Print

Suicide des professionnels de santé : continuerons-nous à faire la sourde oreille ?
Par Dre Nicole Delépine
Mondialisation.ca, 03 septembre 2022

Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/suicide-des-professionnels-de-sante-continuerons-nous-a-faire-la-sourde-oreille/5670940

Suicide des professionnels de santé : face aux chiffres « démesurés », un film choc de l’association SPS pour que « ça bouge vraiment » | Le Quotidien du Médecin (lequotidiendumedecin.fr) sept 2022

Mes soignants sont tracassés et fracassés. Par une sélection ubuesque en 1re année, par un Externat où ils font plus de travail subalterne que de la vraie formation, par un internat trop tardif et pas assez encadré. Épuisés, le suicide ou l’abandon de ces métiers en sont la conséquence. « Les Blouses Blanches sont en colère noire »[1]

Tel est le commentaire d’un médecin sur l’article du quotidien du médecin, journal qui semble s’étonner qu’après plus de trente ans de destruction de la vraie médecine et de la perte de sens de nos métiers au bénéfice du management bureaucratique à visée financière, les médecins et soignants disparaissent du paysage, par démission, par changement de voie ou malheureusement trop souvent par le suicide. (Bernard k • Médecin ou Interne • Le 30/08/2022 à 19:06)

Mais ce sujet brûlant n’est pas nouveau et est occulté depuis plus d’une trentaine d’années comme celui des agriculteurs et des policiers. Nous avions en 2013 appelé l’attention des citoyens[2] trop indifférents au sort réel du système de santé malgré de nombreux ouvrages d’alerte dès les années 2000 comme celui de B Debré et P Even dans « Avertissement aux malades, aux médecins et aux élus » en novembre 2002[3] toujours d’actualité.

Dans l’article d’Atlantico de 2013, nous insistions sur les raisons de la chute vertigineuse de notre système de santé dans un silence médiatique complet. Quelques extraits pour prouver que le sujet n’est pas nouveau et occulté par les médias et les citoyens sauf le jour où ils deviennent malades (ou un de leurs proches) et tombent des nues.

MISE À MORT : suicide des médecins : silence médiatique sur un massacre programmé du système de santé

« Alors que le système hospitalier français, et plus largement le système de la santé, connaît une réforme profonde, le nombre de suicides parmi les professionnels du secteur médical est en pleine explosion. La faute à un harcèlement bureaucratique et à un management d’entreprise qui a déjà fait des ravages, notamment chez France Télécom. »

Le harcèlement quotidien des personnels de santé s’est amplifié considérablement depuis le covid

Chaque jour, comme la suspension des soignants refusant l’injection toxique et inutile l’a démontré et le maintien scandaleux de cette obligation alors que la multiplication mondiale des effets secondaires (dont trop de décès) et l’inefficacité complète sur la transmission du virus a été démontrée et avouée même par le Pr Delfraissy qui dirigeait le conseil scientifique. Cette exclusion des soignants vaccino prudents n’a qu’un but : les empêcher de parler !

« Alertes répétées et à chaque fois silence ! Et le harcèlement des autorités contre le monde médical continue avec chaque jour son flot de mesures vexatoires, diffamatoires et dégradantes pour désespérer un peu plus l’ensemble de la profession.

La gravité du harcèlement subi par les médecins libéraux n’a d’égal que le harcèlement des personnels hospitaliers par les restructurations conçues en dehors de tout consensus et sans réflexions a priori sur conséquences prévisibles avec les personnels concernés et compétents. Les réunions dites de “concertation” ne sont que des simulacres de dialogue et ne consistent qu’à annoncer au personnel désespéré les nouvelles suppressions de postes, de lits et de service sans possibilité de refus ».

La médecine policière

« La bureaucratie représentée par les Agences régionales de santé (ARS) toutes puissantes décide de la vie ou de la mort de tel service ou institution via la délivrance ou non de l’accréditation, soit de l’autorisation de traiter telle ou telle pathologie après des enquêtes, audits et interrogatoires policiers sur vos pratiques, votre obéissance aux recommandations venues d’en haut, les travaux coûteux effectués pour correspondre de nouvelles normes à chaque fois modifiées, bref, du harcèlement administratif et autocrate.

Moralité : les suicides et tentatives se multiplient, s’ajoutant aux arrêts de travail pour dépression ou équivalents aggravant la déshumanisation, conséquence de la froideur dans laquelle les personnels victimes de burn-out (épuisement professionnel : on se brûle, on se consume littéralement) se réfugient avant la décompensation finale du suicide.

Le nombre de suicides des médecins trois fois supérieur à celui de la population générale a été dénoncé de nombreuses fois depuis plusieurs années. »

Le management à la France Télécom

En 2013, le désastre des restructurations hospitalières s’aggrave, les suicides se multiplient et toujours dans le même silence médiatique. Le patron de la pneumologie de Nevers s’est suicidé[4] le 23 avril 2013, et même le Conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Nièvre s’est indigné « du silence des autorités locales, régionales, voire nationales, et des médias locaux ». Le président, le Dr Badoux, insiste dans un courrier d’alerte adressé à Marisol Touraine, au préfet, à l’ARS de Bourgogne et aux instances ordinales. Quelle fut leur réponse à part le bruit assourdissant du silence ? Si elle existe, elle n’a pas inondé les ondes. Le Dr Badoux a évoqué ce médecin « pilier de la pneumologie », « apprécié de toutes et tous pour sa technicité et sa gentillesse ». L’Ordre local « choqué » s’interroge : « Pourquoi une telle indifférence ? La vie des uns et des autres n’a-t-elle pas la même valeur ? Le suicide d’un médecin aurait-il moins d’importance que celui d’un employé de grandes entreprises nationales comme France Télécom ou Renault ? Ce chef de service est revenu à l’hôpital pour mettre sa blouse en cette matinée tragique avant de se taillader les veines et se sectionner la carotide. Qu’on ne nous dise pas qu’il n’y a aucun lien avec le travail quotidien. »

McKinsey rôde, agit, coupe, casse et récolte l’argent de nos impôts

Déjà en 2013 on découvre le rôle des agences de consulting qui deviendront tristement célèbres avec le scandale McKinsey et le covid, mais qui restent toutes puissantes, semble-t-il.

« La même agence de consulting chargée de restructurer FranceTélécom et EDF avec les conséquences que tout le monde connaît… s’occupe depuis les dernières années de restructurer la santé publique ».

Et l’épidémie chez les médecins se double de celles des paramédicaux chez lesquels les suicides devraient aussi faire la une du 20 heures. Mais, surprise, ils sont également ignorés comme ceux des agriculteurs pendus dans leurs granges victimes de la politique agricole commune (PAC).

Dans les six premiers mois de l’année en cours, l’APHP (Assistance publique hôpitaux de Paris), cette célèbre et fière institution d’Île-de-France, a égalé le nombre de suicides et tentatives de l’année 2012 :

« Depuis 2010, avec une accélération en 2012, nous totalisons le triste chiffre de plus de trente suicides ou tentatives de suicide*, toutes catégories confondues, avec sur une période de 5 mois un nombre équivalent à celui (déjà inacceptable) d’une année entière ! »[5]

« Je ne veux plus retourner à Robert Debré. Travail inhumain. Plus la force ». Voilà les quelques mots laissés par Françoise, auxiliaire de puériculture le 22 décembre dernier, avant de mettre fin à ses jours. Depuis, près d’une dizaine d’autres membres du personnel de l’Assistance publique ont imité son geste. Rien que pour 2013, ils sont 9, dont deux ont tenté de se suicider directement sur leur lieu de travail. Le 25 mai 2013, une salariée d’Henri Mondor, âgée de 42 ans, a décidé d’en finir.[6]

L’USAP CGT avait interpellé la ministre en décembre 2012. À la date du communiqué le 29 mai 2013, « aucune réponse de la ministre, aucune mesure concrète nouvelle à l’APHP, bien que la Directrice Générale nous ait répondu favorablement.

De plus les médecins du travail sont de moins en moins nombreux ».

Est-ce que la mise en place d’une cellule de crise et de soutien psychologique peut effacer les harcèlements quotidiens auxquels sont soumis les personnels ? Ne faut-il pas reconsidérer, comme ce fut fait finalement à France Télécom, le management choisi dans les hôpitaux et la politique de santé actuelle ? Comme le dit si bien ce communiqué : « L’hôpital est devenu une usine de production de soins avec une gestion managériale d’entreprise à la clé. Nous n’avons plus un ministre de la Santé, mais un ministre à l’économie de la santé ! » et des intérêts de l’industrie pharmaceutique aurait-il pu ajouter.

C’est le but purement financier de la politique sanitaire que nos concitoyens ne veulent pas ou ne peuvent pas encore reconnaître. Comment s’avouer que son gouvernement ne travaille pas pour le peuple et seulement pour le peuple et qu’il néglige totalement notre sécurité sanitaire ? Comment comprendre quelques années que les médecins complices de l’injection génique toxique et inutile collaborent au scénario tragique du Great Reset et non plus à l’amélioration de votre santé ? C’est tout un travail de prise de conscience de ce qu’est le totalitarisme qui s’insinue insidieusement dans notre société occidentale malade qu’il faut développer grâce à l’aide de philosophes, sociologues, médecins, scientifiques qui décortiquent ce que nous vivons. Car mieux on comprend, mieux on se bat.[7][8] et mieux on se porte

Les médecins infirmiers, ou aides-soignants, sont dans le même bateau ivre et victimes des mêmes souffrances, liés aux dysfonctionnements « organisés » dans le but de justifier restructurations de services, fusions d’hôpitaux, suppressions d’emplois utiles avec au passage casse des équipes soudées qui permettaient la joie de vivre malgré la maladie.

Pendant que prolifère la bureaucratie hospitalière, les effectifs soignants fondent au lit du patient conduisant l’encadrement à sacrifier leur quotidien au nom du service public. Est -ce que changer les plannings d’un jour à l’autre, annuler des congés prévus, installer la zizanie entre les professionnels améliore le service au patient ? Non, ce type de gestion trop répandu dans les établissements de soin et appris chez France Télécom le désintègre, entraînant le désarroi des soignants puis le syndrome d’épuisement professionnel (burn out), éloignant du patient et expliquant cette déshumanisation des hôpitaux. Enfin, dans un certain nombre de cas, sans l’aide de médecins du travail trop peu nombreux et pas toujours avertis, toujours absents pour les médecins (sûrement faits de chair et d’os différents des autres hommes), sans l’aide d’une famille attentive qui souvent rattrape le professionnel devenu patient, le pire arrive et l’on s’étonne, pas très longtemps.

Les médecins du travail eux-mêmes ne sont pas à l’abri : Marie-Magdeleine Gressé « a décidé d’en finir pour projeter ces questions taboues du suicide et du harcèlement sur le devant de la scène et dans le débat public ». Médecin du travail, elle travaillait depuis 25 ans à l’association « Alsace santé au travail » et était fortement impliquée dans l’Association d’aide aux victimes de violences psychologiques et de harcèlement moral dans la vie privée ou professionnelle (Avip).

Et ce n’est pas la réponse de l’APHP à la suite de l’appel au secours des personnels via leurs syndicats qui va améliorer les choses : « 522 000 euros donnés à Ipsos pour un questionnaire imbuvable, on s’aperçoit vraiment que l’on ne nous écoute pas. Des audits sont déjà faits régulièrement et cela coûte des fortunes. On ne voit pas bien ce qu’ils vont faire de ce baromètre. Ce n’est pas ça qui va régler le problème », juge la secrétaire du Comité d’hygiène et de sécurité central de l’Assistance publique.

Elle a raison, chacun comprend et connaît les raisons du désespoir que ne feront pas disparaître tous les outils éculés du management marchand qui nourrissent largement les collaborateurs de McKinsey et autres dont l’existence a choqué et entrouvert les yeux des Français endormis par la propagande covidiste. Se sont-ils rendormis, trop douloureux du totalitarisme encore mou, mais dont tous les ingrédients dont ce harcèlement sont en place.

« Trop dur, trop douloureux, symptôme d’une société tellement malade qu’elle tue ses professionnels de santé tant en ville qu’à l’hôpital et détruit ses hôpitaux. »

MAL TABOU

D’autres de temps à autre ont tiré la sonnette d’alarme, mais toujours dans l’indifférence générale. Citons cette vidéo de franceinfo « Le suicide des médecins, une réalité effrayante » le 27/02/2015

« C’est un mal tabou en France. Chaque année, une cinquantaine de médecins mettrait fin à ses jours. France 2 a mené une enquête glaçante. Le surmenage, la déprime… Autant de facteurs qui ont conduit au suicide du réputé et apprécié docteur Rémi Breuil, en octobre 2011, après 25 ans de carrière. Son épouse Claude n’a rien vu venir. » Ce n’était pas possible. Pas lui, quelqu’un qui aimait la vie, ses enfants, qui adorait son métier… », confie-t-elle à France 2.

Le docteur Breuil se serait peu à peu renfermé. Dans la lettre qu’il a laissée à sa femme, il se dit fatigué, usé. « Être médecin, pour lui, c’était une vocation. Il s’est laissé complètement envahir par ça », reprend sa veuve.

Une souffrance tabou

Le docteur Yves Léopold a posé un chiffre sur ce drame : les médecins se suicident en moyenne 2,5 fois plus que le reste de la population, victimes de ce qu’il appelle le « syndrome de toute-puissance ». Le médecin, qui donne et sauve des vies, ne supporterait pas de ne pouvoir sauver tout le monde, d’où sa souffrance.

En France, ce problème est frappé du tabou. Dans le plus grand anonymat, un hôpital du sud accueille des médecins en souffrance. Inquiets pour leur réputation, ces derniers n’acceptent leur hospitalisation que dans le plus grand secret. L’un d’eux confie : « Je crois que c’est une humiliation, d’être malade. Le comble du médecin… »

LE CARNAGE CONTINUE Y COMPRIS CHEZ LES PLUS JEUNES

Chez les étudiants en médecine, le tabou des suicides :

« Chaque année, une dizaine d’internes se donnent la mort. Des événements traumatisants pour l’ensemble d’une promotion, qui mettent en lumière les risques psychosociaux auxquels sont soumis ces étudiants ».[9]

Anna Wanda Gogusey

 

« La métaphore revient comme un refrain : les étudiants et internes en médecine seraient des super héros. Invincibles et invulnérables. Connaissant l’intégralité de leurs cours sur le bout des doigts, enchaînant les gardes à l’hôpital, cultivant une vocation sans faille.

“Pour autant, il y en a plein qui se fracassent”, souffle Laurence Marbach, présidente de l’association la Ligue pour la santé des étudiants et internes en médecine (Lipseim). Sa fille, Élise, s’est écroulée à 24 ans. “Brillante, passionnée, empathique”, la jeune femme a mis fin à ses jours le 2 mai 2019.

En premier semestre d’hépato-gastro-entérologie à Lyon, l’interne travaillait autour de 80 heures par semaine. Avant son décès, Élise avait enchaîné trois week-ends sans répit : une astreinte pour assurer la continuité des soins, un colloque de spécialité à Paris, une formation à Clermont-Ferrand. Pour tenir, faute de cape de Zorro, elle s’était prescrit des bêtabloquants, essayant de cacher son stress et son épuisement professionnel.

Briser le mythe

Par peur de paraître “faibles”, “inaptes”, “nuls” ou “incompétents”, rares sont les futurs médecins qui osent alerter quand ça ne va pas. Pire, quand ils ont des idées noires.

Dans une culture hospitalière évoluant à huis clos, l’idée qu’il faut “apprendre dans la douleur” reste prégnante. “On est dans une forme de pression sociale, économique, intellectuelle”, relève Barbara Lantier, médecin généraliste qui, face au “mutisme collectif”, a choisi de soutenir sa thèse en 2019 sur le suicide des externes, internes et docteurs en médecine. “Certains étudiants sont dans le déni, alors qu’ils peuvent eux aussi avoir des limites physiques ou morales. Quand ils s’en rendent compte, ils risquent de tomber de très haut.” »

La prévalence de la dépression et des idées suicidaires chez les étudiants en médecine est largement supérieure à la population générale[10]

ALERTE EN 2022 AVEC UNE VIDÉO CHOC[11][12]

Crédit photo : Capture Image YouTube

Fiction choc destinée à alerter et à prévenir le suicide des professionnels de santé.

« Réalisée par Marc Gibaja, réalisateur et scénariste français, la séquence d’une minute met en scène trois professionnels de santé autour d’une patiente. Au cours d’une banale scène de consultation autour d’une patiente âgée, médecin, infirmier et aide-soignant finissent par exprimer leur mal-être et passent à l’acte (par arme à feu, pendaison et défenestration). “Le suicide est un sujet tabou, on veut montrer que cela s’est installé dans le monde des soignants, souligne le Dr Éric Henry, médecin généraliste et président de l’association de Soins aux professionnels de santé (SPS), très mobilisée sur ce sujet.”

Le but du film est qu’il soit impactant et viral pour une prise de conscience de la population sur la souffrance des soignants ».

Trois suicides tous les deux jours

Son enquête de 2017 intitulée « Suicide et professionnels de santé » montrait que 25 % des personnes interrogées avaient déjà eu des « idées suicidaires au cours de leur carrière professionnelle ». Parmi eux, 25 % exerçaient en ville et 39 % en milieu rural.

Une autre étude menée en 2019 par l’Ordre, les syndicats et le collège national des sages-femmes a démontré que 31 % de ces professionnelles étaient affectées par le burn-out. « Deux suicides de sages-femmes ont été portés à ma connaissance ces deux derniers mois », témoigne Christine Chalut-Morin, sage-femme clinicienne, secrétaire générale adjointe de SPS.

En 2021, l’Intersyndicale nationale des internes (Isni) avait alerté sur la santé mentale dégradée des futurs médecins. Le taux de suicide chez les internes était évalué à un tous les 18 jours.

En juin 2022, l’étude Amadeus (améliorer l’adaptation à l’emploi pour limiter la souffrance des soignants) a révélé que 50 et 60 % des professionnels de la santé interrogés présentaient des signes d’épuisement professionnel et 30 % de dépression.

« Un interne en médecine a trois fois plus de risque de mourir par suicide qu’un jeune Français du même âge, je trouve cela terrible ! Ces jeunes qui s’engagent dans les soins où ils vont donner une grosse partie d’eux-mêmes, ce n’est pas normal qu’ils soient autant en souffrance », se désole la Dr Magali Briane, psychiatre addictologue à Lyon et vice-présidente de SPS.

« Certes, un numéro national de prévention du suicide — le 3114 — a été lancé en septembre dernier, s’adressant aux personnes en détresse, à leur famille, mais également aux professionnels de santé en contact avec des personnes en danger. Mais, selon SPS, en huit mois, cette plateforme a enregistré 92 000 appels avec “un taux de réponse de 72,3 %”

Bien loin des “100 % appels décrochés” de l’association SPS, revendique le Dr Éric Henry. Son numéro vert (0 805 23 23 36), mis en place depuis six ans, a reçu plus de 18 000 appels, dont près de 14 000 depuis la crise sanitaire. Près de 50 % des appels ont fait l’objet d’une réorientation, notamment vers un psychologue en face à face (20 %), le médecin traitant (10 %), le psychiatre (8 %) ou d’autres réseaux (Morphée, médecine du travail, médecine universitaire, associations, service social). Les appels de niveaux 3 à 5 — “épuisement professionnel”, “idéations suicidaires” et “risque de passage à l’acte imminent” — sont systématiquement réorientés vers un médecin généraliste et un psychiatre ».

L’association SPS entend démontrer à nouveau l’intérêt d’une plateforme d’écoute, d’orientation et d’accompagnement ciblée pour les soignants. « En tout cas, le film est un prétexte pour déclencher des réactions, insiste le Dr Henry. Est-ce qu’il faut que tous les soignants quittent l’hôpital, leur métier pour que cela bouge vraiment ? Le ministère va-t-il enfin bouger ? ». L’association espère pouvoir nouer prochainement un partenariat avec le numéro national 3114. (d’aucuns lui reprochent ce clip violent et pas forcément efficace, pour faire de la propagande pour son association)

Évidemment ces aides ponctuelles sont positives et à saluer, mais on n’en sortira pas sans une refonte complète du système de santé avec suppression des ARS et de leurs aberrants pouvoirs administratifs par des bureaucrates éloignés de la vraie médecine voulant nous imposer une « médecine collective et non individuelle[13] adaptée à chaque patient » croyant à la religion de l’intelligence artificielle qui ferait diagnostic et prescription sans besoin d’un intermédiaire médical ni même soignant.

La disparition de la chirurgie de plus en plus évidente et préoccupante dans les protocoles thérapeutiques imposés par les agences HAS, INCa, etc. en est la démonstration évidente. Des maladies curables par une chirurgie d’exérèse ou une radiothérapie de qualité sont maintenant soumises à de « nouvelles molécules » inefficaces et hors de prix qu’on change tous les six mois puisque cela n’a pas marché…[14] Mais comment les patients pourraient-ils s’en apercevoir ?

COMMENT EN SORTIR ?[15]

Nos joyeux organisateurs ont tout cassé depuis les années 80. Ils ont transformé nos hôpitaux publics puis privés, et bientôt nos cabinets de ville (devenus « maisons de santé »), en usines, organisées sur le mode de la fabrication des voitures du début du XXe siècle.

Procédures, checklists, protocoles, audits externes et internes, réunionnites aiguës et chroniques, contrôles ARS et décisions unilatérales, le tout sorti d’ordinateurs coûteux, et souvent en panne, ont remplacé les relations humaines

pourtant, si importantes en milieu médical. Cette révolution, acculturation décidée par les « élites », en tous cas par les décideurs, éloigne les médecins et paramédicaux de leur raison d’être, le malade, être de chair et de sang, être pensant, dont la parole est là pour exprimer son désarroi ou sa philosophie, là pour être écouté, compris.

Mais ce rapport humain ne se chiffre pas, ne s’évalue pas, donc il n’a pas de prix, vous serez tous d’accord ! Il n’intéresse pas les financiers qui nous gouvernent.

Ce qui ne se compte pas ne compte pas, même s’il devrait se conter, se raconter. Donc à la trappe, le contact informel entre le médecin ou soignant et le patient. Des robots vont nous remplacer. On nous l’a prédit, et d’ailleurs, les prototypes sont exposés dans les salons « santé connectée », dont notre gouvernement est si fier. Encore une planète où « tout va bien », mais si loin du monde réel.

IL EST TEMPS D’INTERPELLER LES POLITIQUES ET D’EXIGER RÉPONSES ET ENGAGEMENTS

Il n’y aura pas de médecine de qualité, sans libération des médecins et paramédicaux du joug bureaucratique qui les étouffe.

La liberté thérapeutique des médecins accompagnée de leur liberté d’installation, de leur liberté financière et de leur affiliation libre ou non à une convention, est le préalable à une inversion de la chute dramatique du nombre de médecins installés, et même de nouvelles inscriptions à l’ordre et de la fuite à l’étranger des praticiens formés, comme des chirurgiens expérimentés.

Il importera évidemment que cette réforme majeure de l’exercice médical soit associée à la refonte de la recherche et de l’enseignement pour redonner à nos jeunes étudiants animés du désir de soigner une formation à la hauteur de leurs ambitions.

Ne plus les transformer en robots obéissants, mais donner à leur imagination, à leur sensibilité, à leur créativité, la possibilité de s’exprimer sans mépriser les acquis de leurs aînés, doit devenir un objectif obsessionnel des futurs responsables des universités.

Se libérer de la pensée unique en médecine

Après les trente Glorieuses et l’enthousiasme pour les avancées du CNR, vinrent les quarante Piteuses et le règne stérilisant du Tout Fric et les Affreuses actuelles de la déconstruction massive.

Comme nos aînés ont reconstruit les villes après-guerre, pierre après pierre, reconstruisons nos universités, nos écoles, nos hôpitaux. Nous en avons encore les moyens. IMPOSONS UN CHANGEMENT À 180 °.

Il ne faut plus perdre de temps. Soyons dignes de nos aïeux. Soyons fiers de reconquérir nos libertés et notre belle médecine. Seulement à ce prix, les suicides de médecins et soignants deviendront un vilain souvenir. Sans cette reprise en main de la médecine par les médecins, ils se multiplieront en même temps que les démissions. À nous tous de choisir.

Mais sans médecins et sans soignants, qui vous soignera ?

Dre Nicole Delépine

 

Cet article a été publié initialement sur le site nouveau-monde.ca

 

Notes :

[1] Lire le livre du chirurgien B Kron « les blouses blanches sont en colère noire », éditions Max Milo : « La Covid a mis au grand jour la ruine de notre système de santé. De numéro 1 mondial en 1970, il est tombé au 24e rang des pays de l’OCDE ! Pour la première fois depuis la Guerre, l’espérance de vie recule en France. Dans les hôpitaux, 30 000 patients décèdent d’accidents médicaux chaque année. Dans cet essai, Bernard Kron analyse les causes de cet échec. Il décortique les principales réformes (en particulier la diminution drastique du nombre de médecins et d’infirmières) qui ont mené à cette catastrophe. Pour sortir de cette impasse, l’auteur milite pour redonner le pouvoir aux médecins et plus largement aux soignants, qui sont en colère contre leur administration et les agences de santé ».

[2] https://atlantico.fr/article/decryptage/suicide-des-medecins–silence-mediatique-sur-un-massacre-programme-du-systeme-de-sante-nicole-delepine août 2013

[3] Éditions le Cherche Midi « Aux malades, ce livre raconte les risques et les maladies d’aujourd’hui et la vie des médecins et des infirmières qui les soignent. C’est alors un message de vérité et d’espoir. Aux médecins, il tente de faire comprendre la confusion incroyable d’un système qui les paralyse et pourquoi il ne fonctionne pas comme il devrait. C’est ici une invitation à la mobilisation et l’action. Aux élus, il dénonce la politique centralisée, menée depuis 25 ans, purement administrative et comptable, à courte vue, sans lucidité ni courage, en mêlant gaspillages insensés et restrictions injustifiées.

À tous, il rappelle que la médecine doit être sobre, humaine, fondée sur le cœur, le savoir, l’expérience et la raison et centrée sur chaque malade particulier et non pas une démarche technologique d’ingénieurs centrée sur les maladies en général ».

[4] Le quotidien du médecin : « Suicide d’un pneumologue à l’hôpital de Nevers : l’Ordre dénonce le silence des tutelles », 15/05/2013

[5] Communiqué de presse USAP CGT

[6] L’insupportable souffrance au travail : ça suffit !!!
Lundi 25 mai 2013 au soir, une de nos collègues d’Henri Mondor, proche de la CGT, jeune femme de 42 ans a choisi de se suicider.(…) L’USAP CGT par courrier dès décembre 2012 avait déjà alerté.

[7] Lire « le débat interdit » d’Ariane Bilheran et Vincent Pavan, éditions Trédaniel : « un mathématicien et une psychologue — mettent en lumière le traitement de la langue et de la logique, mis en œuvre par les sphères politique et médiatique depuis mars 2020 en France.Forts de leurs connaissances spécifiques, ils étudient le fonctionnement d’une information et d’une communication détournées. En s’appuyant sur des arguments sourcés et chiffrés, ils mettent en lumière la déconstruction des “vérités” scientifiques avancées par le gouvernement pour justifier ses actions politiques. Ils proposent une analyse détaillée de la “nouvelle langue”, de la “nouvelle normalité” et des méthodes de contrainte psychique utilisées sur la population française ».

[8] Lire aussi le blog de Jean Dominique Michel Anthropo-logiques (tdg.ch) et les nombreux articles qu’il écrit et/ou partage.

[9] Par Léa Iribarnegaray 12 janvier 2021 Chez les étudiants en médecine, le tabou des suicides (lemonde.fr)

[10] Pour plus d’infos et d’aides concrètes, voir l’association LIPSEIM fondée en 2020 par une maman blessée. Depuis la création de l’association en mai 2020, ils organisent des actions de prévention et de sensibilisation à destination des apprentis médecins, mais aussi des seniors et de l’administration hospitalière. « Les jeunes doivent entendre qu’ils sont parfois en danger », martèle Luc Marbach.

[11] Suicide des professionnels de santé : face aux chiffres « démesurés », un film choc de l’association SPS pour que « ça bouge vraiment » PAR LOAN TRANTHIMY — LE 30/08/2022 quotidien du médecin

[12] https://youtu.be/38AhlGdiJtU le clip violent à ne pas montrer aux personnes fragiles et déjà touchées.

[13] La bureaucratie étouffe le système de santé. Agences sanitaires et liberté de soigner Volet 2 — Docteur Nicole Delépine (nicoledelepine.fr)

[14] En particulier par exemple dans des tumeurs bénignes comme le fibrome desmoide et surtout dans de nombreux cancers où la chirurgie disparaît du fameux « protocole » comme dans certains cancers des os alors que la place de la chirurgie est fondamentale pour obtenir de vraies guérisons.

[15] Nous avions abordé ce sujet dans « soigner ou obéir » dont les constats et solutions proposées sont toujours d’actualité avec une situation encore aggravée et un pouvoir bureaucratique par les ARS encore gonflé.

Avis de non-responsabilité: Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.