le Sud a préféré se couper du marché mondial du crédit, la source de l’expansion du coton, plutôt que de demander des comptes aux planteurs et à leurs banques pour leur irresponsabilité et leur cupidité.

Même les historiens universitaires, qui, dès le début du deuxième cycle, apprennent à se méfier du présentisme et à ne pas extrapoler les évènements historiques, n’ont pas pu résister à la tentation d’établir des parallèles entre la Panique de 1837 et la crise financière de 2008. Tous les ingrédients sont là : des instruments financiers trompeurs qui dissimulent les risques tout en reliant les banquiers, les investisseurs et les familles du monde entier ; des profits fantastiques amassés du jour au lendemain ; la normalisation de la spéculation et des prises de risques à couper le souffle ; des piles de billets de banque imprimés sur le mythe qu’une institution (coton, logement) est indestructible ; une exploitation délibérée des Noirs ; l’impunité de ceux qui en ont profité quand tout s’écroule : les emprunteurs ont été sauvés après 1837, les banques après 2008.

Pendant l’esclavage, « les Etasuniens ont bâti une culture de la spéculation d’une permissivité unique au monde », écrit l’historien Joshua Rothman dans son livre « Flush Times and Fever Dreams » de 2012. Cette culture a été si loin dans les plantations de coton qu’elle a conduit à la guerre de Sécession et qu’elle est restée une caractéristique déterminante du capitalisme américain. C’est la culture de l’acquisition de richesses sans travailler, de la croissance à tout prix et de l’exploitation éhontée des plus faibles. C’est la culture qui nous a apporté la Panique de 1837, le krach boursier de 1929 et la récession de 2008. C’est la culture qui a engendré des inégalités stupéfiantes et des conditions de travail indignes. Si aujourd’hui les Etats-Unis promeuvent un type aussi nuisible de capitalisme – un capitalisme antisyndical de salaires de misère, d’emplois précaires et d’insécurité normalisée ; un capitalisme où le gagnant rafle tout, où les inégalités dépassent l’entendement, et qui non seulement permet mais récompense la violation des lois financières ; un capitalisme raciste qui ignore le fait que l’esclavage n’a pas seulement privé les Noirs de liberté, mais qu’il a construit la richesse blanche et a creusé un fossé entre les Noirs et les Blancs qui s’élargit chaque année – c’est peut-être, entre autres, parce que le capitalisme américain s’est construit de la manière la plus ignoble qui soit.

Matthew Desmond

Article original en anglais : American Capitalism Is Brutal. You Can Trace That to the Plantation. (Published 2019), The New-York Times Magazine,

Traduction : Dominique Muselet

Matthew Desmond est professeur de sociologie à l’Université de Princeton et contributeur de ce magazine. Son dernier article traitait des avantages du salaire minimum. Lyle Ashton Harris est un artiste qui travaille dans la photographie, le collage et la performance. Il participe actuellement à deux expositions collectives au Guggenheim à New York. Mehrsa Baradaran est professeure à la faculté de droit à U.C. Irvine et auteure de « The Color of Money » et « How the Other Half Banks ». Tiya Miles est professeure au département d’histoire de Harvard et auteure, plus récemment, de « The Dawn of Detroit : Chronique de l’esclavage et de la liberté dans la ville des détroits ».



Articles Par : Matthew Desmond

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