Syrie / La nécessaire bataille contre le daechisme du dollar US

Analyses:

L’année 2023 est une véritable catastrophe pour la livre syrienne.

Une situation sans précédent sur cette « terre généreuse de ses bienfaits » [balad al-kheyrate ; comme disent les Syriens]. 

Pour certains, elle serait essentiellement due à la série de sanctions occidentales de plus en plus sévères contre les Syriens de l’intérieur afin qu’ils se désolidarisent de leurs dirigeants. Pour d’autres, une part non négligeable de cette situation catastrophique serait due aux structures internes de l’administration économique qui ne permettraient pas de transformer lesdites sanctions en opportunités. 

Les premiers rappellent que, quel que soit le pays, pour qu’il y ait un système économique efficace et une monnaie forte par rapport aux devises étrangères, il faut qu’il y ait production, exportation et importation. Par conséquent, il faudrait qu’il y ait une liberté de circulation dans toute la Syrie, sans les multiples obstacles créés par les terroristes, les séparatistes et les occupants étrangers. Il faudrait aussi des transactions bancaires libres avec les pays d’exportation et d’importation. Sans cela, les critiques formulées contre l’administration économique sont injustes. Quant aux seconds, ils considèrent que l’État syrien a les moyens de surmonter cette catastrophe et que tout ce qu’il faudrait se résume à changer la mentalité des décideurs en matière d’économie. 

Pour Naram Sarjoun, cette situation est une dague plantée dans le cœur des Syriens, une dague empoisonnée qu’il faudra extirper coûte que coûte.

Mouna Alno-Nakhal

 

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Bien que je sache que cet article sera une arme entre les mains de mes ennemis telle la dague empoisonnée avec laquelle ces voleurs ont transpercé mon cœur, je l’écris quand même afin de la retourner contre eux. Mon cœur saura que je n’ai pas trahi, mais plutôt que je sais quand et comment l’en extirper pour m’en servir et les combattre avec encore plus de force que jamais. 

Il n’est pas dans mes habitudes d’écrire ce qui plaît à nos ennemis, mais plutôt ce qui nous plaît et qu’ils détestent. Mais aujourd’hui, ce qu’ils détesteraient le plus est que nous arrêtions de prier comme ceux qui implorent le ciel pour que tombe la pluie et que nous nous mettions au travail pour combattre la progression du dollar américain et son terrorisme daechiste. Car ce que nous vivons actuellement est une attaque du dollar à la manière de Daech, pendant que nous défendons la livre syrienne, l’économie, la vie des citoyens et l’éthique en priant à la manière des derviches et des soufis. 

La guerre n’est pas terminée et reste à son apogée. Et puisque le but de cette guerre menée contre nous est de forcer notre société à changer en profondeur ses orientations, ses équilibres et même ses gènes culturels, tout mouvement populaire est considéré comme une victoire ou une défaite selon ses revendications et son importance. 

Oui, la guerre se poursuit, mais comme dans un film muet dont les voix sont étouffées, alors que ses terribles conséquences et ses bombes économiques continuent de semer la désolation et la mort, ses victimes étant beaucoup plus nombreuses qu’il ne se dit. 

Or, s’il est honorable que nous perdions une guerre en dépit de combats féroces, il est horrible que nous la perdions sans combat. Et les défaites les plus amères sont celles qui ne coûtent pas grand-chose à l’ennemi et que nous perdons parce que nous n’avons pas été bons en dépit de notre détermination à le combattre. C’est pourquoi il serait pitoyable qu’après avoir gagné la guerre militaire quasi-universelle menée contre notre pays, nous nous retrouvions perdants à cause d’une mauvaise gestion de l’économie, des services, des médias et des crises d’après-guerre. 

En effet, la situation économique se détériore et il semble que ce soit l’arme la plus meurtrière. Elle tue les gens tout comme elle tue leur patience et leur résilience. Je suis absolument convaincu qu’il s’agit d’un plan américain très intelligent et terriblement dangereux. Or, pouvons-nous séparer l’Américain du non-Américain ? 

La réponse est non, puisque l’Américain et l’Européen sont responsables des souffrances de ce Levant meurtri depuis la Nakba (1948), jusqu’à la Naksa (1967) et le prétendu Printemps arabe (2011). Mais quelles sont nos propres responsabilités ? Sommes-nous exempts d’erreurs ?

Il est clair que face à la puissante force militaire américaine, il n’était pas attendu que nous puissions résister et que nos combattants patriotes et héroïques puissent infliger une défaite à la formidable technologie américaine, laquelle a injecté toutes sortes de munitions, d’informations, d’outils de communications et d’espionnage au profit d’officiers du renseignement et de milliers de kamikazes entrés dans le pays. Mais l’Amérique a échoué militairement malgré sa supériorité guerrière et technologique, parce que nous avons utilisé nos propres cartes militaires intelligemment avec patience et confiance, et aussi parce que nous avons choisi les bonnes alliances.

Il n’empêche qu’aujourd’hui nous nous retrouvons dans la même situation : une attaque violente frappe l’économie et la livre syriennes. Par conséquent, elle frappe le pain, les carburants et tout moyen de subsistance. Le dollar attaque la livre, pendant que les argentiers daechistes attaquent toutes nos ressources et tuent la livre sur ordre franc et direct des États-Unis. 

Une attaque violente venue s’ajouter à la violence des sanctions et aux diverses « lois du blocus », lesquelles sont similaires à nombre de projets de résolutions soumis au Conseil de sécurité pour nous assiéger sous le chapitre VII depuis des lustres. Mais, jusqu’ici, l’armée économique nationale n’a pas réussi à gérer cette bataille. 

Face à ce constat, il n’est pas question de porter l’arme de la division et de la suspicion contre nos partenaires en la patrie, en portant des accusations de trahison ou de négligence contre qui ce soit. Force est d’admettre que l’équipe gouvernementale est en échec et non qualifiée pour cette étape de « guerre économique ». Elle doit reconnaître qu’elle a essayé mais n’a pas réussi et qu’il est temps de laisser cette tâche difficile à une équipe plus compétente. 

Laquelle équipe devra être capable de s’emparer de l’affrontement économique et médiatique tout en restaurant les services dus aux citoyens, en dépit des pressions américaines. Et cela, afin de permettre à l’armée et à la direction politique d’entrer dans la confrontation en sachant qu’elles peuvent compter sur une économie plus solide, comme l’a fait Poutine lorsqu’il s’est préparé à la bataille d’Ukraine avec une équipe économique des plus intelligentes et habiles en la matière. 

Nous disposons de telles forces compétentes porteuses d’idées et d’initiatives. Ces personnes doivent s’impliquer et nous, nous devons les amener aux premiers rangs. Après tout, notre situation économique n’est pas si différente de notre situation militaire lorsque les villes, les villages et les places se sont effondrés devant les attaques du terrorisme… 

Je reste persuadé que ce que vivent les Syriens ne fera que renforcer cette démarche dictée par la raison et que cet acharnement à briser le Levant coûte que coûte, a des racines profondément enfouies dans un passé lointain. Mais le Levant n’a pas été brisé. Il est resté le Levant et particulièrement à Damas. 

Par conséquent, nous devons prouver que le Levant est à nous et que ses facteurs de force sont dans la personne d’appartenance levantine quand elle se bat, pense, croit, se révolte, lit, écrit, et décide qu’elle ne sera pas vaincue quel que soit le prix qu’elle devra payer. 

Naram Sarjoun

2023/07/22

 

 

Source : blog de l’auteur

[ حكومة صلاة الاستسقاء .. وداعشية الدولار  ]

Traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca 

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Articles Par : Naram Sarjoun

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