Syrie / Vienne 3 : La vaine stratégie du quintet de Washington

Le 12 janvier 2018, Al-Mayadeen TV rapportait les confidences d’une source européenne selon laquelle des représentants de cinq pays [États-Unis, Grande-Bretagne, France, Arabie saoudite, Jordanie] s’étaient rencontrés à Washington pour mettre au point, un projet de réformes constitutionnelles en Syrie. Le projet devait être remis à la Russie comme base des futures négociations dans le cadre du processus de Genève sous l’égide de l’ONU, et une deuxième rencontre devait avoir lieu une semaine plus tard.

Dans la matinée du 26 janvier, Al-Mayadeen TV déclarait que cette deuxième réunion avait bien eu lieu ce mardi 23 janvier, à Paris, en marge de la réunion des représentants d’une trentaine de pays, laquelle s’est notamment soldée par une « Déclaration de principes contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques », déclaration censée remédier à une malheureuse paralysie de l’ONU lorsqu’il s’agit de la Syrie et des vetos de la Russie.

Par ailleurs, cette même chaîne publiait le fameux projet du quintet de Washington [*] reçu de Vienne, où il a été remis à quelques personnalités dont l’envoyé spécial de l’ONU Staffan de Mistura, organisateur têtu de Vienne 3, après l’échec sciemment programmé de Genève 8 par son adoption exclusive de la déclaration desdits opposants du « Groupe de Riyad » soutenus par le Quintet de Washington, et avant la tenue non désirée du congrès du 29 janvier prochain organisé par la Russie à Sotchi.

En bref, il s’agit d’un retour à la case d’avant départ : mise de la Syrie sous tutelle directe des Nations Unies, décentralisation masquant une partition, gouvernements locaux, constitution détaillée en rapport avec les buts recherchés… tout le contraire de la résolution 2254 évoquée à tout bout de champ !

Dans une revue de presse récente nous avions souligné un bout de phrase de la conférence de presse commune d’Emmanuel Macron et de Recep Erdogan reçu à Paris ce 5 janvier :

«… le format d’Astana-Sotchi n’est, à mes yeux, pas tout à fait le bon… Pourquoi ? Parce que je pense que plusieurs autour de la table n’ont pas tout à fait les mêmes intérêts que le président Erdogan. Leur intérêt est plus de construire leur influence, leur puissance et leur propre compromis bilatéraux avec la Syrie, plutôt que de construire une vraie stabilité inclusive… je pense qu’il faut associer d’autres puissances de la région et il faut, surtout en termes de modalités, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui au sein de Sotchi, nous assurer que toutes les sensibilités, toutes les oppositions sont bien représentées et que nous nous mettons dans le cadre de ce qui d’ailleurs a été décidé au sein des Nations Unies, c’est-à-dire la possibilité de laisser toutes celles et ceux qui ont fui soit Daech, mais la plupart du temps le régime de Bachar al-Assad, pouvoir s’exprimer dans le processus que nous mettrons en place… ».

Le processus que nous mettrons en place ? Quel processus ? Avec quelles autres puissances ? Maintenant, nous le savons [NdT].

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CONFERENCE DE PRESSE DU DR BACHAR AL-JAAFARI

Bonsoir à vous tous,

Hier et aujourd’hui, nous avons eu avec Monsieur l’envoyé spécial du Secrétaire général [de l’ONU] des pourparlers aussi constructifs que possible, d’autant plus que nous sommes à la veille de la tenue du congrès de Sotchi.

Naturellement, nous avons profité de cette rencontre pour répondre à ses questions ; lesquelles portaient principalement sur les résultats attendus du « Congrès national syrien » à Sotchi. À ce stade, il n’a pas été possible de répondre à certaines de ces questions puisque, comme vous le savez, ce congrès n’a pas encore eu lieu.

En réalité, les résultats du congrès de Sotchi seront la résultante du dialogue entre les participants syriens eux-mêmes, car son but est le dialogue entre Syriens sans ingérences étrangères. Sont attendus environ 1600 invités représentant les différentes composantes du peuple syrien.

Ce n’est pas par hasard que ce congrès de Vienne 3 a coïncidé avec la fuite ou, plutôt, la distribution préméditée d’un document non officiel [no paper document] tournant autour de la relance du processus politique de Genève relatif à la Syrie ; lequel document a été conçu par les représentants d’États qui se sont réunis à Washington, puis à Paris.

Il s’agit de représentants des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France, de l’Arabie saoudite et de la Jordanie. Et ce sont tous, comme vous le savez, des partenaires dans l’effusion du sang syrien en mon pays ; ce qui est en soi conforme à la comédie noire que nous vivons dans un nouvel épisode de la série de complots contre la Syrie. En effet :

  • Comment serait-il possible qu’un État comme l’Amérique, qui a créé Daech, a protégé Daech, a soutenu Daech et qui continue à se battre sur le sol syrien pour Daech… un État qui viole militairement la souveraineté syrienne sur son sol en défiant ostensiblement toutes les chartes, les lois et les conventions internationales… comment serait-il possible qu’un tel État dont les propres mains et celles de ses instruments ont trempé dans le sang syrien, un État qui a agressé directement la Syrie… comment serait-il possible que cet État puisse parler de solution politique et d’avenir en Syrie ?
  • Comment serait-il possible que des États comme la Grande-Bretagne et la France qui suivent la politique américaine tel un aveugle dirigeant un autre aveugle… comment serait-il possible que ces deux États puissent imaginer une quelconque solution ou un quelconque horizon en Syrie ?
  • Comment serait-il possible qu’un État comme la Jordanie qui abrite la cellule secrète d’opérations militaires MOK, qui a accueilli des terroristes venus de toutes parts sur son territoire devenu un refuge tranquille pour sept camps d’entrainement militaire, avant de les envoyer en Syrie… comment serait-il possible, fondamentalement parlant, qu’un tel État puisse parler de souveraineté et participer à une solution politique en Syrie ?
  • Enfin et surtout, la Saoudie, perle de la couronne, summum de la démocratie, phare de la liberté en Orient… la Saoudie, modèle de l’État de droit, parangon des constitutions et de la justice sociale, oasis du bien-vivre et de l’égalité des sexes, icône des élections et de la transmission du pouvoir… comment serait-il possible que ce pays de l’ignorance [jahili de Jahiliya : période antéislamique dans le Coran ; NdT] puisse participer à l’élaboration d’une constitution moderne pour la Syrie ? C’est assurément une comédie noire !

Ledit document non officiel en rapport avec « la relance du processus politique de Genève pour la Syrie », tel est son intitulé, est totalement inacceptable et ne mérite même pas l’encre de son écriture, car notre peuple n’accepte pas et n’acceptera pas que des solutions lui arrivent par parachutes ou sur le dos des tanks.

En tous cas, Mesdames et Messieurs, le langage utilisé par les concepteurs de ce document non officiel indique qu’ils se sont comportés de manière irresponsable. Le processus politique de Genève est présenté comme s’il était mort. Ils tentent, en vain, de donner l’impression qu’ils cherchent à le relancer ; mais, comme dit le proverbe, ils l’assassinent et défilent à ses funérailles.

De notre côté, nous pensons que c’est là une tentative vouée à l’échec. Son but est de torpiller les pourparlers de Genève, le Congrès de Sotchi et toute perspective de solution politique en Syrie, car c’est en accord avec leurs politiques destructrices dans la région.

Je pense que le résumé que je viens de vous présenter nous évitera les questions et réponses, pour aujourd’hui.

Merci beaucoup

Dr Bachar al-Jaafari

26/01/2018

Envoyé permanent de la Syrie auprès des Nations unis et chef de la délégation syrienne à Vienne.

 

Introduction, transcription et traduction par Mouna Alno-Nakhal  pour Mondialisation.ca

Source : Al-Fadaiya [Syrie]

https://www.facebook.com/SyrianNewsCenter/videos/1770361972998113/

 

Note :

[*] [Le projet du Quintet]

 

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Articles Par : Dr. Bachar al-Jaafari

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