Sanctions ? Mais personne ne quitte l’Iran
De nouvelles sanctions contre l’Iran ? Les puissances occidentales semblent décidées. Et pourtant, à bien y regarder, l’Iran est un partenaire commercial très respectable pour de nombreux pays européens, Italie en tête : sur un échange commercial total avec l’Europe des 27, équivalent à 24 milliards d’euros en 2007, l’Italie est au premier rang avec 6 milliards. Certes, c’est un échange déséquilibré : plus de 4 milliards d’importation face à 1,8 d’exportation.
Iran veut dire en premier lieu hydrocarbures : pétrole et gaz totalisent 88 % des importations italiennes depuis le pays proche-oriental, selon les données recueillies par la Chambre de commerce italo-iranienne. L’Eni a une présence historique en Iran, depuis l’époque de Mattei (Enrico Mattei, président de l’Eni, Giulio Andreotti étant aux Affaires étrangères, NdT), et peut aujourd’hui se vanter d’excellentes relations de partenariat avec ce pays : à l’Eni, on tient à souligner que l’ « esprit de Mattei » est encore vif, « leur pétrole n’est pas le notre », l’échange doit être équitable. En somme, l’Eni ne pense pas du tout sortir d’Iran, comme du reste aucune des entreprises pétrolières européennes qui y sont présentes. Mais les incertitudes internationales pèsent : ainsi, même si le potentiel fait envie, on ne parle plus d’investissements depuis quelques temps. Wait and see. Ainsi l’agence pétrolière italienne, par la voix de son administrateur délégué Paolo Scaroni (dans une interview au Financial Times, nov. 2007) précise que les relations sont excellentes, l’intérêt est élevé et « nous honorerons nos contrats », mais si des sanctions internationales sont décrétées l’Eni aussi devra les respecter.
Pour les petites et moyennes entreprises qui font le tissu industriel italien, l’incertitude est encore plus lourde. L’Italie exporte surtout des machines-outils, mais l’incertitude est dissuasive pour des entreprises moins fortes. Le président de la Chambre de commerce italo-iranienne Rosario Alessandrello avait parlé d’ « énorme potentiel »: « Nous voulons continuer à travailler en Iran » avait-il dit en souhaitant la bienvenue au président Ahmani Dejad à Rome, il y a deux semaines (sommet Fao, NdT) : la rencontre, disait-il, « témoigne de l’intérêt des entrepreneurs italiens pour l’Iran ».
Edition de dimanche 15 juin 2008 de il manifesto
http://abbonati.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/15-Giugno-2008/art46.php3
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
Marina Forti est co-rédactrice en chef de il manifesto ; elle a souvent été l’envoyée spéciale du journal en Iran et Afghanistan. Et a été longtemps responsable de la rubrique Terra Terra, sur les problèmes d’environnement.