Richard Labévière dénonce l’orwellisation de la presse française

Viré pour mal-pensance, Richard Labévière contre-attaque.

Rédacteur en chef à Radio France Internationale (RFI), grand reporter et écrivain spécialiste du Proche et du Moyen Orient, Richard Labévière vient d’être licencié, au motif qu’il n’aurait pas demandé la permission de sa direction pour faire une interview de Bachar el-Assad le 8 juillet dernier, juste avant l’arrivée du président syrien en France en visite officielle (l’interview incriminée est en ligne sur le site de TV5 Monde).

Un prétexte aberrant, qui cache d’évidence d’autres raisons. Inavouables.

Le licenciement de ce journaliste de renommée internationale a été prononcé en plein mois d’août, le 12 exactement, à la dérobée, comme si de rien n’était… Une évidente volonté de discrétion, respectée scrupuleusement par tous les grands médias français, puisque pas un seul à ce jour (sauf erreur) ne s’est fait l’écho de ce limogeage.

Richard Labévière livre aujourd’hui ce qui lui semble être les vraies raisons de son renvoi.

Celui-ci s’inscrit d’abord, dit-il, dans « une suite de harcèlements professionnels » de la part de la direction de RFI, sur une durée de 4 ans. Labévière s’est ainsi vu retirer en 2005 l’Editorial international de RFI sur la simple demande de l’ambassadeur d’Israël en France, Nissim Zvili.

Labévière dit aussi avoir été victime de menaces de mort sur son lieu de travail, « émanant vraisemblablement du Betar » (milice sioniste), « avec des complicités internes à RFI« . L’accusation est forte.

Il s’agirait, par ces pratiques, d’intimider les journalistes qui sortent du discours officiel pro-israélien que RFI chercherait à imposer.

Labévière note que sa mise au pas intervient au moment où Christine Ockrent, épouse du ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, et Alain Pouzilhac prennent la tête de l’Audiovisuel extérieur de la France (RFI, TV5 Monde et France 24). Coïncidence ?

Il s’agirait, ni plus ni moins, selon lui, d’imposer une lecture néoconservatrice, américaine ou israélienne, des crises proche-orientales. Avoir une lecture pro-palestinienne ou pro-arabe ne serait aujourd’hui plus permis.

Retour du délit d’opinion ? Mainmise d’une pensée unique ? Terrorisme intellectuel ? Richard Labévière va jusqu’à parler d’orwellisation de la presse française, publique et privée.

A l’heure où le pluralisme semble menacé, sans que les médias ne s’en émeuvent le moins du monde, une pétition de soutien à Richard Labévière vient d’être mise en ligne.

Le journaliste a décidé d’assigner en justice la chaîne publique qui l’employait. Un préavis de grève est par ailleurs lancé par les syndicats de RFI pour la rentrée, et un référé prudhommal aura lieu le 22 septembre prochain.

Touche pas à mon BHL

Rappelons que, parmi ses faits d’armes, Richard Labévière avait publié l’an dernier un livre intitulé Bernard-Henry Lévy ou La règle du je, dans lequel il démontait la « double imposture : philosophique et journalistique » que représente selon lui BHL.

« Il s’agit de démonter, note son éditeur, les bouffonneries qu’il fait passer pour de la philosophie et du journalisme, avec l’aide des médias et de la grande édition qui sont les chiens de garde de l’idéologie la plus réactionnaire. » Labèvière présente BHL comme un « serviteur de l’empire américain et du libéralisme mondialisé, ego médiatique vide et surdimensionné« . De quoi s’attirer des ennuis…

Touche pas à mon Ben Laden

Même si cela n’a vraisemblablement aucun rapport avec son licenciement estival, souvenons-nous aussi que Richard Labévière est l’un des deux journalistes (avec Alexandra Richard du Figaro) à avoir rapporté la présence d’Oussama Ben Laden à l’hôpital américain de Dubaï du 4 au 14 juillet 2001, deux mois seulement avant les attentats du 11-Septembre, et sa rencontre, le 12 juillet, avec le chef d’antenne local de la CIA Larry Mitchell.

Extrait de son ouvrage Les Coulisses de la Terreur : « Recoupé et vérifié par d’autres témoignages, le récit de notre informateur atteste que la fameuse rencontre a eu lieu le 12 juillet 2001. Révélée le 31 octobre 2001 par Radio-France Internationale (RFI) et Le Figaro, l’information est aussitôt démentie par le directeur de l’hôpital, Bernard Koval (…). Le lendemain, RFI révèle l’identité de l’agent de la CIA qui, selon ses informations, a bel et bien rencontré Ben Laden. Le représentant local de la CIA qui a rendu visite à Oussama Ben Laden le 12 juillet 2001 à l’Hôpital américain de Dubaï s’appelle Larry Mitchell. »

Description du livre : « Deux mois avant les attentats du 11 septembre, la CIA négocie encore avec Oussama Ben Laden. Puis les Etats-Unis déclenchent les hostilités en Afghanistan. Ils laissent s’échapper le milliardaire saoudien et ses protecteurs, comme ils laissent s’évanouir leurs capitaux dans une jungle financière. Qui sont les complices au cœur même de l’establishment américain ? Aurons-nous bientôt un « Ben Ladengate » ? Pour l’éviter, les idéologues de l’administration Bush inventent une nouvelle guerre froide : la guerre sans fin contre la terreur… Désormais, tous ceux qui ne partagent pas les valeurs du meilleur des mondes selon Washington sont suspectés de soutenir le terrorisme, sinon d’être des terroristes eux-mêmes, agents d’un nouveau complot contre le monde libre et les champions du Bien. Ce complot est baptisé d’un nom générique : Al Qaïda. Du Pakistan à Bali, de Riyad à Casablanca, de Genève à Lugano, enquêtant sur les lieux des attentats et les places bancaires, Richard Labévière parvient à une conclusion : Al Qaïda n’existe pas. Le terrorisme ne relève pas d’une organisation mondiale, mais d’une nébuleuse de réseaux qui s’enracinent localement, dans les économies les plus inégalitaires et les régimes politiques les plus arbitraires. Pourtant, la mythologie Ben Laden continue. Pour survivre, l’Empire a besoin d’un ennemi et de faire la guerre : une guerre sans fin.  »

Le livre a paru en novembre 2003. Les ennuis de Labévière ont commencé, d’après ses dires, il y a environ 4 ans… Non, il n’y a sans doute aucun rapport…

Des vidéos de Cinesoumoud et Kropotkine



Articles Par : Global Research

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