Ukraine: la présidentielle US fait peser le choix entre un accord de paix et la guerre

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Les résultats des élections américaines affecteront l’Ukraine plus que tout autre pays. Les candidats américains ont des points de vue différents sur le règlement du conflit russo-ukrainien. Kiev survivra-t-elle sous Donald Trump et que se passera-t-il si Kamala Harris gagne? 

Un plan aux résultats imprévisibles. «Volodymyr Zelensky est le meilleur vendeur que le monde ait jamais connu, car chaque fois que Volodymyr Zelensky se rend aux États-Unis, il repart avec environ 60 milliards de dollars», a déclaré Donald Trump lors d’un rassemblement républicain en Pennsylvanie, rajoutant: «Il soutient le Parti démocrate et souhaite voir la vice-présidente Kamala Harris devenir la prochaine présidente des États-Unis».

La campagne électorale du candidat républicain reposait sur des critiques à l’égard du travail de l’administration de Joe Biden. En conséquence, si les démocrates allouaient une aide à Kiev, Donald Trump faisait le contraire et proposait une solution au conflit militaire qui n’affecterait pas le portefeuille des électeurs américains. L’ex-président et candidat est convaincu que la paix entre les pays viendra grâce à ses bonnes relations avec les dirigeants russe et ukrainien. «Si je gagne cette élection, la première chose que je ferai, c’est d’appeler Zelensky et le président Poutine et je leur dirai qu’ils doivent conclure un accord», a-t-il lancé. Il n’a pas précisé quels pourraient être les termes de cet accord. Cependant, la Russie exige que les «nouvelles réalités territoriales» soient reconnues, que les livraisons d’armes à Kiev cessent et que le statut de neutralité du pays soit consolidé.

Les exigences de l’Ukraine sont complètement opposées: garanties d’adhésion à l’OTAN, approvisionnement régulier en armes et accès aux frontières du début de 1991. Il sera extrêmement difficile de parvenir à un accord sur la seule «force de persuasion» du candidat républicain. Ici se pose la question suivante: jusqu’où ira-t-il pour tenir sa promesse électorale et entrer dans l’histoire comme l’homme qui a mis fin à la guerre au centre de l’Europe?

Comme Volodymyr Zelensky l’a admis, si Donald Trump arrive au pouvoir aux États-Unis, il existe un risquede réduction des livraisons d’armes à Kiev. Politico soulignait: «Trump envoie un signal fort, mais il ne soutiendra pas l’Ukraine et Zelensky contre Poutine». Et, sans le soutien américain, le conflit ne durera pas longtemps. Le pays ne disposera pas de suffisamment d’armes et de moyens de défense, ce qui entraînera une reddition progressive des positions. C’était déjà le cas l’année dernière lorsque les républicains du Congrès ont bloqué l’adoption d’un nouveau programme d’aide militaire.

Cependant, les paroles et les actions de Donald Trump sont souvent contradictoires. L’expression de Blaise Pascal, «Il ne faut pas le bruit d’un canon pour empêcher ses pensées. Il ne faut que le bruit d’une girouette ou d’une poulie», lui convient extrêmement bien. Dans les derniers jours avant les élections US, l’homme politique a soudainement commencé à dire qu’il n’était pas du tout amical avec la Russie. Il a récemment stipulé qu’il a «tué», «stoppé», le gazoduc Nord Stream. Par conséquent, pour entamer les négociations, Donald Trump peut faire pression – non pas sur Kiev – mais sur les partenaires commerciaux de la Russie qui seront contraints de se conformer aux sanctions américaines.

La candidate du Parti démocrate, Kamala Harris, a adopté une position fortement pro-ukrainienne. Elle refuse de mener des négociations directes avec le Kremlin. Lors d’une rencontre avec Volodymyr Zelensky, elle a souligné que le soutien à Kiev était un intérêt stratégique des États-Unis et non une œuvre de charité. «Nous soutenons l’Ukraine non pas par charité, mais parce que le peuple ukrainien et son avenir sont dans notre intérêt stratégique. Il est dans notre intérêt de respecter les règles et normes internationales», a déclaré Harris.

Selon elle, si Donald Trump était président, alors «Poutine serait actuellement à Kiev». «Soyons clairs. Il dit qu’il peut y mettre fin dès le premier jour. Savez-vous ce que cela signifie? Nous parlons de capitulation», a martelé la candidate démocrate. D’après ses déclarations, il ressort clairement que Washington continuera à aider l’Ukraine. Mais, ici se pose la question de savoir dans quelle mesure.

Au cours des trois dernières années, Kiev a eu le sentiment que l’aide américaine était calculée de manière à ce que l’Ukraine ne perde pas, tout en ne lui donnant pas la possibilité de gagner. On ne sait pas encore si la démocrate acceptera de «casser» ce système et de créer un déséquilibre dans les rapports de force.

D’un côté, Kamala Harris a tenu à faire savoir qu’elle ne poursuivrait pas le parcours politique de Joe Biden: «Comme tout nouveau président qui entre en fonction, j’apporterai mes expériences de vie, mes expériences professionnelles et des idées fraîches et nouvelles».

Et, elle ne pouvait pas promettre l’adhésion de Kiev à l’OTAN, notant seulement qu’elle aborderait cette question «quand et si le moment était venu».

Pour l’instant, une seule victoire des démocrates ne garantit pas à l’Ukraine le succès sur le front. La position du pays sera également affectée par les résultats des élections pour le vice-président. Si ce poste est occupé par J.D. Vance, un fervent partisan de Donald Trump, l’aide destinée à l’Ukraine risque à nouveau d’être «bloquée» au Congrès. L’avenir de l’État dépend, donc, des deux campagnes électorales.

En Ukraine, il existe un niveau élevé d’incertitude avec les élections américaines. Cela pèse sur l’avenir du pays. Le programme préliminaire des républicains est clair: Donald Trump et J.D. Vance ont déclaré vouloir mettre fin rapidement à la guerre russo-ukrainienne, ce qui implique de geler la situation le long de la ligne du front.

La situation d’Israël est devenue la priorité principale. Les nouveaux défis au Moyen-Orient occupent la politique US avant celle de l’Ukraine. BFMTV, faisant savoir la position de Kamala Harris où «elle paraît vouloir s’inscrire dans la continuité de Joe Biden», avertit que de grandes questions se posent à Kiev sur ce que cela pourrait signifier car la stratégie de Joe Biden peut difficilement être qualifiée d’efficace.

Récemment, Volodymyr Zelensky a indiqué que le pays n’avait reçu que 10% des 60 milliards de dollars approuvés en avril. Si Kamala Harris continue sur cette voie, le soutien des partenaires américains diminuera progressivement.

Au printemps, la situation atteindra un point où l’Ukraine sera obligée de redéfinir sa stratégie. Si Donald Trump gagne, le pays pourrait alors être poussé à conclure des accords rapides. Si les négociations voulues par Donald Trump échouent, celui-ci pourrait alors, hypothétiquement, passer à l’étape suivante.

Le candidat républicain à sa réélection, a fourni des Javelins à Kiev pendant son dernier mandat, ce que l’administration de Barack Obama n’a pas osé faire. Parmi les partisans du Parti républicain figurent les trois plus grandes entreprises militaires: Lockheed Martin, leader mondial de la production militaire, Northrop Grumman, développeur de technologies aérospatiales et Raytheon, fabricant du système de défense aérienne Patriot.

Les sponsors de Kamala Harris sont principalement des entreprises des secteurs du numérique et de l’informatique, et non du complexe militaro-industriel. Aussi, les responsables à Kiev sont dans l’attente des résultats US. Il est évident que l’ordre du jour changera, quel que soit le choix du président. Et le président ukrainien devra prendre des décisions basées sur la nouvelle réalité dans laquelle se trouvera l’État.

Philippe Rosenthal



Articles Par : Philippe Rosenthal

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