Pour une nouvelle approche productive au Moyen-Orient

La « démocratie doit être quelque chose de plus que deux loups et un mouton votant sur ce qu’il y aura au dîner. »
James Bovard, 1994

« Dans un pays bien gouverné la pauvreté est une chose honteuse.
Dans un pays mal gouverné la richesse est une chose honteuse. »
Confucius (551-479 Avant JC)

« La démocratie [c’est] lorsque les indigents, et non les hommes aisés sont les souverains. »
Aristote (384-322 Avant JC)

Pouvez-vous avoir une « démocratie occupée » militairement ? Poser la question c’est y répondre. Quand une armée étrangère occupe un pays par la force, la population ne peut pas être aux commandes de son destin, quel que soit la langue parlée par le gouvernement marionnette local. — C’est un oxymoron [alliance de deux mots incompatibles, NDT]. C’est la raison pour laquelle il ne pourra jamais y avoir de démocratie en Irak ou en Afghanistan occupé. C’est seulement, pour ne pas dire jamais, quand les troupes étrangères partiront ou seront mises à la porte que le gouvernement national de ces pays pourront regagner leur légitimité et leur autorité.

C’est une vérité première que le président US, George W. Bush, semble avoir des troubles de comportement. Afin de mobiliser l’opinion publique US derrière sa politique ratée, Bush II est forcé de recourir à un vocabulaire incendiaire pour présenter sa « guerre contre le terrorisme », une _expression vide, comme la guerre contre les terroristes en Irak. Par exemple, il peut y avoir des soi-disant « terroristes » en Irak, mais il n’y en avait aucun avant que l’administration Bush-Cheney décide d’envahir ce pays le 20 mars 2003, et ce ne sont pas les terroristes du monde entier, à la Al Qaïda, qui veulent faire du tort aux USA. « Les terroristes d’Al Qaïda », qui ont des griefs contre les USA, ne sont pas en Irak ; ils sont au Pakistan, au Yémen, en Arabie Saoudite, au Royaume-Uni …etc. — La plupart des insurgés en Irak ne sont pas des terroristes, mais des patriotes qui combattent un envahisseur étranger. Ce serait le cas si les USA étaient envahis par un ennemi étranger : Les usaméricains combattraient les envahisseurs. Combattre un envahisseur n’est pas un acte de terroriste mais un acte patriote. Pour Bush, « rester dans le coup » en Irak n’est pas une politique ; c’est de l’obstination et un manque de vision.

En attaquant, envahissant et occupant l’Irak sans raison et illégalement, le 20 mars 2003, pour des raisons dont Bush lui-même avoue qu’elles n’ont rien à voir avec le 9/11 et le terrorisme, comme il l’a concédé publiquement lors de sa conférence de presse du 21 août  (2006), tout en continuant à bafouiller le mot « démocratie », non seulement le président américain donne à la grande institution de la démocratie une mauvaise réputation, mais il tourne des centaines de millions de musulmans modérés contre l’Occident et ses valeurs humanistes. Et, pour faire empirer les choses, en poussant Israël à l’attaque et à la destruction du Liban, tout en fermant les yeux sur les souffrances qu’Israël impose tous les jours aux Palestiniens, George W. Bush suscite contre lui le mépris et la colère de la majeure partie du monde. À la suite de ses actes politiques malencontreux et de ses déclarations niaises, Bush réussit seulement à présenter les interventions occidentales en Irak et en Afghanistan comme des aventures coloniales et impérialistes du 19èmes Siècle. En ce sens, George W. Bush et sa cohorte de conseillers néo-conservateurs sont vraiment des hommes du 19ème siècle, pas du 21ème siècle. De nos jours, une telle politique conduit dans une impasse. Elle ne peut que mener au désastre.

Ce dont on aurait besoin, dans les circonstances actuelles, c’est d’une conférence internationale, de préférence sous les auspices des Nations Unies, sur le futur de l’Irak et de la région du Moyen-Orient et de leurs habitants. Cela peut être la seule manière d’arrêter la guerre civile irakienne que Bush dénie mais que le Pentagone confirme qu’elle se poursuit en Irak. Un premier objectif évident serait de rediriger les dépenses militaires improductives courantes vers comme un plan Marshall pour élever le standard de vie de cette partie du monde. Un deuxième objectif impératif serait d’adopter un plan ambitieux pour arrêter, une fois pour toutes, l’anarchie qui règne dans les rapports arabo-israéliens. Je suspecte que la plupart des Israéliens et des Palestiniens sont fatigués de la guerre et qu’ils accepteraient un compromis vivable confectionné de bonne foi.

Si aucune dirigeant crédible ne pousse les événements dans cette direction raisonnable, les lois de l’inertie et les effets pervers feront évoluer les choses vers le chaos et toujours plus d’escalade des conflits.

Puisque les USA sont si profondément impliqués dans le désordre international actuel, un réexamen de la situation exigerait des changements de fond dans l’approche par l’administration de Bush des problèmes internationaux. Cela pourrait être difficile, mais sûrement pas impossible, pour le président usaméricain de
 – d’abord, cesser d’être sous l’influence dominatrice de son vice-président, et réaffirmer son autorité pour élaborer la politique étrangère, et
– en second lieu, placer les intérêts du lobby pro-israélien à une place plus équilibrée dans la politique étrangère usaméricaine. Cela exigerait le remplacement du personnel, mais d’autres présidents, Ronald Reagan par exemple, l’ont fait avec succès.

La nouvelle politique étrangère usaméricaine envers le Moyen-Orient devrait prendre exemple sur les Accords de Helsinki en 1975 et la nouvelle approche productive vis-à-vis du du bloc soviétique. Le monde a besoin d’une politique de « détente » au Moyen-Orient. – Les dirigeants occidentaux devraient commencer à dire à tous les musulmans modérés, et ils sont la grande majorité, 1- que leur pays, leur culture et leur religion seront dorénavant respectés ; et 2- que les pays démocratiques les aideront dans leur développement, mais ne leur dicteront pas quels systèmes politiques et quelles institutions ils doivent adopter.

L’administration US actuelle doit rester en fonction jusqu’à janvier 2009. Les USA et le monde n’ont pas les moyens d’attendre encore deux longues années d’amateurisme, d’improvisation et d’échec. 

 Espérons que le monde d’aujourd’hui pourra engendrer des dirigeants d’une grande perspicacité du genre découvert dans le passé, comme Marshall, Acheson, Kissinger, Brzezinski, Baker,… etc.

Original

Traduit de l’anglais par Pétrus Lombard, membre associé et révisé par Fausto Giudice, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est en Copyleft : elle est libre de reproduction, à condition d’en respecter l’intégrité et d’en mentionner sources et auteurs.

Note de Tlaxcala : nous nous permettons de signaler que nous ne partageons pas les appréciations du Dr Tremblay sur les « grands hommes » évoqués en fin d’article, en particulier Henry Kissinger, responsable notamment de crimes de guerre en Indochine et du coup d’État du 11 septembre 1973 au Chili.



Articles Par : Prof Rodrigue Tremblay

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