Un sous-marin américain dans les eaux arctiques Canadiennes
Un sous-marin américain a navigué dans l’Océan Arctique le mois dernier — probablement en passant dans les eaux territoriales Canadiennes — mais le gouvernement Canadien refuse de dire s’il a donné l’autorisation de le faire.
Cependant, des experts disent qu’il est hautement improbable que le Canada ait été seulement informé du voyage dans le Nord de l’USS Charlotte, qui a passé la journée du 10 novembre au pôle Nord, parce qu’il n’y a aucun moyen de surveiller ce qui se passe sous la banquise Arctique.
Et cela pourrait menacer les revendications du Canada sur les milliers de kilomètres carrés dans le Nord, y compris le passage du Nord-Ouest à travers l’Arctique, indique Michael Byers, titulaire de la chaire de recherche en politique globale et lois internationales à l’Université de Colombie Britannique.
« C’est très important — c’est même crucial, » dit-il. « Tout passage non-autorisé pourrait avoir un impact sérieux sur nos revendications. »
Le Professeur Byers ajoute que, au large des îles de la Reine Elizabeth, des ressources en gaz et en pétrole, potentiellement très lucratives, pourraient échapper au contrôle Canadien si des marines étrangères opérent dans l’Arctique sans notre permission. « Le fait important est que nous n’avons rien fait au sujet de la souveraineté de l’Arctique durant les 20 dernières années. »
Pierre Leblanc, colonel en retraite et ancien commandant des forces Canadiennes du Nord, déclare que des sous-marins étrangers naviguent dans l’Arctique Canadien depuis des dizaines d’années. Généralement, le gouvernement Canadien ne le découvre que par pur hasard.
Il ajoute que les états disposant de sous-marins — les Américains, les Britanniques et le Français — n’avertissent généralement pas quand leurs sous-marins entrent dans l’Arctique. « Nous sommes tributaires de leur bonne volonté pour savoir s’ils sont dans nos eaux ou pas. »
Le dernier voyage sous-marin au travers de l’Arctique est intervenu juste avant la dissolution du Parlement Canadien, le mois dernier. L’USS Charlotte, un sous-marin d’attaque de la classe Los Angeles, a quitté son port base de Pearl Harbor, navigué par le détroit de Béring entre l’Alaska et la Russie et sous la banquise de l’Arctique vers le pôle.
Le sous-marin nucléaire a passé plus de 24 heures au sommet du monde, donnant à ses 154 hommes d’équipage l’occasion de marcher sur la glace balayée par le vent et même de jouer un rapide match de foot par -45°C.
Le Charlotte a alors plongé et s’est dirigé vers Halifax pour une escale sur la route d’une remise en état au chantier naval de Norfolk (Virgine).
Un porte-parole de l’U.S. Navy a refusé de donner des détails sur le trajet suivi par le Charlotte. Le chemin vers le Sud le plus court l’aurait fait passer par l’île d’Ellesmere, le détroit de Nares, au travers des eaux Canadiennes.
Le Col. Leblanc doute que les Américains aient informé le gouvernement Canadien du voyage, sans même parler d’en demander la permission. « Je ne pense pas qu’ils nous aient dit quoi que ce soit, je ne pense pas qu’ils en aient parlé à qui que ce soit, » indique-t-il.
« Dans le monde des sous-marins, ils ne disent rien à personne, que ce soit dire là où ils vont ou quand ils y vont, à moins d’y être obligés. »
Si le Charlotte est effectivement passé par le territoire Canadien en allant à Halifax, les sous-mariniers américains pensaient probablement qu’ils avaient le droit de le faire.
Le Canada et les Etats-Unis se disputent depuis des dizaines d’années sur l’étendue des eaux territoriales du Canada dans l’Arctique.
Le Canada revendique 12 nautiques autour des îles de la Reine Elizabeth et prétend que tous les détroits et passages sont des eaux internes. Les Américains disent que ce sont des passages internationnaux que n’importe qui peut librement emprunter, y compris le Passage du Nord-Ouest.
Le Lieutenant-Commander John Coppard, porte-parole de la Marine Candienne, a refusé d’indiquer si le sous-marin américain avait pénétré en territoire Canadien. Il a refusé de confirmer si les Américains ont demandé notre permission, ou même seulement informé Ottawa que le sous-marin devait passer dans les eaux Canadiennes de l’Arctique.
« Nous ne discutons pas des mouvements des sous-marins des [nations] alliées, » a-t-il déclaré, ajoutant : « On peut toutefois s’attendre à ce qu’un navire étranger transitant par les eaux Canadiennes dispose des accords diplomatiques appropriés. »
Cependant, Rodney Moore, porte-parole du ministère Canadien des Affaires Etrangères, a indiqué qu’une telle notification aurait transité par les canaux militaires. « Elle ne serait probablement pas arrivée jusqu’à nous. Je ne ferais pas de commentaire à ce sujet, même si elle était arrivée, » a-t-il indiqué. « Si quelqu’un l’a eu, cela serait au ministère de la défense. »
Bill Graham, le ministre Canadien de la Défense, a refusé de répondre à des demandes d’entretien à ce sujet.
David Rudd, le président de l’Institut Canadien d’Etudes Stratégiques, a indiqué que les gouvernements fédéraux Canadiens successifs ont suivi pendant des dizaines d’années une politique qu’il décrit comme « loin de ma vue, loin de mon attention. »
« C’est une politique non-dite d’ignorance délibérée, » indique-t-il. « Si le public ne sait rien à ce sujet, il ne demandera pas qu’on dépense de l’argent pour surveiller le Nord et protéger notre souveraineté. Et une surveillance sérieuse du Nord est une proposition qui couterait très cher. »
Le Professeur Byers indique que le Canada n’a que 5 petits brise-glace vieillissants, aucun ne pouvant opérer toute l’année. « Nous avons la plus grande longueur de côtes au monde, la plupart est sous la glace la majeure partie de l’année, et nous n’avons même pas un brise-glace tout-temps. »
« Nous n’avons même pas un seul hélicoptère du gouvernement fédéral au nord du 60ème — pas un seul. »
Il a averti que si le Canada ne pouvait pas garder un oeil sur son vaste territoire du Nord, nous pourrions perdre le contrôle du Passage du Nord-Ouest, une route de 5.000 kilomètres au travers de l’Arctique Canadien. Les climatologues prédisent qu’il pourrait être ouvert à la navigation commerciale dans les 10 prochaines années à la suite du réchauffement de la planète et de la diminution de la banquise.
« Notre manque de capacité est embarrassant, » dit-il. « [Et] cela envoie un message aux autres pays que nous ne sommes pas vraiment sérieux à propos de notre souveraineté ou à propos du respect de nos lois sur notre propre territoire. »
Le Col. Leblanc indique que le Canada ne dépense même pas le strict minimum pour la souveraineté du Nord. Lorsqu’il était commandant dans le Nord, même la poigné de vols au-dessus du vaste territoire Arctique revendiqué par le Canada étaient réduits drastiquement.
« Le nombre de vols d’observation plannifiés en 2000 était de zéro. En 1999, il y en avait deux, » se souvient-il. « Et c’est pour une région de la taille de l’Europe. »
« Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe là-haut. »