Unanimité à Ottawa sur le «génocide ouïgour» : vrai débat ou consentement fabriqué?

Après avoir expliqué pourquoi l’unanimité peut être le signe d’une absence de débats sérieux et comment quelques personnes réussissent à contrôler l’opinion publique, l’auteur cherche à comprendre par quel phénomène la Chambre des communes du Canada a pu adopter en février 2021 à l’unanimité une motion accusant la Chine de génocide. C’est un comité de huit députés qui, n’admettant comme possible que le point de vue des organisations ouïgoures, a fait sien le récit de fabricants de consentement qui leur sont liés. L’auteur documente certains faits peu connus et pour le moins préoccupants, comme l’incidence d’organismes de propagande américains et l’existence dans le dossier d’un réseau d’affinité.

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Dans l’ouvrage Les Décisions absurdes 2 (Gallimard, 2012) qui a été populaire dans le milieu des affaires lors de sa parution, le sociologue français Christian Morel dit beaucoup de mal de l’unanimité qui est souvent considérée comme la meilleure façon de conclure un débat. Pour s’expliquer, il se réfère à une règle de droit en vigueur chez les Israélites de l’Antiquité. « Si les vingt-trois juges du tribunal du Sanhédrin prononcent une condamnation à mort à l’unanimité, cela entraîne automatiquement l’acquittement de l’accusé, et celui-ci n’est pas rejugé. »  Même si elle semble aller à l’encontre du bon sens, cette règle est pour Morel bien fondée. Comme rien n’est jamais parfaitement noir ou blanc, l’unanimité est relativement impossible dès que plusieurs personnes délibèrent de manière studieuse, car elles ne peuvent pas toutes regarder un même objet le moindrement complexe de la même manière et envisager les mêmes facteurs avec une égale importance. Ainsi, si un jugement est unanime, on peut soupçonner qu’il est irréfléchi, qu’il a été rendu en l’absence d’une réelle délibération, d’une réelle confrontation des idées. L’unanimité « est le signe qu’il n’y a pas eu de véritable débat. La décision qui en résulte est à ce point suspecte qu’elle doit être sanctionnée par l’acquittement du coupable ».  

L’unanimité avec laquelle la Chambre des communes du Canada a adopté le 22 février 2021 une motion (citée ci-dessous) et dans laquelle elle reconnaît « qu’un génocide est actuellement perpétré par la République populaire de Chine contre les Ouïgours et d’autres musulmans turciques » est surprenante. Tous les 266 députés s’étant présentés en Chambre au moment du vote, qu’ils appartiennent à l’un ou l’autre des cinq partis qui la composent ou soient un député indépendant, ont voté en faveur de la motion. Aucun n’a voté contre. Même pas un seul des députés libéraux, du parti au pouvoir, qui étaient libres de voter dans un sens ou l’autre et dont la moitié étaient présents. Il devient alors normal de se demander si cette unanimité a été précédée d’un véritable débat ou est suspecte : voilà la question dont on cherchera ici à fournir des éléments de réponse. 

Motion adoptée le 22 février 2021 [1]

Conformément à l’article 81 (16) du Règlement, la Chambre procède à la mise aux voix de la motion principale, telle que modifiée, de M. Chong (Wellington-Halton Hills), appuyé par M. Genuis (Sherwood Park-Fort Saskatchewan), – Que,

a) de l’avis de la Chambre, la République populaire de Chine s’est livrée à des actions correspondant à ce que prévoit la résolution 260 de l’Assemblée générale des Nations unies, couramment appelée « convention sur le génocide », dont la mise en place de camps de détention et de mesures visant à prévenir les naissances à l’égard des Ouïgours et d’autres musulmans turciques; 

b) étant donné que (i) dans la mesure du possible, le gouvernement a comme politique d’agir de concert avec ses alliés lorsqu’il s’agit de reconnaître un génocide, (ii) il existe un consensus aux États-Unis, où deux administrations consécutives sont d’avis que les Ouïgours et d’autres musulmans turciques font l’objet d’un génocide organisé par le gouvernement de la République populaire de Chine, la Chambre reconnaisse qu’un génocide est actuellement perpétré par la République populaire de Chine contre les Ouïgours et d’autres musulmans turciques, demande au Comité international olympique de déplacer les Jeux olympiques de 2022 si la République populaire de Chine continue ce génocide et demande au gouvernement d’adopter officiellement cette position.

La motion principale, telle que modifiée, est mise aux voix et est agréée par le vote suivant :

POUR : 266, CONTRE : 0. 

Fabrication du consentement et accusations contre la Chine

La Chine a accueilli en 2019 au Xinjiang un millier d’étrangers, provenant de plus de 90 pays et regroupés en 70 délégations, qu’elle avait invités pour qu’ils puissent examiner les conditions de vie des Ouïgours. La Banque mondiale, dont un de ses projets au Xinjiang servait selon une accusation lancée par des sénateurs américains à persécuter la communauté ouïgoure, a dépêché à l’automne 2019 ses experts qui sont revenus bredouilles et dont l’examen sur place « n’a pas étayé les allégations ».[2]  Comme le Xinjiang est immense, correspondant au sixième du territoire chinois, il a aussi reçu cette année-là 200 millions de touristes, nationaux et internationaux.[3] En dépit de tous ces visiteurs, les accusations en 2020 contre la Chine s’accentuent dans les pays occidentaux au lieu de s’estomper.

La persistance des accusations contre la Chine n’étonnerait guère le célèbre journaliste américain Walter Lippmann (1889-1974) s’il pouvait revenir d’outre-tombe. Il expliquerait qu’océans et différences culturelles créent une barrière entre Chinois et Occidentaux, et qu’une telle barrière suffit à quelques individus pour prendre le contrôle de l’opinion publique et interpréter, dans un sens qui leur est favorable, tout événement se déroulant en Chine. Il rattacherait le phénomène à la « fabrication du consentement » qu’il définit en 1922 comme le processus par lequel, en démocratie, l’opinion publique ne doit pas aller dans tous les sens, mais être minutieusement contrôlée.[4]  (Le concept de fabrication du consentement est remis à la mode à la fin des années 1980, de façon plus savante peut-être, par Chomsky et son collègue Herman.[5])

Si on se fie à Lippmann, toute fabrication du consentement réussie amène une adhésion substantielle, idéalement unanime, de l’opinion publique. Dans le dossier ouïgour, il serait comblé. Il est bien difficile de trouver en Occident un média grand public mettant en doute les accusations portées contre la Chine, même si elles sont évoquées au conditionnel, pour la plupart non vérifiables ou sujettes à interprétation et souvent accompagnées d’une mise en garde du genre « les preuves d’abus sont difficiles à réunir et les témoignages directs très rares ».[6] Les accusations sont nombreuses (disparitions, camps d’internement, travaux forcés, contrôle coercitif des naissances, persécutions religieuses, surveillance, incitation aux mariages interethniques, intimidations, trafic d’organes, génocide culturel) et extensibles (le nombre de victimes, selon les sources, oscillent entre un et trois millions, parfois plus).[7]  Peu de citoyens en l’occurrence oseraient contester ces accusations, surtout qu’ils risqueraient d’être identifiés comme complotistes ou agents de propagande chinois. « Lorsque tout le monde pense la même chose, c’est que personne ne pense beaucoup », aurait déjà dit, sans doute avec hilarité, Lippmann. 

Au fait, sur quelle base a été adoptée cette motion unanime du 22 février 2021 de la Chambre des communes du Canada ? Il faut la relier au travail d’un sous-comité de huit députés, le Sous-comité des droits internationaux de la personne, lequel relève d’un comité plus important, le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Le 20 février 2020, celui-ci demande à celui-là d’étudier la situation des droits de la personne du peuple ouïgour. Cela amène le Sous-comité, les 20 et 21 juillet 2020, à récolter douze heures de témoignages dont il se sert pour établir sa position. Mais avant d’en parler, il faut savoir que ce n’était pas la première fois que le Sous-comité abordait le sujet. Il l’avait notamment fait en 2018 dans un « exercice d’établissement des faits ». 

Mars 2014 – Rebiya Kadeer rencontre à ses bureaux d’Ottawa Alex Neve, le secrétaire général d’Amnesty International Canada, en présence de Kayum Masimov (à gauche) et de Mehmet Tohti (à droite) de la Uyghur Canadian Society

Travaux de 2018 du Sous-comité des droits internationaux de la personne 

En 2018, le Sous-comité n’avait convoqué que quelques témoins : Évelyne Puxley du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement ; Mehmet Tohti de la Société ouïgoure du Canada, qui est un habitué du Sous-comité pour s’être déjà présenté devant lui en 2006 et en 2014 ; Farida Deif de Human Rights Watch Canada; Darren Byler et Adrian Zenz, le premier chargé de cours en anthropologie à l’Université de Washington et le second présenté par la présidente du Sous-comité, dans la version française des transcriptions, comme professeur à l’« école européenne de culture et de technologie de Korntal, en Allemagne ».[8] 

Janvier 2021 – Une collaboration : Garnett Genuis du Sous-comité des droits internationaux de la personne et Mehmet Tohti du Uyghurs Rights Advocacy Project

Si on consulte la version anglaise, Adrian Zenz aurait en réalité été présenté comme professor at the European School of Culture and Theology in Korntal, Germany [9] qui est une école évangélique formant des missionnaires.[10] Adrian Zenz a témoigné quelques semaines auparavant, aussi sur la question ouïgoure, devant un comité similaire du Congrès américain. Ses deux exposés possèdent plusieurs similitudes.[11] Au Congrès américain, Zenz est présenté comme « expert et chercheur sur les minorités ethniques chinoises » (Expert and researcher on China’s ethnic minorities). Curieusement, on ne mentionne pas l’établissement auquel il est rattaché, qui aurait demandé à ne pas être associé en public à cette recherche (The institutional affiliation is withheld as the institution has requested not to be mentioned in public in relation to this research). 

Juillet 2020 – Adrian Zens au Sous-comité 

Si on s’attarde au témoignage de Farida Deif, on peut se faire une idée du genre de propos qui se tiennent en pareilles circonstances. On peut aussi réaliser que chacun arrive avec ses propres objectifs : Mehmet Tohti en profite par exemple pour exhorter « le gouvernement du Canada à accepter entre 3 000 et 4 000 réfugiés ouïgours qui sont actuellement coincés en Turquie et qui craignent d’être expulsés en Chine à tout moment ».[12]  Deif est directrice de Human Rights Watch Canada. Elle affirme que, selon « des estimations crédibles, un million de personnes seraient détenues dans [des] camps où les musulmans turciques sont forcés d’apprendre le mandarin et de chanter des hymnes à la gloire du Parti communiste chinois ».  Elle demande au Canada d’imposer des sanctions et des contrôles contre la Chine, d’enquêter sur les plaintes de harcèlement et de favoriser l’asile de musulmans turcophones chinois.[13]  

Human Rights Watch – « la plus puissante ONG de la planète », lit-on parfois[14]– est régulièrement accusé de biais, particulièrement proaméricain. Il est aussi accusé de promouvoir l’interventionnisme, à la limite militaire, pour exporter les « valeurs progressistes et démocratiques occidentales », tendance qui se devine dans les propos de Farida Deif.[15] Cette conception de la « responsabilité de protéger » – en anglais, « R2P » – et qui aurait mené parfois à des désastres est une idée développée à l’origine par Walter Lippmann.[16] La « responsabilité de protéger » – le principe est accepté lors du Sommet mondial de 2005 de tous les chefs d’État et de gouvernement, et le Canada se targue d’en être à l’origine [17] – fait partie de la panoplie à laquelle les ONG du domaine des droits de la personne sont volontiers prêtes à recourir.

Le 20 novembre 2018, le Sous-comité des droits internationaux de la personne publie un communiqué de presse, plutôt sévère, où on lit que « le mode de vie des Ouïgours et des autres musulmans turcophones de la province de Xinjiang, dans l’ouest de la Chine, est menacé » et que « la Chine n’a pas encore subi les conséquences de ses actes », et où on « exhorte le gouvernement du Canada à régler cette crise qui continue de s’aggraver » –comme s’il était en mesure de le faire.[18] Le communiqué ne semble pas avoir fait grand bruit. Du moins, on n’a pas retrouvé dans les médias de l’époque beaucoup de références à sa diffusion. De toute façon, ce ne sont pas les autorités gouvernementales canadiennes qui en auraient fait la promotion à ce moment-là : la représentante du ministère soutient dans son témoignage que le maintien de bonnes relations avec la Chine est une priorité pour le Canada. 

En décembre 2018, soit un mois plus tard, le Sous-comité publie une sorte d’aide-mémoire rendant compte des témoignages. On y affirme par exemple, en apparence sans aucune analyse de leur véracité, que ces témoignages constituent « un portrait clair et convaincant de la répression systématique qui sévit à grande échelle dans la Région autonome ouïgoure du Xinjiang ». Cependant, comme on reprend aussi le témoignage de la représentante du ministère, le document peut sembler minimalement équilibré. On admet par exemple un « manque de données » et on mentionne que les « responsables canadiens veillent en public et en privé à ne pas faire d’allégations qui ne peuvent être fondées ».[19] On précise aussi « que le Canada entretient une relation multidimensionnelle avec la Chine » et qu’il « s’est engagé à avoir des échanges constructifs avec [elle] en matière de droits de la personne et continue de chercher à établir […] une relation […] fondée sur la confiance et l’avantage mutuel ». 

La Chine se défend

En mars 2019, la Chine publie un livre blanc, La lutte contre le terrorisme, la déradicalisation et la protection des droits de l’homme au Xinjiang.[20]  Le document comprend plusieurs sections, notamment trois sections historiques où sont longuement documentés l’appartenance chinoise du Xinjiang (de l’Antiquité à 1950), la naissance de l’extrémisme (de 1930 à 1990) et le terrorisme dans la région (de 1990 à 2015). On y apprend que, depuis 2014, la police a « détruit 1 588 gangs violents et terroristes, arrêté 12 995 terroristes, saisi 2 052 engins explosifs, puni 30 645 personnes pour 4 858 activités religieuses illégales et saisi 345 229 exemplaires de documents religieux illégaux ». Les « activités religieuses illégales » sont définies comme les pratiques extrêmes : fanatisme, fatwa, jihad… Une section porte sur la subordination des tribunaux chinois aux faits et à la loi, une autre sur la subordination à la clémence et à la rigueur. Les dernières sections sont consacrées à la prévention par l’éducation, à des expériences de lutte antiterroriste et de déradicalisation, à la coopération internationale contre le terrorisme. Ce livre blanc est dénoncé par les communautés ouïgoures de l’étranger et certains médias, qui y voient de la propagande.[21]

Le gouvernement chinois ne s’arrête pas là et publie en août 2019 un autre livre blanc, L’enseignement et la formation professionnels au Xinjiang.[22] Il y explique que, « s’attaquant à la fois aux symptômes et aux causes fondamentales, et associant des mesures de prévention et une réponse énergique, le Xinjiang a créé des centres d’enseignement et de formation professionnels conformément à la loi dans le but de prévenir l’apparition et la propagation du terrorisme et de l’extrémisme religieux, freinant efficacement les fréquents incidents terroristes et protégeant les droits à la vie, à la santé et au développement de la population de tous les groupes ethniques ». Ce nouveau livre blanc équipe sans doute la Chine à mieux expliquer la nature et la philosophie des camps de déradicalisation qu’elle a reconnu avoir créés. Elle réussit en tout cas à se créer de plus en plus d’alliés en dehors des pays occidentaux, notamment au sein des pays musulmans. Souvent eux-mêmes aux prises avec des contestations internes difficiles à gérer, ils sont sensibles à une conception alternative des droits de la personne, plus préoccupée de droits collectifs comme le droit « à la vie, à la santé et au développement » que de droits individuels. Autant que la Chine, ces pays en ont assez de se faire faire la morale par les Occidentaux qui présentent sous bien des rapports d’aussi graves lacunes qu’eux.[23]

Le contexte amène ainsi la Chine à demander de plus en plus aux pays occidentaux de se mêler de leurs affaires. En fin décembre 2019, le Secrétaire d’État américain Pompeo l’accuse de non pas lutter contre le terrorisme, mais de chercher à effacer les croyances et les cultures des citoyens chinois.

« Quelle est la réponse de la Chine à cette affirmation ? » demande un journaliste au porte-parole du ministère des Affaires étrangères de Chine, qui s’attend visiblement à la question. « J’aimerais partager avec vous quelques données que je viens de noter […]. En 2019, il y a eu aux États-Unis 41 tueries de masse […] tuant au total 211 personnes, un record depuis les années 1970. Les données montrent qu’aux États-Unis, [les] armes à feu ont coûté la vie à plus de 14 800 personnes en 2019. Les fréquents crimes violents, y compris les fusillades sur les campus et dans les lieux publics, font que les civils américains ordinaires vivent depuis longtemps dans la peur des armes à feu et de la violence. Nous recommandons aux États-Unis de bien gérer leurs propres affaires et de concentrer leur attention sur le règlement de leurs maux tenaces et de leurs fléaux persistants, en garantissant au moins que leur population bénéficie de la “liberté contre la peur”, plutôt que d’étendre leurs bras longs pour interférer dans les affaires intérieures des autres pays. »[24]

Février 2021 – Porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères réfutant, documents à l’appui, le témoignage d’une ouïgoure à la BBC de Londres 

On aura reconnu dans les propos de Pompeo cette logique très anglo-saxonne de privilégier les droits individuels, comme les croyances religieuses. On aura aussi reconnu dans la réponse du porte-parole chinois la position inverse, celle d’assurer d’abord le droit pour une population à sa sécurité collective.

Les témoignages du 20 et 21 juillet 2020 devant Le Sous-comité des droits internationaux de la personne 

Le Sous-comité des droits internationaux de la personne n’est pas en juillet 2020 dans le même contexte qu’en 2018. D’abord, il n’est plus formé des mêmes députés. Des élections générales ont entre-temps eu lieu et cinq des huit membres du Sous-comité sont nouveaux. Ensuite, le gouvernement est minoritaire de sorte que le Parti libéral du Canada, parti au pouvoir et qui se maintient par des concessions aux partis d’opposition, est moins libre de mener à sa guise les travaux parlementaires. Enfin, les relations du Canada et de la Chine se sont détériorées. La directrice financière de Huawei, Wanzhou Meng, a été arrêtée par les autorités canadiennes le 1er décembre 2018 à Vancouver, où elle se trouve depuis lors sous surveillance électronique, contestant son extradition vers les États-Unis. L’arrestation s’est en effet effectuée à la demande des autorités américaines qui lui reprochent d’avoir agi à l’encontre de ses lois extraterritoriales en commerçant avec l’Iran. En représailles, la Chine a arrêté deux Canadiens qu’elle a accusés d’espionnage. 

Si on se fie au rapport final publié en mars 2021, les douze heures de témoignages que recueille le Sous-comité les 20 et 21 juillet 2020 constituent essentiellement la base de son jugement dans le dossier ouïgour.[25] C’est à ce moment qu’il entend « des Ouïgours qui ont fui la région, d’anciens détenus, des proches de détenus, des représentants d’organisations non gouvernementales, des universitaires et des spécialistes des droits de la personne ».[26]  La vérité, qui est la correspondance entre ce qu’on dit et la réalité, implique une confrontation des points des points de vue : rien en effet n’autorise quiconque à croire que la réalité ne puisse être appréhendée que d’un seul point de vue. Or ce qui s’est produit autant par le choix des témoins que par la complaisance avec laquelle ils ont été entendus, c’est que le Sous-comité n’a considéré comme possible que le seul point de vue des organisations ouïgoures. La confrontation des points de vue est ainsi devenue impossible et, forcément, il en est alors résulté une parfaite unanimité. On rétorquera peut-être que le Sous-comité était formé de simples députés, pas différents de la population et pensant la même chose qu’elle. Mais alors, à quoi servait-il ? N’avait-il pas un devoir de vérité ? 

On se rappellera qu’aux dires de Walter Lippman, il suffit de quelques personnes pour prendre le contrôle de l’opinion publique et interpréter, dans un sens favorable, tout événement se déroulant à l’étranger, en l’occurrence ici en Chine. On peut penser que certaines de ces personnes se sont retrouvées comme témoins devant le Sous-comité des droits internationaux de la personne et ont raconté les choses à leur avantage. 

  • Adrian Zenz déclare au Sous-comité que « depuis 2017, jusqu’à 1,8 million d’Ouïgours et d’autres groupes ethniques minoritaires dans la région nord-ouest du Xinjiang, en Chine, ont été victimes de la plus importante incarcération d’une minorité ethnoreligieuse depuis l’Holocauste ».[27] Adrian Zenz, dont on a déjà parlé et qui prend de plus en plus de place dans le dossier, travaille dorénavant pour Victims of Communism Memorial Foundation. Il s’agit d’une organisation de propagande installée à Washington, d’extrême droite et anticommuniste, qui s’est donné comme mandat « d’éduquer les Américains sur l’idéologie, l’histoire et l’héritage du communisme ».[28] C’est Zenz qui est à l’origine des estimations de millions de Ouïgours en captivité. Ses estimations sont uniquement basées sur des statistiques et documents chinois accessibles sur Internet. Il s’agit d’un chrétien fondamentaliste de la mouvance born-again. Ses détracteurs rappellent souvent qu’il s’est dit en 2019 guidé par Dieu dans ses recherches sur la Chine.[29]
  • Mehmet Tohti déclare au Sous-comité que les Chinois « stérilisent 80 % des femmes ouïgoures, détiennent 80 % des hommes ouïgours dans des camps de concentration, des prisons ou des usines de la Chine continentale, et séparent les enfants ouïgours de leur famille ».[30] Il se présente comme directeur du Uyghurs Rights Advocacy Project, un organisme basé à Ottawa qui, suivant ce qu’on lit sur son site, est financé par le National Endowment for Democracy.[31]   (Alors qu’il témoignait devant le Sous-comité en 2018, il s’était présenté comme provenant de la Société ouïgoure du Canada. La cause ouïgoure est représentée par une multitude d’organismes dont il est difficile de suivre les ramifications.)  Le National Endowment for Democracy est une fondation, sise à Washington, financée par le gouvernement américain. Géré de façon bipartite par le Parti démocrate et le Parti républicain, il a pour objectifs, selon le gouvernement américain, le renforcement et le progrès des institutions démocratiques à travers le monde. L’organisme a été créé dans la perspective de servir comme substitut à la CIA.[32]  Il est impliqué dans plusieurs tentatives de renversement de régimes, ce dont il est facile de se rendre compte en relevant les sommes qu’il investit et dont on peut voir les affectations sur son site.[33]
  • Sayragul Sauytbay prétend au Sous-comité qu’elle est « médecin, enseignante et directrice d’école », qu’elle a été emprisonnée dans un camp de concentration où « il y avait environ 2 500 personnes, tous des innocents […]. La fourchette d’âge des prisonniers allait de 13 à 80 ans. ».[34]   Sayragul Sauytbay est liée au Congrès mondial ouïgour, un lobby financé par le National Endowment for Democray. Elle apparaît d’ailleurs sur le site du Congrès mondial ouïgour qui lui a accordé 1 000 euros (environ 1 500 $) pour avoir témoigné des crimes génocidaires au Xinjiang.[35]  

Mars 2020  – Sayragul Sauytbay  avec Melania Trump et Mike Pompeo

Quiconque s’intéresse au dossier ouïgour tombe immanquablement sur le Congrès mondial ouïgour (World Uyghur Congress). Il s’agit d’un lobby international autour duquel se tisse tout un réseau d’organisations locales et de satellites, et qui est en lien avec les ONG, les médias et les instances politiques d’une vingtaine de pays où sont installées des communautés ouïgoures. On peut trouver un ouvrage, signé par Yu-Wen Chen de l’Université d’Helsinki,[36] détaillant son histoire et ses stratégies, The Uyghur Lobby : Global Networks, Coalitions and Strategies of the World Uyghur Congress (Routledge, 2014). Le Congrès mondial ouïgour a joué un rôle déterminant dans l’engouement de tout l’Occident pour la minorité chinoise ouïgoure. 

Le site LobbyFacts.eu, qui amasse des renseignements sur les groupes de pression intervenant auprès de l’Unité européenne et les sommes investies, indique qu’il mène « des activités de lobbying auprès de l’Unité européenne et du Parlement européen. En particulier, le Congrès mondial ouïgour rencontre les députés européens pour les informer de la détérioration de la situation dans la région autonome ouïgoure et faire pression pour une action européenne pour améliorer leur situation. »[37] Le Congrès mondial ouïgour reçoit un financement important du gouvernement américain, on l’imagine en raison de l’importance stratégique du Xinjiang, par le biais du National Endowment for Democracy. En juin 2019, la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a décoré Dolqun Isa, le président du Congrès mondial ouïgour pour sa « contribution à la démocratie ».[38] Le gouvernement chinois considère le Congrès mondial ouïgour comme une organisation terroriste et l’associe à l’extrême droite. 

Le nom de Sayragul Sauytbay revient souvent dans les sites alternatifs où l’on documente les changements au fil du temps dans son témoignage.[39] Selon l’Ambassade de Chine en Suède où elle vit maintenant, elle n’aurait jamais été détenue. En avril 2016, elle serait devenue directrice d’une école maternelle au Xinjiang. En mars 2018, elle aurait été démise de son poste pour incompétence et transférée à l’école primaire locale. Soupçonnée de fraude et endettée, elle aurait fui de Chine et se serait fabriqué un passé.[40] Le gouvernement américain l’a récompensée d’un prix et on peut la voir sur une photo circulant sur Internet avec Melania Trump et Mike Pompeo.[41]  

Ce qui semble certain, c’est que Sayragul Sauytbay s’est d’abord enfuie en 2018 au Kazakhstan où elle a été arrêtée. Contestant son extradition vers la Chine, elle a déclaré qu’elle avait été forcée en Chine de travailler dans un camp de rééducation où se trouvaient 2 500 Kazakhs. L’affaire a fait grand bruit dans le pays. Le Kazakhstan ne l’a pas expulsée vers la Chine, mais tout en ne se disant pas disposé à la garder.[42] En 2019, elle a pu partir vers la Suède qui lui a délivré un passeport. La Suède a en effet décidé d’accepter comme réfugié, sans enquête, tout demandeur d’asile venant du Xinjiang, pourvu qu’il soit musulman ouïgour.[43] Les communautés ouïgoures se sont alors mises à militer pour que tous les pays occidentaux accordent le même privilège. Le Sous-comité a répondu aux pressions : on lit dans son rapport final une recommandation, la neuvième, visant à créer une « catégorie spéciale pour accélérer l’entrée au pays des Ouïgours et d’autres musulmans turciques, surtout ceux qui militent pour les droits de la personne et ont besoin de protection parce qu’ils fuient la persécution » et visant aussi à « suspendre le renvoi des Ouïgours et d’autres musulmans turciques vers la Chine ». 

Sayragul Sauytbay ppare une version anglaise d’un livre, déjà publié en allemand en 2020, qui sera publiée en juin 2021 sous le titre The Chief Witness : Escape from China’s Modern-Day Concentration. On peut penser qu’elle veut faire comme une certaine Gulbahar Haitiwaji, qui a publié au début de 2021 en France un ouvrage qui a eu un grand retentissement, Rescapée du goulag chinois, et porte aussi sur une expérience des camps de concentration – l’ouvrage  est aussi connu au Québec par La Presse qui en a fait écho.[44] Il faut parler un peu de cette Gulbahar Haitiwaji, même si elle n’a pas été reçue par le Sous-comité, simplement à cause des similitudes entre les deux cas. Pour faire la promotion de son ouvrage, Gulbahar Haitiwaji a multiplié les entrevues dans les médias français. L’Ambassade de Chine en France, disant avoir pris très au sérieux ses déclarations, aurait demandé qu’on mène une enquête en Chine à son sujet. C’est à la suite de cette enquête qu’elle a publié un long communiqué où elle donne tous les détails des divers séjours en Chine de Gulbahar Haitiwaji, la période où ils se seraient produits, ses activités, ses rencontres, les moments où la police locale l’aurait interrogée, etc. On indique dans le communiqué qu’elle n’a jamais été détenue et n’a subi aucuns sévices durant ses séjours. Le communiqué donne aussi des détails gênants sur la vie qu’elle mènerait.[45]

Deux « rescapées » devenues écrivaines

Gulbahar Haitiwaji apparaît aussi sur le site du Congrès mondial ouïgour qui lui a accordé 1 000 euros pour avoir témoigné des crimes génocidaires au Xinjiang.[46] (Sur Wikipédia, on peut lire un article sur Gulbahar Haitiwaji, sorte de panégyrique qui ne semble pas suffisamment conforme aux règles de l’encyclopédie collaborative en ligne pour qu’on avertisse ses auteurs : « Vous êtes invité à le compléter pour expliciter son admissibilité, en y apportant des sources secondaires de qualité, ainsi qu’à discuter de son admissibilité. Si rien n’est fait, cet article sera proposé à la suppression un an plus tard après la mise en place de ce bandeau. »[47] Puisque tout le monde peut écrire sur Wikipédia, il est en effet devenu un moyen important de diffusion pour le lobby ouïgour.)

  • Gulbahar Jelilova raconte au Sous-comité son séjour en détention. « Je les suppliais de me tuer pour éviter la torture, lorsqu’ils me mettaient une cagoule noire sur la tête et qu’ils m’amenaient pour me violer, me torturer, je les suppliais de me tuer. »[48]   Gulbahar Jelilova est liée au Congrès mondial ouïgour qui lui a aussi accordé 1 000 euros pour avoir témoigné des crimes génocidaires au Xinjiang.[49] Dans la déclaration qu’elle a faite à un tribunal populaire non gouvernemental chargé d’enquêter sur les prélèvements forcés d’organes en Chine et où elle s’est présentée comme témoin, elle ne mentionne pas qu’elle a été violée ou torturée.[50] Sur une fiche du Xinjiang Victims Database où elle porte le numéro 2209, elle se plaint d’avoir été « torturée à plusieurs reprises et même menacée d’agression sexuelle par un policier kazakh ».[51]   L’histoire de Gulbahar Jelilova, plus ou moins amplifiée, a fait le tour du monde. Même dans La Presse où on apprend qu’elle a passé « 13 mois avec des chaînes aux pieds », ce dont il n’est pas question dans ses autres déclarations.[52]

Le Sous-comité ne l’interroge pas pour savoir si elle a été détenue dans une prison de droit commun ou dans un camp de concentration. Il ne lui répond pas lorsque, leur parlant de Turquie où elle est maintenant installée, elle pose une curieuse question. « Puis-je ajouter quelque chose? J’aimerais vous demander votre avis. J’ai été détenue pendant un an et trois mois. On m’a accusée de terrorisme. J’ai beaucoup souffert, et je me demande juste qui payera le prix pour ce qu’on m’a infligé. À qui dois-je m’adresser ou que dois-je faire? Une semaine après ma libération, j’ai écrit le nom de toutes les personnes qui m’ont torturée, afin de ne pas les oublier. »[53]

  • Omerbek Ali s’adresse au Sous-comité : « Je voudrais souligner, avant tout, qu’en principe, il n’y a pas d’écoles dans les camps. La scolarisation n’existe pas puisque ce sont des camps de concentration. Je suis citoyen du Kazakhstan. J’ai été détenu et emprisonné pendant huit mois sans aucune procédure légale. Nous parlons de millions et de millions d’Ouïgours qui ont été arrachés à leur foyer et répartis dans des zones de production situées dans des déserts — des millions et des millions. C’est une réalité qu’on observe sur le terrain. »[54] Le Sous-comité ne cherche pas à savoir si le témoin a été incarcéré dans une prison de droit commun ou un camp d’internement. 
  • Omerbek Ali porte aussi comme nom Omer Bekri. On le retrouve dans le Xinjiang Victims Database sous le numéro 3623.

On y retrouve un témoignage fait auprès de Radio Free Asia après sa libération où il parle pourtant de cours suivis dans le camp où il aurait été incarcéré. Dans La Presse, on retrouve des éléments qui ne se retrouvent pas dans le témoignage auprès de Radio Free Asia, comme le passage en 7 mois et 10 jours de détention de 120 à 60 kg.[55] Omerbek Ali est lié au Congrès mondial ouïgour qui lui a aussi accordé 1 000 euros pour avoir témoigné des crimes génocidaires au Xinjiang.[56]

  • Elise Anderson travaille pour le Uyghur Human Rights Project. « Ce mois-ci, l’analyse des experts sur la crise des droits de la personne ouïgours a connu un changement significatif. Des institutions et des experts faisant autorité ont commencé à qualifier ce qui se passe là-bas de campagne probable de crimes contre l’humanité, et de génocide probable. Pendant de nombreuses années, le Parti communiste chinois, ou PCC, a systématiquement détruit les institutions qui ont longtemps servi à maintenir et à transmettre le savoir culturel ouïgour. »[57] On peut être étonné des précautions que prend Elise Anderson en utilisant le mot « probable », même à deux reprises. Le Uyghur Human Rights Project a été fondé par l’Uyghur American Association (UAA) en 2004 avec une subvention de soutien du National Endowment for Democracy (NED).[58] Le National Endowment for Democracy a continué par la suite à assurer son financement.[59]
  • Kamila Talendibaevai témoigne. Elle est la conjointe de Huseyincan Celil : « Cela fait maintenant 14 ans. Comme l’a dit M. MacLeod, ces 14 années ont été longues. Beaucoup de députés sont peut-être déjà au courant de ce cas, et… »[60] Le cas de Celil n’est pas très connu au Québec, beaucoup plus en Ontario.  Celil est un Ouïgour. Selon la version chinoise, il aurait été arrêté en 1994, accusé de plusieurs meurtres et de terrorisme. Mais il aurait réussi à s’enfuir et, considéré comme réfugié, à s’installer au Canada sous un nouveau nom avec sa femme et trois de ses six enfants, puis à obtenir la citoyenneté canadienne. En 2006, il se rend en Ouzbékistan où, fiché à Interpol, il est arrêté, puis extradé vers la Chine.[61] Celle-ci a toujours été inflexible et n’a jamais voulu traiter Celil autrement que comme un criminel chinois. Amnesty International Canada a fait plusieurs campagnes à son propos, soutenant qu’il y a eu erreur sur la personne et qu’il ne correspond pas à l’homme recherché par la Chine. Le gouvernement a aussi pris parti en sa faveur : jusqu’au premier ministre, Harper est intervenu auprès des autorités chinoises. 

L’Ouzbékistan, agacé par la campagne d’Amnesty International, a répondu qu’il n’y avait aucun doute et que les empreintes digitales correspondaient. La pertinence du témoignage de Kamila Talendibaevai dans le cadre de l’étude du Sous-comité n’est pas évidente. Mais comme on l’a présentée comme « militante des droits des Ouïgours »… 

Il ne semble pas qu’au Sous-comité, on se préoccupe de préserver une certaine distance avec les témoins. Un des députés membres affiche fièrement sur son compte twitter le jour même de son témoignage une photo avec Kamila Talendibaevai : « Kamila Talendibaevai témoigne actuellement devant le Sous-comité des droits de la personne. Son mari est un Canadien ouïgour qui est détenu en Chine depuis plus d’une décennie sans accès consulaire. Je l’ai rencontrée pour la première fois lors d’un événement il y a quelques années. Je salue son plaidoyer courageux. »[62]

  • Lors de son témoignage, Alex Neve, le secrétaire général d’Amnesty International Canada, aborde le sujet de Huseyincan Celil : « En 2006, le mari de Kamila, Huseyin Celil, un Canadien ouïgour, a été arbitrairement arrêté par l’Ouzbékistan. Il a été expulsé illégalement, ce qui équivaut à une extradition, et il est maintenant injustement emprisonné en Chine. Depuis 14 ans, ce citoyen canadien n’a même pas eu droit à une visite consulaire de la part de représentants chinois [sic]. Kamila n’a eu aucun contact avec la famille de Huseyin en Chine au cours des quatre dernières années. Elle ne connaît rien de son sort et craint particulièrement pour sa santé. » Par la suite, Alex Neve demande au Canada d’exercer des pressions pour que soit libéré Celil. Le Sous-comité, dans son rapport final, adopte une proposition, la dixième, pour qu’on « utilise tous les outils à sa disposition pour obtenir la libération de Huseyin Celil, y compris, sans s’y limiter, la création d’un poste d’envoyé spécial dont la tâche consisterait précisément à demander sa libération et son retour. »
  • Rayhan Asat, présidente de l’American Turkic International Association, est reçue comme témoin. L’American Turkic International Association se définit comme « une plate-forme permettant aux professionnels du droit américains et turcs d’échanger des idées stimulantes et innovantes dans le domaine juridique ». On ne comprend pas très bien l’intérêt d’un tel témoin jusqu’à ce qu’on réalise qu’elle est aussi conférencière spécialiste des droits de la personne, apparemment très courue. Mais, ce monde étant assez petit, on apprend par LinkedIn que Rayhan Asan est « Senior Fellow » du Centre Raoul-Wallenberg pour les droits de la personne.[63] Le Sous-comité invite justement comme témoin, son président fondateur, l’honorable Irwin Cotler, chaud partisan de la cause ouïgoure.
  • Dans le dossier ouïgour, on a souvent l’impression que les gens se citent à qui mieux mieux. Irwin Cotler s’appuie justement sur le témoignage de Rayan Asat qui ne semble avoir comme seul lien avec le sujet que d’être d’ascendance ouïgoure et conférencière éloquente : « Mme Asat a décrit avec éloquence la surveillance de masse, le travail forcé, la torture et les mauvais traitements, les techniques massives de contrôle et de répression de la population, la stérilisation massive, les avortements forcés, les injections coercitives, la séparation forcée de plus d’un demi-million d’enfants ouïgours d’avec leurs familles, et les attaques massives contre leur religion, leur culture, leur identité, leurs traditions et leur mémoire. »
  • L’honorable David Kilgour est reçu comme témoin. Lui aussi a un lien avec le Centre Raoul-Wallenberg pour les droits de la personne dont il est identifié comme un « collaborateur émérite ».[64] C’est un ancien homme politique, qui est souvent cité quand il est question des Ouïgours – avec l’avocat David Matas, il a procédé à des travaux qui lui ont permis d’accuser la Chine de prélever les organes des membres du Falun Gong.[65]
  • On pourrait considérer Kilgour comme un témoin indépendant. On peut en douter avec le témoignage devant le Sous-comité de Raziya Mahmut qui appuie ses dires sur Zenz. Elle provient du International Support for Uyghurs, une ONG installée à Montréal qui s’est donné comme mandat de « soutenir les Ouïgours et autres peuples turcs opprimés et persécutés par le Parti communiste chinois au Turkestan oriental ». Mais que retrouve-t-on dans la liste des membres de l’équipe de l’International Support for Uyghurs ? David Kilgour.[66]

Sur le site de l’International Support for Uyghurs, on retrouve aussi une photo où l’on aperçoit Rabiye Kadeer, l’ancienne présidente du Congrès mondial ouïgour, considérée par la Chine comme une criminelle, en grande conversation avec l’ancien lieutenant-général Roméo Dallaire.[67] « Lorsqu’il y a des violations massives des droits de l’homme par un État, nous avons tous la responsabilité d’y aller et protéger les victimes. Nous y avons souscrit. Le monde y a souscrit », disait-il en mars dernier, faisant référence aux Ouïgours et au concept de « responsabilité de protéger ».[68] On ne dira jamais assez que ce monde est petit : ils semblent tous se connaître.

Juillet 2008 – Rabiye Kadeer avec George W. Bush à Washington

Mieux encore, on apprend aussi sur le site du International Support for Uyghurs que le 19 février 2020, les représentants de l’organisme se sont rendus à la Chambre des communes d’Ottawa pour « plaider en faveur de la libération des quelque trois millions d’Ouïgours détenus dans des camps de concentration au Turkestan oriental par le Parti communiste chinois ». Ils auraient alors reçu l’appui d’Elizabeth May du Parti vert et de Garnett Genuis du Parti conservateur du Canada, membre du Sous-comité.[69] Soit dit en passant, Garnett Genuis est l’appuyeur de la motion adoptée le 22 février 2021 par la Chambre des communes… 

  • Le Sous-comité entend Jewher Ilham, présentée comme militante des droits humains. La pertinence de sa présence devant le Sous-comité n’est pas évidente non plus. Peu importe, elle est la fille de Ilham Tohti, emprisonné en Chine –  selon ses défenseurs pour ses opinions, selon la Chine pour subversion –  et dont on ne saurait plus grand-chose maintenant. Jewher Ilham, qui est arrivée aux États-Unis en 2013, a 23 ans. En tant que défenseure de son père, elle a témoigné devant le Congrès américain, a écrit des articles dans les journaux américains, a raconté ses expériences dans un ouvrage publié en 2015, Jewher Ilham : A Uyghur’s Fight to Free Her Father. Elle a été la conférencière principale à une conférence sur la liberté de religion organisée en 2019 par le secrétaire américain d’État Mike Pompeo. Elle est liée au Victims of Communism Memorial Foundation qui semble en avoir fait une étoile montante.[70]  
  • Olsi Jazexhi, présenté comme professeur et journaliste, fait partie des témoins. Il vit pour moitié du temps au Canada, pour l’autre moitié en Albanie dont il est originaire. Il raconte au Sous-comité qu’il a fait partie d’une délégation invitée en 2019 par la Chine à séjourner au Xinjiang. Il donne sa version de cette visite, qui a duré neuf jours. Il prétend qu’il a vu des camps de concentration, non des écoles que les hôtes leur présentaient.[71]   « Nous sommes entrés dans le camp de concentration, que les autorités chinoises avaient conçu comme une école. Elles voulaient que nous filmions ces gens qui chantaient et dansaient pour montrer au monde extérieur que ce n’étaient pas des camps de concentration, mais des écoles. » Après son voyage au Xinjiang, il a écrit plusieurs articles et donné plusieurs entrevues pour raconter sa visite,[72] ce qui a amené Global Times, proche du gouvernement chinois, à l’accuser d’être un menteur et à rapporter des témoignages contredisant le sien et venant d’autres membres de la délégation dont il faisait partie.[73]  

Juin 2019 – Rabiye Kadeer avec Roméo Dallaire à Montréal

Le Canada Files est un site alternatif d’analyse de la politique canadienne et qui se définit comme socialiste. Son rédacteur en chef, qui semble bien informé, s’est curieusement intéressé aux travaux du Sous-comité des droits internationaux de la personne. Il raconte dans un de ses articles qu’en février 2020 s’est formé au Parlement canadien le Groupe d’amitié parlementaire Canada-Ouïgours. Vérification faite sur le site du Parlement du Canada, l’existence d’un tel groupe est véridique.[74]   Selon ce qu’on lit dans l’article du Canada Files, le Uyghurs Rights Advocacy Project, lié au National Endowment for Democracy et dont on a parlé, aurait promis de travailler en étroite collaboration avec ce groupe de parlementaires. Celui-ci est coprésidé par le député libéral Sameer Zuberi et le député conservateur Garrett Genius, qui sont tous deux membres du Sous-comité. Il comprend des sénateurs et des députés. En feraient aussi partie le néo-démocrate Heather McPherson, le bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe et le conservateur David Sweet, tous membres du Sous-comité. 

Juillet 2019 – Jewher Ilham s’adressant à Donald Trump

En somme, cinq membres du Sous-comité sur les huit feraient partie du Groupe d’amitié parlementaire Canada-Ouïgours, qui serait en plus alimenté par le Uyghurs Rights Advocacy Project, du moins si on se fie au Canada Files. Il y a de quoi être très étonné, d’autant que le groupe a été formé en février 2020, avant que ne soient choisis les témoins appelés à intervenir devant le Sous-comité. Une telle coïncidence est de nature à créer des doutes dans l’esprit de n’importe quel observateur.

Juin 2020 –  À Washington, des Ouïgours remerciant le gouvernement pour son support 

On peut même avoir l’impression que le Sous-comité des droits internationaux de la personne avait déjà fait son choix de condamner la Chine et que les témoignages de juillet 2020 n’avaient qu’un but, celui de lui permettre d’agir. D’ailleurs, peut-on interpréter autrement le passage suivant qu’on peut lire dans les transcriptions et où l’on cite le bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe, vice-président du Sous-comité, s’exprimant le 20 juillet 2020 entre deux témoignages ?

« Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie sincèrement tous les témoins. Nous avons besoin d’eux dans ce sous-comité. Ils ont fourni des témoignages assez exceptionnels qui nous ont tous touchés. D’ailleurs, je remercie les employés de la Chambre des communes qui nous permettent d’accomplir ce travail aujourd’hui. Je veux remercier tous mes honorables collègues qui ont décidé de s’unir et de faire ce travail. Il faut maintenant s’assurer que ce sous-comité arrive à avoir un impact et qu’il ne s’agisse pas juste de palabres et de mots. Je n’étais pas là en 2018. J’imagine que la situation a changé, mais, en tant que parlementaires, nous avons le devoir de proposer quelque chose de concret et d’être capables de nommer les choses telles qu’elles sont. Je suis bien heureux d’être avec vous aujourd’hui, et j’espère que c’est vraiment l’objectif que nous atteindrons tous ensemble. » [75]

« L’objectif que nous atteindrons tous ensemble » ? Tout cela est étonnant.

Le commerce du « génocide » ouïgour : des tas de produits disponibles en ligne

***

Le 21 octobre 2020, le Sous-comité publie un long communiqué où il dit que si « la communauté internationale ne condamne pas les violations des droits de la personne commises par le gouvernement de la Chine dans la province du Xinjiang, un précédent sera établi et ces méthodes seront adoptées par d’autres régimes. » Il poursuit, en disant que « les condamnations exprimées ici visent directement le gouvernement de la Chine, représenté par le Parti communiste chinois, et non le peuple chinois, que le Sous-comité soutient de tout cœur et dont il espère qu’il pourra un jour profiter de la paix, de la liberté et de la sécurité dont jouissent beaucoup d’autres peuples dans le monde ». Puis il aligne et détaille les accusations portées contre la Chine : détention de masse et traitement cruels, travail forcé, surveillance de l’État généralisé, limitation des naissances, contrôle par la répression. Il conclut en disant que le « Canada a la responsabilité de protéger les Ouïgours et les autres musulmans turciques en vertu de la norme internationale dite de la responsabilité de protéger, qu’il a contribué à établir et qui vise à ce que la communauté internationale mette fin aux crimes de masse atroces que sont les génocides, les crimes de guerre, les nettoyages ethniques et les crimes contre l’humanité. » Il souhaite « remercier tous les témoins qui ont comparu devant lui en ces temps difficiles. Il tient à souligner tout particulièrement le courage de ceux qui ont mis leur vie et celle de leurs proches en péril en venant témoigner. »

Le nouveau chef conservateur, Erin O’Toole, jubile. Il dispose d’une base pour sa campagne anti-Chine et y faire adhérer toute la Chambre des communes.

***

L’unanimité avec laquelle la Chambre des communes a, le 22 février 2021, adopté une motion dans laquelle elle reconnaît « qu’un génocide est actuellement perpétré par la République populaire de Chine contre les Ouïgours et d’autres musulmans turciques » a-t-elle été précédée d’un véritable débat ? C’était la question de départ. Ce qui précède ne permet pas de répondre à la question pas l’affirmative. Il ne semble pas y avoir eu de débat. La Chambre des communes a paru au contraire s’en remettre au Sous-comité des droits internationaux de la personne qui n’a considéré comme possible que le point de vue des organisations ouïgoures et s’est limité à entériner le récit des fabricants de consentement qui leur sont liés. 

L’unanimité n’est décidément pas toujours un bon signe !

Paul Lavoie

 

 

Notes :

1https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-2/chambre/seance-63/journaux#DOC–11123394 

2https://www.worldbank.org/en/news/statement/2019/11/11/world-bank-statement-on-review-of-project-in-xinjiang-china 

3http://cf.chineseembassy.org/fra/fyrth_12/t1815627.htm 

4Public Opinion (Harcourt, 1922).

5En collaboration avec Edward S. Herman : Manufacturing Consent: The Political Economy of the Mass Media (Pantheon, 1988)

6https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9nocide_culturel_des_Ou%C3%AFghours 

7Voir par exemple :  https://www.ledevoir.com/monde/asie/547083/des-ong-reclament-une-enquete-de-l-onu-sur-la-detention-des-ouighours-en-chine 

8https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/42-1/SDIR/reunion-122/temoignages 

9https://www.ourcommons.ca/DocumentViewer/en/42-1/SDIR/meeting-122/evidence 

10https://www.awm-korntal.eu/en/page/european_school_of_culture_and_theology.html 

11https://www.govinfo.gov/content/pkg/CHRG-115hhrg32303/pdf/CHRG-115hhrg32303.pdf 

12https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/42-1/SDIR/reunion-119/temoignages 

13https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/42-1/SDIR/reunion-122/temoignages 

14https://www.jeuneafrique.com/136281/politique/human-rights-watch-une-machine-de-guerre-au-service-des-droits-de-l-homme/ 

15Il y a même un article de Wikipédia consacré au sujet : https://en.wikipedia.org/wiki/Criticism_of_Human_Rights_Watch .

16W.Lippmann, « The Cold War », Foreign Affairs 65 (Spring, 1987), pp. 884-869.

17https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/le-canada-et-la-responsabilite-de-proteger-r2p 

18https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/42-1/SDIR/communique-de-presse/10193019 

19https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/42-1/SDIR/document-pertinent/10277108 

20http://www.gov.cn/zhengce/2019-03/18/content_5374643.htm 

21Voir par exemple : https://www.la-croix.com/Religion/Islam/Ouigours-Chine-justifie-repression-Xinjiang-lhistoire-2019-08-02-1201038946 

22http://french.xinhuanet.com/2019-08/16/c_138313618.htm 

23Voir par exemple :  https://www.liberation.fr/checknews/2020/07/16/ouighours-des-pays-musulmans-dont-la-palestine-soutiennent-ils-la-politique-de-la-chine_1793929/ 

24http://ht.chinacommercialoffice.org/fra/zt/fyrth/t1729159.htm 

25https://www.noscommunes.ca/Committees/fr/SDIR/StudyActivity?studyActivityId=10962686 

26http://publications.gc.ca/collections/collection_2021/parl/xc11-1/XC11-1-1-432-4-fra.pdf 

27https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages 

28 https://victimsofcommunism.org/ 

29Voir par exemple : https://www.letemps.ch/monde/adrian-zenz-cest-un-genocide-demographique ou https://www.monde-diplomatique.fr/2020/11/A/62442 

30https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages

31https://www.urap.ca/about-us/#pll_switcher 

32William Blum, Killing Hope : US Military and CIA interventions Since World War II, Zed Books, 2003.

33https://www.ned.org/ 

34https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages 

35https://www.uyghurcongress.org/en/wuc-awards-camp-survivors/ 

36On peut consulter son site : https://researchportal.helsinki.fi/en/persons/julie-yu-wen-chen .

37https://lobbyfacts.eu/representative/055fb38808e34926a4fe2ec6b77a927e/world-uyghur-congress

38Voir par exemple : http://french.xinhuanet.com/2019-12/07/c_138613205.htm et https://www.reuters.com/article/us-china-xinjiang/china-upset-as-interpol-removes-wanted-alert-for-exiled-uighur-leader-idUSKCN 

39http://tibetdoc.org/index.php/politique/ouighours-et-tibetains/614-volatilite-des-temoignages-sur-la-question-ouighoure 

40http://www.chinaembassy.se/eng/sgxw/t1795448.htm 

41https://en.wikipedia.org/wiki/Sayragul_Sauytbay 

42https://www.ledevoir.com/monde/asie/538486/le-kazakhstan-refuse-l-asile-a-une-chinoise-qui-a-revele-l-existence-de-camps-de-reeducation 

43https://www.independent.co.uk/news/world/europe/sweden-uighur-muslim-china-refugees-camps-asylum-seekers-a8832191.html 

44https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2021-02-28/rescapee-du-goulag-chinois/brainwashing.php 

45http://www.amb-chine.fr/fra/zfzj/t1855934.htm 

46https://www.uyghurcongress.org/en/wuc-awards-camp-survivors/ 

47 https://fr.wikipedia.org/wiki/Gulbahar_Haitiwaji 

48https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-5/temoignages 

49https://www.uyghurcongress.org/en/wuc-awards-camp-survivors/ 

50https://chinatribunal.com/submissions/gulbahar-jelilova/ 

51https://shahit.biz/eng/viewentry.php?entryno=2209 

52https://plus.lapresse.ca/screens/b713fa83-ec52-4833-82ff-faaf9c130fd3__7C___0.html 

53https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-5/temoignages 

54https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-5/temoignages 

55https://plus.lapresse.ca/screens/b713fa83-ec52-4833-82ff-faaf9c130fd3__7C___0.html 

56https://www.uyghurcongress.org/en/wuc-awards-camp-survivors/ 

57https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-5/temoignages 

58https://www.devex.com/organizations/uyghur-human-rights-project-uhrp-73203 

59https://www.ned.org/wp-content/themes/ned/search/grant-search.php?organizationName=&region=Asia&projectCountry=China&amount=&fromDate=&toDate=&projectFocus%5B%5D=&search=&maxCount=25&orderBy=CountryR&start=1&sbmt=1 

60https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages 

61https://www.amnesty.ca/our-work/individuals-at-risk/huseyin-celil 

62https://twitter.com/GarnettGenuis/status/1285325526937329664

63https://www.raoulwallenbergcentre.org/collaborateurs-emerites 

64https://www.raoulwallenbergcentre.org/collaborateurs-emerites 

65https://sante.lefigaro.fr/actualite/2016/07/25/25236-chine-90-000-greffes-clandestines-font-tourner-hopitaux-entiers 

66https://www.isupportuyghurs.org/en/team 

67 https://www.isupportuyghurs.org/en/all-events/speech-at-rights-city-2019 

68https://www.cbc.ca/news/politics/romeo-dallaire-genocide-china-1.5944504 

69https://www.isupportuyghurs.org/en/all-events/press-conference-in-the-parliament-hill 

70https://victimsofcommunism.org/speaker/jewher-ilham/ 

71https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages 

72https://www.youtube.com/watch?v=qTQFdGsDrxw 

73https://www.globaltimes.cn/content/1172044.shtml 

74https://www.parl.ca/diplomacy/fr/groupes-amitie 

75https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/43-1/SDIR/reunion-4/temoignages 

 



Articles Par : Paul Lavoie

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