Roundup et glyphosate : Multiple toxicité mortelle

La détermination scientifique précise de la manière dont de très faibles concentrations d’herbicide et d’autres produits chimiques dans les formules de Roundup tuent les cellules humaines, donne du poids au projet d’élimination progressive et d’interdiction de toute diffusion supplémentaire de cultures génétiquement modifiées tolérantes au Roundup.

Cet article a été soumis à l’USDA (Ministère de l’Agriculture étasunien) au nom de l’ISIS.

Quatre formules différentes du Roundup, l’herbicide au glyphosate fabriqué par Monsanto, sont hautement toxiques pour les cellules humaines, et cela à des concentrations bien en dessous de la quantité recommandée pour l’usage agricole. Les chercheurs de l’Institut de Biologie de Caen, en France, ont publié leurs dernières conclusions dans le numéro actuel de Chemical Research in Toxicology [1] [Ce fait a été révélé il y a quelques temps au grand public par notamment un interview au 20 Heures de TF1, ndt].

Les formules de Roundup sont des cocktails mortels

Les quatre formules de Roundup sont des mélanges de glyphosate et de divers adjuvants (substance ajoutée pour renforcer l’effet de l’ingrédient actif). Les formules de Roundup sont aujourd’hui le top des herbicides non sélectifs dans le monde entier, et de plus en plus car plus de 75 pour cent des organismes génétiquement modifiés (OGM) sont tolérants au Roundup. Le glyphosate et son métabolite principal, l’acide aminomethylphosphonic (AMPA) sont les principaux contaminants des cours d’eau. Ces adjuvants, rarement mesurés dans l’environnement et généralement considérés « inertes, » sont protégés comme des secrets commerciaux par l’industrie. Parmi eux, celui qui prédomine est l’huile de suif polyéthoxylatée (POEA). Le POEA sert de détergent tensioactif dans les formules de Roundup pour améliorer sa solubilité et sa pénétration dans les plantes.

Trois lignées cellulaires humaines ont été testées : cellules HUVEC originelles de l’épithélium veineux du cordon ombilical ; cellules embryonnaires provenant de la lignée rénale 293 ; et cellules placentaires de la lignée JEG3. Toutes ces cellules sont mortes en 24 heures d’exposition aux formules de Roundup.

Les formules de Roundup contiennent différentes quantités de glyphosate, la substance active : Roundup Express, 7,2 grammes par litre (R7.2) ; Roundup Bioforce, 360 g/L (R360) ; Roundup Grand Travaux, 400 g/L (R400) et Roundup Grand Travaux Plus, 450 g / L (R450). Ces formules ont été comparées avec leurs ingrédients seuls : glyphosate, AMPA, et POEA. Toutes les formules de Roundup étudiées, avec leurs différents ingrédients chimiques, ont été testées à des concentrations de 10 ppm (parties par million) à 2 pour cent (taux recommandé en usage agricoles), ce qui signifie que les formules de Roundup étaient diluées à 100.000 fois ou plus.

Les chercheurs ont découvert que la présence des autres ingrédients chimiques des formules de Roundup, comme le POEA, amplifiait réellement les effets toxiques du glyphosate. La toxicité des formules de Roundup n’est pas proportionnelle à leur teneur en glyphosate. Elle est probablement due au POEA et aux autres ingrédients non encore divulgués, présents dans toutes les formules. Par lui-même le POEA est bien plus toxique que les formules de Roundup, alors que l’AMPA est plus toxique que le glyphosate.

 

Les points de toxicité multiples

 

Les chercheurs ont testé les formules de Roundup, le glyphosate, l’AMPA et le POEA, pour leurs effets sur trois points capables de tuer la cellule : dommages à la membrane cellulaire ; empoisonnement des mitochrondries (lieu énergétique du métabolisme) ; et fragmentation de l’ADN dans le noyau cellulaire entraînant la mort programmée des cellules. Ils ont mesuré les différentes concentrations des marqueurs enzymatiques spécifiques pour chacun des dommages après 24 heures d’exposition, et ont aussi obtenu des images de cultures cellulaires au microscope.

Toutes les formules de Roundup, ainsi que le glyphosate, ont provoqué la mort des cellules ; les résultats sont les mêmes pour tous les types de cellules, mais à des concentrations différentes. Ainsi, le R400, la formule la plus toxique, a tué toutes les cellules à 20 ppm, ce qui équivaut à 8 ppm de glyphosate. Toutefois, 4 à 10 ppm de glyphosate seul n’est pas toxique, sa toxicité commence aux alentours de un pour cent (10.000 ppm) et n’affecte pas la membrane cellulaire. Les formules de Roundup endommagent la membrane cellulaire, et empoisonnent aussi les mitochondries. En revanche, le glyphosate empoisonne les mitochondries sans endommager la membrane cellulaire

De façon inattendue, le R400 est plus toxique que le R450, ce dernier étant à son tour plus nocifs que le R360, le R7.2 et que le glyphosate. Cependant, la toxicité n’est pas proportionnelle à la concentration en glyphosate. La capacité de tuer les cellules du R7.2 est presque la même que celle de R360, et ces résultats sont constants dans l’ensemble des lignées cellulaires. Cela suggère l’implication d’autres substances inconnues dans les effets toxiques.

Ainsi, l’AMPA et le POEA tuent aussi les cellules en empoisonnant les mitochrondies et en endommageant la membrane cellulaire. Le POEA est si puissant qu’il commence à endommager la membrane cellulaire des HUVEC et empoisonne les mitochondries des cellules 293 et JEG3 à 1 ppm. Les formules de Roundup sont plus toxiques que le glyphosate ou l’AMPA. L’AMPA lui-même détruit la membrane cellulaire, ce que ne fait pourtant pas le glyphosate, bien qu’il soit 3 à 8 fois plus toxique pour les mitochondries que l’AMPA. Mais, comme les dommages à la membrane cellulaire sont plus graves pour la cellule, l’AMPA est plus toxique que le glyphosate, alors que le POEA est le plus toxique de tous.

Qu’arrive-t-il quand tous ces ingrédients sont réunis ? Les chercheurs ont constaté que, pour les cellules HUVEC et 293, les combinaisons de glyphosate et de POEA, de glyphosate et d’AMPA, d’AMPA et de POEA, sont plus toxiques que les ingrédients seuls à même concentration.

Pour la mort cellulaire programmée, l’action est rapide. Les marqueurs d’enzymes (impliquées dans la dégradation des cellules mortes) sont activés à partir de 6 heures d’exposition, avec un maximum à 12 heures dans tous les cas. Les cellules HUVEC sont 60 à 160 fois plus sensibles que les autres lignées cellulaires ; le glyphosate et le R360 sont efficaces à la même concentration de 50 ppm. Les adjuvants ne semblent pas nécessaires. Le glyphosate seul est 30 pour cent plus puissant que les formules de Roundup ; il agit rapidement à concentration 500 à 1000 fois plus faible qu’en usage agricole.

 

Interdiction des cultures OGM tolérantes au Roundup

 

Ces dernières études confirment une foule de preuves sur la toxicité du glyphosate et des formules de Roundup [2] (Glyphosate Toxic & Roundup Worse, SiS 26), et déterminent exactement les différents points d’action qui provoquent tous la mort cellulaire. Des études épidémiologiques ont déjà lié le glyphosate à des avortements spontanés, à des lymphome non hodgkinien et à des myélomes multiples. Des études de laboratoire ont montré que le glyphosate inhibe la transcription génétique chez les œufs d’oursins et retarde le développement. Chez le rat, de brèves expositions au glyphosate ont provoqué des dommages au foie, et l’agent détergent tensioactif ajouté dans le Roundup a un effet synergique, entraînant davantage de dégâts dans le foie. Il a aussi été découvert que le Roundup est bien plus mortel pour les grenouilles que pour les mauvaises herbes, et qu’il pourrait être impliqué dans la disparition des amphibiens ces dernières décennies [3] (Roundup Kills Frogs, SiS 26).

Nous avons exigé la révision de la réglementation sur le glyphosate et le Roundup en 2005 [2]. Il y a maintenant de solides arguments en faveur de la limitation, sinon de l’élimination progressive du glyphosate et du Roundup, d’abord en interdisant la diffusion des cultures OGM tolérantes au Roundup dans le monde entier. Pour la même raison, aucune autre cultures OGM tolérante au Roundup ne devrait recevoir d’approbation de diffusion commerciale.

Références

  1. Benachour N and Séralini G-E.. Glyphosate formulations Induce Apoptosis and Necrosis in Human Umbilical, Embryonic, and Placental Cells Chem. Res. Toxicol. , 2009, 22 (1), pp 97–105
  2. Ho MW and Cummins J. Glyphosate toxic and Roundup worse Science in Society 26, 12, 2005. http://www.i-sis.org.uk/GTARW.php
  3. Ho MW. Roundup kills grogs Science in Society 26. 13, 2005.

Article original en anglais : Death by Multiple Poisoning, Glyphosate and Roundup, ISIS, le 11 février 2009.

Traduction par Pétrus Lombard.



Articles Par : Dr. Mae-Wan Ho et Brett Cherry

Avis de non-responsabilité : Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.

Le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) accorde la permission de reproduire la version intégrale ou des extraits d'articles du site Mondialisation.ca sur des sites de médias alternatifs. La source de l'article, l'adresse url ainsi qu'un hyperlien vers l'article original du CRM doivent être indiqués. Une note de droit d'auteur (copyright) doit également être indiquée.

Pour publier des articles de Mondialisation.ca en format papier ou autre, y compris les sites Internet commerciaux, contactez: [email protected]

Mondialisation.ca contient du matériel protégé par le droit d'auteur, dont le détenteur n'a pas toujours autorisé l’utilisation. Nous mettons ce matériel à la disposition de nos lecteurs en vertu du principe "d'utilisation équitable", dans le but d'améliorer la compréhension des enjeux politiques, économiques et sociaux. Tout le matériel mis en ligne sur ce site est à but non lucratif. Il est mis à la disposition de tous ceux qui s'y intéressent dans le but de faire de la recherche ainsi qu'à des fins éducatives. Si vous désirez utiliser du matériel protégé par le droit d'auteur pour des raisons autres que "l'utilisation équitable", vous devez demander la permission au détenteur du droit d'auteur.

Contact média: [email protected]