Une promenade idyllique

Photo: AFP/Vincenzo Pinto
Le président George W. Bush a accueilli le pape.
Cela vaut la peine de réfléchir encore sur l’étreinte entre le pape et Bush : une étreinte « suffocante » comme l’a écrit hier Enzo Mazzi dans nos pages.
Comment donc le Vatican a-t-il abandonné sa prudence traditionnelle et sa réserve ? Comment donc cet enthousiasme pour le monde riche et dominateur ? Et cette étreinte avec Bush ne peut pas ne pas être rapprochée de l’enthousiasme pour le triomphe de Berlusconi.
Le Vatican cherche à l’évidence à se ranger de manière voyante du côté du vainqueur. Il est rescapé de quelques défaites, plus ou moins bruyantes, et il veut les oublier. Et surtout faire oublier.
Aux USA le scandale de la pédophilie et la baisse manifeste des adhésions. D’autre part le succès des églises «self-service », même chez les catholiques. Chez nous le risque d’une religion réduite au privé : la nécessité de ce fait, d’un état qui aide (et finance, surtout les écoles). Bienvenues, alors, les génuflexions de Bush, de Berlusconi et des mas medias du monde entier.
Très significative cette promenade des deux grands dans les jardins du Vatican. Ce n’était jamais arrivé. Les commentateurs de la Rai, pendant ce temps, parlaient d’une conversion possible de Bush au catholicisme. Oui, peut-être, mais en tout cas après la fin de la présidence.
Dans tous les cas une promenade idyllique, dans un très bel environnement, surréel. Lointaines, très lointaines toutes les tragédies. Les échos de la guerre et le désespoir des affamés ne parvenaient pas jusqu’à l’entretien « familier ». Ni les disputes entre les chrétiens et les musulmans. Physiquement proches mais spirituellement très lointains – presque comme à Guantanamo- les camps de roms à la périphérie romaine.
Pour le Vatican, un virage en quelques décennies seulement : du Concile, avec l’église « des pauvres » et de la théologie de la libération qui ne faisait pas la génuflexion, loin de là, ni devant le pape ni –surtout- devant le président des Etats-Unis. Peu de décennies sont passées, mais le panorama a changé : pas tant à Washington qu’à Rome. Le pape semble être redevenu, comme on disait, l’ « aumônier de la Maison Blanche ».
Edition de dimanche 15 juin de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/oggi/art55.html
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio