Ukraine: la liberté de religion est menacée

Région :
Analyses:

Malgré l’indépendance réciproque des Églises et de l’État, les liens informels entre les deux sphères demeurent importants. Naturellement, les religions, qui proposent de « grandes options ultimes », se préoccupent de la vie des hommes sous tous ses aspects : culturels, moraux, sociaux, économiques. Il n’y en a rien de surprenant. Mais l’Eglise n’est pas légitime d’agir comme un parti en vue de reconquérir ou participer à l’exercice du pouvoir. Toutefois, il arrive souvent qu’elle est utilisée comme un instrument de guerre politique.

Quand les désaccords religieux deviennent politisés

L’Eglise forme aussi la conscience des citoyens, engage à la solidarité et à l’amour de la patrie. L’une de ses missions consiste à réconcilier le pays. Ce qui est d’ailleurs difficile si l’Eglise est divisée elle-même, comme c’est le cas en Ukraine.

Ce pays, qui compte environ 25 millions d’orthodoxes, est représenté par plusieurs Eglises de cette confession. L’Eglise orthodoxe du Patriarcat de Moscou constitue la principale d’entre elles et demeure toujours sous l’autorité de la Russie en dépit d’un certain statut d’autonomie acquis en 1990. La deuxième est l’Eglise orthodoxe ukrainienne du Patriarcat de Kiev qui est née en 1992 d’un schisme avec celle de Moscou. Elle n’est pas reconnue par le monde orthodoxe.

La révolution de 2014 a certainement aggravé le clivage entre l’Église ukrainienne du Patriarcat de Moscou et celle du Patriarcat de Kiev. Selon le politologue et philosophe ukrainien Mikhaïl Minakov, la «révolution de la dignité» a abouti à une corruption éhontée, à un nationalisme militant et au déclin des libertés. Il s’agit également de la liberté de religion. Depuis 2014, les églises rattachées au Patriarcat de Moscou ont subi un grand nombre des attaques de la part des nationalistes qui profitent des désaccords religieux pour l’utiliser comme un outil d’influence.

Un exemple parmi d’autres des violences des néo-nazis envers les croyants est l’incident qui s’est passé à Nikolayev, dans le Sud du pays. Des ultra-nationalistes ukrainiens sont venus saccager le chantier de construction d’une église orthodoxe du patriarcat de Moscou. Ils ont insulté puis frappé les croyants qui essayaient de les empêcher d’entrer sur le chantier, y compris des femmes âgées. Après avoir pénétré sur le site, ils se sont mis à détruire les fondations de la future église.

En 2016, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe s’est réunie pour examiner un rapport sur la persécution de l’Eglise orthodoxe ukrainienne qui relève du Patriarcat de Moscou. Chapelles vandalisées, incendies volontaires, agressions physiques d’ecclésiastiques. Tous ces crimes ont été enregistrés et déposés devant les membres de l’OSCE.

Mais le plus effrayant, c’est la réaction des représentants de l’Eglise du Patriarcat de Kiev et des autorités ukrainiennes. Il s’agit plutôt de la non-réaction et même de l’approbation des actes violents. De quelles valeurs démocratiques parle-t-on dans le pays où les religieux approuvent l’agression contre les croyants? L’Union Européenne a vraiment de quoi interroger les autorités ukrainiennes.

Il est évident que les violations du droit à la liberté de religion ou de conviction non seulement déstabilisent la société ukrainienne mais aussi sapent le projet d’intégration européenne.

En effet, l’Ukraine avec ses handicaps (outre les des attaques perpétrées contre certains de ses concitoyens, elle subit une crise économique destructrice avec une chute du PIB de 18% depuis 2014) apparaît comme le voisin qu’il vaut mieux garder éloigné de soi.

Christine Benoît

News sans frontières

 

 



Articles Par : Christine Benoît

Avis de non-responsabilité : Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.

Le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) accorde la permission de reproduire la version intégrale ou des extraits d'articles du site Mondialisation.ca sur des sites de médias alternatifs. La source de l'article, l'adresse url ainsi qu'un hyperlien vers l'article original du CRM doivent être indiqués. Une note de droit d'auteur (copyright) doit également être indiquée.

Pour publier des articles de Mondialisation.ca en format papier ou autre, y compris les sites Internet commerciaux, contactez: [email protected]

Mondialisation.ca contient du matériel protégé par le droit d'auteur, dont le détenteur n'a pas toujours autorisé l’utilisation. Nous mettons ce matériel à la disposition de nos lecteurs en vertu du principe "d'utilisation équitable", dans le but d'améliorer la compréhension des enjeux politiques, économiques et sociaux. Tout le matériel mis en ligne sur ce site est à but non lucratif. Il est mis à la disposition de tous ceux qui s'y intéressent dans le but de faire de la recherche ainsi qu'à des fins éducatives. Si vous désirez utiliser du matériel protégé par le droit d'auteur pour des raisons autres que "l'utilisation équitable", vous devez demander la permission au détenteur du droit d'auteur.

Contact média: [email protected]