Vous n’êtes pas fou. C’est cette dystopie génocidaire qui est folle
Je dis cela parce que vivre en Occident pendant un génocide soutenu par l’Occident peut vous donner l’impression de devenir fou.
Vous n’êtes pas fou. Ce sont eux qui sont fous. Ceux qui font comme si tout allait bien. Ceux qui considèrent le génocide de Gaza comme un «problème isolé». Ceux qui n’aiment pas que vous parliez de ces choses parce que ça les dérange. Ce sont eux les fous.
Je dis cela parce que vivre en Occident pendant un génocide soutenu par l’Occident peut vous donner l’impression de devenir fou. Comme si quelque chose n’allait pas chez vous parce que vous ne pouvez pas accepter que votre gouvernement n’aide pas Israël à brûler des gens vivants, à tirer dans la tête d’enfants, à détruire délibérément le système de santé de Gaza et à cibler des populations civiles avec une guerre de siège meurtrière afin d’annexer le territoire palestinien. Comme si vous étiez défectueux si vous êtes incapable d’être aussi détendu que les autres à ce sujet.
Mais il n’y a rien qui cloche chez vous, et vous n’êtes pas défectueux. Il y a quelque chose qui ne va pas du tout avec une civilisation qui pourrait accepter tout cela. C’est notre dystopie génocidaire qui est défectueuse.
L’histoire regorge d’exemples d’horribles atrocités de masse auxquelles la majorité de la population n’a pas réagi avec le dégoût et l’urgence qui s’imposaient à l’époque. L’esclavage. L’Holocauste. L’extermination systématique d’autres populations indigènes dans le cadre d’autres projets coloniaux. La plupart des personnes qui, aujourd’hui, regardent en arrière et jugent correctement ces maux avec le recul, sont en train de somnoler pendant qu’ils se répètent aujourd’hui en Palestine.
Ceux qui se sont opposés aux atrocités de masse de l’histoire ont eu tendance à être minoritaires, car si s’opposer à ces atrocités était une sagesse conventionnelle, elles n’auraient jamais eu lieu. Cela nous montre qu’il n’y a pas de corrélation entre la sagesse conventionnelle et la véritable clarté morale. Nous ne pouvons pas nous tourner vers les autres pour évaluer si notre position sur une question est la bonne, car l’histoire nous apprend que la majorité se trompe très souvent sur les questions les plus importantes au moment présent, lorsque cela compte.
Et la majorité a tort aujourd’hui. Ceux qui soutiennent de manière flagrante les abus d’Israël ont tort. Ceux qui essaient de ne pas trop penser à ce qui se passe à Gaza et au Liban ont tort. Ceux qui disent que tout cela est tragique et déchirant, mais que c’est tellement compliqué et qu’Israël a le droit de se défendre ont tort. Ceux qui ne s’opposent pas aux atrocités commises par Israël, mais seulement à ce que leur propre pays envoie des troupes sur le terrain ou y consacre l’argent de leurs impôts, ont tort. Ceux qui savent qu’un génocide est en cours mais qui évitent d’en parler trop fort parce qu’ils veulent s’assurer que les démocrates remportent les élections ont tort. Ceux qui savent qu’il s’agit d’un génocide mais qui ne réagissent pas à cette réalité avec le degré d’urgence, de force et de concentration qui s’impose ont tort.
Tout autour de nous, nous sommes bombardés de messages qui tentent de nous faire croire que c’est nous qui ne percevons pas la réalité correctement. Ces messages peuvent être manifestes, comme la propagande des médias et les arguments des défenseurs d’Israël que nous rencontrons sur Internet. Ils peuvent également être subtils, comme les messages tacites que nous recevons lorsque personne autour de nous ne parle de Gaza et que les gens se sentent mal à l’aise lorsque nous le faisons.
Mais ces messages nous mentent. C’est absolument nous qui voyons les choses correctement. C’est nous qui réagissons de manière appropriée à ce cauchemar. Ce sont eux qui agissent comme une bande de fous qui se promènent nonchalamment au milieu d’un incendie.
Ne vous fiez pas aux autres pour évaluer votre propre niveau de clarté. Dans une civilisation devenue folle, c’est à vous de déterminer ce qu’est la santé mentale. Lorsque nos dirigeants soutiennent un génocide actif dans une société inondée d’illusions induites par la propagande, nous devons tous être assez courageux pour nous tenir debout.
Caitlin Johnstone
Article original en anglais :
You’re Not Crazy. This Genocidal Dystopia Is Crazy.
Caitlin’s Newsletter, le 16 octobre 2024
Version française publié sur Réseau international