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Sherbrooke: la région pauvre du Québec en partis municipaux 
Par Paul Lavoie
Mondialisation.ca, 12 septembre 2021

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https://www.mondialisation.ca/sherbrooke-la-region-pauvre-du-quebec-en-partis-municipaux/5659898

Résumé : Après avoir évoqué l’émergence au Québec de partis municipaux, on constatera à partir de diverses statistiques leur très faible présence dans la région de Sherbrooke. On recensera par la suite les légendes urbaines circulant dans cette ville à leur propos, répondant aux arguments employés pour les combattre. On cherchera aussi à comprendre par quel tour de force un candidat indépendant, se prétendant apolitique et s’opposant à deux partis déjà implantés, réussit en 2017 à se faire élire maire de Sherbrooke même s’il est inconnu et n’a aucune expérience municipale. Dans la dernière partie, il sera question d’une vaste recherche récente étudiant l’effet des partis sur la participation électorale municipale.

*

Un élu peut prendre durant quatre ans toutes les décisions qu’il veut : c’est ça, la démocratie !  Ce discours se rencontre chez ceux qui s’opposent aux partis municipaux. « Je pense qu’on n’a pas besoin d’un parti pour prendre des décisions », prétend par exemple le maire de Sherbrooke, élu comme indépendant en 2017 et qui espère sa réélection en 2021 au même titre.(1) Si sa conception de la démocratie peut avoir un certain sens pour un petit village où tout le monde se connaît, ou si elle pouvait en avoir au 19e siècle dans un pays analphabète, elle est plus difficile à soutenir de nos jours. La démocratie est le droit d’une population à intervenir collectivement dans les décisions qui la concernent. Dans les pays démocratiques, ce droit est largement dévolu aux partis politiques. Ce sont des organisations de citoyens qui se mettent d’accord sur un programme, se choisissent des candidats, puis cherchent à obtenir suffisamment de sièges pour prendre le pouvoir. Dans une démocratie véritable, on retrouve en fait au moins deux partis qui, avec des programmes différents, cherchent chacun à prendre le pouvoir. La population a alors la possibilité de dire son mot puisqu’elle peut se sentir en accord avec l’un d’entre eux, le porter au pouvoir, évaluer ses performances, le renvoyer éventuellement dans l’opposition par le choix d’un autre parti correspondant mieux à ses idées. Cette formule des partis, sans doute imparfaite et sujette à de nombreuses défectuosités, n’en est pas moins vue comme celle permettant, faute de mieux, de se rapprocher le plus de l’idéal démocratique.

Émergence et croissance des partis municipaux au Québec

Le gouvernement du Québec dit aux villes à la fin des années 1970 : je vais vous donner plus de pouvoirs et plus d’argent, mais en retour vous allez devenir de meilleures démocraties. Le premier à parler explicitement en ces termes est le ministre des Affaires municipales dans le cabinet Lévesque, Guy Tardif (1935-2005), le grand-père de Laurent Duvernay-Tardif.(2) Quelle que soit leur allégeance, tous les gouvernements qui se succèdent par la suite maintiennent à peu près le même discours, donnant de plus en plus de pouvoirs et de moyens aux villes, entreprenant en outre de les fusionner pour en augmenter l’efficacité. Elles s’occupent aujourd’hui d’urbanisme, de développement économique, de voirie, d’habitation, d’environnement, de transport, de sécurité, d’eau, de matières résiduelles, de loisirs, de vie communautaire, de culture, d’intégration des communautés, tous des domaines dont elles sont largement absentes au milieu du 20e siècle. En juin 2017, le gouvernement adopte une loi dont le titre à lui seul met en lumière le chemin parcouru depuis Guy Tardif : « Loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter, à ce titre, leur autonomie et leurs pouvoirs ».

Présents depuis le 19e siècle aux deux niveaux supérieurs de gouvernement (Québec et Ottawa), les partis commencent à se répandre au niveau municipal au milieu du 20e siècle : ils émergent en premier lieu à Montréal et à Québec, puis essaiment dans plusieurs autres villes où la population comprend qu’elle peut par leur entremise participer de façon active au gouvernement le plus proche de sa réalité quotidienne. Pour les élections municipales de l’automne 2021, il y a 169 partis par tout le Québec.(3) Ceux-ci sont autorisés dans les villes d’au moins 5 000 habitants, le gouvernement les jugeant moins nécessaires dans les petites localités (où peuvent exister des équipes, sans accès cependant au statut reconnu de parti). On retrouve des partis dans toutes les villes d’au moins 100 000 habitants du Québec, dans plus de la moitié des villes de 10 000 à 100 000 habitants, et dans près du cinquième des villes entre 5 000 et 10 000 habitants (voir tableau 1 et figure 1). La particularité du Québec dans ce domaine est d’abord que des partis existent au niveau municipal, ce qui n’est généralement pas la règle ailleurs en Amérique du Nord. C’est ensuite qu’ils sont complètement indépendants de ceux des autres niveaux de gouvernement, ce qui amène des gens de tous les horizons politiques à travailler ensemble et à s’occuper d’enjeux locaux. 

Figure 1 – Taux de présence des partis municipaux au Québec selon la taille des villes

Si les partis politiques municipaux contribuent à la démocratie, ils procurent bien d’autres avantages. Entre autres, les partis constituent une sorte d’assurance minimale contre les « intrus ». Pour durer, tout parti doit être crédible. En particulier, il doit faire un tri des candidats qu’il choisit pour former son équipe, retenir les plus capables à appliquer son programme, et rejeter tout individu qu’il croit inapte à occuper un poste ou animé de motifs inavouables. Bien sûr, un parti suscite du mécontentement lorsqu’il écarte un candidat ou se fourvoie s’il en sélectionne un qui se révèle médiocre par la suite, mais c’est certainement mieux qu’avec les candidats indépendants, surtout lorsque ceux-ci se présentent pour la première fois. La population n’a pas le loisir de les convoquer en entrevue ni de vérifier leur CV avant de leur accorder son vote, ne disposant d’aucun filtre analogue à celui dont dispose un parti pour vérifier leur qualité et leur motivation. On ne va certainement pas penser que les quelques dizaines de signatures exigées par la loi pour devenir candidat à une élection municipale constituent une quelconque garantie de compétence ou d’altruisme.(4)

D’autre part, tout parti met dans son programme des idées qui proviennent de son électorat et constitue des équipes qui sont représentatives de ce même électorat. C’est facile à comprendre : quand on désire se faire élire, on s’identifie à la population qu’on veut conquérir même si on souhaite la faire évoluer en lui proposant des idées plus ambitieuses. La proximité d’un parti municipal avec son électorat fait qu’il est plus soucieux de l’environnement, aspire à faire participer les citoyens à la vie collective, se préoccupe de transport en commun, de sécurité pour les piétons et les vélos, d’espaces verts, d’étalement urbain, d’intégration sociale, de services de proximité, etc. Voilà toutes des préoccupations qui se sont répandues chez les citoyens et sont proches de leur vie de tous les jours. Par ailleurs, on trouve au sein des équipes provenant de partis plus de femmes (voir figure 2), plus de jeunes, plus de personnes des communautés culturelles que chez les indépendants qui, malgré leur bonne volonté, ne sont représentatifs que d’eux-mêmes. 

Figure 2 – Distribution des candidates selon leur appartenance ou non à un parti lors des élections municipales entre 2005 et 2017 (6)

Sherbrooke : une région en manque de partis municipaux

Imaginons à partir du centre-ville de Montréal un cercle de 100 kilomètres de rayon et à l’intérieur duquel on repère toutes les villes d’au moins 5 000 habitants, c’est-à-dire celles où peuvent exister des partis (voir figure 3). On compte alors 142 partis municipaux dans 64 villes différentes. Si on fait la même chose à partir du centre-ville de Québec, on retrouve 13 partis dans six villes. S’il est vrai que ces nombres sont plus faibles en raison d’une population sensiblement moins nombreuse que dans la région de la métropole, ils confirment néanmoins une pénétration des partis dans la région de la capitale nationale. Mais si on fait le même exercice pour Sherbrooke, surprise ! On ne détecte en effet, 100 kilomètres à la ronde, qu’un seul parti municipal et il est à Sherbrooke. La situation est surprenante puisqu’on dénombre tout de même 462 000 habitants sur ce territoire en ne tenant compte que des villes de plus de 5 000 habitants (voir tableau 2). En matière de démocratie municipale, c’est donc toute la région de Sherbrooke qui est en retard. Tandis qu’on retrouve autour de Montréal 1,92 parti par ville, autour de Québec 0,93 parti, on n’en retrouve autour de Sherbrooke que 0,07… On peut dire les choses autrement : 100 km autour de Sherbrooke, on ne retrouve qu’une seule ville sur les 14 (7 %) où existe un parti, alors qu’on en dénombre 6 sur 14 (43 %) autour de Québec et 64 sur 74 autour de Montréal (86 %) (voir figure 4). 

Figure 3 – Cercles de 100 km autour de Montréal, Québec et Sherbrooke

Figure 4 – Proportion des villes (5 000 habitants et plus) situées à moins de 100 km de Montréal, de Québec ou de Sherbrooke et où existe un parti

 Tableau 2 – Nombre de villes et partis à 100 km autour de Sherbrooke, de Montréal et de Québec

Sherbrooke et ses légendes urbaines à propos des partis

Les Sherbrookois opposés aux partis municipaux se nourrissent de véritables légendes urbaines. 

  • « Les partis municipaux, il n’y en a qu’à Montréal et à Québec », commencent-ils par dire. C’est faux ! Montréal et Québec n’accueillent que 13 % des partis. 
  • « S’ils ne sont pas à Montréal ou à Québec, c’est qu’ils sont dans la r-é-g-i-o-n de Montréal ou de Québec », rétorquent-ils. C’est encore faux ! On en retrouve à Saguenay, à Rouyn-Noranda, à Gatineau, à Sherbrooke, villes qui sont réputées ne pas être en banlieue ni de Montréal ni de Québec ; en fait, on retrouve 25 partis dans des villes éloignées de plus de 100 km à la fois de Montréal et de Québec. 
  • « On les retrouve seulement dans les grosses villes », disent-ils pour avoir le dernier mot. Cela est tout aussi faux que le reste. Les trois quarts des villes avec un parti ne dépassent pas 100 000 habitants. Il existe même 71 villes moins populeuses que Sherbrooke — oui, 71 villes ! — où existe un parti et dans lesquelles on enregistre au total 132 partis.(7)
  • En désespoir de cause, les Sherbrookois opposés aux partis municipaux se fâchent : « De toute façon, qu’on fonctionne avec des partis ou des indépendants, c’est discutable : il y a le pour et le contre. » Traiter sur un même pied les partis municipaux et les indépendants, c’est faire fi de l’histoire et propager une autre légende urbaine. Avec le développement de la démocratie, les populations obtiennent le droit de choisir leurs représentants. Les premières élections auxquelles ils participent à la fin du 18e siècle ne surprennent pas les Québécois (à l’époque du Bas-Canada) qui ont l’habitude, depuis le temps de la Nouvelle-France, de choisir par vote leurs marguilliers – les marguilliers sont des notables, élus en présence du curé un dimanche de décembre après la grand-messe, et qui sont chargés d’administrer l’année suivante les biens temporels de la paroisse. À mesure que le droit de vote s’étend à d’autres franges de la population que les seuls notables et qu’on perçoit mieux l’idée de démocratie, on voit des députés se coaliser afin de promouvoir certaines revendications collectives. C’est dans ce contexte que se créent des groupes structurés, prenant plus tard le nom de partis, et qui aspirent à satisfaire les couches de la population d’où ils proviennent.  

Réussissant à se hisser au sommet des États, les partis prennent au cours du 19e siècle leur forme moderne en obtenant de pouvoir élire des candidats provenant de leurs rangs et, remportant suffisamment de sièges, d’assumer le pouvoir. Alors que les élus sont auparavant choisis sur la base de leur unique personne, ce qui favorise les notables comme à l’époque des marguilliers, ils le sont dorénavant sur la base de leur adhésion à un parti et à ses idées. Les partis se généralisent et entrent dans les mœurs.(8) 

Partout où ils s’implantent, les partis marginalisent les indépendants pour une raison assez simple. En face de candidats indépendants, l’électeur ne sait pas sur quelle base le choisir. Le plus drôle? Le plus riche? Le plus beau parleur? La meilleure promesse? L’expérience? La jeunesse? Or, tout se simplifie s’il est membre d’un parti : l’électeur sait à quelle enseigne le candidat loge, quelles idées il défend, comment il se comportera sur telle question. Avec la généralisation des partis se développe un vocabulaire sans fin permettant de les distinguer : à droite, à gauche, à l’extrême droite, vert, progressiste, libéral, réformateur… L’adhésion de la population au fonctionnement par partis est très forte.  Toutes les études montrent par exemple qu’aux élections fédérales et provinciales, les gens font leur choix non pas en fonction de la personne qui est candidate, mais du parti dont elle est la représentante. D’ailleurs, bien des gens votent toute leur vie pour le même parti et le soutiennent envers et contre tous, simplement parce qu’il correspond à leurs idées au plus profond d’eux-mêmes. Autre exemple, il n’y a pratiquement pas de candidats indépendants lorsque les partis réussissent, comme au municipal dans la région de Montréal et de Québec, à se transférer le pouvoir de l’un à l’autre de manière durable. En somme, les gens savent avec les partis à qui ils ont affaire.

Dans la plupart des systèmes parlementaires d’Occident, l’espace occupé par les indépendants (aussi appelés en Europe « sans étiquette ») est réduit. Au cours de toute son histoire, le parlement d’Ottawa accueille moins de 100 députés indépendants, la très grande majorité d’entre eux étant élus comme membres d’un parti avant d’en être chassés en raison d’un comportement inadéquat ou de démissionner à la suite d’un désaccord profond.(9) Il existe néanmoins un peu partout dans le monde des mouvements d’opposition aux partis. Certains sont fondés sur le rejet des élites et s’expriment parfois à travers des leaders de type populiste. D’autres s’inscrivent dans diverses mouvances : anarchique, libertaire, complotiste, antipolitique… (10) Dans le monde municipal québécois, l’opposition aux partis que l’on rencontre chez les indépendants ne participe pas du tout aux mouvements précédents. C’est une opposition d’abord limitée uniquement à la sphère municipale. La preuve en est que les indépendants cherchent volontiers l’appui des partis politiques des niveaux supérieurs. Ensuite, il s’agit visiblement d’une opposition de type stratégique ou intéressé. L’argumentation en faveur du « crédo de l’indépendance » – l’expression vient d’un journaliste de Sherbrooke(11) – est faible, voire inexistante.

On ne peut certainement pas dire qu’être membre d’un parti et être indépendant, c’est comme blanc bonnet et bonnet blanc. 

Le maire de Sherbrooke, qui a apparemment une sainte horreur des partis municipaux, raconte avec nostalgie qu’il est originaire de Saint-Jean-sur-Richelieu. La prochaine fois qu’il en parlera, il faut lui demander pourquoi il néglige de souligner par la même occasion qu’on y retrouve trois partis… On imagine aussi que c’est par oubli qu’en laissant entendre que les Sherbrookois sont à son image et n’aiment pas les partis, il s’abstient de rappeler qu’à l’élection de 2017, les partis avaient ensemble fait mieux que lui aux élections. Deux partis convoitaient la mairie, dont un a disparu. Conjointement, ils ont obtenu 54 % du vote : 32 % pour le Renouveau sherbrookois et 22 % pour Sherbrooke Citoyen. C’est 10 % de plus que lui, qui a gagné avec 44 % (voir figure 5). 

Figure 5 – Répartition des résultats de l’élection municipale de 2017 à Sherbrooke

Sherbrooke et ses arguments contre les partis municipaux

En simplifiant, on peut regrouper les arguments entendus à Sherbrooke contre les partis municipaux en trois grandes catégories. 

1. Une première catégorie, la plus rapide à réfuter, est de type économique : les partis municipaux coûtent cher. N’invoquer que son coût pour juger défavorablement un quelconque objet est en soi un argument irrecevable, car il faut mettre le coût de cet objet en rapport avec les bénéfices qu’il rapporte. Donc, si les partis municipaux coûtent cher, qu’on le démontre en tenant compte de tous les paramètres. En attendant, on doit remarquer une chose : ceux prêts à dire que les partis coûtent cher se trouvent à court d’arguments dès qu’on leur mentionne que les villes remboursent 70 % des dépenses électorales des indépendants. Tant qu’à retirer des fonds aux partis, pourquoi ne le ferait-on pas pour tout le monde ?

Les deux catégories suivantes d’arguments découlent d’une vision nostalgique des années 1950, alors que la fonction d’une ville est réduite aux services sanitaires de base. Cette vision est celle du maire actuel de Sherbrooke, qui l’explique bien lors de sa prise du pouvoir en 2017 : « revenir à la base, de la bonne eau, des bons systèmes d’égouts et évidemment les services que les citoyens s’attendent à avoir quand ils paient leurs taxes ».(12) Avec cette vision, les élus municipaux ne paraissent avoir qu’un travail technique à accomplir et dans l’unanimité la plus complète. Cela ne paraît pas cependant marcher. Du moins, l’unanimité n’est pas au rendez-vous. Voilà en effet que, dans la campagne électorale actuelle, se pointe un autre candidat à la mairie que le maire, et qui dénonce le « manque d’unité » au Conseil et l’absence « d’une vision commune ». Heureusement, il annonce la bonne nouvelle : il saura avec son leadership rétablir l’harmonie et permettre aux Sherbrookois de retrouver le bonheur brisé.(13)   Son communiqué porte d’ailleurs comme titre « Pour une vision claire, commune et partagée ». Le candidat ne semble cependant pas savoir que le maire actuel, dont il est l’adversaire, avait tenu le même discours que lui il y a quatre ans en disant qu’il allait aussi rendre le Conseil municipal « harmonieux et fonctionnel ».(14)

On peut imaginer qu’un parti, dans un conseil où l’on court après l’unanimité, est la brebis galeuse. La cheffe actuelle du parti d’opposition à Sherbrooke — elle est le seul membre d’un parti au sein d’un conseil entièrement formé d’indépendants à part elle — n’a pas la vie facile, pointée du doigt comme si le malheur arrive par elle. Encore faut-il ajouter que, si on se fie à ses déclarations, le problème se complique du fait qu’elle est une femme et qu’il lui est difficile de dénoncer quoi que ce soit. « Quand un homme le fait, c’est vu comme un signe de force, quand c’est une femme, on voit juste une plainte. »(15)

2. On retrouve ainsi à Sherbrooke une seconde catégorie d’arguments contre les partis municipaux et ayant trait aux échanges qu’ils occasionnent. On entend en effet dire que les partis sont mauvais puisqu’ils compliquent les débats et entraînent des discussions inutiles et stériles. Non sans humour, un journaliste de Sherbrooke se défait de cet argument en disant que les débats sont inhérents à la vie politique : « On accuse les partis de créer des divisions, de ralentir les processus, de [ne] servir qu’à des intérêts personnels, d’être partisans ou de tout transformer en enjeux politiques. En gros, du monde en politique reproche à d’autres personnes en politique de faire de la politique. » (16)

S’il est un peu gênant de dire quelque chose d’aussi évident, il faut bien rappeler que les débats sont non seulement inhérents à la vie politique, mais plus généralement à la vie en société. Au lieu de pester contre la cheffe de l’opposition, ses collègues au Conseil municipal devraient relire un texte de Pierre Bourgault, déjà ancien, et dont des enseignants se servent encore dans nos écoles pour montrer l’intérêt du dialogue et de la discussion. « Chez nous, toute discussion un peu vive jette le trouble chez la plupart des interlocuteurs qui n’arrivent pas à imaginer qu’on puisse défendre une opinion avec passion, qu’on puisse assener des arguments mortels, qu’on puisse élever le ton, qu’on puisse refuser de lâcher le morceau sans se brouiller pour la vie. “Laisse tomber, je ne veux pas de chicane.” […] On dirait que les gens n’ont pas compris l’intérêt du dialogue et de la discussion et qu’ils s’imaginent qu’on est bien plus heureux à poursuivre, chacun de son côté, un monologue stérile et débilitant. On n’a pas compris non plus que c’est le dialogue, sans cesse renouvelé et même, à l’occasion, violent, qui écarte la véritable violence qui éclate toujours quand les gens cessent de se parler. »(17)

3. La troisième catégorie d’arguments vient de ceux qui, comme le maire actuel de Sherbrooke,(18) s’indignent de voir les membres d’un parti voter en bloc et respecter la « discipline de parti ». C’est évidemment inacceptable dans une ville en quête mythique de la bonne entente. L’argument de la discipline de parti, qui est utilisé à toutes les sauces et paraît à première vue solide, est le plus fragile de tous lorsqu’on l’étudie de près. Explications. 

Dans toute assemblée délibérante comme l’est un conseil municipal, les membres du parti au pouvoir se concertent pour remplir leurs promesses électorales et leur vote en bloc n’a en conséquence rien de choquant s’il s’agit d’atteindre cet objectif. Dans le cours de leur mandat, ils font face à des points de vue divergents : ceux-ci viennent des électeurs dont ils sont les représentants, de leur vis-à-vis de l’opposition ou de leurs propres rangs. Cela les oblige à concilier plusieurs visions, ce qu’ils cherchent à faire par des échanges, des concessions, des consensus, parfois même des votes libres. La dure réalité des choses fait en sorte que le parti au pouvoir, s’il veut se maintenir, est rarement insensible aux arguments des autres partis, encore moins à ceux de la population dont il tient sa légitimité.(19)

Cela dit, il est vrai que les partis ont généralement tendance à limiter le droit de leurs membres à voter à leur guise. Plusieurs raisons l’expliquent, dont deux en particulier. Il y a d’abord une question de cohérence, aucune institution ne pouvant se maintenir sans direction. C’est vrai d’un parti qui n’a souvent pas d’autre choix que de privilégier l’intérêt du plus grand nombre et est en conséquence amené à prendre des décisions ralliant le plus de gens, mais ne convenant pas forcément à tout le monde. La situation deviendrait pour lui intenable si chaque membre était libre de voter pour ce qui fait son affaire sans se préoccuper du bien commun, voire s’adonnait au chantage en menaçant continuellement ses collègues de voter contre eux. L’autre raison ? En laissant ses membres voter librement, un parti met les plus faibles à la merci de groupes qui pourraient se saisir de l’occasion pour exercer des pressions indues et encourage les plus retors à se procurer des avantages en échange de leur vote. Bref, l’argument de la discipline de parti se retourne contre ceux qui l’utilisent en laissant apparaître d’abord qu’il est un peu simpliste, ensuite qu’il s’agit plutôt d’un atout pour un parti de pouvoir y recourir, ce que ne peuvent faire des indépendants, qui ne « prennent pas parti » de par leur nature même. 

Aux États-Unis, les représentants et les sénateurs sont libres de voter dans un sens ou dans l’autre, peu importe le parti auquel ils adhèrent. On entend alors souvent dire, sous l’influence de ce qui s’observe là-bas, que ce serait une pratique à adopter ici et ne présentant que des avantages. Vraiment ? Des études font pourtant état du marchandage et des abus qui découlent de cette pratique.(20)  L’ancien ministre libéral fédéral Stéphane Dion, qui n’a jamais eu la réputation de croire à toutes les légendes urbaines, s’est intéressé à la question. Lors d’un colloque tenu en 2015 à l’Assemblée nationale du Québec où on abordait – tiens, tiens ! — la discipline de parti, il a déridé les participants. Dans sa présentation, il s’est beaucoup amusé du fait que le discours populaire, influencé par l’expérience américaine, est à l’effet de l’abolir. Il s’est demandé pourquoi la population veut d’un côté que ses députés votent selon leur conscience, mais que, de l’autre côté, elle-même vote systématiquement aux élections provinciales et fédérales pour un parti plutôt que pour un candidat. 

Les discussions sur la « discipline de parti » se terminent immanquablement en queue de poisson, tous ceux qui fouillent la question finissant par reconnaître qu’au fond, il s’agit d’un mal nécessaire. Quant à Stéphane Dion, il fait observer qu’on sera tous d’accord pour un certain allégement de la discipline de parti, mais qu’il est impossible de tout permettre et qu’elle est là pour de bon. La raison lui apparaît évidente : la discipline de parti est intrinsèque au fonctionnement en parti.(21) Serait-ce donc que le danger de la discipline de parti soit une autre légende urbaine dont Sherbrooke a le secret ? 

Le coût à payer par une ville se privant de partis

Un sujet dont ne parlent jamais les indépendants, c’est le coût que paie une ville en se privant de partis.

1) La population n’a aucun moyen de dire son mot.

2) Certaines composantes de la population se sentent mal représentées.

3) Elle n’a aucun moyen de vérifier la compétence et la fiabilité de ceux qui se prétendent ses représentants, ni d’évaluer leur travail, ni même d’en être informée.

4) Les orientations qui sont prises ne correspondent pas à celles qu’elle choisirait.

5) Une ville se retrouve souvent aux mains d’une sorte de parti non officiel, dominé par des groupes d’intérêts et par une petite élite politique locale : c’est ce qu’affirme sans détour le maire de Gatineau, Maxime Pedneaud-Jobin, qui doit s’y connaître.(22)

6) Il n’est pas étonnant que, dans des villes où il n’y a pas de parti, on ait tant de difficulté à pourvoir tous les postes de conseillers municipaux. C’est ce qui arrive lorsqu’en l’absence de démocratie, une population se désintéresse de sa ville et ne la considère plus comme son affaire. 

Il y a des idées rétrogrades qui ont la vie dure, enlisées dans une vision et des concepts du 19e siècle. C’est le cas de celles voulant que la population soit incapable de se gérer par elle-même et qu’il faille confier sa gouverne à quelques notables qui, en toute indépendance, décident de ce qui est bon pour elle. On a beau faire remarquer que les partis municipaux existent au Québec depuis plus de 40 ans et que, si on prend les habitants de toutes les villes au Québec où ils sont implantés, on obtient plus de 5,5 millions de personnes. On se fait répondre, avec agacement, que les gens de Sherbrooke ont raison, et que les millions d’autres ont tous tort. 

Se faire élire en combattant la vertu 

À la veille des élections municipales de 2017, Radio-Canada organise un débat entre les candidats à la mairie de Sherbrooke. Au départ, ceux-ci disposent de 30 secondes pour se présenter. Favorisé par le sort, le premier à le faire est celui qui est élu maire quelques jours plus tard. Il lui suffit de ses deux premières phrases pour terrasser les deux partis qu’il affronte. Si l’attaque est habile, elle ne respecte pas toutes les convenances — il n’est guère courtois de profiter des salutations d’usage pour se lancer à l’attaque de ses adversaires. « Bonjour. Mon nom est Steve Lussier, candidat indépendant à la mairie de Sherbrooke. J’ai bien dit indépendant parce que je fais pas partie d’une ligne de parti. » (23) (« Ligne de parti » est un anglicisme pour « discipline de parti ».) Se comptant sans doute heureux d’avoir pu dès le début du débat et aussi aisément ressortir à son profit une légende urbaine bien connue à Sherbrooke, le candidat se mêle ensuite dans ses feuilles et cesse de parler durant de longues secondes. 

Est-ce seulement à Sherbrooke où l’on voit des gens réussir à se faire élire en combattant la vertu ? Car, si on réfléchit, on réalise que les partis sont liés au développement de la démocratie. On a beau les critiquer en raison de programmes trop courts, inadaptés ou flous, de responsabilités mal remplies, de mauvaises décisions, de leur focalisation sur l’élection, de leur manque de pérennité, de la trop grande importance accordée à leur chef… Sur les 169 partis autorisés à la grandeur du Québec, il s’en trouve certainement quelques-uns qui « déshonorent la profession ». Cependant, on ne peut pas mettre en doute leur légitimité, leur avantage, leur contribution à la démocratie. Dans la littérature spécialisée, on lit parfois que les partis sont autant un produit de la démocratie qu’un producteur de démocratie. Car, on ne doit surtout pas penser qu’ils sont interchangeables avec de simples individus agissant de manière désordonnée et à l’initiative d’eux seuls. Fraîchement élu en combattant la vertu, notre maire explique le lendemain de son élection à la journaliste du Devoir le secret de sa victoire : il est « apolitique » ! (24)

Un maire apolitique ! 

Il faut remarquer que celui de Sherbrooke n’est pas le seul maire du Québec à se prétendre « apolitique ». (25) L’apolitisme municipal est un phénomène connu et qui est objet de recherches. Comme à propos de la discipline de parti, il faut le relier à l’influence américaine. Il est difficile de définir ou de caractériser l’apolitisme, certains disant qu’il ne s’agit pas tant d’une idéologie que d’une simple attitude ou philosophie de vie. Ce qu’on peut dire, c’est que la passivité politique est la règle aux États-Unis où la consommation et le divertissement prennent toute la place, autant dans les médias que dans la vie quotidienne ou la sphère publique : les partis se ressemblent, la participation à la vie politique des citoyens est faible, l’intérêt pour les affaires publiques ou les faits de société peu développé.

Au cours des années 1990, des idées de réformes se répandent dans le monde municipal américain en réaction à son haut niveau de corruption et de délabrement. En cohérence avec la passivité politique ambiante, l’idée germe de gérer dorénavant les villes comme des entreprises et d’où est absente toute partisanerie politique. On donne à ce mouvement le nom d’« apolitisme ». On ne peut dire si on rencontre plus d’Elvis Gratton dans le monde municipal québécois que dans le reste de la société. Il n’en est pas moins vrai que le mouvement est copié chez nous. Cela se fait malgré des contextes très différents, avec notamment ici l’existence de partis, un plus grand contrôle des dépenses électorales et une beaucoup plus importante (et relative !) participation populaire aux scrutins et aux débats publics. On voit donc apparaître au cours des années 2000 des candidats cherchant à se faire élire sans parti, sans programme, sans campagne, d’autres qui refusent des débats avec leurs adversaires. (On cite souvent l’exemple d’Andrée Boucher qui, après avoir combattu les fusions municipales à titre de mairesse de Sainte-Foy, se fait élire à la mairie de Québec en 2005 comme indépendante, restant ostensiblement chez elle tout le temps de la campagne.) L’apolitisme devient alors pour les indépendants une façon de s’identifier par opposition aux partis municipaux, vus comme à l’opposé de leur conception de la vie municipale. 

Lorsqu’on entend un quelconque maire se prétendre apolitique, on peut sûrement sourire. Ne serait-ce qu’à le voir s’opposer aux partis municipaux, il est difficile de penser que celui de Sherbrooke est sans opinion. Mais comme disent les universitaires Laurence Bherer et Sandra Breux que le phénomène passionne, le prétendu apolitisme d’un maire ne signifie pas sa neutralité idéologique ou politique. Lorsqu’il se présente en 2017, le maire de Sherbrooke donne l’impression d’avoir déjà certaines conceptions bien arrêtées. Dans sa charge contre le maire de l’époque, il lui reproche notamment un programme d’accès à la propriété où il est prévu que la Ville prête l’équivalent des mises de fonds aux propriétaires. « Ce n’est pas à Ville de donner les mises de fonds. Il y a des entrepreneurs qui seraient prêts à le faire ».(26)  La remarque laisse soupçonner quelque parti pris… Travaillant pour la Banque Nationale comme directeur au développement hypothécaire (selon LinkedIn, c’est un « employé rémunéré à commission ayant généré à lui seul plus de 20 millions de ventes par année sur près de 10 ans »),il se définit comme promoteur immobilier et actionnaire d’une entreprise. Des étudiants de l’Université de Sherbrooke, qu’il rencontre et à qui il fait état de son désir de « faire bénéficier son sens des affaires à la communauté », en parlent comme d’un « self-made man ».(27) Ils le font non sans perspicacité : un journaliste rapporte encore récemment qu’« après le secondaire, il saute [..] à pieds joints sur le marché du travail et ouvre une entreprise d’organisation de courses et de spectacles » et que son « parcours professionnel se fait petit à petit par ses expériences de travail et les formations continues offertes par certains de ses employeurs ». (28)

Aux étudiants et à bien d’autres, Lussier raconte durant la campagne de 2017 que sa priorité est de « faire du ménage » dans l’administration municipale. Des photographies de l’époque le montrent illustrant son propos en passant le balai. D’autres photos le montrent avec le livre-jeu Où est Charlie ?, sur lequel est collé « Bernie » à la place de « Charlie ». Il reproche en effet au maire de l’époque, Bernard Sévigny, d’être absent de Sherbrooke en raison de sa présidence de l’Union des municipalités du Québec.(29) Ce dernier ne semble pas avoir trouvé drôles les clowneries de celui qui l’a défait. Dans son ouvrage L’aquarium municipal, paru deux ans après sa défaite, il se demande comment son adversaire a bien pu se faire élire : « Comment un aspirant dont les premières sorties publiques consistaient à brandir une bande dessinée intitulée “Où est Bernie”, et jouer du balai en promettant de faire le ménage à l’hôtel de ville, approches indignes de la fonction et annonciatrices d’une candidature burlesque, peut-il se glisser jusque dans la chaise du maire d’une grande ville ? »(30)  Il est vrai, si on se fie à Bherer et Breux, que le populisme n’est jamais loin de l’apolitisme. 

Fin 2017, le nouveau maire Lussier est en poste depuis quelques semaines à peine qu’un citoyen affirme sur les réseaux sociaux que le directeur de son cabinet lui a demandé de poser lors de l’assemblée du Conseil une question embarrassante à la cheffe de l’opposition. Le maire, gêné par la révélation, congédie son chef de cabinet. Ce qui est encore plus gênant pour lui, c’est que ce dernier ne se laisse pas faire, affirme qu’il a reçu une commande du maire et qu’il est en mesure d’en fournir la preuve. C’est vers cette époque que le maire donne une entrevue à Renée Dumais-Beaudoin, animatrice à la radio de Radio-Canada Estrie. « Alors c’est sûr que c’était probablement venu me chercher. Faut s’exprimer par rapport à ça et tout ça, mais est-ce que j’ai vraiment dit ça? Écoutez, j’ai d’autre monde dans mon entourage aussi au cabinet, on s’entend. Alors ils m’ont dit Steve, je crois pas que t’aies dit ça. Peu importe, j’va toujours dire, si je l’ai dit là, ben coudonc, je l’aurai dit. On est toute humain. » Pince-sans-rire, Renée Dumais-Beaudoin demande des explications : « Mais dire quoi exactement? » Le maire répond : « Ben probablement que j’aurais dit comme quoi, ce que les dires disent, que j’aurais dit comme quoi, hum… que ça avait pas de bon sens, qu’il faudrait faire quelque chose au niveau d’inviter des gens. J’imagine c’était ça, c’était ça dans les propos que j’ai vus dans le journal. » L’entrevue se retrouve rapidement sur la page Facebook d’Infoman que 17 000 personnes consultent…(5)  On ne sait pas trop non plus si sa performance convainc le nouveau maire d’apprendre « l’art de prononcer des discours en public » : en tout cas, on apprend dans La Tribune du 4 juillet 2019 qu’un citoyen du nom de Jonathan Savard s’est présenté au Conseil le mardi précédent pour lui demander s’il est judicieux pour les contribuables de la Ville de Sherbrooke d’assumer 2600 $ pour une telle formation.

Une campagne électorale municipale peut être regardée comme étant en bonne partie une sorte de montage financier. Il faut au départ obtenir les contributions de donateurs, lesquelles sont limitées à 200 $ par personne lors d’une année électorale. Il existe une mesure incitative pour le donateur, puisqu’il obtient un crédit d’impôt en échange de sa contribution. Un don de 100 $ ne lui coûte en fin de compte que 20 $, un don de 200 $ la somme de 45 $. Cette mesure incitative n’est cependant « efficace » qu’avec des gens relativement à l’aise financièrement, puisqu’une partie de la contribution va en don et qu’il faut attendre la déclaration de revenus de l’année suivante pour revoir le reste. En tout cas, une fois une certaine cagnotte amassée, il s’agit pour un candidat ou un parti d’obtenir des prêts, puis de procéder aux dépenses électorales en respectant le maximum autorisé par la loi, qui dépend du nombre d’électeurs. Si on obtient au moins 15 % des voix, la Ville rembourse une fois la campagne terminée 70 % des dépenses effectuées. On s’acquitte alors des prêts et le tour est joué. En gros, cela permet d’effectuer une campagne où l’on peut dépenser quelques milliers de dollars si on se présente à un poste de conseiller ou quelques dizaines de milliers de dollars à la mairie.

 

Tableau 3 – Liste des entités (P pour parti, I pour indépendant) ayant récolté en 2017 plus de 10 000 $ en contributions électorales (Sources : DGEQ)

Les indépendants se plaignent que les partis ont un statut privilégié, en raison de leur capacité de mobilisation. Ils n’ont pas complètement tort. Si on relève sur le site d’Élections Québec toutes les entités ayant amassé plus de 10 000 $ en contributions en 2017 et si on les classe en fonction des sommes récoltées, on note qu’il s’agit dans 83 % des cas de contributions faites à des partis (34 sur 41) plutôt qu’à des candidats indépendants (7 sur 41). Quand on tient plutôt compte des sommes amassées, 93 % le sont par des partis : 1 878 960 $ sur 2 017 762 $. On remarque aussi que les indépendants sont à peu près absents des premiers rangs de la liste : le premier indépendant à y apparaître se trouve en 11e position, le second en 24e (voir tableau 3). On notera que les données auxquelles on se réfère dans le tableau concernent, pour les indépendants, des candidatures à la mairie uniquement ; pour ce qui est des candidatures indépendantes à des postes de conseiller, il est peu vraisemblable de toute façon que les sommes recueillies puissent dépasser 10 000 $.

Le tableau 3 fait apparaître une réalité qu’on ne mentionne pas souvent et dont on ne prend pas suffisamment conscience. Le phénomène des candidats indépendants est largement propre aux régions et pratiquement inexistant dans les grandes agglomérations urbaines de Montréal et de Québec. Cela pourra paraître difficile à croire par les indépendants des régions, mais plusieurs grandes villes au Québec réussissent à survivre sans être dirigées par des indépendants et sans qu’on retrouve un seul indépendant dans le conseil municipal ! Si on regarde la liste précédente, on remarquera qu’on ne trouve qu’un seul indépendant dans la région de Montréal : il est en 41e position, la dernière. Tous les autres indépendants se situent à Gatineau (11e rang), Saguenay (24e et 40e), Sherbrooke (25e) et Trois-Rivières (27e et 38e). Du reste, quand on cherche sur le site d’Élections Québec en date d’aujourd’hui (30 août 2021) la liste des électeurs s’engageant à se présenter comme candidats indépendants aux élections municipales de novembre prochain, on en trouve seulement quatre pour Montréal, malgré son énorme population. On n’en trouve aucun pour Québec. On en trouve un pour Laval, un pour Longueuil, aucun pour Lévis. Cependant, pour les villes de Saguenay et de Gatineau, on en trouve pour chacune 19, pour celle de Sherbrooke 17 et pour celle de Trois-Rivières 14.

Si on veut comprendre comment des indépendants peuvent rivaliser avec des partis au chapitre du financement, on peut vraisemblablement faire appel à deux facteurs. Sans doute en raison des réseaux de contacts impliqués, mieux vaut pour eux faire partie du milieu des affaires. Mieux vaut aussi avoir à son actif des réalisations sur le plan politique. On peut le penser en prenant pour preuve le tableau précédent (tableau 3). Denis Tassé, qui se présente à Gatineau, est un homme d’affaires et est conseiller municipal depuis une douzaine d’années. Jean-Pierre Blackburn, qui se présente à Saguenay, vient du domaine de l’administration et a à son actif une longue carrière politique, ayant même été ministre. Jean-François Aubin, qui se présente à Trois-Rivières et qui, professeur de cégep, est le seul semblant être sans rapport avec le milieu des affaires, a cependant une expérience comme conseiller municipal. Yves Lévesque, qui se présente aussi à Trois-Rivières, a une expérience en affaires et est maire depuis 2001. Arthur Gobeil, qui se présente à Saguenay, est comptable de formation et dirige depuis des années le bureau local d’une grande firme ; sans jamais avoir été membre d’un conseil municipal, il en connaît les rouages, impliqué dans plusieurs organismes publics et parapublics, et membre de plusieurs conseils d’administration. Hoang Mai, qui se présente à Brossard, est notaire et a été député fédéral. 

Le cas de Steve Lussier, à Sherbrooke, sort véritablement de l’ordinaire. Sherbrooke est sous la moyenne québécoise quant au revenu médian de sorte que les solliciteurs, que ce soit pour des organismes de bienfaisance ou des partis politiques, savent tous que l’argent n’y coule pas à flots et que le nombre de personnes très à l’aise est limité. Cela ne semble pas avoir arrêté en 2017 les ambitions de Steve Lussier voulant devenir maire. Il obtient en contributions 22 425 $, alors que les deux partis présents obtiennent beaucoup moins : 17 601 $ pour Renouveau sherbrookois, 13 890 $ pour Sherbrooke Citoyen. Encore faut-il pondérer ces chiffres. Lorsqu’il se présente en 2017, le maire actuel de Sherbrooke se présente à titre d’indépendant, de sorte que ses fonds ne servent qu’à sa propre élection. Ce n’est pas le cas des deux partis, leurs fonds devant aussi servir pour l’un à l’élection de 14 postes de conseillers municipaux et pour l’autre de 16 postes. Il faut donc faire une sorte de règle de trois pour en tenir compte. La chose la plus simple est d’utiliser pour fin de pondération le montant des dépenses autorisées (voir tableau 4) qui dépend du nombre d’électeurs et est une donnée factuelle. Le résultat est saisissant : c’est comme si le candidat Lussier fait trois fois mieux que chacun des partis. 

Tableau 4 –  Contributions amassées à Sherbrooke au cours de l’élection de 2017

Figure 6 – Contributions pondérées obtenues par Steve Lussier, Renouveau sherbrookois et Sherbrooke Citoyen à l’élection municipale de Sherbrooke en 2017

On peut penser que le facteur déterminant dans la constitution d’un fonds électoral aussi bien garni que celui du candidat Lussier est, en l’absence de réalisation politique antérieure, sa proximité du milieu des affaires, autant en matière de contacts qu’en termes idéologiques. Dans un article paru à l’époque dans La Tribune, on fait état de son organisation formée de plusieurs gens d’affaires ou retraités du domaine. On donne quelques noms. On signale notamment la présence au moment de la visite du journaliste de Patrick Lachance, qu’on décrit comme un « développeur de premier plan à Sherbrooke ». On le cite : « Steve est un bonhomme avec qui j’ai une excellente relation d’affaires. Plusieurs de nos transactions hypothécaires passent par lui. J’ai voulu lui souhaiter bonne chance. »  Le journaliste de La Tribune, pour qui l’opportunisme des milieux d’affaires n’est visiblement pas inconnu, joue à torturer Patrick Lachance. Est-ce que cela veut dire que vous désavouez Bernard Sévigny? « Pas nécessairement. Le maire fait un bon travail » s’empresse de répondre Lachance, voulant se sortir du piège tendu…

Figure 7 – L’émission Infoman de Radio-Canada reprend le 5 octobre 2017 une publicité de l’équipe du candidat Lussier en ligne depuis le 6 juillet 2017. Il s’agit d’une publicité de type « négatif », fréquent dans les campagnes électorales américaines. La vidéo dramatise l’état des rues de Sherbrooke comme dans un film d’horreur

Toujours dans l’article de La Tribune, on cite l’agent officiel de Lussier, un certain Richard Audette qui a été propriétaire de restaurants : « Nous sommes tous des néophytes en politique. C’est sûr qu’il y aura plusieurs ajustements. Pour nous, c’est comme démarrer un projet d’entreprise et là-dedans nous nous y connaissons. Nous saurons trouver la recette gagnante. » On cite par la suite Jean-Marc Hamel, qui s’occupera de la trésorerie. « Je suis aussi un retraité du secteur financier et la dernière chose que j’envisageais, c’était de me retrouver à solliciter des contributions électorales. La nécessité d’un changement à la mairie me motive à le faire. » En tout cas, ce monsieur Hamel sait faire des miracles : 119 donateurs selon le site d’Élections Québec. Quand les indépendants disent que les partis leur font une concurrence déloyale, voilà un contre-exemple : Renouveau sherbrookois n’attire que 96 donateurs et Sherbrooke Citoyen 89. Mais, comme dit le journaliste de La Tribune, quand on incarne le changement et adhère au crédo de l’indépendance, rien n’est impossible même en n’ayant aucune expérience en politique municipale.

Figure 8 – Infoman signale à son émission du 19 octobre le camion à énergie solaire de l’équipe du candidat Lussier (35)

Le maire actuel de Sherbrooke se fait donc élire en 2017 en disant vouloir « faire bénéficier son sens des affaires à la communauté ». L’argument est sans valeur. Les hommes et femmes d’affaires ont droit comme tout le monde d’accéder à des postes électifs. Il leur est cependant difficile de faire valoir leur expérience dans les affaires comme un avantage. C’est au contraire un désavantage. Si on réussit en affaires, c’est qu’on privilégie l’intérêt particulier à l’intérêt collectif. Or, en politique, il faut privilégier l’intérêt collectif à l’intérêt particulier. Une ville n’est pas une entreprise, de sorte que le sens des affaires a plus ou moins d’intérêt. La capacité de réflexion, le sens de l’organisation, l’empathie, la capacité de communiquer et susciter l’adhésion, voilà sans doute des qualités plus intéressantes et qui s’acquièrent dans plusieurs autres domaines que celui des affaires. Une surreprésentation dans la sphère politique de gens issus du domaine des affaires s’observe néanmoins un peu partout dans le monde. Bien qu’aucune donnée ne paraisse disponible pour le monde municipal québécois, il serait surprenant que le cas de l’Assemblée nationale, où plus de 40 % des députés du parti au pouvoir sont issus du domaine des affaires et de la gestion, n’ait pas d’équivalent dans plusieurs conseils municipaux. Dans une lettre d’opinion parue dans Le Devoir le 5 juin 2021, sous le titre « Affaires et politique », l’ancien ministre Daniel Paillé recense plusieurs échecs de gens d’affaires ayant fait le saut en politique. Selon lui, l’échec s’expliquerait du fait que le monde des affaires et celui de la politique sont incompatibles, les deux s’opposant par un « mode décisionnel et d’imputabilité » trop éloigné l’un de l’autre. En somme, les gens d’affaires voulant entrer en politique devraient accepter de se convertir.

Le dernier maire de Montréal à penser que sa ville doit être gérée comme une « business » s’appelle Michael Applebaum, à l’origine agent immobilier et propriétaire du magasin de chaussures familial. La chroniqueuse Michèle Ouimet dans La Presse du 8 décembre 2012 réagit durement à un de ses discours. « Michael Applebaum [dit] que la Ville est une “business” et que les Montréalais sont des clients, une vision qui dénote un manque de jugement politique et une incompréhension de la chose éthique. La Ville n’est pas une business, mais une administration publique, une “personne morale”, comme le précise sa charte, qui doit rendre des comptes et justifier chaque sou dépensé. Et les Montréalais ne sont pas des clients, mais des citoyens et des contribuables qui paient des taxes. Et qui votent. La Ville offre des services, elle ne vend pas des saucisses à la livre. Quand le système se détraque, quand la fraude s’installe, ce sont les Montréalais qui paient la note. Et Dieu sait qu’ils l’ont payée, la note, pendant des années. »(36) Le plus ironique, c’est que Michael Applebaum devient maire de Montréal en 2012 en remplacement de Gérald Tremblay, forcé de démissionner en raison d’allégations de corruption. Arrêté en 2013 et forcé à son tour de démissionner, Applebaum est condamné en mars 2017 à un an de prison pour corruption et abus de confiance. Comme quoi venir du monde des affaires n’est pas toujours une preuve de compétence ou une garantie de moralité.

Des partis en bonne et due forme !

À l’occasion des élections municipales de 2017, la chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires, rattachée à l’Université Laval, effectue une importante recherche — 4 023 répondants — en collaboration avec Élections Québec.(37)   Ses résultats, dont plusieurs sont inédits, ne sont connus que depuis quelques mois, le rapport n’ayant été publié qu’en février 2021 en raison, on l’imagine, de la pandémie. Une partie de la recherche porte sur l’influence des partis dans la participation électorale. On a par exemple demandé aux participants s’ils croyaient qu’existaient dans leur municipalité des partis politiques (ou équipes pour les répondants venant de municipalité de moins de 5 000 habitants). On a alors croisé les résultats avec ceux d’une autre question où les participants devaient indiquer s’ils avaient voté ou non lors de l’élection de 2017.

Tableau 5 : la participation électorale selon la présence d’un parti ou d’une équipe

Les réponses (voir tableau 5) comportent des différences significatives : le taux de participation est de beaucoup supérieur chez les électeurs ayant observé la présence de partis politiques, et à l’inverse de beaucoup inférieur chez les électeurs n’ayant pas observé leur présence. Voilà pour les chercheurs l’occasion d’un premier constat.

1) Le taux de participation est largement supérieur chez les électeurs ayant observé la présence de partis politiques au sein de leur municipalité.

Les chercheurs, analysant d’autres questions, en arrivent à deux autres constats.

2) Les électeurs disant se sentir proches d’un parti politique ont déclaré avoir voté dans une proportion de près de 20 % supérieure à ceux qui ont déclaré ne pas l’être.

3) L’analyse multivariée montre que la présence d’un parti politique dans une municipalité, le sentiment qu’il s’agit d’un véhicule pertinent pour la représentation des intérêts citoyens et l’identification à une formation politique locale sont tous des facteurs qui influencent positivement le vote.

Fait particulièrement intéressant que notent les chercheurs, c’est que, dans les municipalités où l’on ne retrouve pas de parti, la perception que certains candidats forment une équipe informelle n’incite pas les électeurs à voter, d’où un quatrième constat.

4) À contrario, dans les municipalités où l’on ne retrouve pas de parti politique, la perception que certains candidats forment une équipe informelle n’influence pas les électeurs à se rendre aux urnes.

Ce serait donc un parti en bonne et due forme qui influence la participation électorale, non l’image de collaboration entre eux que certains candidats pourraient vouloir donner. Il est toujours agréable de voir la recherche confirmer des impressions qu’on a déjà eues. À cet égard, on doit citer une lettre ouverte publiée dans La Presse en 2011, voilà donc 10 ans, et signée par Laurence Bherer et Sanda Breux. Elles avaient alors perçu l’impact des partis municipaux sur la participation électorale et mis en perspective le phénomène avec ce qu’on observait aux États-Unis.

Le Québec est un des rares endroits en Amérique du Nord où il est possible d’avoir des partis politiques municipaux. Malgré leur faible organisation, ils ont un effet sur la vie politique, car le taux de participation électorale aux élections municipales est plus élevé ici (environ 45 %) qu’aux États-Unis (environ 25 %). Sachons profiter de cette exception et tournons-la à notre avantage : les partis politiques sont ainsi non seulement importants, mais nécessaires à la quête de l’idéal démocratique ! (38)

Conclusion

Les indépendants sont pour la plupart d’entre eux des gens dévoués, estimables et bien intentionnés. Ils doivent cependant réaliser qu’ils comblent un vide, momentanément et en l’absence de mieux. Le mouvement des partis municipaux au Québec est trop puissant et étendu pour disparaître. Vouloir prendre leur place, c’est se battre contre des moulins à vent. Ainsi, si les indépendants croient eux aussi à la démocratie, qu’ils se forment à leur tour en partis et adoptent un programme, même si cela est compliqué, demande des efforts, de la coordination et est toujours à refaire. S’ils sont aussi efficaces individuellement qu’ils le disent, on peut imaginer combien ils le seraient en travaillant ensemble au sein d’un même parti ! S’ils ne le font pas, ils accréditent l’idée qu’ils trouvent un intérêt à ce que rien ne change… La région de Sherbrooke est rendue au stade où la gouvernance des villes doit changer et où la population doit enfin pouvoir dire son mot. Il n’est pas normal de continuer à penser en 2021 qu’on peut agir à sa guise lorsqu’on est élu à un conseil municipal, le pire qui peut arriver étant seulement de ne pas se faire réélire au bout de quatre ans.

Certes, il ne faut pas avoir une vision idyllique des partis municipaux. Former un parti est difficile, demande du courage et n’est pas une garantie de réussite. En fait, le seul argument sérieux contre les partis municipaux est un argument qu’on n’entend jamais. On ne l’entend jamais, car il ne fait pas plaisir à entendre. Un parti municipal est un signe de maturité. Or il est bien difficile de dire que les partis ne doivent pas exister à Sherbrooke à cause d’un manque de maturité de sa population.

L’historien Éric Bédard relate que l’émergence des partis politiques rencontre beaucoup de résistance au Québec au 19e siècle.(39) Il propose deux pistes pour comprendre ce phénomène. D’abord, les Québécois se retrouvent alors pour la première fois de leur histoire avec certains pouvoirs, ce qui fait en sorte que leur développement dépend dorénavant d’eux. Or, accepter l’existence de partis entraîne de choisir un camp, de « prendre parti » — ce qui n’est pas le cas lorsqu’on élit des indépendants et dont on « se fiche » royalement — et d’en assumer la responsabilité : c’est lourd à porter dans la mesure où il est bien plus facile d’accuser les autres que soi-même. Ensuite, il fait remarquer qu’en raison de leur sentiment d’infériorité, les Québécois considèrent le régime des partis comme un luxe qui ne leur est pas accessible et est réservé aux grandes nations.

N’y aurait-il pas un parallèle à faire entre ce qu’on peut observer aujourd’hui à Sherbrooke et ce que remarque Bédard à propos du 19e siècle ? La résistance de certains Sherbrookois aux partis municipaux ne serait-elle pas au fond qu’une forme d’abord de déresponsabilisation (on laisse des indépendants agir à leur guise durant quatre ans plutôt que d’assumer le pouvoir par l’entremise d’un parti dont on accepte le programme et dont on se sent responsable), ensuite d’autodénigrement (pour certains de ses citoyens, Sherbrooke serait trop petite pour des partis, alors qu’elle est la 6e ville du Québec et la ville centre de la 3e agglomération du Québec, que son budget annuel dépasse un tiers de milliard de dollars…) ?

Nous ne sommes plus au temps des marguilliers.

Paul Lavoie

Notes

1 Mickaël Bergeron. « Les villes n’aiment pas les partis politiques ». La Tribune. Sherbrooke. 20 mars 2021.

2 Journal des débats de l’Assemblée nationale : le 12 juin 1980. Vol. 21, n° 112.

3 Au 30 août 2021, ils sont plutôt 172, trois s’étant rajoutés depuis la rédaction de cet article.

4 On dénomme fonction de sélection celle par laquelle un parti recrute ses représentants.

5 On dénomme fonction programmatique celle par laquelle un parti propose un ensemble d’idées permettant à son électorat de se retrouver en lui et de le distinguer des autres partis.

6 Les données à partir desquelles a été construit le graphique concernant les femmes candidates proviennent de : Ministère des Affaires municipales et de l’Habitation. Données relatives à l’élection générale de 2017 : compilation et traitement statistique. Gouvernement du Québec. Québec. 2020.

7 Voir la liste des partis municipaux autorisés à https://www.electionsquebec.qc.ca/francais/ .

8 Il existe toute une littérature sur le développement des partis. 

9 « Les candidats indépendants dans l’histoire du Canada ». La Presse canadienne. Ottawa. 27 mai 2019.

10 Voir par exemple Frédéric Sawicki. La Fin des partis politiques. PUF. Paris, 2019.

11Luc Larochelle. « Le crédo de l’indépendance ». La Tribune. Sherbrooke. 24 mai 2017.

12 Isabelle Porter. « Élection-surprise d’un maire apolitique à Sherbrooke ». Le Devoir. Montréal. 11 novembre 2017.

13 Charles-Philippe Thibault. Vincent Boutin se porte candidat à la mairie de Sherbrooke : pour une vision claire, commune et partagée. Sherbrooke. 21 avril 2021.

14 Richard Langlois. « Le candidat indépendant à la mairie, Steve Lussier, a fait une sortie en règle contre Bernard Sévigny ». Énergie 106.1FM. Sherbrooke. 13 septembre 2017 à 17 h 4.

15 Roxane Gaudreault. « Une mairesse pour Sherbrooke en 2021 ». Le collectif. Sherbrooke. 29 mars 2021.

16 Mickaël Bergeron. Ibid.

17 Pierre Bourgault. « La vraie nature de l’opinion ». La colère. Écrits polémiques. Tome 3. Lanctôt. Montréal. 1996.

18 Isabelle Porter. Ibid.

19 On dénomme fonction de structuration et d’encadrement celle par laquelle un parti maintient sa cohérence en exerçant le pouvoir tout en cherchant à sauvegarder sa légitimité auprès de la population.

20 Lucie Lecomte. La discipline de parti et le vote libre. Division des affaires juridiques et sociales de la Bibliothèque du Parlement du Canada. Gouvernement du Canada. Ottawa. 2018. 

21  Stéphane Dion. « Le bon dosage de la discipline de parti ». Exposé au colloque La démocratie québécoise et canadienne : un bilan de santé. Assemblée nationale du Québec. Québec. 9 avril 2015.

22 Maxime Pedneaud-Jobin. « L’avenir est aux partis municipaux ». Le Devoir. Montréal. 14 janvier 2013.

23 On retrouve le débat en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=KCzuZdkJw-k 

24 Isabelle Porter. Ibid.

25 L. Bherer et S. Breux. « L’apolitisme municipal. » Bulletin d’histoire politique. 2012, 21 (1).

26« Quel est le nouveau maire de Sherbrooke, Steve Lussier ». Radio-Canada Estrie. Sherbrooke. 6 novembre 2017.

27 Kevin Galipeault. « Élections municipales de la Ville de Sherbrooke : portraits d’Hélène Pigot et de Steve Lussier, deux candidats à la mairie ». Le Collectif. Sherbrooke.  27 septembre 2017.

28 Réjean Blais. « Course à la mairie de Sherbrooke : Steve Lussier sort des sentiers battus ». Radio-Canada Estrie. Sherbrooke. 30 juillet 2021.

29 Voir par exemple : Jonathan Custeau. « “Où est Bernie”, demande Steve Lussier. » La Tribune. Sherbrooke. 13 septembre 2017.

30 Bernard Sévigny. L’aquarium municipal : récit documenté sur la gouvernance municipale. Marcel Broquet Éditeur. Candiac. 2019. P. 470. Aussi rapporté par : Fanny Lachance-Paquette. « L’ancien maire Bernard Sévigny lance un livre et sort de son mutisme ». Radio-Canada Estrie. Sherbrooke. 24 septembre 2019.

31 https://www.facebook.com/infomantv/videos/1490911767629427/ 

32 Institut de la statistique du Québec. Bulletin statistique régional : Estrie. ISQ. Québec. 2021.

33 http://infoman.radio-canada.ca/emission/2017/10/05/emission-du-5-octobre-2017/ . La vidéo est disponible à https://youtu.be/SvCzmkNTX2Y .

34 Luc Larochelle. . Ibid.

35 http://infoman.radio-canada.ca/emission/2017/10/19/emission-du-19-octobre-2017/   

36 Michèle Ouimet. « Montréal n’est pas une “business” ». La Presse. Montréal. 6 décembre 2012.

37 Philipe Dubois et François Gélineau. Les motifs de la participation électorale aux élections municipales québécoises : le cas de 2017. Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires. Université Laval. Février 2021.

38 Laurence Bherer et Sanda Breux. « Les partis municipaux sont nécessaires. » La Presse. Montréal. 27 novembre 2011. 

39 Éric Bédard. « La naissance douloureuse des partis politiques au Québec ». Bulletin d’histoire politique, 2010, 19 (1), 71–76.

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