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Russie: la danse du Covid au somme de l’Etat n’empêche pas les coups de l’OMS
Par Karine Bechet-Golovko
Mondialisation.ca, 17 septembre 2021
Russie politics
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Sans grande surprise, l’OMS suspend la procédure d’agrément du vaccin russe Spoutnik V, histoire sans fin d’un conflit géopolitique évident. Et alors que l’agenda intérieur et international est extrêmement chargé, le Président russe, testé négatif et vacciné, se met en auto-isolement, en raison de cas dans son entourage. A part à servir d’instrument de chantage global, l’on en arrive à se demander vraiment à quoi sert ce vaccin en général ? En tout cas, un signal de faiblesse du pouvoir est clairement envoyé à un moment on ne peut plus inopportun.

Le vaccin sauve l’humanité d’un danger mortel, les non-vaccinés sont des parias qu’il faut écarter de la vie sociale, certains dirigeants au Canada et aux Etats-Unis n’ont pas de mots assez forts pour parler de ces inconscients égoïstes qui refusent la piquouse salvatrice.

Pourtant, dans ce consensus politico-médiatique intrusif, de nombreux détails surprennent. Et il est bien connu que le Diable se cache dans les détails …

L’OMS, qui doit avoir pour priorité la santé de l’humanité (rien de moins, je vous assure) suspend la procédure d’agrément du vaccin russe Spoutnik V. Rien de personnel, rien de politique (que vous avez l’esprit mal tourné!), simplement lors de la tournée d’inspection, il semblerait que l’un des points de fabrication ne soit pas aux normes. Ah, les normes, que serait-on sans elles ! Et lorsque l’on veut absolument trouver quelque chose, en général, on le trouve.

En effet, fin juin le ministère russe avait assuré que les « experts » de l’OMS avaient contrôlé 4 des 7 lieux de production et avaient fait des remarques par rapport à l’un d’entre eux, des travaux de mise en conformité allaient être réalisés. Toutefois, souligne le ministère russe, cela ne remet pas en cause la qualité du vaccin.le vaccin nous protège sinon totalement du virus, il doit faire en sorte que l’on n’en tombe pas gravement malade. Une fois vacciné, dans la logique des choses, les « heureux vaccinés » ne doivent plus avoir peur du virus ni des vilains contaminés, puisqu’ils sont protégés. C’est tout l’intérêt de la chose …

Vladimir Poutine vient de déclarer qu’il se met en auto-isolement quelques jours, car il a de nombreux cas de covidés dans son entourage … Dans le détail, j’ai du mal à comprendre … Il a été vacciné et testé négatif …. Alors pourquoi s’isoler ? Sur le plan sanitaire, ce n’est pas logique, si l’on pense que le vaccin est efficace comme affirmé. Autre question : d’où viennent tous ces contaminés, si tout l’entourage est vacciné ? Soit la vaccination n’est pas aussi répandue qu’annoncé dans les hautes sphères, soit elle n’est pas aussi efficace qu’annoncé officiellement ? Quelle autre possibilité pour expliquer la peur ? Si l’on s’en tient à des considérations strictement sanitaires, bien sûr.

A chacun de prendre ses décisions, mais les décisions de certains ont plus de conséquences que celle des autres … En l’occurrence, au calendrier de la politique intérieure russe, les élections parlementaires vont commencer et les combats de couloirs se renforcent en sentant le vent faiblir. Au plan international, le calendrier est chargé et les vidéo-conférences ne sont jamais un signe de force, surtout lorsque l’on est le seul … Ainsi, le Président russe interviendra à distance lors de la réunion de l’Organisation du traité de défense collective, qui est censé être l’équivalent de l’OTAN dans l’étranger proche de la Russie, qui se tient à Douchanbé au Tadjikistan en réel ce 16 septembre. La question de l’Afghanistan doit être au centre des discussions des dirigeants de la Biélorussie, de l’Arménie, du Kazakhstan, de la Kirghizie et de la Russie (qui, elle, sera représentée à distance). Nous ne sommes pas face à des bobos post-modernes (en tout cas, dans la grande majorité) et la position de la Russie, dont le Président « s’auto-isole » au cas où, est un signe de faiblesse, qui risque de porter sérieusement atteinte au moins à l’image du pays, sinon à ses intérêts et à son poids.

Le calendrier n’est pas des mieux choisi et une certaine concession à la danse globale covidienne ne rendra pas les instances atlantistes ni plus conciliantes envers le vaccin russe et donc l’extension de ses parts de marché, ni envers la Russie elle-même. L’histoire l’a déjà montré à de nombreuses reprises, le dernier (contre)exemple en la matière est Gorbatchev – même si lui, personnellement, il est vrai, a très bien survécu à la destruction du pays, à laquelle il a largement contribué. On espèrera que cette fois-ci, la situation est différente.

Karine Bechet Golovko

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