Une enquête d’urgence s’impose sur le rôle des entreprises de technologie & des réseaux sociaux dans l’assassinat des civils de Gaza

Google, Meta & autres pourraient avoir été de connivence avec Israël dans des crimes & violations, y compris des exécutions extrajudiciaires contre les Palestiniens, au mépris du droit international.

Territoires palestiniens – Le rôle des grandes entreprises technologiques et des plateformes internationales de réseaux sociaux dans le meurtre de civils palestiniens pendant la guerre génocidaire d’Israël contre la bande de Gaza, en cours depuis le 7 octobre 2023, doit faire l’objet d’une enquête. Ces entreprises doivent être tenues pour responsables s’il s’avère qu’elles sont complices ou qu’elles n’ont pas pris les précautions nécessaires pour empêcher l’accès aux informations des utilisateurs et leur exploitation. Elles doivent s’assurer que leurs services ne sont pas utilisés dans les zones de conflit et que la vie privée de leurs utilisateurs est respectée.

Des rapports fréquents indiquent qu’Israël utilise un certain nombre de systèmes technologiques basés sur l’intelligence artificielle, notamment Where’s Daddy, Fire Factory, Gospel et Lavender, pour pister et surveiller illégalement les Palestiniens. Ces systèmes sont capables d’identifier des suspects potentiels et de les classer comme cibles légitimes sur la base d’informations potentiellement pertinentes qui ne sont généralement pas liées au lieu ou à l’individu en question, en recherchant des similitudes et des modèles parmi tous les habitants de la bande de Gaza, en particulier les hommes, et dans les rangs de leur armée.

Des études ont montré que, bien qu’elle soit consciente de la marge d’erreur importante due à la nature de ces systèmes opérationnels et à leur incapacité à fournir des informations précises – en particulier concernant la localisation des personnes placées sur la liste de ciblage en temps réel – l’armée israélienne ne vérifie généralement pas l’exactitude des informations fournies par ces systèmes.

Par exemple, l’armée israélienne utilise largement le système Lavender pour identifier les suspects dans la bande de Gaza avant de les prendre pour cible. Ce système fait intentionnellement un grand nombre de victimes civiles.

Lavender utilise la logique des probabilités, une caractéristique distinctive des algorithmes par apprentissage automatique. L’algorithme recherche dans de vastes ensembles de données des schémas correspondant au comportement des combattants, et la quantité et la qualité des données déterminent le degré de réussite de l’algorithme dans la recherche de ces schémas. Il recommande ensuite des cibles en fonction des probabilités.

Des sources militaires et de renseignement israéliennes ont reconnu avoir attaqué des cibles potentielles sans tenir compte du principe de proportionnalité ou des dommages collatéraux, alors que de vives inquiétudes ont été exprimées quant à la dépendance possible du système Lavender à la surveillance des comptes de réseaux sociaux.

Ces soupçons sont étayés par un livre (The Human Machine Team) écrit par l’actuel commandant de l’unité d’élite 8200 de l’armée israélienne, qui donne des instructions sur la manière de créer une “machine à cibler” semblable au système d’intelligence artificielle Lavender. Le livre contient également des informations sur des centaines de signaux qsusceptibles d’augmenter le taux de classification d’une personne, comme le fait de changer de téléphone portable tous les quelques mois, de changer fréquemment d’adresse, ou même de rejoindre le même groupe sur l’application WhatsApp de Meta en tant que “combattant”.

En outre, il a été récemment révélé que Google et Israël collaborent à plusieurs initiatives technologiques, dont le projet Nimbus, qui fournit à l’armée israélienne des outils permettant de renforcer la surveillance et la collecte illégale de données sur les Palestiniens, élargissant ainsi les politiques israéliennes de répression et de persécution, ainsi que d’autres crimes à l’encontre du peuple palestinien. Ce projet en particulier a suscité d’importantes critiques en matière de droits de l’homme, poussant des dizaines d’employés de l’entreprise à protester et à démissionner, et d’autres à être licenciés en raison de leurs protestations.

L’armée israélienne utilise également la fonction de reconnaissance faciale de Google Photos pour surveiller les civils palestiniens dans la bande de Gaza et dresser une “liste de cibles”. Elle rassemble autant d’images que possible de l’événement du 7 octobre, connu sous le nom d’”Al-Aqsa Flood”, au cours duquel les visages des Palestiniens étaient visibles alors qu’ils prenaient d’assaut la barrière de séparation et pénétraient dans les colonies de peuplement. Cette technologie est ensuite utilisée pour trier les photos et stocker les images de visages, entraînant l’arrestation récente de milliers de Palestiniens de la bande de Gaza, en violation des règles explicites de l’entreprise et des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

L’équipe de terrain d’Euro-Med Monitor a recueilli des témoignages de civils palestiniens qui, en raison de leur activité sur les réseaux sociaux, ont été désignés comme suspects par Israël, bien que sans aucune action militaire.

Un jeune Palestinien qui a demandé à être identifié uniquement comme “A.F.”pour des raisons de sécurité, a par exemple été gravement blessé lors d’un bombardement israélien qui a visé une maison résidentielle dans le quartier Al-Sabra de la ville de Gaza.

La maison a été visée peu après qu’“A.F.” a posté un clip vidéo sur Instagramqui appartient à Meta, dans lequel il plaisantait en disant qu’il était en “mission de reconnaissance sur le terrain”.

Son parent a déclaré à Euro-Med Monitor qu’A.F. avait simplement tenté d’imiter les journalistes lorsqu’il avait posté le bref clip vidéo sur son compte Instagram personnel. Soudain, cependant, A.F. a été pris pour cible par un avion de reconnaissance israélien alors qu’il se trouvait sur le toit de sa maison.

Le 16 avril, un autre bombardement israélien a coûté la vie à six jeunes Palestiniens qui s’étaient rassemblés pour accéder à des services Internet. L’une des victimes utilisait une discussion de groupe sur WhatsApp – filiale de Meta – pour donner des nouvelles du quartier Sheikh Radwan de la ville de Gaza.

Le parent du garçon tué, qui a requis l’anonymat pour des raisons de sécurité, a informé Euro-Med Monitor que la victime se trouvait près du point d’accès à Internet lorsque le groupe a été touché par un missile provenant d’un avion de reconnaissance israélien. La victime partageait volontairement des informations sur les attaques israéliennes et la situation humanitaire à Sheikh Radwan dans des groupes familiaux et publics sur l’application WhatsApp.

La stratégie secrète de l’armée israélienne consistant à lancer des attaques aériennes et d’artillerie extrêmement meurtrières sur le fondement de données qui ne répondent pas aux normes minimales d’évaluation précise des cibles, qu’il s’agisse d’enregistrements de téléphones portables, de photos, de contacts sur les réseaux sociaux ou de schémas de communication, le tout dans le contexte plus large d’un programme d’assassinat incroyablement aléatoire, est particulièrement inquiétante.

Les preuves présentées par les experts mondiaux en technologie indiquent un lien probable entre l’utilisation par l’armée israélienne du système Lavender – utilisé pour identifier des cibles lors des attaques militaires d’Israël sur la bande de Gaza – et l’entreprise Meta. Ce qui signifie que l’armée israélienne a pu cibler des personnes simplement parce qu’elles faisaient partie de groupes WhatsApp avec d’autres personnes figurant sur la liste des suspects. En outre, les experts se demandent comment Israël a pu obtenir ces données sans que Meta ne les divulgue.

Auparavant, le journal britannique The Guardian a révélé l’utilisation par Israël de l’intelligence artificielle (Lavender) pour assassiner un grand nombre de civils palestiniens. L’armée israélienne a utilisé des systèmes de reconnaissance automatique pour identifier les combattants potentiels sans grande influence, dans le but de les cibler sans tenir compte du niveau de dommages collatéraux tolérables. Une “marge de tolérance” a été adoptée, autorisant la mort de 20 civils pour chaque cible abattue. Lorsqu’il s’agit de “combattants importants”, cette marge de tolérance autorise à tuer 100 personnes pour chaque combattant.

Google, Meta et d’autres entreprises de technologie et de réseaux sociaux pourraient avoir été de connivence avec Israël dans des crimes et des violations contre le peuple palestinien, y compris des exécutions extrajudiciaires, au mépris du droit international et des engagements déclarés de ces entreprises en matière de droits de l’homme.

Les réseaux sociaux ne devraient pas divulguer ce type de données personnelles sur leurs utilisateurs ni prendre part au génocide israélien contre les civils palestiniens dans la bande de Gaza. Une enquête internationale est indispensable pour garantir que les responsables rendent des comptes et que les victimes obtiennent justice.

Le parti pris manifeste et même ostensible de Meta pour Israël, la suppression massive des contenus soutenant la cause palestinienne et sa politique de répression des critiques des crimes israéliens – y compris les rumeurs de liens privilégiés entre les hauts responsables de Meta et Israël – suggèrent l’implication probable de l’entreprise dans l’assassinat de civils palestiniens.

Compte tenu des risques liés à l’absence de mesures suffisantes pour démontrer que l’objectif est légitime au regard du droit humanitaire international, les entreprises susmentionnées doivent s’engager pleinement à mettre fin à toute coopération avec l’armée israélienne, et cesser d’autoriser Israël à accéder aux données et aux informations qui violent les droits des Palestiniens et mettent leur vie en péril.

Une enquête doit être diligentée sans délai sur le non-respect par Israël du devoir de précaution et des droits de l’homme lors de l’utilisation de l’intelligence artificielle à des fins militaires, ainsi que sur le non-respect du droit international et du droit international humanitaire.

Ces entreprises doivent rapidement réagir aux informations qui circulent sur leur implication dans les crimes israéliens contre le peuple palestinien. Des enquêtes sérieuses concernant leurs politiques et pratiques en matière de crimes israéliens et de violations des droits de l’homme doivent être ouvertes si nécessaire, et les entreprises doivent être tenues pour responsables s’il s’avère qu’elles sont complices ou qu’elles n’ont pas pris les précautions adéquates pour empêcher l’exploitation des informations fournies par les utilisateurs à des fins criminelles.

 

Article original en anglais : Urgent need to investigate role of technology, social media companies in killing Gazan civilians, InfoBrics, le 21 avril 2024

Traduction : Spirit of Free Speech



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